CJCE, 14 mars 1990, n° C-133/87
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Nashua Corporation e.a., Nashua Corporation, NV Nashua Belgium (SA), Nashua Copycat Limited, Nashua Copygraph GmbH, Nashua Denmark A/S, Nashua France (SA), Nashua Nederland BV, Nashua International Limited, Nashua Reprographics SpA, Nashua España (SA)
Défendeur :
Commission des Communautés européennes , Conseil des Communautés européennes, Committee of European Copier Manufacturers
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Due
Présidents de chambre :
Sir Gordon Slynn, MM. Schockweiler, Zuleeg
Avocat général :
M. Mischo
Juges :
MM. Koopmans, Mancini, Joliet, O'Higgins, Moitinho de Almeida, Rodríguez Iglesias, Grévisse
Avocats :
Mes Hutchings, Pheasant, Rabe, Schuette, Ehle, Schiller
LA COUR,
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 27 avril 1987, Nashua Corporation, société ayant son siège social à New Hampshire, a, en vertu de l'article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, demandé l'annulation de la décision par laquelle la Commission a rejeté l'engagement que la requérante avait offert dans le cadre de la procédure antidumping relative à l'importation de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (affaire C-133-87).
2 Par requête déposée au greffe de la Cour le 13 mai 1987, Nashua Corporation et ses filiales, NV Nashua Belgium SA, Nashua Copycat Limited, Nashua Copygraph GmbH, Nashua Denmark A/S, Nashua France SA, Nashua Nederland BV, Nashua International Limited, Nashua Reprographics SpA et Nashua España SA, (ci-après indiquées sous la dénomination collective "Nashua "), ont, en vertu de l'article 173, deuxième alinéa, du traité, demandé l'annulation du règlement (CEE) n° 535-87 du Conseil, du 23 février 1987, instituant des droits antidumping définitifs sur les importations de photocopieurs à papier ordinaire originaires du Japon (JO L 54, p. 12, ci-après "règlement attaqué "), dans la mesure où il concerne Nashua (affaire C-150-87).
3 Nashua Corporation est un Original equipment manufacturer (ci-après "OEM "), c'est-à-dire le fournisseur sous sa propre marque de produits fabriqués par d'autres entreprises. En effet, elle achète au Japon des photocopieurs à papier ordinaire (ci-après "PPC ") auprès du fabricant japonais, Ricoh Company Limited (ci-après "Ricoh "), pour les vendre sous la marque Nashua dans la Communauté, par l'intermédiaire de ses filiales, et dans de nombreux pays tiers.
4 En juillet 1985, Ricoh a fait l'objet, avec d'autres producteurs japonais, d'une plainte déposée auprès de la Commission par le Comité des fabricants européens d'appareils de copie, qui l'accusait de vendre ses produits dans la Communauté à des prix de dumping.
5 La procédure antidumping engagée par la Commission sur la base du règlement (CEE) n° 2176-84 du Conseil, du 23 juillet 1984, relatif à la défense contre des importations qui font l'objet d'un dumping ou de subventions de la part de pays non membres de la Communauté économique européenne (JO L 201, p. 1), a conduit d'abord à imposer à Ricoh un droit antidumping provisoire de 15,8 %. Par le règlement attaqué, pris sur proposition de la Commission, le Conseil a ensuite fixé le droit antidumping définitif à 20 %.
6 Par ordonnance du 1er février 1989, les affaires C-133-87 et C-150-87 ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.
7 Pour un plus ample exposé du cadre réglementaire et les faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que les moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-dessous que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.
