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Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch., 3 juin 1994, n° 91-15907

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Isotec (SARL)

Défendeur :

Alpilles Location (SARL), Etablissements Applanat, Zurich Assurances (SA), EITB (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Carrie

Conseillers :

MM. Deorandi, Isouard

Avocats :

Me Pascal, Cardonnel, SCP Jean-Luc Albertini-Catherine Alexandre, SCP Teissier-Gualbert

T. com. Tarascon, du 5 juill. 1991

5 juillet 1991

EXPOSE DU LITIGE

Le 8 janvier 1990, la société Isotec a acheté un groupe électrogène d'occasion à la société Alpilles Location, assurée à la compagnie La Zurich, et qui l'avait acquis en novembre 1990 de la société d'exploitation des Etablissements Applanat après révision par la société EITB.

Par jugement du 5 juillet 1991, le Tribunal de commerce de Tarascon a débouté la société Isotec de son action en résolution de la vente et paiement de dommages-intérêts.

Le 27 août 1991, la société Isotec a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de la société Alpilles Location laquelle a provoqué appel, les 25, 26 septembre et 1er octobre 1991, contre la société d'exploitation des Etablissements Applanat, la Compagnie La Zurich, la société EITB.

La société Isotec soutient que le groupe électrogène est tombé en panne en juillet 1990 avant d'être repris pour réparation par la société Alpilles Location. Elle reproche à celle-ci un manquement à son obligation de délivrance et invoque la garantie des vices cachés.

Elle sollicite la résolution de la vente, et la condamnation de la société Alpilles Location à lui rembourser la somme de 147 440 F, prix d'achat du matériel, avec intérêts à compter du 8 janvier 1990 ainsi qu'à lui payer 29 000 F de dommages-intérêts outre 12 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La Compagnie La Zurich conclut à la confirmation du jugement attaqué niant l'existence d'un vice caché et alléguant que l'action fondée sur ce vice n'a pas été intentée à bref délai. Subsidiairement, elle conteste sa couverture à la société Isotec au motif que la police d'assurance ne garantit pas ce type de sinistre.

La société d'exploitation des Etablissements Applanat demande la confirmation de la décision déférée pour les motifs retenus par les premiers juges et la condamnation de la société Isotec à lui payer la somme de 10 000 F de dommages-intérêts et celle de 10 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Le 10 mars 1994, la société Alpilles Location a déposé des conclusions qui seront rejetées pour les motifs ci-dessous indiqués.

Le 15 mars 1994, le conseiller de la mise en état a clos l'instruction de l'affaire.

Le 17 mars 1994, la société Isotec a sollicité le rejet des conclusions de la société Alpilles Location et subsidiairement la révocation de l'ordonnance de clôture afin que puissent être accueillies ses écritures en réplique. Le 24 mars 1994, la Compagnie La Zurich a conclu au rabat de l'ordonnance de clôture.

La société EITB, assignée à la personne de sa secrétaire n'a pas constitué avoué.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des conclusions du 10 mars 1994 de la société Alpilles Location et sur la révocation de l'ordonnance de clôture :

Selon l'article 15 du nouveau Code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les moyens de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacun soit à même d'organiser sa défense.

La société Alpilles Location en concluant le 10 mars 1994, soit cinq jours avant l'ordonnance de clôture dont la date lui avait été indiquée à ordre de travail du 3 novembre 1993, alors que les dernières écritures adverses remontaient au 3 mars 1992, a empêché la société Isotec de répondre à ses moyens.

Dès lors, il convient d'écarter ses conclusions.

D'après l'article 784 du nouveau Code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

Le seul motif invoqué pour la révocation de cette ordonnance réside en la nécessité de répondre aux conclusions du 10 mars 1994 de la société Alpilles Location,

Mais ces conclusions ayant été écartées en raison de leur tardivité, il n'existe plus de cause de révocation.

