CA Paris, 1re ch. H, 23 mai 2006, n° 2005-20727
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
DBS (SAS), Sort & Chasle (Sté), Somoclest (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Carre-Pierrat
Conseillers :
M. Raguin, Mme Mouillard
Avoués :
SCP Verdun Seveno, SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Hardouin
Avocats :
Mes Paquelier, Catala Marty, Watellier
Dans le cadre de la construction d'un hémicycle et de bureaux pour le Parlement européen de Strasbourg (marché "TPE IV"), la société d'aménagement et d'équipement de la région de Strasbourg (la SERS), en sa qualité de concessionnaire de la ville de Strasbourg et de maître d'ouvrage, a lancé, le 11 mars 1994, un appel d'offres restreint qui portait sur les travaux de "plâtrerie, isolation et cloisons" (sous-ensemble 2.1), divisé en quatre lots (2.11, 2.12, 2.13, 2.14). Le marché était organisé selon une procédure "combinée".
Trois entités, la première composée d'un groupement entre la société Cilia, les sociétés Marwo, Stenger, Isotral et Pierrot, la deuxième du groupement entre les sociétés CCB Dufaylite et Stenger, la troisième de l'entreprise Sort et Chasle, ont remis une offre pour la totalité des lots du sous-ensemble 2.1. Deux sociétés, la Somoclest et la Soe Stuc et Staff (ci-après Soe) ont fait des offres pour deux ou trois lots.
La société DBS n'a pas remis d'offre, de même que les sociétés CCB Dufaylite et Trouvé, alors que ces dernières avaient reçu l'agrément de la SERS.
La commission d'ouverture des plis, qui s'est réunie le 7 octobre 1994, a constaté que les offres présentées par les groupements Cilia et CCB Dufaylite et la société Sort et Chasle se situaient à un niveau nettement supérieur à l'estimation du maître d'œuvre. L'appel d'offres a donc été déclaré infructueux par le maître d'ouvrage.
Le 2 décembre 1994, la SERS a lancé un second appel à la concurrence sous forme ouverte, avec un nouveau découpage des lots. L'ouverture des plis a eu lieu le 17 février 1995.
La SERS a reçu des offres d'entreprises qui ne s'étaient pas manifestées lors du premier appel d'offres. Les entreprises ayant fait des propositions dans le cadre de cette procédure ont été présentes au second appel d'offres, exception faite de la société Soe. La société DBS a, pour la première fois, fait des propositions.
Les offres de la société Jacqmin étant les moins élevées après un recalage significatif opéré par le maître d'œuvre, l'ensemble du marché "Plâtrerie-Cloisons-Isolation" lui a été attribué le 31 mars 1995.
En application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce, des visites et saisies ont été effectuées le 29 mars 1995, dans les locaux des sociétés Cilia, Stenger, CCB Dufaylite, Bove, Sort et Chasle, Soe et Isotral. Des enquêtes complémentaires ont, ultérieurement, été réalisées sur le fondement de l'article L. 450-3 du Code de commerce, auprès des entreprises mentionnées mais également auprès des sociétés DBS, Baffy, Lassince et la SERS.
Par une lettre enregistrée le 29 février 1996, le ministre de l'Economie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre lors du marché précité.
Sur la base des éléments présentés, et sur le fondement des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, les griefs suivants ont été notifiés le 12 septembre 2000 :
* à la société Cilia :
- pour avoir, à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, participé à l'entente mise en œuvre entre l'ensemble des sociétés agréées par le maître d'ouvrage, par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente sur les prix, parle biais d'échanges d'informations avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir participé, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, à l'entente mise en œuvre avec deux autres entreprises soumissionnaires, pour se répartir les lots, en désignant l'entreprise la moins disante, chacune d'elles déposant des offres de couverture pour les lots pour lesquels elle n'était pas intéressée à la société Marwo ;
- pour avoir participé, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, à l'entente mise place, en communiquant des informations sur les prix avant la date limite de remise des offres, favorisant ainsi la mise en œuvre de la répartition des lots entre le groupement Cilia et les sociétés CCB Dufaylite et Somoclest.
* à la société DBS :
- pour avoir, même si elle n'a pas en définitive déposé d'offre, participé à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, à l'entente mise en œuvre entre l'ensemble des entreprises agréées, par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remises des offres ;
- pour avoir participé, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994 à l'entente mise en œuvre par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres, favorisant ainsi, bien qu'elle ait échoué, la mise en œuvre de la répartition des lots entre le groupement Cilia et les sociétés CCB Dufaylite et Somoclest.
