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Décisions

TPICE, 3e ch., 10 décembre 1996, n° T-75/96

TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Söktas Pamuk Ve Tarim Ürünlerini Degerlendirme Ticaret Ve Sanayii AS

Défendeur :

Commission des Communautés européennes

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vesterdorf

Juges :

MM. Briët, Potocki

Avocat :

Me Sinan

TPICE n° T-75/96

10 décembre 1996

LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

Faits à l'origine du recours

1 Le 8 janvier 1996, le comité des industries du coton et des fibres connexes de l'Union européenne (Eurocoton) a saisi la Commission d'une plainte selon laquelle les importations de tissus de coton écrus plats originaires de République populaire de Chine, d'Égypte, d'Inde, d'Indonésie, du Pakistan et de Turquie feraient l'objet de pratiques de dumping et causeraient ainsi un préjudice important à l'industrie communautaire.

2 La Commission a ouvert une enquête, conformément à l'article 5 du règlement (CE) n° 3283-94 du Conseil, du 22 décembre 1994, relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 349, p. 1, ci-après "règlement antidumping").

3 L'avis d'ouverture d'une procédure antidumping concernant les importations des tissus en cause a été publié au Journal officiel des Communautés européennes du 21 février 1996 (JO C 50, p. 3).

Procédure et conclusions des parties

4 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mai 1996, Soekta Pamuk Ve Tar m UEruenlerini De erlendirme Ticaret Ve Sanayi A , établie en Turquie, qui fabrique et exporte vers la Communauté les types de tissus de coton présumés faire l'objet d'un dumping, a introduit, d'une part, sur le fondement des articles 173, quatrième alinéa, 174 et 176 du traité CE (ci-après "traité"), un recours en annulation dirigé contre l'avis d'ouverture de la procédure antidumping, et, d'autre part, en vertu de l'article 178 du traité, un recours en réparation du dommage que lui aurait causé la mesure attaquée.

5 Par acte séparé, enregistré au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a également introduit, en vertu de l'article 185 du traité, une demande de sursis à l'exécution de la "décision attaquée, dans la mesure où elle concerne la requérante et la Turquie en général".

6 La demande en référé a été rejetée par ordonnance du président du Tribunal prononcée le 26 août 1996, Soekta /Commission (T-75-96 R, Rec. p. II-0000).

7 Le juge des référés a considéré, en premier lieu, que la demande d'annulation apparaissait prima facie manifestement irrecevable, dès lors que l'ouverture de la procédure antidumping en cause constituait, à première vue, une mesure préparatoire non susceptible de recours, dont l'illégalité éventuelle pouvait être utilement soulevée à l'appui d'un recours en annulation dirigé contre la décision finale.

8 Le juge des référés a estimé, en second lieu, que la demande d'indemnité était, prima facie, manifestement irrecevable, au motif que l'acte prétendument irrégulier qui serait à l'origine du préjudice allégué apparaissait comme dépourvu d'effets juridiques et que, de surcroît et en toute hypothèse, la requérante n'avait fourni aucune indication sur la nature et l'étendue du préjudice allégué.

9 Par acte déposé le 19 juin 1996, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité du recours au sens de l'article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure.

10 Par décision du Tribunal du 6 novembre 1996, adoptée en application des dispositions combinées des articles 14 et 51 du règlement de procédure, l'affaire, initialement attribuée à la troisième chambre élargie, a été renvoyée à la troisième chambre, les parties entendues.

11 Dans la présente instance, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

° annuler la décision d'ouvrir la procédure antidumping concernant les importations de tissus de coton écrus originaires de République populaire de Chine, d'Égypte, d'Inde, d'Indonésie, du Pakistan et de Turquie,

° condamner la Commission à réparer le dommage qu'elle a causé,

° condamner la Commission aux dépens.

12 La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

° rejeter le recours comme irrecevable,

° condamner la requérante aux dépens.

13 Dans ses observations déposées le 31 juillet 1996, la requérante conclut au rejet de l'exception d'irrecevabilité et à ce qu'il plaise au Tribunal:

° déclarer recevable le recours, y compris la demande de dommages-intérêts,

° condamner la Commission aux dépens.