Sur la recevabilité
Sur le recours tendant à l'annulation de la décision par laquelle la Commission a rejeté l'engagement offert par Nashua Corporation
8 Ainsi que la Cour l'a relevé dans l'ordonnance du 11 novembre 1987, Nashua/Conseil et Commission, point 6 (150-87, Rec. p. 4421), le rôle de la Commission s'intègre dans le cadre du processus de décision du Conseil. Il résulte, en effet, des dispositions du règlement n° 2176-84 du Conseil que la Commission a la charge de mener des enquêtes et de décider sur la base de celles-ci, de clôturer la procédure ou, au contraire, de la poursuivre en adoptant des mesures provisoires et en proposant au Conseil l'adoption de mesures définitives. C'est cependant au Conseil qu'il appartient de se prononcer définitivement. En effet, il peut s'abstenir de toute décision s'il est en désaccord avec la Commission ou, au contraire, prendre une décision sur la base des propositions de celle-ci.
9 Le rejet par la Commission d'une proposition d'engagement n'est pas une mesure produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante, étant donné que la Commission peut revenir sur sa décision ou que le Conseil peut décider de ne pas instituer un droit antidumping. Un tel rejet est une mesure intermédiaire dont l'objectif est de préparer la décision finale et ne constitue donc pas un acte attaquable.
10 Or, ainsi qu'il ressort des arrêts du 7 mai 1987, Toyo Bearing/Conseil (240-84, Rec. p. 1809), Nachi Fujikoshi/Conseil (255-84, Rec. p. 1861) et Koyo Seiko/Conseil (256-84, Rec. p. 1899), c'est en attaquant le règlement instituant des droits antidumping définitifs que les opérateurs économiques peuvent, le cas échéant, faire valoir toute irrégularité relative au rejet de leurs propositions d'engagement.
11 Il résulte de ce qui précède que le recours tendant à l'annulation de la décision attaquée est irrecevable.
Sur le recours tendant à l'annulation du règlement n° 535-87
12 Le Conseil estime que le recours tendant à l'annulation du règlement n° 535-87 est irrecevable. A cet égard, il fait valoir, en premier lieu, que Nashua est un importateur indépendant de PPC fabriqués par Ricoh, dont le prix de revente n'a pas été pris en compte par les institutions pour établir le prix à l'exportation, seul cas où, selon la jurisprudence de la Cour, il y a lieu de reconnaître à l'importateur en question la qualité pour agir en annulation à l'encontre d'un règlement instituant des droits antidumping définitifs.
13 Le Conseil fait valoir, en second lieu, que, pour la construction de la valeur normale des produits en cause, les institutions ont fixé la marge bénéficiaire de l'exportateur à 5 %, sur la base de données provenant exclusivement de Ricoh, producteur-exportateur, et non pas de Nashua.
14 Il convient de rappeler, tout d'abord, que les règlements instituant un droit antidumping ont, de par leur nature et leur portée, un caractère normatif, en ce qu'ils s'appliquent à la généralité des opérateurs économiques. Toutefois, il n'est pas exclu que certaines dispositions de ces règlements concernent directement et individuellement ceux des producteurs et exportateurs du produit en cause, auxquels sont imputées les pratiques de dumping sur la base de données relatives à leur activité commerciale. Cela est le cas, en général, des entreprises productrices et exportatrices qui peuvent démontrer qu'elles ont été identifiées dans les actes de la Commission ou du Conseil ou concernées par les enquêtes préparatoires (voir arrêts du 21 février 1984, Allied Corporation I, points 11 et 12, 239-82 et 275-82, Rec. p. 1005, et du 23 mai 1985, Allied Corporation II, point 4, 53-83, Rec. p. 1621).
15 Il en est de même pour ceux des importateurs dont les prix de revente ont été pris en compte pour la construction des prix à l'exportation et qui sont, dès lors, concernés par les constatations relatives à l'existence d'une pratique de dumping (voir arrêts du 29 mars 1979, ISO, point 15, 118-77, Rec. p. 1277, point 15 et du 21 février 1984, Allied Corporation I, précité, point 15).
16 Il y a donc lieu d'examiner si, en l'espèce, Nashua a été concernée par les constatations relatives à l'existence de la pratique de dumping incriminée.
