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Décisions

Cass. crim., 26 septembre 2006, n° 05-86.583

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Delbano

Avocat général :

Mme Commaret

Avocats :

SCP Lesourd, SCP Bachellier, Potier de la Varde

Toulouse, ch. corr., du 13 oct. 2005

13 octobre 2005

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par la société X, Y Bruno, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, en date du 13 octobre 2005, qui, pour publicité de nature à induire en erreur et infraction à la législation sur le démarchage à domicile, les a condamnés, la première à 15 000 euro d'amende, le second à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 1 000 euro d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils; - Joignant les pourvois en raison de la connexité ; - Vu les mémoires produits en demande et en défense; - Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 385 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 48 de la charte des droits fondamentaux, violation des droits de la défense et du principe de la présomption d'innocence;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les exceptions de nullité de la procédure soulevées in limine titis par les prévenus;

"au motif qu'elles n'avaient pas été soulevées devant le tribunal;

"alors que, dès lors que la nullité de la procédure a été soulevée, pour une cause donnée, devant te tribunal in limine titis, toute nullité doit pouvoir ensuite être soulevée devant la juridiction d'appel";

Attendu que, pour déclarer irrecevables les exceptions de nullité proposées en cause d'appel, l'arrêt attaqué retient que ces exceptions, étrangères à la compétence et à la procédure suivie devant la juridiction du second degré, sont différentes de celles présentées par les prévenus avant toute défense au fond devant le tribunal correctionnel;

Attendu qu'ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des articles 385 et 512 du Code de procédure pénale dont les dispositions ne sont pas contraires à celles, légales et conventionnelles, invoquées au moyen, lequel, dès lors, ne peut qu'être écarté;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 410-2 du Code de commerce, L. 113-3, L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6, alinéa 1, L. 121-6, L. 121-4 et L. 213-1 du Code de la consommation, défaut de motif, manque de base légale;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables d'avoir effectué une publicité comportant des allégations, indications, présentations fausses ou de nature à induire en erreur sur les prix de vente des meubles au magasin King Salons;

"aux motifs que la comparaison des prix pratiqués lors des ventes réalisées, selon les pièces remises par Bruno Y aux agents de l'Administration, montrait que le prix affiché n'était jamais pratiqué, qu'il permettrait un coefficient de marge de 5,54 à 6,55, mais que le prix effectivement payé par le client permettait une marge de 1,68 à 3,93 (généralement proche de 2,60); qu'aucun rabais n'était annoncé aux clients, ni dans les courriers de la société Call Center Games, ni sur les vitrines du magasin ; que constituait une publicité, au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation, tout moyen d'information destiné à permettre au client potentiel de se faire une opinion sur les caractéristiques des biens ou services qui lui étaient proposés ; que le prix affiché sur un meuble renseignait le client potentiel sur la qualité, la valeur marchande de ce bien de consommation ; que l'affichage d'un prix, associé à l'annonce, verbale seulement, d'une ristourne ou du gain d'un bon de réduction, faisait naître chez le client de la société X l'illusion d'une bonne affaire, sans le laisser maître d'apprécier la vérité du gain ou de la réduction puisqu'il raisonnait à partir d'un prix affiché, falsifié ou arbitrairement exagéré, et jamais pratiqué;

"alors, d'une part, qu'est seule interdite la publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent, entre autres, sur le prix et les conditions de vente de biens ou de services qui font l'objet de la publicité; que l'affichage du prix qui se rapporte à l'objet présenté est une obligation légale qui ne peut en aucun cas être constitutive, en tant que telle, d'aucune publicité et a fortiori de publicité mensongère; que la cour constate que les meubles étaient proposés à la vente, avec leurs étiquettes descriptives et les prix affichés et qu'aucun rabais n'était annoncé aux clients, ni dans les courriers de Call Center Games, ni sur les vitrines du magasin; qu'en l'état de ces constatations qui ne caractérisent aucune publicité mensongère, la déclaration de culpabilité apparaît illégale;

"alors, d'autre part, que la pratique d'une ristourne ou du gain d'un bon de réduction sur les prix affichés en magasin proposés au client en dehors de toute publicité, ne constitue nullement une publicité mensongère; que la cour constate que les bons d'achat de 2 500 euro et 3 000 euro offerts aux clients lors de leur visite n'avaient fait l'objet d'aucune annonce dans les courriers de la société Call Center Games ; qu'en l'état de ces énonciations qui ne caractérisent aucune publicité mensongère, la déclaration de culpabilité n'est pas légalement justifiée;

"alors, enfin, que l'article L. 410-2 du Code de commerce dispose que les prix sont librement déterminés; que l'énonciation que les prix affichés n'étaient jamais pratiqués, qu'ils permettaient un coefficient de marge de 5,54 à 6,55 mais que le prix effectivement payé par le client permettait une marge de 1,68 à 3,93, généralement proche de 2,60, ne pouvait non plus caractériser une publicité mensongère dès lors que les étiquettes ne faisaient apparaître que le prix des mobiliers offerts à la vente ; qu'à cet égard, les ristournes et les bons de réduction proposés, pratique commune de tous commerces, ne pouvaient pas davantage constituer une publicité mensongère au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation; qu'à tous égards, la déclaration de culpabilité est privée de base légale";

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette les pourvois.