Cass. crim., 7 septembre 2004, n° 03-86.623
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Castagnede
Avocat général :
M. Frechede
Avocats :
SCP Bouzidi, Bouhanna, Me de Nervo
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : - X Claude, contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 8 octobre 2003, qui, pour tromperie, l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les dispositions civiles de l'arrêt : - Attendu que Claude X, dont la liquidation judiciaire n'était pas clôturée, s'est pourvu seul en cassation, sans le concours du liquidateur ;
Attendu qu'en cet état, le pourvoi n'est pas recevable en ce qu'il est dirigé contre les dispositions civiles de la décision attaquée ;
Qu'en effet, selon l'article L. 622-9 du Code de commerce, le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, les droits et actions concernant son patrimoine étant exercés, pendant toute la durée de la liquidation judiciaire, par le liquidateur ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 213-1 et suivants, L. 216-2 et L. 216-3 du Code de la consommation, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que, confirmant le jugement du 21 décembre 2001 en ce qu'il a déclaré le demandeur coupable de tromperie au préjudice de Jean Y et infirmant le jugement du 11 octobre 2001 en ce qu'il avait déclaré le demandeur coupable d'escroquerie au préjudice de Jérôme Z, requalifiant les faits d'escroquerie en fait de tromperie et déclarant le demandeur coupable des faits ainsi requalifiés, la cour d'appel a condamné le demandeur à une peine de huit mois d'emprisonnement ;
"aux motifs que Claude X exerçait en tant qu'exploitant individuel l'activité d'achat et de revente de véhicules automobiles d'occasion, dans un garage à l'enseigne A, que l'entreprise a été mise en redressement judiciaire le 21 avril 1999, mise en liquidation judiciaire le 21 février 2000 ; que, le 6 avril 1999, Claude X a vendu à Jérôme Z un véhicule R qui, déclaré irréparable par les services de la préfecture à la suite d'un accident, ne pouvait plus, au plan administratif, faire l'objet d'une nouvelle immatriculation ; que, le 4 février 2000, il a vendu à Jean Y un véhicule C, sans avoir lui-même réglé le prix au précédent propriétaire, lequel a décidé de conserver par devers lui la carte grise ; que, ne pouvant obtenir l'immatriculation du véhicule à son nom, Jean Y a dû faire constater judiciairement, par ordonnance de référé du 30 avril 2001, rendue au contradictoire du liquidateur de A, l'existence de la vente du 4 février 2000 ; qu'il n'est parvenu à régulariser la situation, par l'établissement d'une carte grise à son nom, que le 30 mai 2001 ; que les faits tels que rappelés ne sont pas contestés dans leur matérialité par Claude X, qui se borne à faire valoir, en ce qui concerne le véhicule vendu à Jérôme Z, que celui-ci était mécaniquement en état de rouler et, en ce qui concerne le véhicule vendu à Jean Y, que lui-même n'avait pu régler le précédent propriétaire en raison de ses difficultés financières et de la procédure collective dont il faisait l'objet ; que le prévenu a été appelé à s'expliquer sur une éventuelle requalification du délit d'escroquerie, qui lui est reproché dans la première affaire, en celui de tromperie ; qu'en vendant à Jérôme Z un véhicule qui ne pouvait faire l'objet d'aucune nouvelle immatriculation et à Jean Y un véhicule dont l'immatriculation régulière qui a nécessité plus de quinze mois de démarches administratives et judiciaires, Claude X a trompé ses clients sur les qualités substantielles des marchandises vendues ;
Qu'il y a lieu de confirmer la décision du Tribunal de Marseille, en date du 21 décembre 2001, en ce qu'il a déclaré Claude X coupable de tromperie au préjudice de Jean Y, d'infirmer la décision du même tribunal en date du 11 octobre 2001, en ce qu'il l'a déclaré coupable d'escroquerie au préjudice de Jérôme Z et de dire que les faits ainsi requalifiés constituent en réalité le délit de tromperie ; qu'en raison du trouble porté à l'ordre public par les agissements du prévenu, il convient de prononcer à son encontre une peine d'emprisonnement ferme ;
"alors, d'une part, qu'en retenant qu'en vendant à Jérôme Z un véhicule qui ne pouvait faire l'objet d'aucune nouvelle immatriculation, le demandeur l'a trompé sur les qualités substantielles des marchandises vendues, le véhicule vendu ayant été déclaré irréparable par les services de la préfecture à la suite d'un accident, ne pouvant plus, au plan administratif, faire l'objet d'une nouvelle immatriculation sans constater que le demandeur, à la date à laquelle le véhicule a été vendu, avait connaissance de la décision prise par les services de la préfecture, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
"alors, d'autre part, qu'il ressort des jugements du tribunal de commerce que la poursuite de l'activité avait été régulièrement autorisée, la vente faite à Jean Y étant intervenue au cours de la période d'activité autorisée par le tribunal de commerce ; que le demandeur faisant valoir avoir été dans l'impossibilité d'exécuter ses obligations en remettant la carte grise du véhicule eu égard à la procédure collective ; qu'ayant constaté que le demandeur avait fait l'objet d'un redressement judiciaire le 21 avril 1999, puis d'une liquidation judiciaire le 21 février 2000, qu'il avait vendu un véhicule à Jean Y le 4 février 2000 sans avoir lui-même payé le prix au précédent propriétaire, lequel a décidé de conserver par devers lui la carte grise, puis décidé qu'en vendant à Jean Y un véhicule dont l'immatriculation régulière a nécessité plus de quinze mois de démarches administratives et judiciaires, que le demandeur a trompé son client sur les qualités substantielles des marchandises vendues, sans statuer sur le moyen dont elle était saisie l'invitant à constater qu'eu égard à la procédure collective, le demandeur ne pouvait procéder au paiement préférentiel d'un créancier, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi, justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 621-43 et suivants du Code de commerce, 2 et suivants et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel a dit recevable la partie civile et a condamné le demandeur à payer diverses sommes ;
"aux motifs que Claude X fait valoir que la constitution de partie civile des victimes n'est recevable qu'à la double condition que celles-ci aient déclaré leur créance devant les organes de la procédure collective et qu'il y ait une instance en cours ; que Jean Y, dont la créance est postérieure au jugement ayant ordonné le redressement judiciaire, a déclaré ladite créance à Me A, liquidateur à la liquidation judiciaire du prévenu ; que Claude X ne s'explique pas sur la seconde condition de la recevabilité qu'il invoque, relative à l'existence d'une instance en cours ; qu'il convient, dès lors, d'écarter ce moyen et de déclarer recevable la constitution de partie civile de Jean Y ;
"alors que le demandeur faisait valoir que Jean Y n'avait pas déclaré sa créance et que, dès lors, sa constitution de partie civile était irrecevable ; qu'en relevant que Jean Y, dont la créance est postérieure au jugement ayant ordonné le redressement judiciaire, a déclaré sa créance à Me A, liquidateur à la liquidation judiciaire du prévenu, sans relever qu'une telle déclaration avait été faite dans le délai légal de déclaration ou qu'à la suite de la liquidation judiciaire, un nouveau délai avait été ouvert, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés" ;
Attendu que, le pourvoi étant irrecevable en ce qu'il est dirigé contre les dispositions civiles de l'arrêt, il en est de même du moyen ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs : I - Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les dispositions civiles de l'arrêt : Le déclare irrecevable ; II - Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les dispositions pénales de l'arrêt : Le rejette.