17 Il y a lieu de relever à cet égard que c'est en fonction des particularités des ventes de Ricoh aux OEM et notamment des différences de frais encourus par Ricoh pour les ventes aux OEM, par rapport aux frais encourus par Ricoh pour les ventes de PPC sous sa propre marque, que le Conseil a jugé approprié de fixer, dans le cadre de la construction de la valeur normale, la marge bénéficiaire des exportateurs à 5 %, c'est-à-dire à un taux inférieur à celui de la marge bénéficiaire moyenne, estimée à 14,6 %.
18 Sur la base de la valeur normale ainsi construite pour les ventes de Ricoh aux OEM, les institutions ont abouti à une marge de dumping inférieure à celle déterminée pour les ventes de PPC commercialisés sous la propre marque de Ricoh, et cette marge de dumping ainsi que celles établies pour toutes les filières de ventes de Ricoh ont été prises en compte pour le calcul d'une marge de dumping pondérée, sur la base de laquelle le droit antidumping a été fixé.
19 Il est vrai que la marge bénéficiaire de 5 % a été appliquée sans distinction entre les différents opérateurs économiques concernés lors de la construction de la valeur normale des PPC. Toutefois, les opérateurs économiques en question, dont le nombre est restreint, ont été identifiés par les institutions, et c'est précisément pour tenir compte des particularités de leurs relations commerciales avec les producteurs que le taux de la marge bénéficiaire retenue a été fixé à 5 %.
20 Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu de qualifier la requérante comme importateur ou exportateur, et compte tenu de ses relations commerciales avec Ricoh, Nashua est concernée par les constatations relatives à l'existence de la pratique de dumping incriminée et que, dès lors, elle est concernée directement et individuellement par les dispositions du règlement litigieux relatives aux pratiques de dumping de Ricoh.
21 Le recours tendant à l'annulation du règlement n° 535-87, dans la mesure où celui-ci frappe les PPC fabriqués par Ricoh d'un droit antidumping de 20 %, est dès lors recevable.
Sur le fond
22 A l'appui de sa demande, Nashua invoque cinq moyens tirés respectivement : 1) du calcul erroné de la marge de dumping; 2) de la construction erronée de la valeur normale des produits vendus aux OEM; 3) du calcul erroné du droit antidumping; 4) de la violation du principe de non-discrimination; 5) de l'illégalité du refus de prendre en compte l'engagement proposé par Nashua.
Sur le moyen tiré du calcul erroné de la marge de dumping
23 Nashua fait valoir, en premier lieu, qu'elle est un exportateur, étant donné qu'elle achète généralement ses photocopieurs au Japon ou, en tout cas, en acquiert la propriété au Japon avant de les remettre au transporteur, et qu'elle est seule responsable de l'exportation, de l'expédition, de la vente et du service après-vente de ces produits. Dès lors, le Conseil aurait dû établir pour Nashua une marge de dumping distincte de celle qu'il a établie pour les fabricants-exportateurs du même produit. Elle souligne que le Conseil disposait des données nécessaires à cette fin, puisque, dans le cadre de la construction de la valeur normale, il a procédé à des ajustements exigés par la nature spéciale des ventes aux OEM et que pour le prix à l'exportation il a tenu compte du prix que lui a facturé Ricoh. Elle ajoute que cette façon de procéder correspond à la pratique de la Commission qui, à maintes reprises, aurait établi des marges de dumping distinctes pour plusieurs exportateurs de produits achetés au même fabricant.
24 A cet égard, il y a lieu de relever que, aux termes de l'article 2, paragraphe 2, du règlement n° 2176-84, "un produit est considéré comme faisant l'objet d'un dumping lorsque son prix à l'exportation vers la Communauté est inférieur à la valeur normale d'un produit similaire ". Ainsi que le précise l'article 2, paragraphe 8, sous a), du même règlement, "le prix à l'exportation est le prix réellement payé ou à payer pour le produit vendu à l'exportation vers la Communauté ". Or, en l'espèce, les PPC ont été vendus à l'exportation par Ricoh, et c'est le prix payé par Nashua à Ricoh, comme la requérante l'a d'ailleurs admis, qui doit être considéré comme prix à l'exportation. Il y a donc lieu de constater que c'est à Ricoh et non pas à Nashua que la pratique de dumping devait être imputée.
