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Décisions

CA Angers, ch. com., 13 janvier 2004, n° 02-02006

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Biotonic (SA)

Défendeur :

Lequeux

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Ferrari

Conseillers :

Mme Lourmet, M. Mocaer

Avoués :

SCP Chatteleyn, Geroge, SCP Gontier-Langlois

Avocats :

Mes Spano, Artarit

T. Com. Angers, du 4 sept. 2002

4 septembre 2002

Thérèse Lequeux a fait assigner, le 8 août 2001, la société de vente par correspondance Biotonic :

- en délivrance des gains de 59 900 F et 100 000 F annoncés dans les documents qu'elle lui a envoyés en tant que gagnante de loterie publicitaire,

- subsidiairement, en paiement de la somme de 80 000 F au titre de la réparation du préjudice résultant de sa déception après la publicité trompeuse lui ayant fait croire au bénéfice du gain qu'elle n'avait pas gagné,

- et, en tout état de cause, en paiement de la somme de 10 000 F en réparation du préjudice résultant de la méconnaissance des dispositions du Code de la consommation.

Le Tribunal de commerce d'Angers, par jugement du 4 septembre 2002, a condamné la société Biotonic à payer à Thérèse Lequeux le montant des gains, soit 9 131,70 euro et 15 244,90 euro, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, la somme de 12 196 euro à titre de dommages-intérêts et celle de 1 525 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

LA COUR,

Vu l'appel formé contre ce jugement par la société Biotonic;

Vu les dernières conclusions du 8 octobre 2003, par lesquelles la société Biotonic appelante, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la cour de débouter Thérèse Lequeux, subsidiairement constater la contradiction des motifs du jugement et réduire le montant des sommes allouées au seul préjudice subi par celle-ci;

Vu les dernières conclusions du 8 avril 2003, par lesquelles Thérèse Lequeux, intimée, sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné la délivrance des gains et statué sur les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la réformation en ce qu'il a omis de statuer sur la demande en réparation du préjudice résultant de la méconnaissance des dispositions du Code de la consommation, réclame deux indemnités de 1 525 euro de ce chef et demande la somme de 3 500 euro au titre des frais de procédure d'appel ;

Sur ce,

Attendu que Thérèse Lequeux a reçu de la société de vente par correspondance Biotonic deux documents la désignant, de façon nominative et répétitive, en gros caractères, comme la personne gagnante de 59 900 F, avec l'annonce de l'expédition du chèque sous 48 heures, pourvu qu'elle renvoie le " bordereau de réclamation expresse de gain " joint ; qu'elle a retourné le bordereau le lendemain, accompagné d'une commande, sans recevoir le lot;

Que, contrairement à ce qu'allègue la société, la lecture des documents qu'elle lui a envoyés ne permettait pas à un consommateur moyennement attentif, de par leur présentation et l'utilisation à dessein de caractères minuscules pour le règlement du jeu, de saisir qu'en réclamant le chèque, selon la procédure indiquée, elle ne participait en réalité qu'à une loterie avec pré-tirage au sort; que la confusion a été entretenue par la réception, en même temps que la marchandise commandée, d'un " bulletin nominatif d'acceptation d'un chèque bancaire de 59 900 F " accompagné du fac-similé d'une carte informatique à code barre portant le nom de Thérèse Lequeux avec le numéro attribué;

Qu'il s'ensuit que la société Biotonic, organisateur de la loterie, qui a annoncé le gain à Thérése Lequeux, sans avoir mis en évidence l'existence d'un aléa, s'est obligée, par ce fait purement volontaire, à le délivrer;

Attendu que Thérèse Lequeux a encore reçu de la même société un nouvel avis l'avertissant de l'attribution d'un gain de 100 000 F payé par chèque, à la condition de passer une commande, de remplir les documents demandés et de répondre dans les 10 jours ; qu'elle affirme avoir rempli ces conditions, ce qui n'est pas dénié par l'appelante ; que, là encore, l'annonce du gain a été faite sans que soit mise en évidence l'aléa du pré-tirage, cette information, qui se déduit du règlement du jeu figurant de manière quasi-illisible sur les documents envoyés, n'étant pas perceptible à leur examen pour un consommateur moyen;

Que la société Biotonic doit en conséquence être condamnée, sur le fondement de l'article 1371 du Code civil, à payer le montant des gains annoncés à sa cliente; que le jugement sera confirmé de ce chef;

Attendu que l'appelante critique, à juste titre, la décision déférée qui a, à la fois, alloué le montant des gains et accordé l'indemnité de 12 196 euro (80 000 F) réclamée à titre subsidiaire par la cliente, sur le fondement quasi-délictuel, en réparation du préjudice découlant de la publicité trompeuse; que, d'ailleurs, l'intimée ne demande pas la confirmation de la disposition du jugement lui allouant cette indemnité, qu'elle ne sollicite toujours qu'à titre subsidiaire en cause d'appel et qui fait double emploi avec la délivrance des gains;

Attendu qu'enfin, Thérèse Lequeux ne justifie pas en quoi la méconnaissance des dispositions des articles L. 121-36 et L. 121-37 du Code de la consommation, relatives au caractère distinct du bulletin de participation et du bon de commande et à l'absence de confusion avec un document administratif, lui aurait personnellement causé un préjudice qui ne serait pas déjà réparé par la délivrance des gains : que sa demande d'indemnisation de ce chef, sur laquelle les premiers juges ont omis de statuer, sera dès lors écartée;

Attendu que, n'obtenant que très partiellement gain de cause, l'appelante supportera les dépens d'appel en plus de ceux de première instance ; qu'aucune considération d'équité ne justifie qu'il soit fait application, en cause d'appel, de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; qu'en revanche les dispositions prises de ce chef en première instance seront confirmées;

Par ces motifs, statuant publiquement et contradictoirement, Réforme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Biotonic à payer une indemnité de 12 186 euro, Le confirme en ce qu'il a condamné la société Biotonic à payer à Thérèse Gabard épouse Lequeux les sommes de 9 131, 70 euro et 15 244, 80 euro avec intérêts au taux légal à compter du 8 août 2001, celle de 1 525 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens de première instance, Y ajoutant, Déboute Thérèse Lequeux de sa demande en payement d'indemnités pour violation des dispositions du Code de la consommation, Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel, Condamne la société Biotonic aux dépens d'appel, recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.