* à la société Sort et Chasle :
- pour avoir participé, à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, à l'entente mise en œuvre entre l'ensemble des entreprises agréées, par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir participé, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994 à l'entente mise en œuvre par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres, favorisant ainsi, bien qu'elle ait échoué, la mise en œuvre de la répartition des lots entre le groupement Cilia et les sociétés CCB Dufaylite et Somoclest.
* A la société CCB Dufaylite, à son siège, à Paris, pour ses propres agissements ainsi que ceux de l'établissement secondaire de Wasselonne (67) en activité à l'époque des faits :
- pour avoir participé, à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, à l'entente mise en œuvre par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente sur les prix, par des échanges d'informations avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente mise en œuvre avec le groupement Cilia et la société Somoclest, ayant pour but la répartition des lots en désignant pour chaque lot l'entreprise la moins disante, chacun des deux autres soumissionnaires faisant des offres de couverture pour les lots pour lesquels il n'était pas intéressé.
* à la société Somoclest :
- pour avoir participé, à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, à l'entente mise en œuvre par le biais d'échanges d'informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente sur les prix, par des échanges d'informations avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente mise en œuvre avec le groupement Cilia et la société CCB Dufaylite, ayant pour but la répartition des lots en désignant pour chaque lot l'entreprise la moins disante, chacun des deux autres soumissionnaires déposant des offres de couverture pour les lots pour lesquels il n'était pas intéressé.
* à la société Lassince et Fils :
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994 participé à l'entente mise en place, en communiquant des informations sur les prix avant la date limite de remise des offres, favorisant ainsi, bien qu'elle ait échoué, la mise en œuvre de la répartition des lots entre le groupement Cilia et les sociétés CCB Dufaylite et Somoclest.
* à la SCOP Soe Stuc et Staff :
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, participé à l'entente mise place, en communiquant des informations sur les prix avant la date limite de remise des offres.
* à la SARL Stenger qui, par les agissements de son gérant et bien que non concernée par l'exécution future des travaux, a joué à l'occasion des deux appels d'offres successifs, un rôle majeur dans l'organisation des échanges d'informations sur les prix :
- pour avoir coordonné, à l'occasion de l'appel d'offres restreint du 11 mars 1994, l'entente mise en œuvre entre l'ensemble des entreprises agréées, en collectant puis diffusant des informations sur les prix, avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir, à l'occasion de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, de nouveau, coordonné l'entente sur les prix, en collectant et diffusant des informations avant la date limite de remise des offres, contribuant ainsi, bien qu'elle ait échoué, à la mise en œuvre de la répartition des lots entre le groupement Cilia et les sociétés CCB Dufaylite et Somoclest et à l'élimination des autres sociétés soumissionnaires.
Les griefs notifiés à la société Cilia ont également été notifiés, le 28 mars 2001 sur le même fondement, à la société Cilia Salvatore, nouvelle dénomination de la société d'exploitation de l'entreprise Cilia.
Enfin, une notification de griefs complémentaire a été faite, le 23 décembre 2003, à la société d'exploitation Cilia SA aux droits de laquelle se trouve la société Cilia SAS :
- pour avoir, dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente sur les prix, par le biais d'échanges d'informations sur les prix avant la date limite de remise des offres ;
- pour avoir dans le cadre de l'appel d'offres ouvert du 2 décembre 1994, participé à l'entente mise en œuvre avec deux autres entreprises soumissionnaires, pour se répartir les lots, en désignant l'entreprise la moins disante, chacune d'elles déposant des offres de couverture pour les lots pour lesquels elle n'était pas intéressée.
Par une décision n° 05-D-51 du 21 septembre 2005, le Conseil de la concurrence a décidé :
"Article 1er : la société Cilia SAS est mise hors de cause.
Article 2 : il n'est pas établi que la société Marwo ait enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Article 3 : il est établi que les sociétés Cilla Salvatore SARL, Somoclest, Soe Stuc et Staff Lassince et Fils, DBS, Sort et Chasle, Stenger, CCB Dufaylite ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Article 4 : il n'y a pas lieu d'infliger de sanction pécuniaire aux sociétés Stenger et CCB Dufaylite, en liquidation judiciaire.