En droit

14 En vertu de l'article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure, la suite de la procédure sur l'exception d'irrecevabilité est orale, sauf décision contraire du Tribunal. Le Tribunal (troisième chambre) estime que le dossier comporte tous les éléments de conviction nécessaires en vue de statuer et qu'il n'y a donc pas lieu d'ouvrir la procédure orale.

Sur la recevabilité de la demande d'annulation

Argumentation des parties

15 Au soutien de son exception d'irrecevabilité, la Commission allègue, à titre principal, que l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse est un acte préparatoire, la première étape d'une procédure pouvant déboucher sur l'adoption de mesures antidumping (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60-81, Rec. p. 2639, point 19, et ordonnance du Tribunal du 14 mars 1996, Dysan Magnetics et Review Magnetics/Commission, T-134-95, Rec. p. II-183, point 23).

16 La Commission rejette comme dépourvue de pertinence l'argumentation tirée par la requérante de ce que l'article 47 du protocole additionnel du 23 novembre 1970 (JO 1972, L 293, p. 4, publié dans sa version anglaise au JO 1977, L 361, p. 60, ci-après "article 47 du protocole additionnel") annexé à l'accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie imposerait à la Commission, avant l'ouverture d'une procédure antidumping, certains préalables que l'institution n'aurait pas respectés en l'espèce. En effet, dès lors que l'ouverture de la procédure n'est pas un acte susceptible de recours, les raisons particulières pour lesquelles un requérant demande son annulation seraient sans importance.

17 L'ouverture de la procédure litigieuse ne constituerait pas le terme ultime d'une procédure spéciale, distincte de celle qui doit permettre ensuite de statuer sur le fond, contrairement au retrait du bénéfice de l'immunité contre les amendes (arrêt de la Cour du 15 mars 1967, Cimenteries CBR e.a./Commission, 8-66, 9-66, 10-66 et 11-66, Rec. p. 93), que les ententes notifiées peuvent encourir en vertu de l'article 15, paragraphe 6, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204, ci-après "règlement n° 17").

18 L'adoption de mesures antidumping serait fondée sur les dispositions appropriées du règlement antidumping, et non pas, comme le soutiendrait à tort la requérante, sur l'ouverture de la procédure antidumping. Aussi conviendrait-il de rejeter, en ce qu'il est fondé sur cette prémisse erronée, l'argument que la requérante tire du grave risque financier d'avoir à acquitter des droits antidumping provisoires, auquel elle serait exposée en raison de l'ouverture de la procédure.

19 Contrairement aux allégations de la requérante, la situation de l'espèce ne serait pas semblable à celle qui se présente dans les affaires d'aides d'État. La nature d'acte susceptible de recours qui s'attache à l'ouverture d'une procédure au sens de l'article 93, paragraphe 2, du traité ne découlerait pas de la circonstance qu'une procédure a été ouverte, mais des conséquences propres qu'entraîne une procédure d'aide d'État (arrêt du Tribunal du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission, T-10-92, T-11-92, T-12-92 et T-15-92, Rec. p. II-2667, point 47).

20 La Commission fait observer, à titre subsidiaire, que, en tout état de cause, la requérante n'est pas directement et individuellement concernée par l'ouverture de la procédure et qu'elle n'a aucun intérêt légitime à faire valoir. Le règlement antidumping aurait trait à la protection des pays de la Communauté contre le dumping de marchandises provenant de pays tiers, et, comme il est précisé à son article 5, paragraphe 10, un avis d'ouverture se référerait au produit et aux pays concernés, et non pas à des exportateurs ou à des importateurs individuels.

