CJCE, 5e ch., 10 mars 1992, n° C-175/87
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Matsushita Electric Industrial Co. Ltd, Matsushita Electric Trading Co. Ltd
Défendeur :
Conseil des Communautés européennes, Commission des Communautés européennes, Committee of European Copier Manufacturers
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Joliet
Avocat général :
M. Mischo
Juges :
Sir Gordon Slynn, MM. Grévisse, Moitinho de Almeida, Zuleeg
Avocats :
Mes Forrester, Rabe, Schuette, Ehle, Schiller
LA COUR (cinquième chambre),
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 juin 1987, les sociétés Matsushita Electric Industrial Co. Ltd (ci-après "MEI") et Matsushita Electric Trading Co. Ltd (ci-après "MET"), toutes deux membres du groupe Matsushita, ayant leurs sièges à Osaka, ont, en vertu de l'article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, demandé l'annulation du règlement (CEE) n° 535-87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12, ci-après "règlement attaqué"), dans la mesure où il s'applique aux requérantes.
2 MEI comprend plusieurs départements qui fabriquent et vendent, chacun, une catégorie particulière de produits. La fabrication et la vente des photocopieurs à papier ordinaire (ci-après "PPC") est réalisée par l'Office Equipment Division (ci-après "OED"), assistée par l'Industrial Sales Division et les Industrial Sales Offices. Au Japon, l'OED vend les PPC, sous la marque "Panasonic", à 59 sociétés, affiliées à MEI ou à d'autres sociétés du groupe Matsushita (ci-après "sociétés de vente apparentées") qui, agissant en tant que distributeurs régionaux, vendent les PPC à des revendeurs indépendants.
3 MET est une société commerciale affiliée à MEI qui est responsable de l'exportation des PPC. Dans la Communauté, les PPC exportés par MET sont importés, entre autres, par les sociétés Panasonic Deutschland GmbH, Panasonic UK Ltd et Panasonic Industrial UK Ltd, Panasonic France SA et Panasonic Belgium NV, qui sont des filiales à part entière de MET ou de MEI établies respectivement en Allemagne, au Royaume-Uni, en France et en Belgique.
4 En ce qui concerne les ventes aux Original Equipment Manufacturers (fournisseurs sous leur propre marque de produits fabriqués par d'autres entreprises, ci-après "OEM"), les requérantes (ci-après "Matsushita") relèvent que, au cours de la période d'enquête, aucune vente n'a eu lieu sur le marché japonais. Par contre, dans la Communauté, Matsushita a vendu, au cours de cette période, des PPC aux OEM suivants: Roneo France, Roneo UK, Roneo Belgium et Olympia AG.
5 En juillet 1985, Matsushita a fait l'objet, avec d'autres producteurs japonais, d'une plainte déposée auprès de la Commission par le comité des fabricants européens d'appareils de copie, qui l'accusait de vendre ses produits dans la Communauté à des prix de dumping.
6 La procédure antidumping engagée par la Commission sur la base du règlement (CEE) n° 2176-84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 201, p. 1), a conduit à l'adoption du règlement (CEE) n° 2640-86 de la Commission, du 21 août 1986, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 239, p. 5). Le taux du droit antidumping provisoire a été fixé à 15,8 % du prix net franco frontière de la Communauté pour les importations de PPC fabriqués et exportés par Matsushita. Par le règlement attaqué, pris sur proposition de la Commission, le Conseil a ensuite fixé le droit antidumping définitif à 20 %.
7 Pour un plus ample exposé des faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.
8 A l'appui de son recours, Matsushita invoque plusieurs moyens tirés respectivement du calcul erroné de la valeur normale, de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l'exportation, de l'illégalité de l'article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n° 2176-84 du fait de son incompatibilité avec le code antidumping de 1979, de l'évaluation incorrecte du préjudice subi par l'industrie communautaire, d'une appréciation erronée des intérêts de la Communauté, du calcul erroné du droit antidumping et de la violation de l'obligation de motivation.
Sur le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale
9 Matsushita soutient, en premier lieu, que les institutions ont violé l'article 2, paragraphes 3 et 7, du règlement n° 2176-84 et commis une erreur manifeste d'appréciation en déterminant la valeur normale sur la base non pas des prix facturés par MEI aux 59 sociétés de vente apparentées, par l'intermédiaire desquelles elle commercialise ses produits au Japon, mais sur celle des prix facturés par ces sociétés aux revendeurs indépendants.
10 A cet égard, Matsushita fait valoir tout d'abord que, dans la mesure où elles considéraient que les ventes entre MEI et les sociétés de vente apparentées n'étaient pas intervenues au cours d'opérations commerciales normales, les institutions auraient dû, conformément à l'article 2, paragraphe 3, sous b), du règlement n° 2176-84, construire la valeur normale par addition des coûts, des frais de vente, des frais généraux et des dépenses administratives exposés par MEI, ainsi que d'une marge bénéficiaire raisonnable de MEI. Elle fait valoir ensuite que, en considérant que MEI formait, avec les sociétés de vente apparentées, une entité économique unique, les institutions ont méconnu, en premier lieu, la spécificité de l'organisation commerciale de Matsushita, et notamment le rôle important que remplit l'OED, avec l'assistance de l'Industrial Sales Division et des Industrial Sales Offices, dans le domaine des ventes, en second lieu, la différence entre les fonctions des sociétés de vente apparentées et celles des départements de vente internes et, enfin, la différence des frais supportés par ces sociétés et par MEI elle-même et que les institutions ont, à tort, inclue dans la valeur normale.
11 En ce qui concerne la détermination de la valeur normale sur la base des prix des sociétés de vente apparentées, il y a lieu de constater que, selon les pièces du dossier, Matsushita contrôle économiquement ces sociétés de distribution de ses produits au Japon et leur confie des tâches qui relèvent normalement d'un département de vente interne à l'organisation du producteur.