25 Comme le Conseil l'a observé à juste titre au point 92 des considérants du règlement attaqué, la circonstance que les OEM ont procédé elles-mêmes à l'exportation des produits en cause ne pouvait dès lors justifier l'exclusion des ventes en question du calcul de la marge de dumping de Ricoh, une telle exclusion pouvant d'ailleurs accroître la marge de dumping de l'intéressée.
26 Il y a lieu d'observer, enfin, que la situation de Nashua n'est pas comparable à celle des exportateurs pour lesquels le Conseil et la Commission ont fixé des marges de dumping distinctes de celles fixées pour les fabricants du même produit. En effet, ces exportateurs étaient établis dans le pays d'exportation et vendaient à l'exportation ainsi que sur le marché interne les produits faisant l'objet des pratiques de dumping incriminées.
27 Nashua fait valoir, en second lieu, qu'en tout état de cause rien ne s'opposait à l'établissement d'une marge de dumping séparée pour le réseau de distribution de ses photocopieurs. Elle se réfère à cet égard à la pratique suivie aux États-Unis d'Amérique dans des situations similaires à la sienne.
28 Il convient de rappeler que, d'une part, la marge de dumping, calculée pour les ventes de Ricoh aux OEM, est inférieure à celle qui a été établie pour les autres ventes et que, d'autre part, la marge de dumping finale correspond à la moyenne des marges fixées pour toutes les filières de vente des fabricants, conformément à l'article 2, paragraphe 13, sous c), du règlement n° 2176-84, aux termes duquel "lorsque les marges de dumping varient, des moyennes pondérées peuvent être établies ".
29 L'application de cette disposition était en l'espèce justifiée. En effet, d'une part, comme cela a été indiqué ci-dessus, le calcul de la marge de dumping sans prise en compte des ventes à Nashua pouvait entraîner l'accroissement de la marge de dumping de Ricoh; d'autre part, il était nécessaire d'éviter que le fabricant soit incité à écouler la plupart de ses produits sous les marques des OEM.
30 En ce qui concerne l'argument tiré de la référence à la pratique suivie en la matière aux États-Unis d'Amérique, dont l'existence est mise en cause par le Conseil, il convient de rappeler que, comme la Cour l'a jugé dans l'arrêt du 5 octobre 1988, Canon/Conseil, point 15 (277-85 et 300-85, Rec. p. 0000), l'attitude d'un de ses partenaires commerciaux, même important, ne suffit pas pour obliger la Communauté à procéder de la même manière. Cette référence ne saurait donc commander l'interprétation de la réglementation communautaire.
31 Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen tiré du calcul erroné de la marge de dumping n'est pas fondé et doit, dès lors, être rejeté.
Sur le moyen tiré de la construction erronée de la valeur normale des produits vendus aux OEM
32 Nashua fait valoir qu'en retenant une marge bénéficiaire de 5 % dans le cadre de la construction de la valeur normale des produits vendus aux OEM, les institutions ont procédé à un ajustement arbitraire, qui ne tient aucun compte des différences entre les ventes aux OEM et les ventes réalisées sous la propre marque du fabricant. Or, la différence entre ces deux types de vente serait sensible au niveau des frais de vente, des dépenses administratives et des frais généraux, qui, dans le cadre d'une vente à un OEM, sont beaucoup moins élevés que dans celui d'une vente à un revendeur ordinaire, compte tenu essentiellement de l'importance et de la régularité des commandes d'un OEM et du fait que le fabricant ne supporte ni frais de distribution, de marketing, de publicité, ni frais de vente après la vente aux OEM.
