TPICE, président, 25 avril 2006, n° T-455/05 R
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES
Ordonnance
PARTIES
Demandeur :
Componenta Oyj, République de Finlande
Défendeur :
Commission des Communautés européennes
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocat :
Me Savola
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Faits à l'origine du litige, procédure et conclusions des parties
1 Le 20 octobre 2005, la Commission a adopté la décision C (2005) 3871 final, relative à l'aide d'État C 37-2004 (ex NN 51/2004) accordée à Componenta Oyj (ci-après la " requérante ") par la République de Finlande.
2 Dans cette décision (ci-après la " décision litigieuse "), la Commission constate que la requérante a bénéficié d'une aide, accordée par la ville de Karkkila (Finlande), d'un montant maximal de 2 383 276,5 euro.
3 Cette aide se composerait, d'une part, d'un montant de 713 092,5 euro, payé par la ville de Karkkila à la requérante pour la vente de la participation (50 %) que détenait celle-ci dans la société Karkkilan Keskustakiinteistöt Oy (ci-après " KK "), une société immobilière dont la ville de Karkkila détenait l'autre moitié des actions, et, d'autre part, du remboursement par KK d'un " prêt participatif " sans intérêt, d'un montant de 1 670 184 euro, accordé en 1996 par la requérante à KK. À cette fin, la ville de Karkkila, qui avait elle-même accordé à KK un prêt d'un montant identique en 1996, a accordé un nouveau prêt sans intérêt à cette société.
4 L'article 1er, premier alinéa, de la décision litigieuse dispose que cette aide est incompatible avec le Marché commun.
5 L'article 1er, second alinéa, de la décision litigieuse prévoit que le montant de 713 092,5 euro payé par la ville de Karkkila à la requérante pour la vente de ses actions dans KK pourrait être réduit si la République de Finlande établissait que la surévaluation des terrains constituant l'actif de KK, estimée par la Commission à 619 760 euro, était inférieure à ce montant.
6 L'article 2 de la décision litigieuse impose la récupération du montant accordé à la requérante, augmenté des intérêts, en conséquence du caractère illégal de l'aide.
7 Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 29 décembre 2005, la requérante a introduit un recours, en vertu de l'article 230 CE, visant à l'annulation de la décision litigieuse.
8 Par acte séparé, enregistré au greffe du Tribunal le 29 décembre 2005, la requérante a introduit la présente demande en référé, en vertu de l'article 242 CE, visant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de la décision litigieuse. La requérante demande également la condamnation de la Commission aux dépens.
9 La Commission a présenté ses observations écrites sur la présente demande en référé le 23 janvier 2006. Elle demande le rejet de la demande de sursis à exécution et la condamnation de la requérante aux dépens.
10 La requérante a répondu à ces observations par acte déposé au greffe le 3 février 2006.
11 La défenderesse a répondu aux observations de la requérante par acte déposé au greffe le 10 février 2006.
12 Par acte déposé au greffe le 18 janvier 2006, la République de Finlande a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la partie requérante.
13 Par ordonnance du 20 février 2006, le président du Tribunal a admis la demande en intervention de la République de Finlande.
14 Les parties, y compris la partie intervenante, ont été entendues en leurs explications orales lors d'une audition tenue le 9 mars 2006.
15 Le traitement confidentiel de certaines données, sollicité par la requérante lors de l'audition et par acte déposé au greffe le 24 mars 2006, a été accordé à celle-ci, la partie défenderesse et la partie intervenante ne s'y étant pas opposées.
En droit
16 En vertu des dispositions combinées de l'article 242 CE et de l'article 225, paragraphe 1, CE, le Tribunal peut, s'il estime que les circonstances l'exigent, ordonner le sursis à l'exécution de l'acte attaqué devant lui.
17 L'article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l'objet du litige, les circonstances établissant l'urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue (fumus boni juris) l'octroi des mesures provisoires auxquelles elles concluent. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l'une d'elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C-268-96 P(R), Rec. p. I-4971, point 30]. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (ordonnance du président de la Cour du 29 juin 1999, Italie/Commission, C-107-99 R, Rec. p. I-4011, point 59).
18 Les mesures demandées doivent, en outre, être provisoires en ce sens qu'elles ne préjugent pas les points de droit ou de fait en litige ni ne neutralisent par avance les conséquences de la décision à rendre ultérieurement au principal [ordonnance du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C-149-95 P(R), Rec. p. I-2165, point 22].
