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Décisions

CA Paris, 1re ch. D, 16 janvier 2002, n° 2001-16071

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Koogar (Sté), Ameline

Défendeur :

AMS-NEVE (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulon

Conseillers :

Mmes Percheron, Jaubert

Avocats :

Mes Ouaki, Boucaya

T. com. Paris, du 29 mai 2001

29 mai 2001

La société Koogar, Me Hubert Lafont (ultérieurement remplacé par la SCP Brouard-Daude) en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de cette société et René Ameline ont formé contredit le 5 juillet 2001 à l'encontre du jugement rendu le 29 mai 2001 par le Tribunal de commerce de Paris, qui accueillant l'exception d'incompétence soulevée par la société AMS-NEVE au profit de la juridiction anglaise de son domicile, s'est déclaré incompétent pour connaître du litige, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir et a condamné les demandeurs à payer à la société AMS-NEVE la somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les dépens. Ils prient la cour, faisant droit à leur recours, de dire le Tribunal de commrce de Paris compétent pour statuer sur le litige les opposant en qualité de crédit-preneur de matériels d'enregistrement au fabricant AMS-NEVE par application de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles compte tenu du lien contractuel existant entre eux du fait des mandats d'ester en justice qu'ils tiennent du crédit-bailleur. Ils invoquent également l'article 6-2 de la Convention, de même que les dispositions des articles 333 du nouveau Code de procédure civile et 14 du Code civil, qu'ils ne soutiennent cependant pas à l'audience.

La société AMS-NEVE demande à la cour de déclarer le contredit irrecevable comme tardif et subsidiairement mal fondé, aucun contrat de vente n'ayant été passé entre elle et la société KOOGAR et aucun élément ne pouvant faire échec à l'application de l'article 2 de la Convention de Bruxelles. Elle sollicite en toute hypothèse la condamnation in solidum de la société Koogar et de M. Ameline au paiement de la somme de 50 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.

SUR CE, LA COUR

Sur la recevabilité du contredit

Considérant qu'il est constant que la société Koogar, Me Lafont es qualités et M. Ameline ont formé contredit le 5 juillet 2001, soit plus de 15 jours après le prononcé du jugement déféré; qu'il ne résulte toutefois ni des mentions dudit jugement ni de quelqu'autre élément du dossier que les parties auraient été avisées de la date à laquelle le jugement serait rendu, les demandeurs justifiant pour leur part en avoir eu connaissance le 21juin 2001; que leur contredit, formé dans les 15 jours de cette date, est donc recevable.

Sur la compétence

Considérant qu'il résulte de l'assignation délivrée à AMS-NEVE que l'action intentée et les demandes formulées par les demandeurs ont pour fondement à titre principal l'article 1604 du Code civil et à titre subsidiaire l'article 1641 du même code ; qu'elles présupposent donc l'existence d'un contrat de vente entre AMS-NEVE et Koogar, prévoyant Paris comme lieu de livraison ou d'exécution, ce qui justifierait la compétence du tribunal saisi par application de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles ;

Mais considérant que KOOGAR n'a pas acquis les consoles arguées de vices, qu'elle a reçues en vertu de contrats de crédit-bail conclus avec la société Locafit s'agissant de la console A, avec la société GVD Leasing pour la console B;

Qu'en ce qui concerne la console A, la société AMS-NEVE n'a été que le fabricant du matériel, vendu par la société Siemens au crédit-bailleur Locafit et Koogar n'est pas fondée à opposer à la défenderesse la théorie française de la " chaîne des contrats " qui qualifie de contractuelle l'action du sous-acquéreur, la " matière contractuelle " au sens de l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles étant une notion autonome qui exclut le renvoi au droit interne de l'un ou l'autre des Etats concernés et qu'il faut interpréter en se référant aux objectifs de la convention, la Cour de Justice décidant que l'article 5-1 ne s'applique pas dans un litige opposant le sous-acquéreur d'une marchandise au fabricant dès lors que la notion de matière contractuelle ne saurait être comprise comme visant une situation dans laquelle il n'existe aucun engagement librement assumé d'une partie envers une autre ;

Que s'agissant de la console B, si la société AMS-NEVE a effectivement vendu ce matériel au crédit-bailleur GVD LEASING, KOOGAR ne peut arguer du mandat d'ester en justice qui lui est consenti par le crédit-bailleur dans le cadre de leurs rapports internes pour prétendre avoir un lien contractuel avec le vendeur du matériel ; que l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles n'est donc pas applicable;

Que c'est en vain que les demandeurs se prévalent de l'article 6 de la convention, leur action à l'encontre d'AMS-NEVE n'étant pas une action en garantie au sens de ce texte, et les procédures opposant Koogar à ses crédits- bailleurs ayant été jugées sans qu'AMS-NEVE y soit appelée;

Que c'est dès lors à juste titre que le tribunal a fait application de l'article 2 de la convention, et le contredit doit être rejeté;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société AMS-NEVE, à hauteur de la somme de 3 000 euro, les frais irrépétibles par elle exposés

Par ces motifs, LA COUR, Rejette le contredit; Renvoie en conséquence les parties à mieux se pourvoir; Condamne la société Koogar et René Ameline à payer à la société AMS-NEVE la somme de 3 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les frais du contredit.