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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. B, 31 mars 2006, n° 04-20374

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Gaches Chimie (SA), Gaches Chimie Spécialités (Sté)

Défendeur :

Lyondell Chimie France (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cadiot

Conseillers :

M. Astier, Mme Bourrel

Avoués :

SCP Cohen-Guedj, SCP de Saint Ferreol-Touboul

Avocats :

Mes Mimran Valensi, Toufany

T. com. Salon-de-Provence, prés., du 29 …

29 octobre 2004

Faits, procédure, moyens et prétentions des parties

La SA Gaches Chimie qui une activité de commerce de gros de produits chimiques a été liée à la société Lyondell de droit néerlandais et à la SNC Lyondell Chimie France par un contrat de distribution exclusif de 1993 à 2003, lequel a pris fin à l'initiative de la société Lyondell le 31 décembre 2003 après un préavis de neuf mois (courrier avec AR en date du 31 mars 2003).

Par courrier du 29 décembre 2003 (non produit) puis des 3 février 2004 et 15 mars 2004, la SA Gaches Chimie a demandé à la Lyondell Chimie France de lui communiquer ses tarifs, ce qu'a refusé cette dernière.

Par exploit du 18 juin 2004, la SAS Gaches Chimie Spécialités a assigné en référé la SNC Lyondell Chimie France afin qu'elle lui communique sous astreinte son barème de prix et ses conditions d'achat des produits chimiques qu'elle fabrique, comprenant ses conditions de règlement et les rabais, remises et ristournes consentis aux autres clients ou intermédiaires.

La SA Gaches Chimie est intervenue volontairement à la procédure.

Par déclaration du 4 novembre 2004, la SA Gaches Chimie et la SAS Gaches Chimie Spécialités ont relevé appel de l'ordonnance de référé en date du 29 octobre 2004 de Monsieur le Président du Tribunal de commerce de Salon-de-Provence :

- qui a déclaré irrecevable l'action de la société Gaches Chimie Spécialités, qui a déclaré recevable l'action de la SA Gaches Chimie,

- qui a dit n'y avoir lieu à application de l'article 873 du NCPC et dès lors, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

- qui a condamné la SA Gaches Chimie à payer à la SNC Lyondell Chimie France la somme de 800 euro au titre de l'article 700 du NCPC.

Par ses uniques conclusions en date du 1er mars 2005 qui sont tenues pour entièrement reprises, la société Gaches Chimie Spécialités demande à la cour :

Vu l'article 329 du NCPC;

Vu l'article 441-6 du Code de commerce,

Vu l'article 873 alinéa 1 du NCPC,

- de dire que la société Gaches Chimie SA a un intérêt à agir,

- de confirmer en conséquence l'ordonnance sur ce point,

Sur le fond,

- de constater la violation par la SA Lyondell Chimie France de l'obligation de communication de ses conditions tarifaires.

- de constater que ce défaut de communication constitue un trouble manifestement illicite,

- de constater la compétence du juge des référés,

- de réformer en conséquence l'ordonnance sur ce point,

- de condamner la société Lyondell Chimie France à lui communiquer son barème de prix et ses conditions d'achats des produits chimiques qu'elle fabrique, comprenant ses conditions de règlement et les rabais, remises et ristournes consentis aux autres clients, ou intermédiaires, et ce par lettre recommandée ou par signification,

- d'assortir cette condamnation d'une astreinte fixée à 2 000 euro par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

- de dire et juger que la cour se réserve la faculté de liquider ladite astreinte et d'en fixer une nouvelle,

- de condamner la société Lyondell à payer à la SA Gaches Chimie la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris ceux de l'exécution.

Au terme de ses conclusions récapitulatives en date du 28 décembre 2005 qui sont tenues pour entièrement reprises la SA Gaches Chimie reprend les demandes qu'elle avait conjointement formulées avec la SAS Gaches Chimie Spécialités dans les écritures en date du 1er mars 2005.

Par ses uniques conclusions en date du 24 octobre 2005, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SNC Lyondell Chimie demande à la cour:

* de statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel interjeté par la société Gaches Chimie France.

- de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise.

Et y ajoutant,

- de condamner la société Gaches Chimie France à lui verser la somme de 2 000 euro sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

L'instruction de l'affaire a été close le 24 janvier 2006.

Motifs

Attendu que l'appel a été interjeté dans le délai imparti, que sur la forme il est recevable.