19 En outre, dans le cadre de cet examen d'ensemble, le juge des référés dispose d'un large pouvoir d'appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l'espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l'ordre de cet examen, dès lors qu'aucune règle de droit communautaire ne lui impose un schéma d'analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement (ordonnance Commission/Atlantic Container Line e.a., point 18 supra, point 23).
Arguments des parties
20 La requérante fait valoir que toutes les conditions pour l'octroi du sursis à l'exécution de la décision litigieuse sont remplies en l'espèce.
21 Concernant la condition relative au fumus boni juris, la requérante invoque en substance quatre moyens à l'appui de sa demande. En premier lieu, la Commission se serait rendue coupable de violation des formes substantielles et de détournement de pouvoir, en faisant une appréciation manifestement erronée des preuves et des explications qui lui auraient été données lors de la procédure d'examen. En deuxième lieu, la décision de la Commission serait contraire aux dispositions de l'article 87 CE. En troisième lieu, la décision conduirait à un résultat excessif et violerait en conséquence le principe de proportionnalité. En quatrième lieu, enfin, la motivation de la décision serait insuffisante et vague.
22 Afin de justifier la pertinence de ces moyens, la requérante soutient que la Commission n'a pas procédé à une évaluation correcte des actifs de KK, constitués essentiellement de terrains situés à Karkkila, la valeur de ces terrains justifiant, d'une part, le prix payé pour les actions qu'elle détenait et, d'autre part, le remboursement du prêt participatif par KK. Elle conteste, en effet, la position de la Commission selon laquelle la valeur de ses parts dans KK et de sa créance à l'égard de cette dernière serait nulle.
23 À l'appui de sa thèse, elle produit deux rapports d'expertise, qui tendraient à justifier que la valeur des terrains prise en considération par les parties lors de la conclusion du contrat était correcte et, partant, que celles-ci ont procédé à une juste estimation de la valeur des actions de KK et de la créance de la requérante à l'égard de cette dernière.
24 La requérante invoque, par ailleurs, trois motifs en ce qui concerne la condition relative à l'urgence de sa demande.
25 En premier lieu, elle avance que la récupération mise à sa charge par la décision litigieuse affaiblirait fortement ses capacités d'investissement et de développement, en particulier pour l'année 2006. Il en résulterait un affaiblissement de ses possibilités de créer des emplois dans ses unités de production en Finlande.
26 Subsidiairement, la requérante invoque un risque substantiel pour sa position sur les marchés pertinents, comparée à celle de ses concurrents. L'exécution de la décision litigieuse mettrait en effet en danger la réalisation des investissements prévus dans son plan d'action, alors que ces investissements sont indispensables pour préserver la position de la société sur ces marchés.
27 En deuxième lieu, elle avance que l'exécution de la décision litigieuse compromettrait la protection juridictionnelle de la société. Il a été précisé par la requérante, lors de l'audition, que la protection juridictionnelle de celle-ci serait compromise en raison du caractère, selon elle, non définitif de la décision litigieuse, résultant de ce que l'article 1er, second alinéa, de ladite décision permet à la République de Finlande de prouver que la surévaluation des terrains telle qu'estimée par la Commission serait moindre que celle retenue et que, partant, le montant devant être récupéré par cet État membre au titre de l'aide allouée à la requérante demeurerait incertain.
28 En troisième lieu, la requérante allègue que la jurisprudence communautaire a également considéré comme justifiant un sursis à exécution des préjudices économiques autres que ceux de nature à mettre en péril l'existence même du demandeur. Elle fait référence, sans autre précision toutefois, aux ordonnances du président de la Cour du 11 mai 1989, RTE e.a./Commission (76-89 R, 77-89 R et 91-89 R, Rec. p. I-1141), du président du Tribunal du 26 octobre 2001, IMS Health/Commission (T-184-01 R, Rec. p. II-3193), et du 16 janvier 2004, Arizona Chemical e.a./Commission (T-369-03 R, Rec. p. II-205).
29 La Commission ne présente aucune observation en ce qui concerne les arguments de la requérante sur la condition relative au fumus boni juris, considérant que la demande est, en tout état de cause, manifestement non fondée en ce qui concerne l'urgence et la balance des intérêts.
30 À cet égard, la Commission souligne que la requérante n'a apporté aucun élément susceptible d'établir l'urgence de la mesure demandée. Selon la Commission, les arguments avancés par la requérante ne sont pas pertinents pour démontrer l'urgence au regard des intérêts propres de celle-ci, ce qui est exigé par une jurisprudence bien établie. La requérante n'aurait notamment pas démontré que le préjudice allégué pourrait mettre en péril son existence sur le marché. En tout état de cause, le préjudice invoqué serait purement hypothétique et ne serait étayé par aucun moyen de preuve sérieux.