Article 5 : Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :
- à la société Cili Salvatore SARL une sanction pécuniaire de 6 280 euro
- à la société Somoclest une sanction pécuniaire de 76 260 euro
- à la société DBS une sanction pécuniaire de 290 000 euro
- à la société Sort et Chastes une sanction pécuniaire de 50 000 euro
- à la société Soe Stuc et Staff une sanction pécuniaire de 11 300 euro
- à la société Lassince et Fils une sanction pécuniaire de 15 000 euro."
LA COUR,
Vu le recours régulièrement formé, le 27 octobre 2005, par la société Sort et Chasle à l'encontre de cette décision et le mémoire contenant l'exposé des moyens de la requérante par lequel elle demande à la cour de :
* A titre principal,
¤ annuler la décision en ce qu'elle a dit qu'elle avait enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et lui a infligé une sanction pécuniaire d'un montant de 50 000 euro,
¤ ordonner le remboursement immédiat par le Trésor Public des sommes qu'elle a versées au titre de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre par la décision, assorti des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,
* A titre subsidiaire,
¤ réformer la décision en ce qui concerne le montant de la sanction pécuniaire qui lui a été infligée,
¤ ordonner le remboursement immédiat par le Trésor Public des sommes qu'elle a versées au titre de la sanction pécuniaire prononcée à son encontre par la décision, assorti des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,
* en toute hypothèse, condamner le ministre chargé de l'Economie à lui payer la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu le recours régulièrement formé le 27 octobre 2005, par la société DBS à l'encontre de cette décision et le mémoire contenant l'exposé des moyens de la requérante déposé le 25 novembre 2005, par lequel elle demande à la cour de :
* A titre principal,
¤ prononcer l'annulation de la décision déférée à raison de la prescription de l'action en l'absence de pratiques anticoncurrentielles pouvant lui être reprochées,
* A titre subsidiaire,
¤ réformer ladite décision du chef du quantum de la sanction prononcée au regard de son caractère disproportionné par rapport aux éléments de la cause,
* laisser les dépens à la charge du Conseil de la concurrence ;
Vu le recours incident régulièrement formé le 30 novembre 2005, par la société Somoclest, contenant l'exposé de ses moyens, aux termes duquel elle demande à la cour de :
* à titre principal,
¤ constater la nullité de la procédure du fait de la prescription, la lettre de convocation adressée à la société Somoclest ne satisfaisant pas aux dispositions de l'article L. 462-7 du Code de commerce,
* à titre subsidiaire, pour le cas où la cour se prononcerait sur le fond,
¤ juger tant en ce qui concerne le premier appel d'offres que le second appel d'offres, toutes les conditions justifiant les sanctions édictées à l'article L. 420-1 du Code de commerce sur le fondement des griefs qui lui sont imputés ne sont pas réunies et, en conséquence, la décharger de toutes condamnations pécuniaires,
* à titre infiniment subsidiaire,
¤ constater l'absence de dommage à l'économie et, en conséquence et pour ce moyen, la décharger de toutes condamnations pécuniaires,
* en tout état de cause et à titre infiniment subsidiaire,
¤ réduire de manière substantielle le montant de la sanction prononcée à son encontre.
Sur ce,
Considérant qu'aux termes de l'article L. 462-7 du Code de commerce, dans sa rédaction applicable en l'espèce, le Conseil ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction ;
Considérant que les sociétés Sort et Chasle, DBS et Somoclest soutiennent que les pratiques qui leur sont reprochées sont prescrites dès lors que plus de trois ans se sont écoulés depuis la saisine, le 29 janvier 1996, du Conseil sans qu'aucun acte tendant à la recherche, la constatation et la sanction desdites pratiques n'ait été diligenté ;
Considérant que le Conseil fait observer et le ministre valoir que, selon une jurisprudence constante, la convocation aux fins d'audition adressée par le rapporteur à une société mise en cause constitue un acte interruptif de prescription, étant, selon le ministre, indifférent à cet égard que l'audition ait effectivement eu lieu ou non ;
Mais considérant que si, effectivement, une convocation constitue un acte de nature à interrompre la prescription, il convient, toutefois, de rechercher, sauf à conférer à ce principe une portée purement formelle n'ayant d'autre conséquence que de priver systématiquement de toute efficience le principe de la prescription, la finalité d'un tel acte; qu'une telle recherche qui procède du pouvoir, par essence, conféré a une juridiction d'apprécier l'application d'une règle de droit à l'espèce qui lui est soumise, n'est pas de nature à porter atteinte, contrairement aux observations formulées par le Conseil, au principe d'autonomie procédurale de l'autorité nationale de concurrence ;