21 La requérante soutient au contraire que le présent litige se distingue de l'affaire Dysan Magnetics et Review Magnetics/Commission, précitée, en ce que la décision litigieuse d'ouvrir une procédure en application du règlement antidumping méconnaît la procédure établie par l'article 47 du protocole additionnel. En application de cette disposition, avant de pouvoir instituer des mesures de protection provisoires unilatérales, telles que l'ouverture d'une enquête antidumping, la Commission aurait dû introduire, une demande auprès du Conseil d'association et attendre que celui-ci se soit prononcé dans le délai de trois mois ou se soit abstenu d'agir. La décision d'ouverture litigieuse modifierait ainsi irréversiblement et distinctement la position juridique de la requérante, en altérant le cadre institutionnel établi pour résoudre le litige antidumping en cause.

22 En tant qu'il constitue un acte de clôture à l'égard de la procédure visée par l'article 47 du protocole additionnel, l'avis d'ouverture litigieux s'apparenterait à l'avis émis au titre de l'article 15, paragraphe 6, du règlement n° 17 et constituerait le terme ultime d'une procédure spéciale qui, si elle n'est pas engagée au préalable, ne peut donner lieu à l'application du règlement antidumping.

23 L'importance de la décision attaquée, prise à l'issue de la phase d'examen des preuves accompagnant la plainte, résiderait dans le fait qu'elle crée la base juridique pour l'institution de droits antidumping provisoires. Or, la Cour aurait estimé recevable un recours en annulation dirigé contre le retrait du bénéfice de l'immunité contre les amendes dont bénéficiait une entente notifiée, en ce qu'un tel retrait exposait la requérante à un grave risque financier et avait donc pour effet de modifier sa situation juridique (arrêt du 15 mars 1967, Cimenteries CBR e.a./Commission précité).

24 Enfin, la décision d'ouverture attaquée constituerait formellement le point de départ d'une procédure et produirait, à ce titre, des effets analogues à ceux d'une décision d'ouverture de la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité, en matière d'aides d'État.

25 La requérante allègue, en second lieu, que la Commission a connu l'identité des producteurs et exportateurs des tissus de coton turcs en cause, à l'occasion d'une précédente affaire, dans le cadre de laquelle la Commission aurait recueilli un volume important d'informations les concernant. La clôture de cette procédure antérieure serait intervenue parallèlement au dépôt d'une nouvelle plainte et l'avis d'ouverture litigieux aurait été publié seulement deux jours après la date de clôture précitée. Bien qu'il s'agisse d'une nouvelle procédure, elle devrait être assimilée, en raison des circonstances qui lui sont propres, à une procédure d'examen, dans laquelle l'identité des parties est connue.

Appréciation du Tribunal

26 La demande introduite au titre des articles 173, quatrième alinéa, 174 et 176 du traité tend à l'annulation de l'acte par lequel la Commission a ouvert la procédure antidumping litigieuse. Aux fins de statuer sur la recevabilité de cette demande, il convient de rappeler que constituent des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation, au sens de l'article 173 du traité, les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérants, en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique (ordonnance de la Cour du 8 mars 1991, Emerald Meats/Commission, C-66-91 et C-66-91 R, Rec. p. I-1143, point 26, et arrêt de la Cour du 23 novembre 1995, Nutral/Commission, C-476-93 P, Rec. p. I-4125, point 28).

27 A cet égard, il y a lieu d'observer que, lorsqu'il s'agit d'actes dont l'élaboration s'effectue en plusieurs phases, seules constituent, en principe, des actes attaquables les mesures qui fixent définitivement la position de l'institution au terme de la procédure, à l'exclusion des mesures intermédiaires dont l'objectif est de préparer la décision finale (arrêt IBM/Commission précité, points 10 et suivants; arrêts du Tribunal du 10 juillet 1990, Automec/Commission, T-64-89, Rec. p. II-367, point 42, du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission, T-10-92, T-11-92, T-12-92 et T-15-92, Rec. p. II-2667, point 28, et du 27 juin 1995, Guérin automobiles/Commission, T-186-94, Rec. p. II-1753, point 39).

28 Il y a donc lieu d'apprécier si l'acte attaqué est de nature à produire, par lui-même, des effets juridiques susceptibles d'affecter les intérêts des requérantes, ou si, au contraire, il ne constitue qu'une mesure préparatoire dont l'illégalité pourrait être utilement soulevée dans le cadre d'un recours dirigé contre la décision finale, tout en assurant une protection suffisante aux parties intéressées (arrêt de la Cour du 24 juin 1986, Akzo Chemie/Commission, 53-85, Rec. p. 1965, point 19, et arrêt Cimenteries CBR e.a./Commission, du 18 décembre 1992 précité, point 31).

