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Décisions

Cass. com., 25 avril 2006, n° 04-13.072

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

AMG Compagnie (SA)

Défendeur :

Auchan France (SA), Centrale d'achat centrale de service Auchan (GIE), Auchan France Etablissement secondaire (Sté), Atac (Sté), Atac Etablissement secondaire (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Garnier

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

SCP Choucroy-Gadiou-Chevallier, SCP Roger, Sevaux

T. com. Créteil, du 11 juin 2002

11 juin 2002

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 16 janvier 2004), que la société AMG compagnie (société AMG), qui exerce une activité d'import-export de tous textiles et de commercialisation de vêtements auprès de grossistes et de centrales d'achat, a déposé le 7 août 1997, à l'Institut national de la propriété industrielle, un modèle de tee-shirt n° S 97 127 et un modèle de polo n° S 98 011, qui ont été publiés le 6 mai 1999; qu'après saisies-contrefaçon dans divers magasins, elle a poursuivi en contrefaçon de modèles, de droits d'auteur et en concurrence déloyale les sociétés Auchan et Atac;

Sur les premier et deuxième moyens, réunis : - Attendu que la société AMG fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes en contrefaçon de modèles et de droit d'auteur, alors, selon le moyen : 1°) que les juges du fond, qui constatent qu'il y avait matière à originalité des modèles de tee-shirts et polos dans l'apposition de bandes de couleurs différentes de plus ou moins grande largeur et la combinaison des couleurs ne pouvaient détruire la présomption de création par la société AMG découlant de son dépôt du 7 août 1997, aucun autre dépôt n'ayant été effectué par un tiers, par l'affirmation péremptoire d'une mode existant depuis quelques années, sans préciser en quoi cette mode alléguée était de nature à constituer une antériorité de toutes pièces; que l'arrêt a donc violé l'article L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle; 2°) que les prétendues nombreuses pièces démontrant que la société AMG n'avait pas créé les modèles litigieux se réduisaient à quelques commandes et courriers échangés entre la société AMG et la société indoue Kanan Knitwear dont la société AMG rappelait dans ses conclusions qu'elle était son façonnier habituel à partir de ces créations de modèles dont les dessins accompagnés de fiches techniques servaient, comme en l'espèce, a en réaliser la fabrication, sans qu'il importe que le façonnier propose de son côté une réalisation différente; que les juges du fond n'ont donc ni pertinemment ni suffisamment établi que la société AMG serait irrecevable à invoquer l'article L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle; 3°) que l'arrêt n'a pas ainsi fourni des éléments suffisants à faire preuve contraire de la présomption de titularité des droits d'auteur appartenant, en vertu de l'article L. 113-1 du Code de la propriété intellectuelle, à celui sous le nom duquel l'œuvre est divulguée; qu'en effet, la première divulgation des modèles litigieux avait été réalisée au début de l'année 1998 par la société AMG sous son nom, aussitôt après leur façonnage par la société Hindoue Kanan Knitwear, en sorte que la société AMG était présumée les avoir créés, ce dont elle justifiait non seulement par les fiches techniques et schémas communiqués à son façonnier, mais aussi par le fait que ces fiches techniques avaient été réalisées dans son atelier de création et son bureau de style; que, dans ces conditions, peu importait que l'activité principale et officielle de la société AMG soit celle d'achats d'articles vestimentaires auprès de fournisseurs et de revente auprès de grossistes, dès lors qu'elle exerçait aussi l'activité de création de modèles et bénéficiait d'un renom découlant de sa participation à des salons de mode, ce qui rendait également inopérants le seul fait d'acquitter aussi la taxe para fiscale "Textile - Maille - Habillement", comme du reste la seule affirmation péremptoire sans la moindre justification de son fournisseur habituel, prétendant avoir créé les modèles litigieux dans un courrier intervenu à la veille d'un procès en contrefaçon où il risquait d'être impliqué, comme ayant également livré après coup à la société Auchan les mêmes modèles; que l'arrêt est donc vicié pour défaut de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'arrêt retient par motifs propres et adoptés que la société AMG ne peut prétendre bénéficier de la présomption de titularité du dépôt des modèles et du droit d'auteur sur ceux-ci ni même soutenir avoir eu l'initiative de la fabrication de ces modèles, dès lors qu'il résulte des pièces produites, qu'elle s'est bornée à confirmer des commandes faisant suite à une offre précise de son fournisseur la société Kanan Knitwear qui lui avait présenté, antérieurement aux dépôts, une collection, au vu de laquelle elle avait fait son choix; que c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a statué comme elle a fait et qui a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société AMG fait enfin grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en concurrence déloyale, alors, selon le moyen, que l'abus de la liberté du commerce causant volontairement ou non un trouble commercial constitue un acte de concurrence déloyale ou illicite; et qu'en l'espèce où les sociétés Auchan et Atac, et plus spécialement la société Auchan, était client habituel de la société AMG qui fournissait à sa centrale d'achat au prix de gros des produits vestimentaires, cette société Auchan avait abusé de la liberté du commerce en revendant au détail dans ses établissements des modèles quasi identiques à ceux précédemment divulgués par la société AMG (qui lui en avait même alors communiqué gracieusement des échantillons) à des prix inférieurs aux prix de gros proposés par la société AMG à cette centrale d'achat; qu'un tel comportement, manifestement déloyal et illicite, doit donc être sanctionné, sans qu'il importe qu'il n'y ait pas entre les parties identité de circuit de distribution et d'activité principale, s'agissant d'activités imbriquées et complémentaires; que l'arrêt a donc violé l'article 1382 du Code civil;

Mais attendu qu'ayant relevé que la situation de concurrence nécessaire pour fonder cette action ne pouvait être retenue, dès lors que les parties n'exerçaient pas la même activité, n'utilisaient pas le même circuit de distribution, et que la pratique d'un prix inférieur procède du principe de la liberté du commerce, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait; que le moyen n'est pas fondé;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.