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Décisions

Cass. com., 22 octobre 1968, n° 67-10.786

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Matimo (SARL)

Défendeur :

SNECMA (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guillot

Rapporteur :

M. Colomies

Avocat général :

M. Gegout

Avocats :

Mes Ryziger, Labbé, Colas de la Noue

Paris, du 22 oct. 1966

22 octobre 1966

LA COUR : - Sur les premier et troisième moyens réunis : - Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué (Paris, 22 octobre 1966) qu'alors que la Société nationale d'étude et de construction de moteurs d'aviation, dite SNECMA, avait intenté devant le tribunal de commerce une action en résiliation de la vente d'une presse à friction, d'une capacité de 260 tonnes, qui lui avait été faite par la société Matimo, représentant en France la société Maschinen-Fabrik Peltzer et Ehlers, fabricante de la presse dont le fonctionnement n'était pas satisfaisant, un protocole d'accord intervint le 7 juillet 1960, entre les trois parties, par lequel notamment Maschinen-Fabrik s'engageait à reprendre la presse et à la livrer après certaines modifications, étant stipulé, par l'article 6 du protocole, "qu'à défaut d'exécution d'une des conditions des présentes, qui sont toutes de rigueur, la SNECMA aura la faculté de considérer les présentes non avenues, et de suivre sur les derniers errements de la procédure pendante devant le tribunal, aucun désistement, ni d'instance, ni d'action, n'étant donné tant que le présent accord, dont l'exécution est la condition suspensive, n'aura pas reçu une parfaite et totale exécution " ; que la Maschinen-Fabrik ayant repris, puis livré à la SNECMA la presse dont elle avait, en particulier, conformément à l'accord, changé le bâti, ladite SNECMA, par lettre du 24 août 1961, écrivit au représentant du fabricant qu'elle considérait la presse "réceptionnée définitivement sur le plan technique", puis, constatant qu'à la suite d'une avarie du 21 septembre 1961, la machine était devenue inutilisable, et reprenant son action pendante, assigna Matimo et Maschinen-Fabrik en résiliation de la vente à leurs torts et en diverses réparations ; que la cour d'appel a fait droit, sous certaines modalités, à cette demande ;

Attendu que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'en avoir ainsi décidé sans répondre au moyen soulevé par Matimo et accueilli par le jugement de première instance qui avait déclaré la SNECMA irrecevable à se prévaloir de l'article 6 de la transaction du 7 juillet 1960 pour reprendre la procédure sur les derniers errements, toutes les clauses de cette transaction ayant été respectées, alors que les juges du fond avaient le devoir de répondre aux motifs des premiers juges que Matimo s'était appropriés par ses conclusions et dont elle avait demandé la confirmation ; que le pourvoi critique encore l'arrêt pour n'avoir pas répondu aux conclusions prises par la société Matimo tendant à faire juger que la Maschinen-Fabrik, seule, était, en vertu du contrat du 7 juillet 1960, tenue à la garantie de la machine, alors que les juges du fond sont tenus de répondre à toutes les conclusions des parties ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, après avoir reproduit l'article 6 précité du protocole, rappelle également les termes de son article 4, suivant lesquels "la nouvelle presse est garantie pendant douze mois à partir de sa prise en charge par la SNECMA" ; qu'elle énonce que cette dernière s'est opérée le 5 mai 1961 ; qu'elle déclare que la vis servant à transmettre l'effort de pression est d'un acier ne présentant pas les caractéristiques requises pour un tel organe, que la machine, inapte à une utilisation normale, n'était pas construite conformément aux règles de l'art, et que ce vice caché est resté ignoré de la SNECMA jusqu'au 21 septembre 1961 ; que la lettre de la SNECMA du 24 août 1961 n'est nullement une renonciation à s'en prévaloir ; qu'ainsi la SNECMA n'a pas été remplie des droits que lui conférait le protocole et qu'elle "est en droit d'exercer l'action rédhibitoire et de demander réparation" ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel indique que la SNECMA pouvait exercer cette action en garantie contre Matimo, avec qui elle a contracté puisque la machine litigieuse est celle qui lui a été vendue par cette société et que le protocole, auquel a participé la société, prévoyait, en cas d'inexécution, que la procédure serait reprise sur ses anciens errements, dans lesquels précisément la SNECMA agissait en garantie contre Matimo, qui avait appelé en cause Maschinen-Fabrik ; que la cour d'appel a donc répondu aux conclusions invoquées et que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que le pourvoi reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait alors qu'il résulte de la transaction que c'est le bâti qui devait présenter toutes les garanties désirables tant du point de vue de la robustesse que de ses performances, qu'aucune obligation nouvelle n'avait été souscrite quant à la garantie de la machine, et qu'il ne résulte pas des constatations de fait de l'arrêt que l'avarie survenue provienne du bâti, de telle sorte que dans la mesure où la cour d'appel aurait entendu fonder à la fois la recevabilité de l'action et la résolution de la vente sur l'inexécution de la transaction du 7 juillet 1960, elle aurait en même temps dénaturé celle-ci et omis de donner une base légale à sa décision ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir reproduit les termes de l'article 4 précité du protocole, qui est produit, concernant la garantie accordée à la "nouvelle presse" et son point de départ, énonce qu'à la suite de l'avarie du 21 septembre 1961, la Maschinen-Fabrik a dû couper au chalumeau la vis de transmission de la pression, déformée et bloquée dans son écrou pour n'avoir pu supporter l'effort demandé ; qu'elle relève qu'aux termes du protocole d'accord, la Maschinen-Fabrik s'était engagée à reprendre la machine litigieuse et non seulement à "la livrer ensuite avec un nouveau bâti" mais aussi "équipée de tous accessoires tenant compte de la capacité de 260 tonnes requise" ; que par ces motifs, la cour d'appel, qui retenait que la Maschinen-Fabrik ne s'était pas conformée à ses obligations, n'a fait, en appliquant la garantie à l'ensemble de la machine, qu'user de son pourvoir d'interprétation d'une convention et a justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 octobre 1966 par la Cour d'appel de Paris.