CA Rennes, 2e ch. com., 28 novembre 2006, n° 05-04286
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Garage Roger (SARL)
Défendeur :
Keralum (SARL), Réagroup Bretagne (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Guillanton
Conseillers :
Mme Cocchiello, Jeannesson
Avoués :
SCP d'Aboville, de Moncuit Saint-Hilaire & Le Callonnec, SCP Brebion, Chaudet, SCP Castres, Colleu, Perot & Le Couls-Bouvet
Avocats :
Selarl Le Porzou & David, Me Gosselin, SCP Vogel & Vogel
I - Exposé du litige:
La société Renault (succursale de Rennes) et la SARL Garage Roger ont conclu le 22 janvier 1997 un "contrat d'Agent service" à durée indéterminée. Par la suite, dans le cadre d'une restructuration, les différentes succursales composant le réseau commercial de la société Renault ont pris la forme d'une entité juridique autonome : la société Renault France Automobiles (RFA). La succursale Renault de Rennes est devenue la SAS RFA Bretagne.
C'est ainsi que la SAS RFA Bretagne a été subrogée dans l'ensemble des droits et obligations de la société Renault. La SAS RFA Bretagne est intervenue en conséquence volontairement à la procédure initialement dirigée vers la société Renault.
Le "contrat Agent service" signé le 22 janvier 1997 a fait l'objet de deux avenants : l'un en 2001 et l'autre en 2002, intitulés " contrat d'Agent service, indicateur d'affaire ou mandataire".
En janvier 2001, la SARL Garage Roger avait informé la SAS RFA Bretagne de son intention de vendre le garage. La SAS RFA Bretagne a indiqué à la SARL Garage Roger le nom de Monsieur Keralum qui a donc pris contact avec la SARL Garage Roger et a eu en mains des documents comptables.
Un projet de compromis de vente a été rédigé par Maître Dartois, notaire à Bédée. Le compromis de vente devait être signé devant le notaire le 24 avril 2002 mais la date a été reportée au 22 mai 2002 sur demande de Monsieur Keralum.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 mai 2002, Monsieur Keralum a fait savoir qu'il n'était plus intéressé. Il a fait l'acquisition d'un fonds de commerce exploité à l'enseigne de Peugeot.
Le 9 septembre, la SAS RFA Bretagne adressait un courrier informatif à la clientèle de l'installation d'une nouvelle agence Renault à Pleumelec.
Le 12 septembre 2002, la SAS RFA Bretagne résiliait le contrat d'agent service de la SARL Garage Roger avec un préavis de six mois.
Par acte du 14 avril 2003, la SARL Garage Roger a fait assigner la SAS RFA Bretagne et la SARL Keralum devant le Tribunal de commerce de Saint-Brieuc.
Par jugement en date du 10 mai 2005, le Tribunal de commerce de Rennes a:
- pris acte de l'intervention volontaire de la SAS RFA Bretagne et prononcé la mise hors de cause de la société Renault,
- débouté Monsieur Keralum de sa demande d'irrecevabilité de l'action de la SARL Garage Roger,
- débouté la SARL Garage Roger de l'ensemble de ses demandes principales et subsidiaires,
- débouté les parties de leur demande d'exécution provisoire,
- condamné la SARL Garage Roger à payer des frais irrépétibles et les dépens de l'instance.
La SARL Garage Roger a régulièrement interjeté appel de cette décision le 15 juin 2005.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées le 7 septembre 2006 pour la SARL Garage Roger, le 25 septembre 2006 pour la société Réagroup Bretagne anciennement SAS RFA Bretagne et le 3 octobre 2006 pour la SARL Keralum.
II - Motifs :
La SARL Garage Roger conclut à la réformation du jugement et sollicite de:
- dire et juger applicable le statut d'agent commercial à la SARL Garage Roger,
- dire et juger qu'elle était liée à la SAS RFA Bretagne par un mandat d'intérêt commun,
- dire et juger que la SARL Keralum agissant de concert avec la SAS RFA Bretagne a détourné la clientèle de la SARL Garage Roger,
- condamner solidairement la SAS RFA Bretagne et la SARL Keralum à lui verser la somme de 633 046,33 euro avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
subsidiairement,
- dire et juger irrégulière la rupture du contrat d'agent service de la SARL Garage Roger,
- dire et juger que la SAS RFA Bretagne a manqué à son obligation de loyauté à son égard, que la SARL Keralum de collusion frauduleuse avec la SAS RFA Bretagne a entrepris des manœuvres visant à détourner la clientèle de la SARL Garage Roger et les condamner à lui payer la somme de 633 046,33 euro avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
très subsidiairement,
- ordonner une expertise afin de déterminer le préjudice de la SARL Garage Roger,
en tout état de cause,
- condamner la SARL Keralum à restituer à la SARL Garage Roger l'ensemble de ses documents comptables sous astreinte,
- dire que la SARL Keralum n'est pas propriétaire du compresseur de ressorts,
- condamner solidairement la SAS Réagroup Bretagne venant aux droits de la SAS RFA Bretagne et la SARL Keralum à lui payer 3 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et les condamner aux dépens.