29 Il résulte d'une jurisprudence bien établie (arrêt du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission, précité, point 42) que seuls des actes affectant immédiatement et de manière irréversible la situation juridique des entreprises concernées seraient de nature à justifier, dès avant l'achèvement d'une procédure administrative, la recevabilité d'un recours en annulation.

30 Or, il ressort des dispositions du règlement antidumping que la Commission a la charge de mener des enquêtes et de décider, sur la base de celles-ci, de procéder à la clôture de la procédure ou, au contraire, de la poursuivre soit en adoptant des mesures provisoires, soit en proposant au Conseil l'adoption de mesures définitives.

31 En conséquence, l'acte par lequel la Commission engage une procédure antidumping est un acte purement préparatoire qui n'est pas susceptible d'affecter immédiatement et de manière irréversible la situation juridique de la requérante (ordonnance Dysan Magnetics et Review Magnetics/Commission, précitée).

32 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l'argument de la requérante selon lequel l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse aurait pour effet d'écarter la procédure de règlement à l'amiable des litiges définie par l'article 47 du protocole additionnel.

33 Il convient de relever, en premier lieu, qu'il ne ressort pas d'une analyse des dispositions de l'article 47 du protocole additionnel que l'ouverture d'une procédure au titre de l'article 5 du règlement antidumping ait pour effet de priver la requérante de la possibilité d'un règlement du litige conformément aux modalités définies par l'article 47 du protocole additionnel.

34 Cette dernière disposition, qui n'a pas pour objet d'écarter l'application des instruments de défense commerciale communautaire mais de compléter les modalités de leur mise en œuvre, ne subordonne la simple ouverture, par la Communauté, d'une procédure antidumping à aucune condition spécifique, hormis l'information du Conseil d'association.

35 En outre, l'article 47 du protocole additionnel autorise expressément, en son paragraphe 2, deuxième alinéa, l'imposition à titre conservatoire de droits antidumping provisoires, pendant une durée limitée, par l'une des parties au traité d'association, après en avoir informé le Conseil d'association.

36 En l'espèce, il résulte du dossier que la Commission a informé le Conseil d'association, d'une part, de la plainte déposée auprès d'elle par Eurocoton le 8 janvier 1996 et, d'autre part, de l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse.

37 Aussi l'avis d'ouverture de la procédure antidumping contesté n'est-il pas de nature à faire obstacle à une éventuelle intervention ultérieure du Conseil d'association dans le respect des dispositions de l'article 47 du protocole additionnel, notamment dans l'hypothèse où la Commission envisagerait l'adoption de mesures provisoires ou proposerait au Conseil d'adopter des mesures définitives.

38 Le Tribunal observe, en deuxième lieu, que, dès lors qu'il n'est pas à considérer comme un acte de clôture à l'égard de la procédure visée par l'article 47 du protocole additionnel, l'avis d'ouverture litigieux ne peut être assimilé, contrairement à ce que soutient la requérante, à un avis émis au titre de l'article 15, paragraphe 6, du règlement n° 17 et ne constitue donc pas le terme ultime d'une procédure spéciale qui aurait constitué le préalable à l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse.

39 Le Tribunal constate, en troisième lieu, que si l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse peut éventuellement exposer la requérante au risque de l'imposition de droits antidumping elle ne conduit pas nécessairement à l'imposition de droits antidumping, la procédure pouvant être clôturée sans que des mesures soient instituées (ordonnance Dysan Magnetics et Review Magnetics/Commission, point 27).