12 Comme la Cour l'a déjà relevé, notamment dans l'arrêt du 5 octobre 1988, Brother/Conseil, point 16 (250-85, Rec. p. 5683), le partage des activités de production et de celles de vente à l'intérieur d'un groupe formé par des sociétés juridiquement distinctes ne saurait rien enlever au fait qu'il s'agit d'une entité économique unique qui organise de cette manière un ensemble d'activités exercées, dans d'autres cas, par une entité qui est unique aussi du point de vue juridique.
13 Les arguments de Matsushita tendant à démontrer que Matsushita et ses sociétés de vente apparentées ne doivent pas être considérées comme formant une entité économique unique ne sauraient être retenus.
14 En effet, l'appréciation qui a amené les institutions à constater, en l'espèce, l'existence d'une entité économique unique ne saurait être modifiée du fait qu'un certain nombre de fonctions de vente ont pu être exercées par le producteur lui-même. Les institutions peuvent constater que le producteur forme avec une ou plusieurs sociétés distributrices contrôlées par lui une entité économique, alors même qu'il exerce directement certaines fonctions de vente. En outre, il ressort du dossier que ces fonctions, exercées en l'occurrence principalement par le département de MEI appelé l'OED, ne sont que des fonctions complémentaires à celles exercées par les sociétés de vente apparentées, aucune vente à des clients indépendants n'ayant été effectuée par MEI elle-même.
15 Il résulte de ce qui précède que l'ensemble des frais supportés par ces sociétés, de même que ceux supportés par MEI, qui concourent à la vente des PPC sur le marché intérieur et qui seraient manifestement englobés dans le prix de vente si la vente était effectuée par un département de vente interne du producteur, doit être inclus dans la valeur normale.
16 Dans ces conditions, le fait que les institutions se soient fondées sur les prix payés par le premier acheteur indépendant aux sociétés de vente apparentées est justifié, étant donné que ces prix peuvent, à juste titre, être considérés comme les prix réellement payés ou à payer au cours d'opérations commerciales normales, au sens de l'article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2176-84.
17 Il y a lieu de rappeler à cet égard que, comme la Cour l'a jugé dans l'arrêt du 5 octobre 1988, Canon/Conseil, point 11 (277-85 et 300-85, Rec. p. 5731), ces prix doivent être pris en considération en priorité pour établir la valeur normale, les autres solutions indiquées à l'article 2, paragraphe 3, sous b), i) et ii), du règlement n° 2176-84 n'étant que subsidiaires. Il convient, dès lors, d'admettre que, en l'espèce, il n'y avait pas lieu, pour le Conseil, de construire la valeur normale.
18 Matsushita soutient en second lieu que, lors du calcul de la valeur normale, les institutions auraient violé l'article 2, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2176-84, en augmentant le prix facturé par les sociétés de vente apparentées du montant du rabais pour la reprise de l'unité principale que ces sociétés accordent aux revendeurs, alors que ce rabais serait un rabais ordinaire.
19 Matsushita souligne que le rabais en cause est octroyé aux revendeurs, sans que la preuve d'une reprise doive être rapportée ou que le fait qu'elle ait eu lieu soit vérifié. Ce rabais interviendrait, par conséquent, indépendamment de la reprise d'un ancien PPC ou du retrait d'un tel PPC du marché. Matsushita ajoute que le Conseil n'aurait pas démontré que ce rabais correspond à une valeur payée par les revendeurs à Matsushita ou aux sociétés de vente apparentées.
20 A cet égard, il convient de constater tout d'abord qu'il ressort des débats menés devant la Cour que, en l'espèce, les rabais en cause correspondaient, dans 90 % des cas, à la reprise d'appareils usagés.
21 Il y a lieu de souligner, ensuite, que, selon le point 13 des considérants du règlement attaqué, le rabais de reprise accordé pour la reprise d'un ancien appareil à l'acheteur d'un nouvel appareil correspond à l'avantage que tire le producteur de la mise hors circuit des appareils repris et de l'absence d'un marché d'occasion de PPC au Japon. En effet, selon le Conseil, "la demande d'appareils nouveaux est maintenue au niveau le plus élevé possible, les prix étant, par voie de conséquence, également maintenus à un niveau plus élevé que ceux qui se pratiqueraient en présence d'un marché d'occasion" et "cette demande accrue stimule non seulement les prix, mais aussi les niveaux de production, ce qui devrait normalement se traduire par un renforcement des économies d'échelle et un accroissement proportionnel des marges bénéficiaires".
22 Dans ces conditions, les rabais en cause, qui correspondent à la valeur que le fabricant attribue au retrait des PPC usagés du marché, doivent être considérés comme une partie du prix réellement payé ou à payer par l'acheteur et doivent, dès lors, être pris en considération pour déterminer la valeur normale conformément à l'article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2176-84.
23 Matsushita ajoute toutefois que le Conseil aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en déterminant la valeur du rabais pour la reprise de l'unité principale sur la base d'une moyenne pondérée entre, d'une part, la valeur de ce rabais octroyé par Osaka NOA et, d'autre part, celle du rabais pour la reprise de l'unité principale ainsi que la valeur du rabais pour l'unité principale accordés aux revendeurs indépendants par d'autres sociétés de vente apparentées. Or, seule la valeur du rabais pour la reprise de l'unité principale calculée sur la base des ventes effectuées par Osaka NOA aurait dû être prise en considération, au motif que seul ce rabais représentait pour Matsushita la valeur correspondant au retrait du marché des appareils repris.
