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Décisions

Cass. com., 11 juillet 2006, n° 02-18.229

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Europe funérailles Roc Eclerc (SARL)

Défendeur :

Funéfrance Funéclair (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. Sémériva

Avocat général :

M. Casorla

Avocats :

SCP Boutet, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

TGI Avesnes-sur-Helpe, du 19 juill. 2001

19 juillet 2001

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 29 avril 2002), rendu en référé, que la société Europe funérailles Roc Eclerc (la société Europe funérailles) a poursuivi contre la société Funéfrance Funéclair, dont la gérante est l'une des ses anciennes salariées, Mme Blanchet-Piotrowski, la cessation du trouble résultant d'actes de concurrence déloyale ainsi que le versement d'une provision à valoir sur son indemnisation, en lui faisant notamment grief d'avoir installé, à proximité immédiate de son magasin, un commerce de produits et services similaires, et de s'être alliée à un concurrent;

Sur le premier moyen : Attendu que la société Europe-funérailles fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen: 1°) que la responsabilité quasi-délictuelle peut être engagée lorsqu'il est démontré une faute consistant en un acte de concurrence déloyale ; que l'action en responsabilité pour concurrence déloyale est différente de celle résultant de la violation d'une obligation de non-concurrence insérée dans un contrat de travail ; qu'en l'espèce, où la société gérée par l'ancienne salariée de la société Europe funérailles, Mme Blanchet-Piotrowski était associée à un concurrent de l'ancien employeur, dans une activité de pompes funèbres, le juge des référés, pour nier les agissements évidents de concurrence déloyale, a retenu le respect de la clause de non-concurrence par l'ancienne salariée ; qu'en conséquence, l'arrêt attaqué a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ; 2°) qu'un trouble commercial s'infère nécessairement d'un acte de concurrence déloyale ; qu'en niant l'existence d'un préjudice subi par la société Europe funérailles du fait des agissements de concurrence déloyale invoqués, pour refuser d'accueillir son action en s'appuyant sur le respect de la clause de non-concurrence, le juge des référés a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ; 3°) que, partant, le juge des référés n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard des articles 809 et 455 du nouveau Code de procédure civile, en se bornant à affirmer la contestation sérieuse, par référence à la clause de non-concurrence du contrat de travail ; 4°) que le juge des référés est tenu de procéder à la recherche de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable pour accorder ou refuser une provision ; que, dès lors, il doit motiver sa décision sur ce point ; qu'en l'occurrence, pour refuser d'accorder une provision, le juge des référés a affirmé l'existence d'une contestation sérieuse en s'appuyant sur le respect de ses obligations par Mme Blanchet-Piotrowski en sa qualité de salariée ; que le juge des référés a donc privé sa décision de base légale au regard des articles 809 et 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en retenant, par motifs propres et adoptés que le fait générateur de la responsabilité doit non seulement résider dans un acte de concurrence mais encore dans son caractère fautif, que la simple circonstance que la société dont Mme Blanchet-Piotrowski est la gérante se soit installée à quelques mètres seulement de la société Europe funérailles ne présente pas un caractère fautif et constitue au contraire un acte justifié par le principe de libre concurrence et de liberté du commerce, que le caractère fautif de l'acte visé par l'action n'est pas démontré, et que rien ne permet de considérer que des procédés déloyaux ou non conformes aux usages du commerce auraient été utilisés, la cour d'appel s'est déterminée par des considérations spécifiques au grief pris d'une concurrence déloyale, et indépendantes de celles relatives à l'absence d'obligation de non-concurrence pesant sur la gérante de la société défenderesse au-delà de la fin de son contrat de travail ; que le moyen, qui s'attaque en sa deuxième branche à des motifs surabondants, manque en fait pour le surplus;

Et sur le second moyen : Attendu que la société Europe funérailles fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen : 1°) que tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la société Europe funérailles a sollicité du juge des référé la cessation d'un trouble manifestement illicite et l'octroi d'une provision, pour les agissements de concurrence déloyale de la société Funéfrance ; que, pour rejeter ces demandes, la cour d'appel a décidé qu'il existait une contestation sérieuse ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions dont elle était saisie, en ce qui concerne le trouble manifestement illicite ; qu'en conséquence, l'arrêt attaqué a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) que subsidiairement, l'existence d'une contestation sérieuse n'empêche pas le juge des référés de prendre les mesures propres à mettre un terme à un trouble manifestement illicite ; que, dès lors, en exigeant, pour la mise en œuvre d'une mesure devant faire cesser un trouble, l'absence d'une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que la cour d'appel ayant retenu que la société Funéfrance ne s'était rendue coupable d'aucun acte de concurrence déloyale, elle en a exactement déduit, abstraction faite du motif erroné, mais surabondant, pris de l'existence d'une contestation sérieuse, que l'action tendant à la cessation d'un trouble dont elle constatait ainsi l'absence ne pouvait être reçue ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs: rejette le pourvoi.