Cass. 1re civ., 5 juillet 2006, n° 05-12.193
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Karelis (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
LA COUR : - Attendu que M. François X, architecte, est l'auteur d'un modèle de chalet dénommé Xettes commercialisé par la société Cuny ; que par acte du 5 janvier 1999, ces derniers ont saisi le tribunal d'une action en contrefaçon et en concurrence déloyale reprochant à M. Y et à la société Karelis d'avoir fait construire et construit un chalet identique à leur modèle, en utilisant le projet et les plans y annexés qu'ils avaient établis dans le cadre de l'étude réalisée à la demande de M. Y ; que la cour d'appel a rejeté leurs prétentions ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est reproduit en annexe : - Attendu qu'après avoir justement énoncé que, pour être réputés œuvre de l'esprit au sens de l'article L. 112-2-12 du Code de la propriété intellectuelle, les plans et croquis d'architecture devaient comporter un apport original, la cour d'appel a relevé que, tant en ce qui concerne l'aspect extérieur du bâtiment qu'en ce qui concerne l'agencement des volumes intérieurs, le modèle Xettes, tel qu'il figurait sur les plans sommaires datés du 29 mai 1996 à entête des établissements Cuny, seuls produits aux débats, était d'une conception banale et ne révélait pas de trace d'un effort créateur et de recherche esthétique ; qu'ayant ainsi souverainement apprécié, au vu des pièces produites, l'absence d'originalité du modèle elle a légalement justifié sa décision sans avoir à rechercher si M. Y avait participé aux faits dénoncés dès lors que l'action en contrefaçon ne pouvait prospérer ; que le moyen ne peut être accueilli dans aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen, pris en ses deux premières branches : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter l'action en concurrence déloyale, l'arrêt attaqué relève que si les plans de l'avant-projet réalisé par la société Cuny à l'échelle 1/50e, avaient été reproduits à l'échelle 1/100e et annexés au dossier de demande de permis de construire constitué par la société Karelis et déposé par M. Y, il n'était pas démontré que la société Karelis aurait réalisé une économie réelle de nature à lui permettre d'emporter le marché par une baisse de ses prix, alors que la comparaison des montants respectifs des deux marchés ne permettait nullement de caractériser un acte de concurrence déloyale dès lors qu'il était admis par les deux constructeurs que les techniques respectivement mises en œuvre étaient différentes, qu'il n'était nullement démontré que la société Karélis aurait, par des procédés illicites, détourné la clientèle de la société Cuny et en particulier M. Y ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la société Karelis avait utilisé le projet et les plans de la société Cuny, remis par M. Y pour réaliser, au profit de ce dernier, la construction d'un bâtiment identique, ce qui faisait nécessairement ressortir qu'en s'appropriant le travail d'autrui elle avait réalisé une économie et détourné, par des procédés déloyaux, le client de sa concurrente, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais seulement en ses dispositions relatives à la concurrence déloyale, l'arrêt rendu le 16 novembre 2004, entre les parties, par la Cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Nancy, autrement composée.