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Décisions

Cass. crim., 13 octobre 1982

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Cass. crim. n°

13 octobre 1982

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : - X - contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris (13e Chambre B) en date du 17 décembre 1981, qui, pour tromperie sur la qualité d'une marchandise vendue, l'a condamne à 10 000 F d'amende, a ordonné la publication de la décision et a statué sur les réparations civiles ; - Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er de la loi du 1er août 1905 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaque a déclaré le prévenu, président directeur général d'un garage, coupable de tromperie sur les qualités substantielles d'un véhicule vendu ;

"au motif que le prévenu se devait, comme chef d'entreprise, de veiller personnellement a l'exacte application par ses subordonnés des dispositions légales et réglementaires qui lui étaient imposées pour l'exercice de sa profession, qu'il ne saurait en particulier échapper a la poursuite en invoquant la responsabilité propre d'un préposé sur l'activité duquel il conservait les pouvoirs de contrôle attachés a ses fonctions d'administration générale, que d'ailleurs le prévenu lorsqu'il a été entendu le 19 décembre 1980 a reconnu qu'il assumait seul l'éventuelle responsabilité pénale et civile de l'affaire ;

"alors que la loi du 1er août 1905 n'édicte aucune présomption de tromperie, qu'en l'espèce le prévenu, président-directeur général d'une société exploitant un garage, soutenait dans ses conclusions d'appel que la responsabilité pénale de la tromperie éventuelle ne lui incombait pas mais incombait au chef du service des ventes de véhicules d'occasion, lequel avait d'ailleurs reconnu qu'il avait vendu le véhicule litigieux sans en référer au prévenu ;

Que la cour, qui n'a pas établi la participation personnelle de ce dernier à l'infraction retenue sans même rechercher les circonstances propres à établir l'existence de son intention coupable, a privé sa décision de toute base légale ;

Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et du jugement dont il confirme les motifs non contraires que la société Y, dont X est le président-directeur général, a vendu à Krylatov une voiture automobile cotée 13 700 F a l'argus pour le prix de 9 000 F compte tenu de réparations à faire fixées à 4 700 F ;

Que le compteur de distance était bloqué sur le chiffre 21 832 alors que le kilométrage réellement parcouru était de 75 000 aux dires du précédent propriétaires ;

Attendu que pour retenir le principe de la responsabilité pénale du prévenu les juges énoncent que celui-ci "se devait comme chef d'entreprise de veiller personnellement à l'exacte application par ses subordonnés des dispositions légales et réglementaires qui lui étaient imposées pour l'exercice de sa profession ;

Qu'il ne saurait en particulier échapper à la poursuite en invoquant la responsabilité propre d'un préposé sur l'activité duquel il conservait les pouvoirs de contrôle attachés à ses fonctions d'administration générale" ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs du moyen ;

Qu'en effet, en matière d'infraction à la loi du 1er août 1905, engage sa responsabilité celui qui se soustrait aux obligations de contrôle résultant pour lui personnellement des fonctions d'administration générale qu'il assume ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er et 12 de la loi du 1er août 1905 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de tromperie sur les qualités substantielles d'un véhicule pour avoir vendu une voiture d'occasion pour un prix de 9 000 F, alors que le montant des réparations était fixé a 9 800 F et que le kilométrage annoncé était faux ;

"aux motifs propres à la cour qu'à l'audience la partie civile a confirmé que les réparations restant à sa charge lui avaient été présentées par le vendeur comme pouvant atteindre la somme de 4 000 F qu'elle a ajouté que selon les indications alors fournies, le kilométrage réel du véhicule ne devait pas dépasser 60 000 kilomètres et a précisé qu'elle n'avait pas eu connaissance de la fiche signalétique établie lors de l'achat du véhicule qui évaluait à 6 900 F les frais de remise en état dont 4 800 F pour les éléments mécaniques et fixait à 75 000 le nombre de kilomètres parcourus, que ces déclarations sont confirmées par l'examen du bon de commande qui ne se réfère pas à la fiche signalétique, ne comporte aucune indication sur la nature et le coût des réparations incombant à l'acheteur, que cette pièce de surcroît ne fait pas apparaître en contravention aux dispositions du décret du 4 octobre 1978 le kilométrage parcouru ou enregistré au compteur et non garanti ;

