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Décisions

Cass. crim., 6 octobre 1976, n° 75-91.774

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Combaldieu

Rapporteur :

M. Jegou

Avocat général :

M. Davenas

Rouen, ch. corr., du 26 mai 1975

26 mai 1975

LA COUR : - Rejet du pourvoi de X (Maurice), contre un arrêt du 26 mai 1975, de la Cour d'appel de Rouen (chambre correctionnelle) le condamnant à trois mois d'emprisonnement avec sursis et 8 000 francs d'amende pour falsification de produits alimentaires la cour, vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1er, 3 et 12 de la loi du 1er août 1905, des articles 24 et suivants du décret du 22 janvier 1919, des articles 1er, 2, 3 et 4 du décret du 13 août 1965, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et de réponse aux conclusions, manque de base légale, " en ce que l'arrêt attaque condamne le demandeur pour infraction à la loi du 1er août 1905 et au décret du 13 août 1965 ;

" aux motifs que le demandeur a livré des médicaments contenant des oestrogènes destinés à être administrés à des veaux, sans nécessite thérapeutique, soit à titre purement expérimental " pour comparer l'effet de l'implantation avec des résultats d'un aliment destiné à lutter contre le stress " ; Qu'il a reconnu devant l'inspecteur de la répression des fraudes avoir prescrit ces médicaments sans avoir précédemment examiné les bêtes à la suite de communications téléphoniques lui exposant les symptômes que présentaient les animaux ; Qu'il n'y a pas lieu de distinguer implix et médicaments, l'ensemble de sa déclaration révélant que des implix ont bien été prescrits sur simple communication téléphonique sans examen préalable, les implix étant des médicaments au sens de l'article L. 511 du Code de la santé publique ; Qu'on ne peut considérer comme " la prescription vétérinaire " d'un traitement thérapeutique l'envoi de substances oestrogènes sans qu'un état pathologique caractérisé ait été préalablement constaté et un diagnostic posé ; Qu'il n'a pas perçu d'honoraires spéciaux au titre de chacune de ces interventions ; Qu'il s'agissait de la livraison de routine pour un élevage industriel, que la seule mention du vétérinaire sur la facture ne saurait transformer en une prescription ;

" alors que la thérapeutique s'entend aussi bien du traitement préventif que du traitement curatif que s'agissant d'animaux d'élevage en grand nombre, un examen individuel de chaque animal n'était pas nécessaire ; Que le praticien était seul juge de savoir si la description des symptômes par voie téléphonique était suffisante pour lui permettre de porter un diagnostic qu'il n'avait d'ailleurs pas à faire connaître, et, par voie de conséquence, pour prescrire les médicaments envisagés ; Qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, même lorsque ces examens ont été prescrits, comme le déclare le demandeur à titre expérimental, c'était néanmoins pour combattre une maladie dénommée stress que présentait l'ensemble des animaux se trouvant tous dans une condition identique ; Que l'arrêt confond les implix à substances oestrogènes avec les implants liquides préparés par le demandeur lui-même ; Et que si le demandeur a fait état de médicaments, il ne pouvait être arbitrairement conclu qu'il s'agissait nécessairement d'implix contenant des substances oestrogènes ;

" alors, d'autre part, que l'arrêt attaqué ne répond pas aux conclusions du demandeur qui demandait qu'une expertise contradictoire fut ordonnée dans le but de rechercher si, compte tenu de la définition médicale du mot " thérapeutique ", les activités reprochées entraient dans le cadre de la thérapeutique autorisée, fait qui était de nature à exclure l'incrimination, l'expertise contradictoire étant, au demeurant obligatoire si l'inculpé la demandé conformément aux dispositions des articles 12 de la loi du 1er août 1905, 4, 5 et 25 du décret du 22 janvier 1919 " ;

Attendu que les juges du fond ont constaté que X, vétérinaire, " spécialisé en nutrition animale " a, de nombreuses fois au cours des années 1971 et 1972, livré à des éleveurs et fait administrer à des veaux destinés à la consommation humaine des implants contenant des substances à action oestrogène ; Que ces fournitures ont été faites le plus souvent sans examen préalable des sujets à traiter et sur simple commande par téléphone ;

Attendu que, pour déclarer X coupable de falsification de produits alimentaires, l'arrêt attaqué énonce que l'article 4 du décret du 13 août 1965, dont le prévenu invoque le bénéfice, aux termes duquel lesdites substances peuvent être " administrées pour un traitement thérapeutique sur prescription vétérinaire " constitue une exception dont l'application ne saurait être abusivement étendue, sous peine de retirer toute efficacité à une règle essentielle ayant pour objet de protéger la santé publique ; Qu'on ne saurait considérer comme les prescriptions vétérinaires d'un traitement " thérapeutique " au sens dudit article " l'emploi de substances oestrogènes sans qu'un état pathologique ait été préalablement constaté " ; Que ces motifs caractérisent le délit en tous ses éléments ;

Attendu, d'autre part, qu'en cet état il est vainement reproché aux juges du fond de n'avoir pas fait droit à la demande d'expertise contradictoire sollicitée par le prévenu, une telle mesure n'étant obligatoirement ordonnée sur la demande de l'auteur présumé de la fraude que dans le seul cas où, selon les termes de l'article 25 du décret du 22 janvier 1919 " une présomption de fraudes résulte de l'analyse faite au laboratoire " ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.