Qu'à cette fin, il convient donc d'apprécier si la lettre de convocation adressée à M. Philippe Caruso, PDG de la société Somoclest, constitue un acte tendant à la recherche, la constatation ou la sanction d'une pratique anticoncurrentielle ;
Or considérant que, en l'espèce, Mme Dominique Bleys, désignée en qualité de rapporteur le 12 janvier 1999, à la suite d'une succession de quatre rapporteurs, dont il est établi qu'ils n'ont accompli aucun acte à compter de la saisine du Conseil par le ministre le 29 février 1996, a adressé une lettre de convocation à M. Philippe Caruso, ès qualités, le 20 janvier 1999, alors que la prescription était sur le point d'être acquise "afin de recueillir des éléments d'information utiles à l'examen du dossier" ;
Et considérant qu'il résulte des éléments du dossier que, nonobstant l'absence d'audition de M. Philippe Caruso, le rapporteur général a été à même de procéder, le 12 septembre 2000, à la notification des griefs aux entreprises concernées, qui fait, notamment, référence aux déclarations de ce dernier :
* interrogé à ce sujet, M. Philippe Caruso, dirigeant des sociétés Somoclest a déclaré (...) procès-verbal de déclaration du 29 juin 1995, annexe n° 51, cotes 1215 et 1216, (page 18 de la notification)
* M. Philippe Caruso, dirigeant des sociétés Somoclest, a déclaré (...) procès-verbal du 29 septembre 1995, annexe 51, cote 1216, (page 19 de la notification),
* M. Philippe Caruso, dirigeant des sociétés Somoclest, a déclaré à ce sujet (...) procès-verbal du 29 juin 1995, annexe 51, cote 1216, (page 24 de la notification),
* M. Philippe Caruso, principal dirigeant des sociétés Somoclest, procès-verbal de déclaration du 29 juin 1995, annexe 51, cote 1217, (page 35 de la notification),
* M. Philippe Caruso, dirigeant des sociétés Somoclest, a déclaré le 29 juin 1995, annexe 51, cote 1217, (page 44 de la notification) ;
Que, de même, le Conseil dans sa décision retient les déclarations de M. Philippe Caruso "Le dirigeant de la société Somoclest, M. Caruso a confirmé les déclarations de M. Stenger, dans un procès-verbal du 26 juin 1995", (point 30), "A propos de l'élaboration des prix pour le lot 2.13, M. Caruso, directeur de la société Somoclest, a déclaré" (point 109), étant par ailleurs relevé que le Conseil indique que "La société Somoclest (c'est-à-dire par l'intermédiaire de son représentant légal M. Philippe Caruso) ne conteste pas les échanges d'informations avec la société Stenger et le groupement Cilia" (point 104) ;
Qu'il s'ensuit que la notification des griefs et la décision attaquée reposent sur des éléments, regardés comme suffisants tant par le rapporteur général que par le Conseil, qui ont été recueillis au cours de l'enquête administrative, diligentée en 1995, dans le cadre de laquelle M. Philippe Caruso a été auditionné et le siège de la société Somoclest, dont il est le représentant légal, objet d'une visite des enquêteurs ;
Considérant qu'il s'ensuit que la rapporteure disposait donc, le jour où elle a adressé la lettre de convocation à M. Philippe Caruso, de tous éléments utiles à la recherche, la constatation et à la sanction des pratiques anticoncurrentielles en cause, de sorte que cette lettre avait pour seul finalité de prolonger artificiellement le délai de prescription ;
Que cette lettre ne saurait, en conséquence, valablement interrompre la prescription dès lors que l'audition de M. Philippe Caruso ne présentait aucune utilité, le rapporteur général disposant déjà de tous éléments nécessaires pour notifier les griefs et le Conseil pour statuer ;
Considérant qu'il suit de là que la décision du Conseil de la concurrence doit être annulée et que les sommes versées par les parties condamnées en exécution de cette décision doivent leur être restituées, étant précisé qu'elles produiront intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt et que la capitalisation des intérêts échus doit être ordonnée, en tant que de besoin, au profit des sociétés Sort & Chasle, DBS et Somoclest, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les dépens étant mis à la charge du Trésor Public ;
Par ces motifs, Annule la décision du Conseil de la concurrence n° 05-D-51 du 21 septembre 2005, Ordonne la restitution des sommes versées en exécution de la décision annulée, assorties des intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision et capitalisation des dits intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil, au profit des sociétés Sort & Chasle, DBS et Somoclest, Rejette toute autre demande, Met les dépens à la charge du Trésor Public.