24 Cet argument ne saurait être accueilli. En effet, en ce qui concerne les sociétés de vente apparentées autres que Osaka NOA, le Conseil ne disposait d'aucun élément lui permettant de distinguer les deux rabais en cause. Par ailleurs, les chiffres relatifs à Osaka NOA n'étaient pas représentatifs, dès lors que les ventes de cette société ne s'élevaient qu'à environ 22,5 % du total des ventes effectuées au cours de la période d'enquête.
25 Matsushita fait valoir, en troisième lieu, que les institutions ont violé l'article 2, paragraphe 3, sous b), ii), du règlement n° 2176-84, en ce que le montant des frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux, inclus dans la valeur normale construite relative à des ventes à des acheteurs OEM, ne serait pas raisonnable.
26 A cet égard, Matsushita soutient en particulier qu'il résulte des éléments de preuve produits par elle et par les importateurs OEM que le Conseil n'aurait pas dû inclure dans le calcul de la valeur normale construite des coûts tels que, en premier lieu, les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux des sociétés de vente apparentées, étant donné que, si des ventes à des OEM avaient eu lieu sur le marché japonais, elles n'auraient pas été réalisées par ces sociétés, en second lieu, les frais de publicité ou de promotion, supportés par Matsushita pour les ventes de PPC sous sa propre marque, qu'elle n'aurait pas supportés dans le cas de ventes à des OEM et, enfin, la valeur du rabais pour la reprise de l'unité principale, que Matsushita n'aurait pas octroyé aux acheteurs OEM, en vue de leur permettre d'effectuer des reprises, si des ventes à des OEM avaient eu lieu sur le marché intérieur.
27 Matsushita soutient encore que l'ajustement effectué par le Conseil consistant à appliquer une marge bénéficiaire de 5 % à la valeur normale construite pour les OEM, inférieure au taux de 14,6 % appliqué aux ventes réalisées sous la marque des fabricants, est inadéquat et insuffisant pour couvrir les différences de coûts entre les ventes aux OEM et les ventes de PPC sous la propre marque de Matsushita.
28 Pour démontrer enfin que si des ventes à des OEM avaient eu lieu sur le marché japonais elles n'auraient pas été réalisées par ses sociétés de vente, Matsushita a produit deux accords conclus entre MEI et des clients OEM.
29 Sur ce dernier point, il y a lieu de constater que c'est à juste titre que les institutions n'ont pas pris ces accords en considération, Matsushita n'ayant révélé ni l'identité des acheteurs OEM ni la nature des produits en question et que, de ce fait, l'importance éventuelle de ces accords n'a pu être évaluée.
30 S'agissant de l'argument selon lequel, dans l'hypothèse de ventes à des OEM au Japon, celles-ci auraient eu lieu sans l'intervention des sociétés de vente apparentées, il convient de rappeler que, eu égard aux considérations développées ci-avant, ces sociétés remplissent les fonctions d'un département de vente interne à l'organisation du producteur et que, dès lors, les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux de ces sociétés devaient être inclus dans la valeur normale.
31 S'agissant des éléments de preuve relatifs aux frais de publicité ou de promotion invoqués par Matsushita, il y a lieu de constater que ces éléments ne concernaient que des ventes à des OEM sur le marché communautaire.
32 Or, il résulte de la jurisprudence de la Cour (voir notamment arrêt du 5 octobre 1988, 250-85, précité, point 18) que la construction de la valeur normale vise à déterminer le prix de vente d'un produit tel qu'il serait si ce produit était vendu dans son pays d'origine ou d'exportation, et que, par conséquent, ce sont les frais afférents aux ventes sur le marché intérieur qui doivent être pris en considération, même si ce produit n'y est pas vendu mais est vendu à l'exportation. Dès lors, il convient de reconnaître que les institutions ont, à juste titre, refusé d'utiliser des données relatives à un autre marché que le marché intérieur du pays d'origine ou d'exportation.
33 S'agissant enfin du rabais pour la reprise de l'unité principale, il suffit de constater, ainsi que Matsushita l'affirme, que ce rabais n'aurait pas été octroyé aux OEM si des ventes à celles-ci avaient eu lieu sur le marché intérieur et que, dès lors, le prix serait d'autant plus élevé. Il convenait, par conséquent, d'inclure ce rabais dans la valeur normale.
34 Il convient enfin de rappeler, en ce qui concerne l'argument selon lequel la marge bénéficiaire de 5 % prise en compte dans le calcul de la valeur normale construite pour les OEM serait insuffisante, que, statuant sur un argument similaire dirigé contre le même règlement du Conseil, la Cour a, dans l'arrêt du 14 mars 1990, Nashua Corporation/Commission et Conseil, point 33 (C-133-87 et C-150-87, Rec. p. I-719), constaté que les institutions avaient pris en considération la différence entre les coûts et les bénéfices réalisés dans le cadre des ventes aux OEM et ceux correspondant aux autres ventes. Toutefois, compte tenu de l'impossibilité dans laquelle les institutions se sont trouvées d'évaluer cette différence avec précision dans le cadre de la construction de la valeur normale des OEM, elles ont fixé la marge bénéficiaire à 5 % et non pas au taux moyen de celle-ci, estimé à 14,6 %, qu'elles ont appliqué aux ventes réalisées sous la marque des fabricants.
35 Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné de la valeur normale doit être rejeté.
Sur le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l'exportation
36 Matsushita fait valoir, subsidiairement à son premier moyen d'annulation, que le Conseil a violé l'article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement n° 2176-84, en ce qu'il n'a pas accordé d'ajustements supplémentaires à la valeur normale, au titre des différences de stade commercial, après que les autres ajustements opérés conformément à l'article 2, paragraphe 10, du même règlement aient été effectués.