31 Sur la balance des intérêts, la Commission considère que celle-ci penche clairement en sa faveur, étant donné que le dommage prétendu est purement hypothétique, alors que l'intérêt communautaire à l'exécution de la décision litigieuse l'emporte, selon une jurisprudence bien établie, sur l'intérêt du bénéficiaire de l'aide.
Appréciation du juge des référés
32 Le juge des référés estime que, en l'espèce, il faut tout d'abord examiner si la condition relative à l'urgence est satisfaite.
33 À cet égard, il ressort d'une jurisprudence constante que le caractère urgent d'une demande en référé doit s'apprécier par rapport à la nécessité qu'il y a de statuer provisoirement afin d'éviter qu'un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire. C'est à cette dernière qu'il appartient d'apporter la preuve qu'elle ne saurait attendre l'issue de la procédure au principal, sans avoir à subir un préjudice de cette nature (voir ordonnance du président du Tribunal du 3 décembre 2002, Neue Erba Lautex/Commission, T-181-02 R, Rec. p. II-5081, point 82, et la jurisprudence citée ; ordonnance du président du Tribunal du 10 novembre 2004, Wam/Commission, T-316-04 R, non encore publiée au Recueil, point 26).
34 L'imminence du préjudice ne doit pas être établie avec une certitude absolue, mais il suffit, particulièrement lorsque la réalisation du préjudice dépend de la survenance d'un ensemble de facteurs, qu'elle soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant. Toutefois, le requérant demeure tenu de prouver les faits qui sont censés fonder la perspective d'un préjudice grave et irréparable (voir ordonnance du président de la Cour du 12 octobre 2000, Grèce/Commission, C-278-00 R, Rec. p. I-8787, point 15 ; ordonnance Neue Erba Lautex/Commission, point 33 supra, point 83, et la jurisprudence citée ; ordonnance Wam/Commission, point 33 supra, point 27).
35 En outre, selon une jurisprudence bien établie, afin de prouver que la condition relative à l'urgence est remplie, le requérant est tenu de démontrer que le sursis à exécution demandé est nécessaire à la protection de ses intérêts propres. Pour établir l'urgence, le requérant ne peut invoquer une atteinte portée à un intérêt qui ne lui est pas personnel, telle une atteinte à un intérêt général ou aux droits de tiers, que ceux-ci soient des particuliers ou un État. De tels intérêts ne peuvent être pris en compte, le cas échéant, que dans le cadre de l'examen de la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance Wam/Commission, point 33 supra, point 28, et la jurisprudence citée).
36 Enfin, il faut rappeler que, s'il est bien établi qu'un préjudice de caractère financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu'il peut faire l'objet d'une compensation financière ultérieure, il est également établi qu'une mesure provisoire se justifie s'il apparaît que, en l'absence de cette mesure, la partie requérante se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l'intervention de la décision mettant fin à la procédure au principal ou de modifier de manière irrémédiable sa position sur le marché (ordonnance Neue Erba Lautex/Commission, point 33 supra, point 84 ; ordonnances du président du Tribunal du 20 juillet 2000, Esedra/Commission, T-169-00 R, Rec. p. II-2951, point 45 ; du 27 juillet 2004, TQ3 Travel Solutions Belgium/Commission, T-148-04 R, Rec. p. II-3027, point 46, et Wam/Commission, point 33 supra, point 29).
37 En l'espèce, il convient de relever dès l'abord que le remboursement de l'aide auquel est tenue la requérante constitue un préjudice financier, lequel pourrait être compensé si celle-ci obtenait gain de cause dans le cadre de son recours au principal et ne saurait, dès lors, être regardé comme étant à lui seul un préjudice irréparable ou même difficilement réparable au sens de la jurisprudence.
38 Il convient, dès lors, d'examiner si la requérante a établi à suffisance de droit que l'exécution de la décision litigieuse serait susceptible de porter atteinte à ses intérêts propres, au point de mettre en péril sa survie ou de modifier sa position sur le marché d'une manière irréversible, avant que n'intervienne la décision du Tribunal sur le recours au principal.
39 À cet égard, force est de constater que la requérante n'apporte aucun élément de preuve qui pourrait conduire le juge des référés à une telle conclusion. Au contraire, il convient de constater que les arguments relatifs à l'urgence qu'avance la requérante dans la demande en référé sont de caractère général et hypothétique et ne sont pas étayés par les preuves nécessaires.