40 Il convient de relever, en quatrième lieu, que, en ce qui concerne la comparaison faite par la requérante avec la procédure en matière d'aide d'État, les décisions d'ouverture de la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité impliquent un choix sur la qualification de l'aide d'État en cause et des règles de procédure y afférentes et produisent ainsi, à l'égard des entreprises intéressées, des effets juridiques définitifs consistant notamment dans la suspension du versement de l'aide envisagée (arrêts de la Cour du 30 juin 1992, Espagne/Commission, C-312-90, Rec. p. I-4117, points 21 à 23, et Italie/Commission, C-47-91, Rec. p. I-4145, points 27 à 29).

41 En revanche, l'ouverture d'une procédure antidumping n'est pas susceptible d'affecter immédiatement et de manière irréversible la situation juridique des entreprises concernées. En effet, les entreprises concernées ne sont nullement tenues de modifier leurs pratiques commerciales à la suite de l'ouverture d'une procédure antidumping et ne peuvent être contraintes à coopérer à l'enquête (ordonnance Dysan Magnetics et Review Magnetics/Commission, précitée, point 27).

42 Dans ces conditions, l'ouverture de la procédure contestée ne produit pas d'effets juridiques de nature à affecter les intérêts de la requérante mais constitue une mesure préparatoire, dont l'illégalité éventuelle pourrait être utilement soulevée au soutien d'un recours formé, le cas échéant, contre la décision finale, tout en assurant une protection satisfaisante à la requérante.

43 Dès lors, l'ouverture de la procédure antidumping litigieuse ne saurait être considérée, de par sa nature et ses effets, comme un acte susceptible de recours en annulation au sens de l'article 173 du traité.

44 De l'ensemble de ce qui précède, il résulte que la demande d'annulation doit être déclarée irrecevable, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la question de savoir si la requérante est directement et individuellement concernée par l'acte attaqué.

Sur la recevabilité de la demande d'indemnité

Arguments des parties

45 La Commission conclut également à l'irrecevabilité de la demande d'indemnité. La requête se bornerait à affirmer que la Commission "est tenue de réparer le préjudice causé à la requérante par son acte illégal" et ne contiendrait donc aucun des éléments nécessaires pour fonder un recours en indemnité: le comportement reproché à la Commission, le lien de causalité et le montant du préjudice allégué. L'arrêt Automec/Commission, précité (points 73 à 77), rejetant une demande d'indemnité comme irrecevable, serait directement applicable en l'espèce.

46 La requérante demande dans sa requête que, conformément aux articles 178 et 215 du traité, le Tribunal condamne la Commission à réparer le dommage qu'elle a causé à la requérante.

47 Dans ses observations sur l'exception d'irrecevabilité la requérante précise que, dès l'ouverture d'une procédure antidumping en vertu de l'article 5 du règlement antidumping, les exportateurs des pays concernés subissent des dommages, même si des droits ne sont pas institués en définitive. La requérante évalue à 28 000 USD (21 407 écus) la perte subie en terme d'heures de travail que les membres de son personnel auraient dû consacrer à la défense de l'affaire. En outre, la requérante chiffre à 912 321 écus les pertes qu'elle aurait enregistrées en raison de la chute de ses exportations vers la Communauté, son unique marché extérieur, provoquée par l'issue aléatoire de la procédure litigieuse.

Appréciation du Tribunal

48 Il résulte de l'examen de la recevabilité de la demande en annulation que l'acte prétendument illégal qui serait à l'origine du préjudice allégué est dépourvu d'effets juridiques de nature à affecter les intérêts de la requérante.

49 Or, selon une jurisprudence bien établie (ordonnance de la Cour du 4 octobre 1991, Bosman/Commission, C-117-91, Rec. p. I-4837, point 20), est irrecevable un recours en responsabilité tendant à la réparation d'un préjudice découlant de la prétendue illégalité d'un acte d'une institution, lorsque cet acte est dépourvu d'effets juridiques.

50 De l'ensemble des développements qui précèdent il résulte que le recours doit être rejeté comme irrecevable dans son intégralité.

Sur les dépens

51 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La partie requérante ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu, eu égard aux conclusions de la Commission, de condamner la requérante aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

ordonne:

1) Le recours est rejeté comme irrecevable.

2) La requérante est condamnée aux dépens, y compris ceux relatifs à la procédure en référé.