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Décisions

Cass. crim., 3 avril 1974, n° 72-92.028

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rolland

Rapporteur :

M. Reynaud

Avocat général :

M. Boucheron

Avocat :

Me George

Aix-en-provence, 5e ch., du 17 mai 1972

17 mai 1972

LA COUR : - Rejet du pourvoi formé par X (Etienne), contre un arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 17 mai 1972, qui l'a condamné a 1 000 francs d'amende pour tromperie sur articles alimentaires et à deux amendes de 50 francs pour les contraventions connexes de défaut d'indication du nom du fabricant et défaut de date de fabrication la cour, vu le mémoire produit;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles I et suivants de la loi du 1er août 1905, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motif, manque de base légale, " en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable de délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue;

" aux motifs qu'il avait mis en vente un lot de boîtes de conserves d'olives vertes de mauvaise qualité bactériologique et qu'il aurait dû préalablement vérifier si le conditionnement ne présentait pas quelque malfaçon;

" alors que le délit de tromperie sur les qualités substantielles n'existe qu'à la condition que le vendeur ait connu l'état de cette marchandise et que la loi n'a établi aucune présomption de culpabilité à l'encontre de celui qui aurait seulement omis de procéder à certaines vérifications avant la vente";

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le 21 avril 1971, quatre boîtes de conserves prélevées au lycée municipal de Bar-sur-Aube présentaient à l'analyse " une mauvaise qualité bactériologique due à un défaut de remplissage ";

Attendu que l'enquête devait relever que ces boîtes provenaient du comptoir technique agricole dirigé par X (Etienne) demandeur au pourvoi;

Attendu que l'arrêt constate que le prévenu " réceptionnait " ces boîtes dont la fabrication et le conditionnement étaient effectués par des façonniers sur sa commande et " qu'il lui appartenait de vérifier, avant de mettre en vente cette marchandise, si le conditionnement de celle-ci ne présentait pas quelque malfaçon tel un défaut de remplissage et si cette malfaçon ne risquait pas, au bout d'un certain temps, d'entraîner une détérioration du produit, que sa carence suffit à caractériser l'élément intentionnel pour constituer le délit de fraude ";

Attendu que, par ces constatations qui impliquent la reconnaissance souverainement appréciée par les juges du fond de l'intention frauduleuse, l'arrêt attaqué a justifié sa déclaration de culpabilité à l'égard du prévenu;

Qu'en effet, s'il est vrai qu'en matière d'infraction à la loi du 1er août 1905, la loi n'édicte aucune présomption de tromperie à l'encontre du prévenu qui aurait négligé de procéder a toutes vérifications utiles avant de livrer la marchandise à la vente, les juges du fond peuvent, comme ils l'ont fait en l'espèce, souverainement déduire la mauvaise foi du prévenu du fait que, réceptionnant des marchandises conditionnées par des façonniers à son service, il a méconnu l'obligation qui lui incombait en sa qualité de directeur du comptoir technique agricole, de vérifier si la marchandise livrée ne présentait pas quelque malfaçon, avant de s'en dessaisir pour la vente; d'où il suit que le moyen doit être écarté;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 7 et 9 du Code de procédure pénale, de l'article 11 du décret du 22 janvier 1919, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale, " en ce que l'arrêt attaqué a déclaré non prescrites les contraventions faisant l'objet des poursuites;

" aux motifs que le procès-verbal de prélèvement d'échantillons dressé le 21 avril 1971 par deux agents assermentés du service de la répression des fraudes doit être considéré comme un acte d'instruction et de poursuite qui, en conséquence, interrompt la prescription;

" alors que le procès-verbal de prélèvement d'échantillons ne constate aucune infraction et ne saurait donc constituer un acte d'instruction et de poursuite ";

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que, d'une part, la vente initiale des conserves litigieuses a été effectuée le 16 juin 1970 soit plus d'une année avant le 30 juin 1971, date de la transmission au parquet du dossier du service des fraudes, que, d'autre part, le procès-verbal de prélèvement d'échantillons constatant en outre les faits constitutifs des contraventions poursuivies a été dressé le 21 avril 1971;

Attendu que pour rejeter l'exception de prescription de l'action publique des contraventions relevées, l'arrêt énonce que " le procès-verbal de prélèvement d'échantillons dressé le 21 avril 1971 par deux agents assermentés du service des fraudes, doit être considéré comme un acte d'instruction et de poursuite qui, en conséquence, interrompt la prescription "; Qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision; Qu'en effet, le procès-verbal de prélèvement d'échantillons intervenu dans l'année, dressé régulièrement par deux agents assermentés du service des fraudes, faisant état de constatations entrant dans leurs attributions légales est un acte de recherche de l'infraction, interruptif de prescription au sens des articles 7 et 9 du Code de procédure pénale; Que c'est à bon droit que les juges d'appel ont écarté l'exception de prescription; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;

Rejette le pourvoi.