40 En premier lieu, la requérante soutient, dans sa demande, que le remboursement du montant de l'aide aurait pour conséquence d'affaiblir fortement ses capacités d'investissement et de développement, en particulier pour l'année 2006. La requérante n'apporte cependant pas d'éléments de preuve à l'appui de son allégation ni n'établit ou même n'allègue qu'elle serait dans l'incapacité de rembourser le montant de l'aide. Quant à l'argument selon lequel ledit remboursement pourrait entraver ses plans en matière d'investissement et de développement, il convient de constater qu'il ne constitue pas un élément susceptible de justifier son allégation suivant laquelle cette situation serait de nature à mettre en péril son existence même.
41 La requérante soutient également que de cet affaiblissement des capacités d'investissement et de développement résulterait un affaiblissement de ses possibilités de créer des emplois dans ses unités de production en Finlande. Cet élément n'est cependant pas de nature à démontrer que le sursis à l'exécution de la décision litigieuse est nécessaire à la protection des intérêts propres de la requérante, ainsi que le requiert la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus. Pour établir l'urgence, le requérant ne peut invoquer une atteinte portée à un intérêt qui ne lui est pas personnel, telle une atteinte à un intérêt général ou aux droits de tiers, que ceux-ci soient des particuliers ou un État. Or, outre le caractère pour le moins hypothétique de l'allégation de la requérante, l'intérêt de tiers à voir créer des emplois, notamment celui de la ville de Karkkila, ainsi que de particuliers susceptibles de se voir offrir un emploi ne saurait être considéré comme un intérêt propre de la requérante à obtenir le sursis à l'exécution. L'intérêt des tiers et, le cas échéant, l'intérêt général ne pourraient être pris en considération que dans le cadre de la mise en balance des intérêts.
42 Afin d'étayer son argumentation relative à ce premier motif d'urgence, en réponse aux observations de la Commission, la requérante a fait état de difficultés au regard de sa situation financière et, plus particulièrement, d'un avertissement sur résultats annoncé le 15 décembre 2005, lequel est motivé, selon elle, par le fait que son chiffre d'affaires au cours du dernier trimestre de 2005 a été inférieur de quelque 10 % au chiffre d'affaires de la période correspondante de l'année antérieure et que son résultat courant hors opérations extraordinaires a été négatif.
43 La défenderesse soutient que ces informations ne sont corroborées ni par les informations boursières rendues publiques par la requérante ni par les informations financières figurant sur le site Internet de cette dernière et que, partant, celle-ci ne démontre pas que l'existence même de la société pourrait être mise en péril par l'exécution de la décision litigieuse.
44 Lors de l'audition, en réponse à cette argumentation, la requérante a fait valoir deux éléments nouveaux, au sujet desquels la Commission a présenté ses observations le 15 mars 2006.
45 Ces éléments s'appuient sur deux documents confidentiels produits par la requérante lors de l'audition. Le premier document [...]?(1). Le second document concerne [...].
46 S'appuyant sur ces documents, la requérante soutient que le remboursement de l'aide litigieuse pourrait avoir pour conséquence [...]. Selon la requérante [...].
47 La défenderesse conteste à bon droit les allégations de la requérante. En premier lieu, en effet, il est difficilement envisageable qu'une société [...] soit amenée à disparaître en raison de l'obligation de rembourser à la République de Finlande une dette d'un montant maximal de 2,4 millions d'euro. En deuxième lieu, [...]. En troisième lieu, [...], les documents versés par la requérante ne sont pas de nature à établir que cela mettrait en péril son existence même. En quatrième lieu, [...].
48 Force est de constater que la requérante ne produit aucun élément de nature à établir le bien-fondé de son allégation [...].
49 En conséquence, le risque allégué par la requérante apparaît hypothétique et sa survenance semble d'autant moins probable qu'elle n'est étayée par aucun élément susceptible de démontrer [...].
50 Dès lors, il y a lieu de considérer que les éléments relatifs à la situation financière communiqués par la requérante ne permettent pas d'établir que l'existence même de la société pourrait être mise en péril si le sursis à l'exécution de la décision litigieuse ne lui était pas accordé. Le préjudice que pourrait subir la requérante du fait de l'exécution de la décision litigieuse n'apparaît en effet ni grave, les menaces pour sa survie que laisseraient planer sa situation financière et la position de ses créanciers à cet égard n'apparaissant en effet pas établies, ni irréparable, s'agissant d'un préjudice financier susceptible d'être compensé dans l'hypothèse où la requérante obtiendrait gain de cause dans l'instance au principal.
51 La requérante a, ensuite, soutenu lors de l'audition, s'appuyant sur le deuxième document confidentiel qu'elle a produit à cette occasion, [...].
