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Décisions

Cass. com., 11 juillet 2006, n° 04-11.512

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Josse

Défendeur :

Nomadic Display groupe Primordial (Sté)
Imatec (SARL)
André
Boiche
Bouet
Pezzino

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. Albertini

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

SCP Delaporte, Briard, Trichet, Me Bertrand

T. com. Paris, du 23 janv. 2002

23 janvier 2002

LA COUR : - Sur le moyen unique: Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 19 novembre 2003), que la société Ateliers photographiques et audiovisuels copycolor (la société APAC copycolor) avait pour principal client, la société Nomadic display groupe Primordial (la société Primordial), et employait, notamment, Mme André, responsable de production, M. Boiche, responsable commercial ; qu'après avoir démissionné ces derniers ont constitué, avec la société Primordial et une tierce personne, la société Imatec ayant pour objet social "la prestation de services, conseil et réalisation de visuels graphiques"; qu'après la mise en liquidation judiciaire, le 25 août 1998, de la société APAC copycolor, le liquidateur a poursuivi judiciairement pour concurrence déloyale la société Primordial, ses anciens salariés susnommés ainsi que la société Imatec, qu'ultérieurement la société Primordial a été mise en redressement judiciaire;

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant, d'une part à ce que Mme André, M. Boiche et la société Imatec soient condamnés solidairement au paiement de la somme de 303 852,03 euro à titre de dommages-intérêts et, d'autre part, à ce que soit admise au passif de la procédure collective de la société Primordial une créance de dommages et intérêts d'un montant de 303 852,03 euro, alors, selon le moyen : 1°) que la désorganisation d'une entreprise rivale et sa spoliation ouvrent droit à indemnisation au profit de cette dernière ; qu'en estimant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que la suspension par la société Primordial du paiement des dettes contractées auprès de la société APAC copycolor procédait d'une intention de nuire, au seul motif qu'une partie des dettes avait été contestée avec succès par la société débitrice, ce qui était de nature à justifier son opposition à tout paiement tout en considérant que, sur un montant total réclamé de 113 803,31 euro, la somme de 83 718,96 euro était incontestablement due par la société Primordial, d'où il résultait nécessairement que cette société s'était opposée sans aucun motif valable au règlement de sa dette, cette circonstance caractérisant sa mauvaise foi la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du Code civil ; 2°) qu'en affirmant qu'il n'était pas contesté que la société Imatec n'avait commencé ses activités qu'à partir du 3 août 1998, ce qui excluait toute concurrence déloyale avec la société APAC copycolor qui avait pour sa part cessé ses activités le 15 juillet 1998, sans répondre aux conclusions du liquidateur faisant valoir que les participants à l'action concertée entreprise bien avant le 3 août 1998, en faisant obstacle, s'agissant de M. Boiche, au règlement de ses factures par la société Primordial et en démissionnant, s'agissant de Mme André, dès le mois de mai 1998, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 3°) que le fait pour un salarié de travailler d'abord en sous-main contre son employeur avant de le quitter en détournant la clientèle constitue un acte de concurrence déloyale qui expose celui qui s'en rend coupable à indemniser l'entreprise victime de ces agissements; qu'en se bornant à relever que Mme André et M. Boiche n'avaient été embauchés par la société Imatec qu'à compter du 3 août 1998, soit concomitamment à la mise en liquidation judiciaire de la société APAC copycolor intervenue le 25 août 1998, ce qui excluait toute faute de leur part, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme André et M. Boiche n'avaient pas agi de façon déloyale dès le 15 mai 1998 en créant une société concurrente alors qu'ils étaient encore salariés de la société APAC copycolor, la cour d'appel a privé se décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 4°) qu'en s'abstenant de rechercher si au-delà de manœuvres caractérisant une concurrence déloyale, les intéressés ne s'étaient pas livrés à une entreprise de spoliation au détriment de la société APAC copycolor, peu important dès lors que l'activité de la société Imatec n'ait débuté que le 3 août 1998, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 5°) que le fait que les salariés en cause ne soient pas dans les liens d'une clause de non-concurrence n'est pas de nature à les exonérer des conséquences de leurs agissements déloyaux ; qu'en exonérant M. Boiche et Mme André de toute responsabilité au motif qu'il n'était pas contesté que leur contrat de travail ne comportait pas d'engagement de non-concurrence, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante, privant, pour cette raison, sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, qu'après avoir, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, relevé, par motifs propres et adoptés, que l'activité de la société Imatec avait commencé le 3 août 1998, que la décision prise par Mme André de démissionner et de participer avec M. Boiche et la société Primordial à la création de la société Imatec s'expliquait par les incertitudes planant sur son avenir professionnel, que seuls trois salariés non liés par une clause de non-concurrence, sur un effectif de dix-sept, avaient démissionné moins d'un mois avant l'annonce des licenciements pour cause économique et qu'il n'était pas établi que la suspension des paiements en mars 1998, procédait d'une intention de nuire de la société Primordial, celle-ci contestant une partie de la dette et ses objections étant au demeurant partiellement prises en compte, la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions citées par la deuxième branche et effectué la recherche mentionnée à la troisième, a pu, sans encourir les autres griefs du moyen, déduire de ces constatations et appréciations que le liquidateur ne démontrait pas que le comportement de la société groupe Primordial s'inscrivait dans une action concertée destinée à mettre la société APAC copycolor en difficulté ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs: rejette le pourvoi.