37 Ces différences résulteraient du fait que le prix à l'exportation comprenait les coûts supportés par Matsushita pour mettre les PPC à la disposition des importateurs dans son établissement, alors que la valeur normale comprenait non seulement les frais supportés par Matsushita pour les ventes aux sociétés de vente apparentées, mais également les frais supportés par ces dernières pour mettre les PPC à la disposition des revendeurs dans leurs établissements. Dans ces conditions, le Conseil aurait procédé à une comparaison erronée entre un prix à l'exportation établi au stade sortie usine et une valeur normale correspondant au stade de la distribution régionale.
38 Il convient d'observer, à cet égard, que la valeur normale et le prix à l'exportation ont été établis tous deux sur la base du prix auquel le produit a été vendu pour la première fois à un client indépendant.
39 Il y a lieu de souligner ensuite que Matsushita n'a pas apporté la preuve que les ventes, sur la base desquelles la valeur normale et les prix à l'exportation ont été déterminés, concernaient des catégories différentes d'acheteurs et se situaient, par conséquent, à des stades commerciaux différents de nature à justifier les ajustements demandés. Dès lors, les institutions n'étaient pas tenues de les accorder.
40 Le moyen tiré de la comparaison erronée entre la valeur normale et le prix à l'exportation doit, dès lors, être rejeté.
Sur le moyen tiré de l'incompatibilité de l'article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n° 2176-84 avec le code antidumping du GATT de 1979
41 Matsushita soutient que, dans le cas où l'article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n° 2176-84 devrait être interprété comme autorisant le Conseil à refuser de procéder à des ajustements alors que la valeur normale et le prix à l'exportation ne sont pas comparables quant au stade commercial, cette disposition est incompatible avec l'article 2, paragraphe 6, du code antidumping de 1979 qui exige que la comparaison entre ces deux éléments soit effectuée au même stade commercial.
42 A cet égard, il suffit de relever que l'article 2, paragraphe 10, sous c), ne doit pas être interprété comme autorisant les institutions à refuser des ajustements pour tenir compte des différences de stade commercial, qui seraient exigés par le code antidumping. Toutefois, Matsushita n'a pas apporté la preuve que la valeur normale et le prix à l'exportation n'avaient pas été comparés au même stade commercial.
43 Le moyen tiré de l'incompatibilité de l'article 2, paragraphe 10, sous c), du règlement n° 2176-84 avec le code antidumping du GATT de 1979 doit, dès lors, être rejeté.
Sur les moyens tirés de l'évaluation incorrecte du préjudice subi par l'industrie communautaire
A - Sur l'appréciation erronée de la similarité des PPC
44 Il convient de souligner à titre liminaire que les institutions ont conclu que tous les PPC, au moins ceux relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu'au segment 5 du classement Dataquest, devaient être considérés comme produits similaires, les appareils relevant du segment 6, pour lesquels il n'y a pas eu de production communautaire, ayant été exclus de l'enquête (point 31 des considérants du règlement attaqué).
45 Il y a lieu de constater à cet égard que, selon les classements des PPC réalisés par Info-Markt et Dataquest, auxquels les institutions se sont référées dans la présente affaire, le marché des PPC comprend différents segments définis en fonction des caractéristiques techniques et des performances de ces appareils. Comme l'indique toutefois le point 31 des considérants du règlement attaqué, au cours de la période de référence, les producteurs japonais ont exporté des PPC relevant uniquement du segment des photocopieurs personnels et des segments 1 à 4.
46 Matsushita soutient que c'est à tort que les institutions ont ignoré la segmentation du marché des PPC et considéré tous ces appareils comme des produits similaires au sens de l'article 2, paragraphe 12, du règlement n° 2176-84. Pour démontrer l'absence de similitude entre les PPC relevant de segments adjacents, Matsushita observe que l'acheteur d'un PPC du segment 1 n'achèterait pas un PPC personnel au motif que le coût par photocopie et l'utilité relative de ce dernier diminueraient à mesure que le volume de copies augmente.
47 Matsushita fait valoir par ailleurs qu'il n'existe aucune similitude entre les PPC relevant de segments dits non-adjacents. A cet égard, elle se réfère, tout d'abord, à la décision 88-88-CEE de la Commission, du 22 décembre 1987, relative à l'entreprise commune Olivetti/Canon (JO L 52, p. 51), selon laquelle les PPC se répartiraient en trois marchés distincts, à savoir celui de la gamme inférieure (allant des PPC personnels jusqu'au segment 2 de la classification Dataquest), celui de la gamme moyenne (segments 3 et 4) et celui de la gamme supérieure (segments 4 à 6). Elle souligne, ensuite, que la segmentation du marché, ainsi admise par la Commission, résulterait de la concurrence qui s'opère entre les PPC relevant d'un même segment et qui serait beaucoup plus vive qu'entre PPC de segments différents.
48 Il convient de relever à cet égard que, aux termes de l'article 4, paragraphe 1, du règlement n° 2176-84, "Il n'est déterminé de préjudice que si les importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions causent un préjudice, c'est-à-dire causent ou menacent de causer, par les effets du dumping ou de la subvention, un préjudice important à une production établie de la Communauté ou retardent sensiblement l'établissement de cette production". En vertu du paragraphe 4 du même article, "L'effet des importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions doit être évalué par rapport à la production du produit similaire dans la Communauté ...". En outre, l'article 2, paragraphe 12, de ce même règlement de base dispose que "on entend par produit similaire un produit identique, c'est-à-dire semblable à tous égards au produit considéré, ou, en l'absence d'un tel produit, un autre produit qui présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré".