52 Si la jurisprudence admet qu'un tel élément puisse être pris en considération dans le cadre de l'appréciation de l'urgence (voir point 36 ci-dessus), elle requiert également de la partie requérante que celle-ci démontre le bien-fondé de son allégation. Invitée lors de l'audition à apporter d'autres éléments au soutien de son argumentation, la requérante n'a été en mesure que de réitérer ses arguments relatifs aux difficultés qu'impliquerait le remboursement de l'aide en ce qui concerne ses perspectives d'investissement, sans parvenir à démontrer que ces difficultés seraient de nature à compromettre de manière irrémédiable ses parts de marchés, ni dans quelle mesure celles-ci pourraient être compromises, ni qu'elle ne pourrait parvenir à les récupérer ultérieurement, à les supposer perdues (voir, en ce sens, ordonnance Arizona Chemical e.a./Commission, point 28 supra, point 84).
53 Force est, dès lors, de constater que, en l'espèce, la requérante n'établit pas que l'absence de sursis à l'exécution de la décision serait susceptible de modifier de manière irrémédiable ses parts de marché.
54 La requérante a, en outre, indiqué lors de l'audition que [...].
55 Partant, les arguments de la requérante visant à démontrer le bien-fondé du premier motif d'urgence invoqué par celle-ci doivent être écartés.
56 En deuxième lieu, la requérante soutient que l'exécution de la décision litigieuse compromettrait la protection juridictionnelle de la société en raison du caractère prétendument incomplet et non définitif de la décision litigieuse. Il y a lieu de relever que, invitée à préciser la portée de cet argument lors de l'audition, la requérante a réitéré son argumentation visant à soutenir que le sursis à exécution s'imposerait en raison du caractère non définitif du montant de l'aide devant être récupéré par la République de Finlande en application de la décision litigieuse.
57 Force est cependant de constater que ladite décision fixe le montant maximal susceptible d'être récupéré auprès de la requérante par la République de Finlande, à savoir 2 383 276,5 euro, si celle-ci n'apporte pas d'élément de preuve relatif à la surévaluation des terrains ayant appartenu à KK permettant de réduire le montant de l'aide estimé par la Commission. Dès lors, le montant maximal fixé par la Commission étant connu de la requérante, elle ne saurait soutenir qu'elle est laissée dans l'incertitude par la décision litigieuse quant au montant qu'elle devra rembourser à la République de Finlande. Au contraire il convient de constater que la décision laisse ouverte la possibilité de voir réduire le montant susceptible d'être réclamé à la requérante. L'argument suivant lequel la décision de la Commission aurait un caractère incomplet ou non définitif n'apparaît, dès lors, pas pertinent.
58 De surcroît, la requérante, d'une part, reste en défaut d'établir en quoi sa protection juridictionnelle serait compromise si le sursis à exécution ne lui était pas accordé, eu égard au caractère exécutoire inhérent à la décision litigieuse et à la possibilité, qu'elle a exercée, d'introduire un recours en annulation à l'encontre de cette décision et d'en demander le sursis à exécution. D'autre part, elle ne démontre pas de quelle nature serait le lien entre le caractère prétendument non définitif et incomplet de la décision, à le supposer établi, et la nécessité de lui accorder le bénéfice du sursis à exécution de la décision litigieuse. Partant, le deuxième motif invoqué par la requérante au titre de l'urgence doit être écarté.
59 Enfin, en troisième lieu, la requérante soutient que le sursis à exécution pourrait être justifié par des préjudices économiques autres que ceux de nature à mettre en péril l'existence même du demandeur. Force est cependant de constater que la requérante n'a pas établi quels autres préjudices économiques seraient susceptibles de lui être causés en l'absence de sursis à l'exécution de la décision litigieuse et n'a pas été en mesure, lors de l'audition, de préciser en quoi la jurisprudence citée par elle dans ses écritures est de nature à étayer son argumentation.
60 Partant, le troisième motif d'urgence invoqué par la requérante doit également être écarté.
61 Au vu de ce qui précède, la requérante n'ayant aucunement étayé ses affirmations quant aux conséquences de l'exécution de la décision litigieuse, il faut constater qu'elle n'est pas parvenue à établir que, à défaut d'octroi du sursis à l'exécution de ladite décision, elle subirait un préjudice grave et irréparable.
62 Il s'ensuit que la condition relative à l'urgence de la demande de sursis à exécution n'est pas établie à suffisance de droit. En conséquence, la demande en référé doit être rejetée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les autres conditions d'octroi des mesures provisoires sont remplies.
Par ces motifs,
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
ordonne :
1) La demande en référé est rejetée.
2) Les dépens sont réservés.