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Décisions

CJCE, 16 décembre 1992, n° C-304/90

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Reading Borough Council

Défendeur :

Payless Diy Ltd, Wickes Building Supplies Ltd, Great Mills (South) Ltd, Homebase Ltd, B & Q Plc

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Due

Présidents de chambre :

MM. Kakouris, Iglesias, Murray

Avocat général :

M. Van Gerven

Juges :

MM. Mancini, Joliet, de Velasco, Kapteyn, Edward

Avocats :

Mes Newman, Jack, Lasok, Barling, Vaughan, Anderson, Askham, Paines

CJCE n° C-304/90

16 décembre 1992

LA COUR,

1 Par ordonnance du 9 août 1990, parvenue à la Cour le 4 octobre suivant, la Reading and Sonning Magistrates' Court a posé, en vertu de l'article 177 du traité CEE, quatre questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 30 et 36 du traité.

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant le Reading Borough Council, faisant état d'une violation des articles 47 et 59 du Shops Act, aux entreprises Payless DIY, Wickes Building Supplies, Great Mills (South), Homebase et B & Q pour avoir ouvert leurs magasins le dimanche afin de réaliser des opérations commerciales autres que celles qui sont autorisées par l'annexe V de cette loi.

3 L'annexe V du Shops Act énumère les articles qui, par dérogation, peuvent être vendus en magasin le dimanche. Il s'agit, notamment, de boissons alcoolisées, de certaines denrées alimentaires, de tabac, de journaux et d'autres produits de consommation courante.

4 Devant la juridiction nationale, les parties défenderesses au principal ont mis en cause la légalité de la législation nationale au regard de l'article 30 du traité, en faisant valoir que les dispositions litigieuses du Shops Act ne satisfont pas à l'exigence de proportionnalité visée aux points 15 et 16 de l'arrêt de la -u 23 novembre 1989, B & Q (C-145-88, Rec. p. 3851).

5 Face à ces considérations, la Reading and Sonning Magistrates' Court a décidé de surseoir à statuer et de demander à la -e se prononcer à titre préjudiciel sur les questions suivantes:

"1) Lorsque la législation d'un État membre interdit aux détaillants d'ouvrir le dimanche leurs magasins à leur clientèle, afin de veiller dans la mesure du possible à ce que les employés de magasin n'aient pas à travailler le dimanche, en vue du maintien de ce que de nombreuses personnes tiennent pour la tradition du dimanche anglais, un tel objectif est-il justifié en droit communautaire au sens des points 12 à 14 de l'arrêt du 23 novembre 1989, B & Q (C-145-88)?

2) En appliquant la condition formulée par la -e justice au point 15 de l'arrêt Torfaen (la condition de proportionnalité) à cette législation,

a) la juridiction nationale est-elle tenue d'appliquer les conditions visées à l'article 3 de la directive 70-50?

b) Dans l'affirmative, la disposition nationale doit-elle satisfaire à chacune des conditions visées aux tirets du deuxième alinéa de l'article 3?

c) La juridiction nationale a-t-elle pour rôle d'examiner les faits (dans la mesure où ils ont été prouvés) et d'en tirer ses propres conclusions en ce qui concerne l'applicabilité de ces conditions ou son rôle se limite-t-il à se prononcer sur le point de savoir si une instance législative agissant normalement aurait pu ou non adopter la disposition législative en cause, compte tenu de ces conditions?

d) En évaluant les effets restrictifs de la législation nationale sur la libre circulation des marchandises et en comparant également l'effet restrictif exercé sur les échanges éventuels par les divers moyens distincts qui pourraient être utilisés pour atteindre l'objectif de cette législation, la juridiction nationale doit-elle se borner à ne considérer que la mesure dans laquelle les effets sur les importations dépassent les effets sur la production nationale ou peut-elle considérer l'ensemble des effets restrictifs sur les importations intracommunautaires?

e) Faut-il examiner l'effet restrictif en cause sur les échanges en ce qui concerne: l'effet global sur le commerce intracommunautaire de marchandises et/ou de services, ou l'effet sur les domaines d'activité de l'entreprise en cause, ou l'effet sur cette entreprise?

f) Comment une juridiction nationale doit-elle procéder pour comparer les effets restrictifs sur la libre circulation des marchandises, effets découlant de la législation nationale, avec l'objectif de cette législation?

3) L'article 36 du traité a-t-il quelque application à une disposition nationale telle que la disposition en cause et, dans l'affirmative, en quoi consiste cette application?

4) La réponse à une des questions ci-dessus, quelle qu'elle soit, est-elle influencée par l'existence de dérogations à l'interdiction législative d'exercer des activités commerciales le dimanche?"

6 Pour un plus ample exposé des faits et du cadre réglementaire du litige au principal, du déroulement de la procédure ainsi que des observations écrites déposées devant la Cour, il est renvoyé au rapport d'audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

7 Par sa première question, la juridiction nationale soulève un point d'interprétation de l'arrêt B & Q, précité.

8 Il y a lieu de rappeler que, dans les arrêts du 28 février 1991, Conforama (C-312-89, Rec. p. 997) et Marchandise (C-332-89, Rec. p. 1027), la Cour a précisé que l'article 30 du traité doit être interprété en ce sens que l'interdiction qu'il prévoit ne s'applique pas à une réglementation nationale interdisant d'occuper des travailleurs le dimanche.

9 En outre, par l'arrêt rendu ce même jour, Council of the City of Stoke-on-Trent et Norwich City Council (C-169-91), la Cour dit pour droit que l'article 30 du traité doit être interprété en ce sens que l'interdiction qu'il prévoit ne s'applique pas à une réglementation nationale interdisant aux commerces de détail d'ouvrir le dimanche.

10 Il convient d'apporter la même réponse à la première question posée dans la présente affaire.

11 Étant donné la réponse apportée à cette question, il n'y a pas lieu de statuer sur les autres questions préjudicielles.

Sur les dépens

12 Les frais exposés par le Gouvernement du Royaume-Uni et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR,

Statuant sur les questions à elle soumise par la Reading and Sonning Magistrates' Court, par ordonnance du 9 août 1990, dit pour droit:

L'article 30 du traité doit être interprété en ce sens que l'interdiction qu'il prévoit ne s'applique pas à une réglementation nationale interdisant aux commerces de détail d'ouvrir le dimanche.