Attendu qu'aucune des parties ne conteste que le litige oppose la SA Gaches Chimie et la SA Lyondell Chimie France.

Que l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action de la SAS Gaches Chimie Spécialités et a déclaré recevable l'action de la SA Gaches Chimie France.

Attendu que le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Que tout producteur, prestataire de service, grossiste ou importateur est tenu de communiquer à tout acheteur de produits ou demandeur de prestation de service pour une activité professionnelle qui en fait la demande ses conditions générales de vente ;

Que celles-ci constituent le socle de la négociation commerciale;

Qu'elles comprennent "les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réduction de prix, les conditions de règlement".

Attendu que la SNC Lyondell Chimie France est certes un industriel, mais celle-ci fabrique et donc produit des substances chimiques dérivées du pétrole.

Qu'il suit de là qu'en sa qualité de producteur, l'article L. 441-6 du Code de commerce lui est applicable.

Attendu que les dispositions de cet article s'appliquent en cas de refus de communication opposé à un acheteur, afin d'éviter toute discrimination entre les différents acheteurs d'une même catégorie.

Qu'en l'espèce, il résulte des courriers échangés entre les parties entre janvier 2004 et avril 2004, que la SA Gaches Chimie a sollicité les conditions générales de vente et les tarifs des produits de la SNC Lyondell Chimie France sans s'être présentée comme acheteur, c'est-à-dire sans indiquer les produits et les quantités qu'elle entendait acheter.

Que la SNC Lyondell Chimie France a envoyé immédiatement ses conditions générales de vente et a demandé de préciser ces deux points afin de pouvoir envoyer les tarifs adéquats (courrier du 23 janvier 2004).

Que la SA Gaches Chimie n'a pas répondu ou plus exactement a répondu de façon elliptique par référence aux anciennes relations commerciales, en précisant en outre qu'elle poursuivait sa demande en indemnisation pour rupture fautive.

Qu'eu égard à cette attitude, la SNC Lyondell a alors notifié à la SA Gaches Chimie qu'elle refusait de lui vendre directement ses produits et lui a demandé de s'approvisionner auprès de son nouveau distributeur la société Brenntag.

Que nonobstant son acceptation de se fournir auprès de cette société (courrier du 15 mars 2004) la SA Gaches a maintenu sa demande de tarif pour un certain nombre de produits.

Que par courrier du 19 avril 2004, la SNC Lyondell Chimie France a maintenu son refus de vente directe.

Qu'il suit de là que la SA Gaches Chimie pouvant s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs, la SNC Lyondell Chimie France dont il n'est pas démontré qu'elle occupe une position dominante sur le marché n'avait pas obligation de contracter avec la SA Gaches Chimie, aucune atteinte n'étant ici portée au principe de la libre concurrence.

Qu'en conséquence l'appelante n'a jamais eu la qualité d'acheteur.

Qu'elle ne peut donc prétendre obtenir communication des dits tarifs par application des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce.

Qu'il ne peut donc y avoir en l'espèce de trouble manifestement excessif et application de l'article 873 du NCPC.

Attendu qu'au surplus, le refus de satisfaire aux demandes d'un acheteur n'est illicite qu'à la condition que les demandes soient faites de bonne foi.

Qu'il résulte des faits ci-dessus exposés que la SA Gaches Chimie a formulé cette demande de tarif de mauvaise foi, eu égard à la rupture des relations commerciales entre les deux parties, à l'existence d'un successeur en qualité de distributeur des produits de la SNC Lyondell Chimie France et à sa connaissance des règles de distribution en la matière.

Attendu en conséquence que l'ordonnance entreprise sera confirmée;

Attendu que la SNC Lyondell Chimie France a dû engager des frais pour se défendre en appel qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge.

Que la SA Gaches Chimie sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euro au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens en sus de la somme déjà accordée de ce chef en première instance.

Que la SA Gaches Chimie qui succombe sera condamnée aux dépens.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, en matière de référé, en matière commerciale. Reçoit l'appel de la SA Gaches Chimie et de la SAS Gaches Chimie Spécialités. Confirme l'ordonnance entreprise et y ajoutant, Condamne la SA Gaches Chimie à payer à la SNC Lyondell Chimie France la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du NCPC. Condamne la SA Gaches Chimie aux dépens, ceux d'appel pouvant être recouvrés par la SCP de Saint Ferreol-Touboul, avoués qui en aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.