49 Sur la base des études de marché établies par Info-Markt et Dataquest, les institutions ont conclu que si tous les PPC n'étaient pas similaires, à tout le moins les PPC relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu'à ceux du segment 5 du classement Dataquest, devaient être considérés comme tels. En effet, il résulte du dossier que, dans les études susmentionnées, les segments n'ont pas été clairement délimités, dans la mesure où, d'une part, certains PPC peuvent être classés dans plusieurs segments différents, compte tenu de certaines de leurs caractéristiques et données techniques, et où, d'autre part, il existe une concurrence tant entre les PPC relevant de segments adjacents qu'entre les PPC classés dans les différents segments mentionnés ci-avant.
50 Les différences entre des PPC relevant d'un seul ou de différents segments, relatives notamment à leur vitesse et à leur capacité de copie, ne sauraient suffire à établir que ces PPC n'ont pas de fonctions identiques ou ne répondent pas aux mêmes besoins. Comme l'indique d'ailleurs le point 30, troisième alinéa, des considérants du règlement attaqué, le fait que le choix des clients peut être déterminé en fonction de facteurs tenant notamment à la décision de centraliser ou de décentraliser leurs installations de photocopie confirme l'existence d'une concurrence entre appareils de différentes catégories.
51 Il y a lieu de souligner que, compte tenu des chevauchements entre les différents segments, mentionnés ci-avant, la vitesse de copie ne saurait être retenue comme un élément de distinction des PPC. Il résulte, en effet, des pièces du dossier que, notamment, les PPC qui produisent entre 40 et 45 copies par minute peuvent appartenir soit au segment 3 (allant de 31 à 45 copies) soit au segment 4 (allant de 40 à 75 copies). Il en va de même pour les photocopieurs personnels qui produisent jusqu'à douze copies par minute, alors que ceux des segments 1a et 1b produisent respectivement jusqu'à 20 et de 15 à 20 copies par minute.
52 En ce qui concerne l'argument de Matsushita tiré de la définition des marchés en cause telle qu'elle résulte de la décision 88-88, il convient d'admettre, avec la Commission, que cette définition n'exclut pas une certaine interchangeabilité entre les PPC relevant des trois segments en cause ni le fait que celle-ci soit moindre que celle qui s'opère entre les PPC relevant d'un même segment. Il résulte, en effet, des considérations qui précèdent que les segments définis dans cette décision, comme ceux résultant des classifications Dataquest et Info-Markt, ne se traduisent pas en des marchés distincts.
53 Compte tenu de ce qui précède, il convient de constater que Matsushita n'a pas établi que les institutions avaient commis une erreur d'appréciation en considérant que, en l'espèce, "la production du produit similaire dans la Communauté", au sens de l'article 4, paragraphe 4, du règlement n° 2176-84, était celle de l'ensemble des PPC, tous segments confondus.
54 Le moyen tiré de l'appréciation erronée de la similarité des produits doit, dès lors, être rejeté.
B - Sur la définition erronée de la production de la Communauté
55 Matsushita fait valoir que, compte tenu des nombreuses importations en provenance du Japon effectuées par Rank Xerox, Océ et Olivetti, les institutions n'auraient pas dû intégrer ces sociétés au nombre des producteurs formant la "production de la Communauté", au sens de l'article 4, paragraphe 5, du règlement n° 2176-84, et modifier ainsi la position qu'elles avaient adoptée dans plusieurs affaires antérieures. De l'avis de Matsushita, aucun producteur de la Communauté n'était en mesure d'alléguer l'existence d'un préjudice résultant des importations de petits photocopieurs en provenance du Japon. En tout état de cause, la production européenne dans ce domaine était, selon Matsushita, faible ou inexistante.
56 En ce qui concerne Rank Xerox, Matsushita rappelle tout d'abord que cette entreprise participe à raison de 50 % au capital de Fuji Xerox, société japonaise auprès de laquelle, d'une part, elle s'est procuré de grandes quantités de PPC, entièrement mis au point et portant l'étiquette Rank Xerox, des "kits" et des composants et, d'autre part, elle a obtenu une assistance technique et une aide à la conception. En achetant dans ces conditions des PPC à Fuji Xerox, Rank Xerox avait tout à la fois la possibilité de réaliser un bénéfice et d'agir sur le prix de transfert des appareils en cause. L'inclusion de Rank Xerox dans la catégorie des producteurs de la Communauté ne pouvait dès lors que fausser l'appréciation du préjudice allégué.
57 Il convient de relever, à cet égard, que, statuant sur le même argument alors invoqué par Gestetner, la Cour a, dans l'arrêt du 14 mars 1990, Gestetner/Conseil et Commission, point 57 (C-156-87, Rec. p. I-781), relevé que, en ce qui concerne l'importation de PPC provenant du Japon et fournis par Fuji Xerox, les institutions avaient considéré que Rank Xerox n'avait pas apporté la preuve de ce qu'elle avait été conduite à acheter les appareils pour des raisons d'autoprotection. Il s'agissait, selon des renseignements obtenus, d'une décision de gestion prise dans le cadre du groupe Xerox. Toutefois, le volume de ces importations a été minime par rapport à toute la gamme de PPC produits par Rank Xerox dans la Communauté, ainsi que par rapport à l'ensemble du marché communautaire (1 %), et les prix de revente ont été identiques à ceux des appareils correspondants produits par Rank Xerox.
58 Matsushita conteste ensuite le fait que la production de Rank Xerox ait été regardée comme faisant partie de la production communautaire, alors qu'une part de son activité consistait en réalité à assembler ou à fabriquer des produits, dans la Communauté, à partir de pièces ou matériaux originaires du Japon. Elle fait valoir, à cet égard, que l'article 13, paragraphe 10, ajouté au texte du règlement n° 2176-84 par le règlement (CEE) n° 1761-87 du Conseil, du 22 juin 1987 (JO L 167, p. 9), dit "règlement tournevis", prévoit la possibilité d'instituer des droits antidumping dans ce type de situation. Elle estime que, en soumettant au champ d'application de cette disposition exclusivement les sociétés installées au Japon et en comptant, par ailleurs, les sociétés établies dans la Communauté, qui se livrent aux mêmes activités "tournevis", au nombre des producteurs communautaires, les institutions traiteraient différemment des situations similaires.