En conséquence, l'ordonnance de clôture doit être maintenue et l'article 783 du nouveau Code de procédure civile interdisant le dépôt de toutes conclusions après ladite ordonnance, celles du 17 mars 1994 de la société Isotec et celles du 24 mars 1994 de la Compagnie La Zurich doivent être déclarées irrecevables.

Sur le fond

La société Isotec ne soutient pas que le groupe électrogène acheté ne correspondrait pas à celui commandé ou ne pourrait pas remplir l'usage auquel le vendeur le savait destiné. Elle invoque uniquement le mauvais fonctionnement de cet appareil dû à des pannes.

En conséquence, elle ne peut valablement fonder son action sur le défaut de délivrance de la chose vendue, cette obligation ayant été satisfaite et elle ne peut invoquer, pour obtenir la résolution de la vente, que l'existence d'un vice caché,

L'action rédhibitoire de la société Isotec a été introduite le 1er octobre 1990 alors que la défectuosité de l'engin avait été constatée en juillet 1990 et que les parties étaient restées en discussion jusqu'à la mi-septembre. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle a été introduite à bref délai et s'avère recevable.

Il ressort de l'échange des courriers entre les sociétés Isotec et Alpilles Location et cette dernière avec la société EITB qu'après deux pannes survenues sur l'alternateur régulateur ayant la même origine, prises en charge par la société Alpilles Location, celle-ci a accepté de changer à ses frais, cette pièce.

Cette attitude, en l'absence d'éléments contraires, établit l'existence d'un vice caché. L'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de remettre le groupe électrogène en état de marche montre que ce vice rendait la chose impropre à l'usage auquel elle était destinée.

En conséquence, il convient de prononcer la résolution de la vente, de condamner la société Alpilles Location à rembourser le prix d'achat du matériel soit la somme de 47 440 F avec l'intérêt à compter du 8 janvier 1990, jour du paiement, et d'ordonner la restitution du groupe électrogène.

La société Alpilles Location est une société ayant pour objet la vente ou la location du matériel d'équipement pour l'entreprise. Elle apparaît comme un professionnel et à ce titre connaissait nécessairement le vice affectant la chose louée.

Elle se doit de réparer le préjudice causé par la défaillance de l'appareil et constant en l'impossibilité d'user de celui-ci. Ce préjudice doit être fixé à la somme de 10 000 F, la société Isotec ne justifiant pas, contrairement à ce qu'elle prétend dans ses conclusions, avoir dû louer un engin de remplacement.

La société Alpilles Location qui n'a pas utilement conclu en cause d'appel, n'a formé aucune demande valable contre la Compagnie La Zurich, la société d'exploitation des Etablissements Applanat et la société EITB. Il convient de mettre celles-ci hors de cause.

La société d'exploitation des Etablissements Applanat qui en concluant à la confirmation du jugement attaqué, a nécessairement dirigé ses demandes en dommages-intérêts et sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile contre la société Isotec, bien fondée en son action, doit être déboutée de celles-là.

Succombant à l'instance, la société Alpilles Location doit être condamnée à payer à la société Isotec la somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, Infirme le jugement du Tribunal de commerce de Tarascon du 5 juillet 1991 ; Statuant à nouveau ; Prononce la résolution de la vente du 8 janvier 1990, Condamne la société Alpilles Location à rembourser à la société Isotec la somme de 47 440 F (quarante sept mille quatre cent quarante F) avec intérêts à compter du 8 janvier 1990, La condamne au paiement de la somme de 10 000 F (dix mille francs) à titre de dommages-intérêts, Ordonne la restitution du groupe électrogène acheté par la société Isotec, Met hors de cause la Compagnie La Zurich, la société d'exploitation des Etablissements Applanat et la société EITB, Condamne la société Alpilles Location à payer à la société Isotec la somme de 5 000 F (cinq mille francs) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la société Alpilles Location aux dépens et autorise les SCP d'avoués Sider-Liberas-Buvat et Jourdan-Wattecamps à recouvrer directement ceux d'appel dont elles auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.