33 A cet égard, il convient de relever qu'il ressort du dossier que les institutions ont pris en considération la différence entre les coûts et les bénéfices réalisés dans le cadre des ventes aux OEM et ceux correspondant aux autres ventes. C'est en effet dans ce but et compte tenu de l'impossibilité dans laquelle elles se sont trouvées d'évaluer cette différence avec précision que, dans le cadre de la construction de la valeur normale des OEM, elles ont fixé la marge bénéficiaire à 5 %, et non pas au taux moyen de celle-ci estimé à 14,6 %, et qu'elles ont appliqué cette marge aux ventes réalisées sous la marque des fabricants.
34 Nashua n'a pas apporté la preuve que la marge bénéficiaire établie n'était pas suffisante pour couvrir l'intégralité des différences alléguées. Il s'ensuit que le moyen tiré de la construction erronée de la valeur normale des produits vendus aux OEM doit être rejeté.
Sur le moyen tiré du calcul erroné du droit antidumping
35 Nashua soutient que le Conseil aurait commis une erreur dans le calcul du droit antidumping, en tenant compte uniquement des prix pratiqués par les filiales japonaises de Ricoh en Europe dans les ventes aux distributeurs indépendants et non pas des prix pratiqués par Nashua. Or, le pourcentage des ventes ainsi prises en considération ne serait pas représentatif dans la mesure, notamment, où il n'inclut pas toute une catégorie de ventes réalisées dans la Communauté, en l'occurrence les ventes par les OEM, qui auraient atteint, en 1985, 28 % de toutes les ventes de photocopieurs japonais. Selon Nashua, le Conseil aurait agi en contradiction avec la méthode qu'il avait suivie pour déterminer la marge de dumping, celle-ci ayant été établie sur la base de toutes les ventes de Ricoh, y compris les ventes aux OEM.
36 Il convient de relever, tout d'abord, que, pour le calcul du droit antidumping, l'article 13, paragraphe 3, du règlement n° 2176-84 se limite à imposer aux institutions l'obligation de ne pas dépasser, d'une part, la marge de dumping établie et, d'autre part, le niveau du préjudice, si un droit inférieur à la marge suffirait à faire disparaître le préjudice. Les institutions disposent, par conséquent, d'un large pouvoir d'appréciation en ce qui concerne le choix de la méthode de calcul du droit et ne sont pas tenues d'adopter à cet égard la même méthode que celle retenue pour déterminer la marge de dumping.
37 Il y a lieu de relever, ensuite, que, pour déterminer en l'espèce le montant du droit permettant d'éliminer le préjudice subi par les producteurs communautaires, les institutions ont estimé adéquat de se fonder sur le préjudice global causé par des exportations de PPC en provenance du Japon, représentant 70 % du chiffre total des ventes de PPC dans la Communauté.
38 Nashua n'a pas démontré que cette façon de procéder avait affecté le montant du droit antidumping institué, ni dans quelle mesure ce montant aurait été différent si les ventes réalisées par les OEM avaient également été prises en compte.
39 Il s'ensuit que ce moyen doit être rejeté.
Sur le moyen tiré de la violation du principe de non-discrimination
40 Selon Nashua, le Conseil aurait violé le principe de non-discrimination en appliquant des droits antidumping à un taux uniforme à l'ensemble des importations de PPC. Elle considère qu'elle paye un droit antidumping beaucoup plus élevé en termes absolus qu'une filiale apparentée d'un fabricant japonais, étant donné que sa marge bénéficiaire brute n'est que de 16 %, alors que celle réalisée par les filiales apparentées des fabricants japonais s'élèverait à 42 %.
41 Sans qu'il soit nécessaire d'apprécier les chiffres avancés par Nashua et contestés par le Conseil, il convient de relever, d'une part, que la différence alléguée serait le résultat non pas de l'institution des droits antidumping, mais de la politique commerciale de Ricoh et, d'autre part, que l'institution de droits antidumping vise à supprimer le préjudice causé aux producteurs communautaires, et non pas à garantir la même marge bénéficiaire à tous les importateurs.