59 Cet argument ne peut être retenu. Il convient en effet de relever, à cet égard, que l'article 13, paragraphe 10, du règlement n° 2176-84 a été introduit à une date postérieure à celle de l'adoption du règlement attaqué et concerne l'institution d'un droit antidumping sur les produits assemblés ou fabriqués dans la Communauté à partir de pièces ou de matériaux originaires du ou des pays d'exportation en cause et non pas la définition de la production de la Communauté.
60 En ce qui concerne Océ et Olivetti, également importateurs de PPC du Japon, mais en provenance de fournisseurs non apparentés, Matsushita fait valoir que leurs importations représentaient 35 % à 40 % de leurs ventes et de leurs locations de machines dans la Communauté et qu'elles auraient de ce fait également dû être exclues de la production de la Communauté.
61 Cet argument ne saurait être accueilli. En effet, comme la Cour l'a jugé dans l'arrêt du 14 mars 1990, C-156-87, précité, point 47, Olivetti et Océ importaient des PPC en provenance du Japon afin de pouvoir offrir à leurs clients une gamme complète de modèles. Les PPC, relevant des segments 1 et 2, étaient vendus à des prix supérieurs à ceux de leurs fournisseurs et représentaient entre 35 % et 40 % des ventes et locations de ces nouveaux appareils sur le marché, au cours de la période comprise entre 1981 et juillet 1985. Les tentatives de ces deux producteurs visant à mettre au point et à lancer sur le marché une gamme complète de modèles ont cependant échoué du fait de la dépression des prix du marché imposée par les importations japonaises.
62 L'argument de Matsushita tiré de la pratique antérieure des institutions ne saurait pas davantage être accueilli. En effet, ainsi que la Cour l'a jugé dans le même arrêt, C-156-87, précité, point 43, pour l'application de l'article 4 du règlement n° 2176-84, il appartient aux institutions, dans l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, d'examiner si elles doivent exclure de la production communautaire les producteurs ayant des liens avec les exportateurs ou les importateurs ou qui sont eux-mêmes importateurs du produit faisant l'objet d'un dumping. Ce pouvoir d'appréciation doit être exercé cas par cas en fonction de tous les faits pertinents.
63 Or, il y a lieu de constater que, selon les pièces du dossier et les débats menés devant la Cour, c'est dans l'exercice d'un tel pouvoir d'appréciation que, dans chaque cas mentionné par la requérante, un producteur communautaire a été exclu ou inclus dans la production de la Communauté.
64 En ce qui concerne enfin l'argument de Matsushita selon lequel la production communautaire dans le domaine des petits photocopieurs serait faible ou inexistante, il suffit de constater que, en l'espèce, les institutions ont correctement considéré comme produit similaire l'ensemble des PPC relevant de segments adjacents, depuis le photocopieur personnel jusqu'à ceux du segment 5 du classement Dataquest, et que, dès lors, la production de la Communauté dans le seul domaine des petits photocopieurs ne saurait être prise en considération pour la définition de la production de la Communauté.
65 Compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de la définition erronée de la production de la Communauté n'est pas fondé et doit, dès lors, être rejeté.
C - Sur l'appréciation erronée des facteurs du préjudice
66 Matsushita conteste l'analyse des différents facteurs à laquelle les institutions ont procédé pour évaluer le préjudice subi par la production communautaire, de même que l'existence même du préjudice ainsi défini qui, selon Matsushita, résulterait non pas des importations en cause, mais de la politique suivie par les entreprises communautaires et de l'infériorité de leurs appareils par rapport aux PPC japonais.
67 A cet égard, il convient de se référer aux dispositions du règlement n° 2176-84 qui indiquent les modalités à suivre pour déterminer le préjudice, et notamment à l'article 4, paragraphe 1, de ce règlement. En vertu de cette disposition, d'une part, il n'y a de préjudice que si les importations qui font objet d'un dumping causent ou menacent de causer, par les effets du dumping, un préjudice important à une production établie dans la Communauté et, d'autre part, les préjudices causés par d'autres facteurs ne doivent pas être attribués aux importations qui font l'objet d'un dumping.
68 L'article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2176-84 énonce les facteurs sur lesquels doit porter l'examen du préjudice, à savoir a) le volume des importations faisant l'objet d'un dumping, b) le prix de ces importations et c) leur impact sur la production concernée. Cette même disposition précise toutefois que ni un seul ni même plusieurs de ces facteurs ne constituent nécessairement une base de jugement déterminante.
69 C'est donc dans l'exercice de leur pouvoir d'appréciation que les institutions sont appelées à analyser les facteurs susmentionnés et à retenir parmi les éléments d'appréciation, énumérés à cette fin dans la disposition précitée, ceux qu'elles jugent pertinents dans chaque cas d'espèce. Dans la présente affaire, les institutions ont procédé à un examen détaillé des facteurs mentionnés par cette disposition.
70 S'agissant du volume des importations japonaises, il y a lieu d'observer que, si les ventes et locations de nouveaux appareils fabriqués par les producteurs communautaires ont augmenté de 74 % entre 1981 et 1984, leur part de marché est tombée de 21 % en 1981 à 11 %, au cours de la période de référence, alors que la part de marché communautaire détenue par les producteurs japonais est passée au cours de la même période de 70 % à 78 %. Les institutions ont dès lors pu considérer que les importations japonaises, qui ont augmenté de plus de 120 % entre 1981 et 1984, avaient empêché une évolution plus favorable des ventes et locations de PPC par les entreprises communautaires.