Que les conclusions de l'expert qui évalue a 9 800 F le coût des importantes réparations de remise en état sont corroborées par un concessionnaire parisien et ne peuvent ainsi être mises en doute ;

Que le prévenu qui s'est borné avant de revendre le véhicule à remplacer les pièces défectueuses facturées 226,44 F a caché à son cocontractant que l'état de cette automobile nécessitait des réparations d'un montant supérieur à son prix de vente ;

Que mettant à profit une détérioration du compteur de distance, il lui a tu le kilométrage annoncé par le précédent propriétaire ;

"et au motif adopté des premiers juges qu'il n'est pas utile de procéder à une expertise contradictoire qui n'est pas exigée par les textes légaux, "alors que d'une part, les juges du fond se sont mis en contradiction flagrante avec eux-mêmes en affirmant que l'examen du bon de commande fait apparaître que ce document ne se réfère pas à la fiche signalétique établie par le précédent propriétaire du véhicule, qu'en effet ce document, signé par la partie civile, précise que lors de la mise à disposition du véhicule au client il sera obligatoirement remis à ce dernier un état descriptif qui était nécessairement constitué par la fiche signalétique ;

"alors que d'autre part, puisque l'arrêt attaqué déclare que le bon de commande ne contient aucune indication relative à la nature et au coût des réparations ni au kilométrage, les juges du fond se sont à nouveau contredits en prétendant que l'examen du bon de commande confirmait les déclarations de la partie civile selon lesquelles le montant des réparations à effectuer sur le véhicule et le kilométrage parcouru par lui étaient très inférieurs à ce qui figurait sur la fiche signalétique ;

"qu'en outre, les juges du fond ont violé les dispositions de l'article 12 de la loi du 1er août 1905 en rejetant la demande d'expertise contradictoire formée par le prévenu et en se fondant sur un devis et un rapport d'expertise d'ailleurs non convergents, pour admettre que le montant des réparations à effectuer était de 9 800 F, le texte précité précisant expressément que toutes les expertises nécessitées pour l'application de la loi de 1905 sont contradictoires ;

"que de plus, si selon les factures produites par le prévenu, le montant des pièces remplacées par lui sur le véhicule s'élève à 226,44 F le montant des réparations effectuées s'élève à 999,10 F ;

"et qu'enfin, le fait pour un garagiste de vendre à un prix très inférieur à celui de l'argus un véhicule d'occasion qui, selon une expertise non contradictoire, nécessiterait des réparations d'un montant supérieur au prix de la vente, ne peut, à le supposer établi, constituer un délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, dès lors qu'il n'a jamais été établi par la partie civile que le garagiste s'était engagé à lui garantir un coût de remise en état et un kilométrage réel et que l'acquéreur a lui-même reconnu dans sa plainte qu'il avait été prévenu que le compteur kilométrique étant bloqué, le kilométrage réel etait très supérieur à celui indiqué au compteur ;

Attendu que pour déclarer X coupable de fraude sur les qualités substantielles d'un véhicule automobile vendu, les juges, qui n'étaient contrairement à ce qui est soutenu au moyen saisis d'aucune demande d'organisation d'une mesure d'expertise, relèvent après analyse des témoignages et documents débattus que l'acheteur n'avait été informé ni du kilométrage réel parcouru par la voiture, ni de l'état exact de celle-ci ;

Attendu qu'en cet état, et alors que le moyen se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de fait, soumis aux débats contradictoires, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision ;

Que des lors le moyen doit être écarté ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.