42 Ce moyen doit donc être rejeté.
Sur le moyen tiré de l'illégalité du refus de prendre en compte l'engagement proposé par Nashua
43 Par ce moyen, Nashua fait valoir que, en s'abstenant d'examiner au fond la proposition d'engagement qu'elle avait formulée, la Commission aurait violé l'article 10 du règlement n° 2176-84. Le règlement attaqué, en confirmant cette pratique de la Commission, aurait également violé la disposition précitée.
44 Selon Nashua, la Commission doit, dans un premier temps, examiner si l'engagement offert est susceptible de supprimer le préjudice. Ce n'est qu'après avoir procédé à cet examen que la Commission peut, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, décider d'accepter ou non la proposition d'engagement. Or, un tel examen ferait défaut en l'espèce, la Commission s'étant limitée à formuler des considérations générales sur le statut de Nashua et à faire état de sa pratique traditionnelle de ne pas accepter des engagements de la part des importateurs.
45 A cet égard, il y a lieu de relever que la pratique de la Commission de ne pas accepter des engagements de la part des importateurs, étayée par le Conseil au point 100 des considérants du règlement attaqué, est fondée tout à la fois sur les règles du code antidumping du GATT, dont l'article 7 ne prévoit que l'acceptation d'engagements de la part des exportateurs, et sur l'article 10 du règlement n° 2176-84. Il est vrai que cette dernière disposition n'exclut pas la possibilité pour la Commission d'accepter l'engagement offert par un importateur, mais il résulte des termes de celle-ci qu'une telle acceptation doit être exceptionnelle. En effet, les paragraphes 4 et 6, relatifs à la poursuite de l'enquête après l'acceptation des engagements et l'institution de droits antidumping après la dénonciation d'un engagement ou la constatation de sa violation, ne mentionnent que les exportateurs, c'est-à-dire ceux des opérateurs économiques dont les engagements peuvent en principe être acceptés.
46 Ce régime est justifié par deux ordres de raisons. D'une part, l'acceptation de l'engagement offert par un importateur aurait pour conséquence d'encourager celui-ci à continuer à s'approvisionner en dehors de la Communauté à des prix de dumping. D'autre part, les autres importateurs devraient être traités de la même manière, ce qui, étant donné le grand nombre de sociétés concernées, rendrait le contrôle du respect des engagements extrêmement difficile.
47 Il convient d'observer que la question de savoir si Nashua est l'exportateur physique des PPC ou l'importateur n'a aucune importance. Étant donné, en effet, que les PPC sont achetés en vue de leur importation dans la Communauté et que, dès lors, les raisons qui justifient la non-acceptation des engagements offerts par les importateurs s'appliquent, Nashua ne pouvait être considérée comme exportateur à cette fin (point 100 des considérants, quatrième alinéa, du règlement attaqué).
48 Il s'ensuit qu'en refusant d'accepter la proposition d'engagement offerte par Nashua, pour les motifs exposés au point 100 des considérants du règlement attaqué, les institutions n'ont pas excédé le pouvoir d'appréciation qui leur est reconnu.
49 Le dernier moyen invoqué par Nashua doit, dès lors, être rejeté ainsi que l'ensemble du recours.
Sur les dépens
50 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. Les requérantes ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens. Dans l'affaire C-150-87, les requérantes sont condamnées solidairement aux dépens, y compris ceux des parties intervenantes.
Par ces motifs,
LA COUR
déclare et arrête :
1) Le recours introduit dans l'affaire C-133-87 est rejeté comme irrecevable.
2) Le recours introduit dans l'affaire C-150-87 est rejeté comme non fondé.
3) Les parties requérantes sont condamnées aux dépens dans les deux affaires précitées; dans l'affaire C-150-87, les requérantes sont condamnées solidairement aux dépens, y compris ceux des parties intervenantes.