71 En ce qui concerne la sous-cotation des prix auxquels ces produits ont été importés, il suffit de constater que, malgré les caractéristiques et performances supplémentaires que présentaient les PPC fabriqués au Japon par rapport aux PPC comparables fabriqués dans la Communauté, leurs prix étaient égaux ou même inférieurs à ceux des PPC des producteurs communautaires (points 44, 47 et 49 des considérants du règlement attaqué).
72 Pour ce qui est de l'impact que les importations à bas prix ont eu sur la production concernée, il y a lieu de relever, outre la diminution sensible des parts de marché détenues par les producteurs communautaires, mentionnée ci-avant, que la rentabilité des activités des producteurs communautaires concernés a également baissé au cours de la période de référence.
73 Il convient de souligner, à cet égard, que les institutions n'étaient pas tenues, comme le prétend Matsushita, de prendre en considération les bénéfices ou pertes que les producteurs communautaires ont réalisés sur l'ensemble de leurs activités dans le domaine de la photocopie. En effet, conformément à l'article 4, paragraphe 4, du règlement n° 2176-84, l'effet des importations qui font l'objet d'un dumping doit être évalué par rapport à la production du produit similaire dans la Communauté. Dès lors, c'est à juste titre que, tenant compte de cette production, telle que définie ci-avant, le Conseil a évalué l'incidence des importations japonaises sur la rentabilité des producteurs communautaires.
74 Matsushita allègue par ailleurs que l'évolution du marché européen des photocopieurs démontrerait que les institutions ont, à tort, attribué aux importations en cause un préjudice qui résulterait d'autres facteurs, et en particulier de la décision des entreprises communautaires de ne pas entreprendre la fabrication des petits photocopieurs, eu égard aux coûts et aux difficultés technologiques qu'aurait impliqué le développement de ces nouveaux modèles.
75 Cet argument ne saurait être accueilli. Ainsi, en ce qui concerne Rank Xerox, le Conseil expose au point 85 des considérants du règlement attaqué que, à partir de 1982/1983, les difficultés rencontrées par cette société pour développer un nouveau modèle ont été résolues et qu'un tel modèle a effectivement été lancé sur le marché. Dès lors, le Conseil n'a commis aucune erreur d'appréciation lorsqu'il a considéré que de telles difficultés étaient étrangères au préjudice causé par ailleurs à Rank Xerox du fait des importations en provenance du Japon.
76 En ce qui concerne Océ et Olivetti, il y a lieu de rappeler, comme cela a été indiqué ci-avant (point 61), que les tentatives de ces deux producteurs visant à mettre au point et à lancer sur le marché une gamme complète de modèles ont échoué du fait de la dépression des prix du marché entraînée par les importations japonaises.
77 S'agissant enfin de l'argumentation relative à la prétendue supériorité des PPC japonais, à la gamme de leurs appareils, à leur qualité et fiabilité, il y a lieu de relever qu'aucun élément de preuve n'a été apporté à cet égard.
78 A la lumière des considérations qui précèdent, le moyen tiré de l'appréciation erronée des facteurs du préjudice doit être rejeté.
Sur le moyen tiré d'une appréciation erronée des intérêts de la Communauté
79 Matsushita soutient que l'évaluation des intérêts de la Communauté a été faussée du fait que Rank Xerox, Océ et Olivetti, qui dépendaient et tiraient bénéfice des importations en provenance du Japon, ont été considérées comme faisant partie de l'ensemble des producteurs formant la production de la Communauté et que les institutions n'ont pas comparé leur intérêt avec celui des importateurs OEM, tels que Gestetner, Agfa-Gevaert e.a. A cet égard, elle fait valoir que Rank Xerox, Océ et Olivetti ne détenaient, avec Tetras, que 3 % du marché communautaire des petits photocopieurs, alors que les importateurs OEM précités, qui employaient un nombre très élevé de personnes, ont été très actifs dans le domaine des petits photocopieurs.
80 Matsushita considère que, vu le caractère très limité de la production de la Communauté et la gamme très réduite des produits offerts dans le domaine des petits photocopieurs, l'appréciation portée par les institutions sur la question de savoir si les intérêts de la Communauté nécessitaient une action communautaire était incorrecte, dans la mesure où, en décidant de protéger les fabricants d'une quantité très réduite de produits, elles n'ont pas tenu compte des conséquences qui en résulteraient.
81 Il convient de rappeler que, comme la Cour l'a jugé notamment dans l'arrêt du 14 mars 1990, C-156-87, précité, point 63, la question de savoir si les intérêts de la Communauté nécessitent une action communautaire suppose l'appréciation de situations économiques complexes et que le contrôle juridictionnel d'une telle appréciation doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l'exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l'absence d'erreur manifeste dans l'appréciation de ces faits ou de l'absence de détournement de pouvoir.
82 Il convient de relever à cet égard que, selon les institutions, en l'absence de droits antidumping il serait douteux qu'une production communautaire et indépendante de PPC puisse persister, alors que celle-ci est nécessaire au maintien et au développement des techniques requises pour la fabrication des produits de reprographie ainsi qu'au maintien d'un grand nombre d'emplois. Cette préoccupation résultait notamment du rachat, au cours de l'enquête, de l'entreprise de l'un des producteurs communautaires par un fabricant japonais. Les institutions ont donc considéré que cette nécessité de protection de l'industrie communautaire était plus importante que la protection des intérêts immédiats des consommateurs, comme le précise le point 99 des considérants du règlement attaqué, et que la protection des importateurs.
83 Les institutions n'ayant commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des intérêts de la Communauté, le moyen invoqué à cet égard doit être rejeté.
Sur le moyen tiré du calcul erroné du droit antidumping
84 Matsushita fait enfin valoir que, en fixant les droits antidumping définitifs à 20 % du prix net franco frontière, les institutions ont violé l'article 13, paragraphe 3, du règlement n° 2176-84, selon lequel le montant de ces droits ne peut être supérieur à ce qui est nécessaire pour faire disparaître le préjudice.
85 A cet égard, Matsushita affirme, tout d'abord, que c'est à tort que la Commission a considéré qu'une marge bénéficiaire de 12 % était nécessaire pour assurer un bénéfice ou un revenu raisonnable dans le cadre des ventes des PPC. Cette marge serait manifestement excessive, au motif que les petits photocopieurs sont toujours vendus avec un bénéfice inférieur à celui résultant de l'ensemble des activités liées à la vente des PPC. Elle relève ensuite que le droit a été calculé afin de supprimer la sous-cotation des prix qui, pour les raisons déjà exposées, n'existerait pas. Matsushita estime enfin que la description du mode de calcul du droit contenue au point 107 des considérants du règlement attaqué n'est pas claire.
86 En ce qui concerne l'argument selon lequel la marge bénéficiaire de 12 % serait excessive, il convient d'observer que, selon le point 103 des considérants du règlement attaqué, le taux retenu devait permettre d'assurer à l'ensemble des producteurs communautaires un rendement raisonnable, proportionné au risque correspondant à l'investissement pour la mise au point de nouveaux produits. A cet égard, les institutions ont considéré qu'il n'était pas approprié de prendre en considération les bénéfices réalisés sur les fournitures ou lors d'autres activités relatives aux photocopieurs.
87 Il ne résulte ni du dossier ni des débats menés devant la Cour que les institutions ont incorrectement exercé leur pouvoir d'appréciation. Matsushita n'a d'ailleurs pas démontré dans quelle mesure une marge inférieure pour les petits photocopieurs aurait eu une incidence sur le montant du droit antidumping institué.
88 L'argument tiré du fait que la sous-cotation des prix, que le droit devait supprimer, n'existait pas ne peut pas être accueilli. En effet, comme l'indique le point 110 des considérants du règlement attaqué, les exportateurs japonais ont indubitablement procédé à une certaine forme de sous-cotation de leurs prix (point 71), mais, compte tenu de l'impossibilité de la quantifier, aucun élément qui en tienne compte n'a été inclus dans les calculs du droit antidumping.
89 S'agissant enfin de la description du mode de calcul du droit, il suffit de constater que le point 107 des considérants du règlement attaqué expose d'une manière circonstanciée l'ensemble des opérations du calcul effectué par les institutions et que Matsushita n'a pas précisé les raisons pour lesquelles celles-ci n'étaient pas compréhensibles.
90 Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné du droit antidumping doit être rejeté.
Sur les moyens relatifs à la motivation de la décision attaquée
91 Matsushita estime que le Conseil a violé l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article 190 du traité CEE, en ce que la motivation présentée pour la détermination de la valeur normale serait insuffisante, voire inexistante. Ainsi, en premier lieu, sa décision de considérer les sociétés apparentées comme un élément de la société Matsushita aux fins du calcul de la valeur normale ne saurait justifier que le Conseil n'ait pas appliqué les dispositions prévues à l'article 2, paragraphes 3 et 7, du règlement n° 2176-84, en second lieu, sa décision d'inclure le rabais pour la reprise de l'unité principale dans la valeur normale ne saurait être justifiée par le fait que Matsushita a peut-être bénéficié involontairement de l'avantage résultant de l'absence d'un marché d'occasion, et, enfin, la décision du Conseil d'inclure certains coûts et la valeur du rabais pour la reprise de l'unité principale dans la valeur normale construite pour les ventes aux OEM n'aurait pas été motivée.
92 Le premier argument doit être rejeté au motif que le Conseil a correctement considéré que Matsushita et ses sociétés de vente constituaient une entité économique unique. En outre, l'exigence de motivation posée par l'article 190 du traité a été satisfaite par les motifs exposés au point 7 des considérants du règlement n° 2640-86, confirmé au point 6 des considérants du règlement attaqué, qui indiquent clairement les raisons pour lesquelles les institutions ont utilisé les prix pratiqués à l'égard d'acheteurs indépendants pour déterminer la valeur normale et ont refusé d'appliquer l'article 2, paragraphe 7, du règlement n° 2176-84.
93 Il en va de même en ce qui concerne le deuxième argument invoqué par Matsushita. En effet, il résulte du point 13 des considérants du règlement attaqué que, en l'espèce, l'absence d'un marché d'occasion démontre que le retrait du marché des appareils repris avait lieu dans la grande majorité des cas et que, par conséquent, Matsushita bénéficiait ainsi des mêmes avantages que les autres producteurs.
94 S'agissant enfin du troisième argument, il ressort du point 11 des considérants du règlement attaqué que, vu l'absence de ventes à des acheteurs OEM sur le marché japonais et compte tenu de l'impossibilité d'évaluer avec précision les différences de coûts ou de bénéfices réalisés dans le cadre des ventes aux OEM et ceux correspondant aux autres ventes, les institutions ont, dans le cadre de la construction de la valeur normale des OEM, fixé la marge bénéficiaire à 5 %.
95 Il résulte des considérations qui précèdent que les moyens relatifs à la motivation de la décision attaquée doivent être rejetés et, partant, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
96 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La requérante ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux de la partie intervenante CECOM qui a conclu en ce sens. La Commission supportera, conformément à l'article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, ses propres dépens.
Par ces motifs,
LA COUR (cinquième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) La requérante est condamnée aux dépens, y compris ceux exposés par la partie intervenante CECOM.