La SAS Réagroup Bretagne sollicite la confirmation du jugement et subsidiairement demande de constater que la SARL Garage Roger n'établit pas la réalité de son préjudice pas plus qu'elle ne justifie du lien de causalité avec les fautes alléguées, plus subsidiairement de limiter le montant des indemnités au préjudice réellement démontré, étant précisé que la perte de marge nette subie par la SARL Garage Roger à la suite de la résiliation de son contrat d'agent ne s'élèverait au plus qu'à 5 564 euro sur six mois, et condamner la SARL Garage Roger à lui payer des frais irrépétibles.
La SARL Keralum demande de:
- confirmer le jugement,
- mettre Monsieur SARL Keralum hors de cause sur le fondement de l'article 1165 du Code civil en ce qu'il ne peut être tenu pour responsable des conséquences d'un contrat auquel il est tiers,
- constater que la demande présentée par la SARL Garage Roger à l'encontre de Monsieur SARL Keralum est exclusivement fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil,
- dire et juger que la rupture de la convention passée entre la SARL Garage Roger et la SAS RFA Bretagne ne peut concerner Monsieur SARL Keralum en application de l'article 1165 du Code civil et que sa rupture ou son exécution ne peuvent lui nuire directement ou indirectement,
- débouter la SARL Garage Roger de ses demandes à l'encontre de Monsieur SARL Keralum,
subsidiairement,
- dire qu'il n'existe aucun préjudice en relation causale certaine et directe entre la faute prétendue et le préjudice invoqué,
- subsidiairement, dire n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamner la SARL Garage Roger à lui payer des frais irrépétibles.
Sur la recevabilité de l'action de la SARL Garage Roger:
La SARL Keralum soutient que la SARL Garage Roger qui a cédé son fonds de commerce est dépourvue d'intérêt et qualité à agir.
La SARL Garage Roger a conclu un contrat d'agent de service Renault avec la succursale Renault de Rennes le 22 janvier 1997. Ce contrat a été résilié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 12 septembre 2002 adressée à la SARL Garage Roger. Le projet de compromis de vente du fonds de commerce établi par Maître Dartois le 6 mai 2002, resté sans suite, prévoit que le cédant est la SARL Garage Roger et le cessionnaire Monsieur Keralum. Il est constant que le 9 septembre 2002, Monsieur Keralum était devenu Agent Renault. Par acte en date du 14 avril 2003, la SARL Garage Roger qui n'a vendu son fonds de commerce que suivant acte reçu par Maître Pierre-Bourgeon le 30 avril 2004, a fait assigner la SAS RFA Bretagne et "le garage Keralum" pour voir constater notamment sur le fondement des articles 1382 et 1383 que la SAS RFA Bretagne et le Garage Keralum avaient commis une faute en détournant la clientèle de la SARL Garage Roger et réclamer des dommages-intérêts. L'intérêt à agir s'apprécie à la date de l'introduction de l'instance et n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action. Dans ces conditions, la SARL Garage Roger avait un intérêt légitime, né et actuel et qualité à agir au 14 avril 2003 à l'encontre du "Garage Keralum".
Sur l'application du statut d'agent commercial à l'activité de la SARL Garage Roger:
1) Sur la nullité de la clause de renonciation alléguée par la SARL Garage Roger:
Aux termes de l'article L. 134-1 du Code de commerce : " L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé de négocier et éventuellement de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux."
L'article L. 134-15 du Code de Commerce dispose : "Lorsque l'activité d'agent commercial est exercée en exécution d'un contrat écrit passé entre les parties à titre principal pour un autre objet, celles-ci peuvent décider par écrit que les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la partie correspondant à l'activité d'agence commerciale. Cette renonciation est nulle si l'exécution du contrat fait apparaître que l'activité d'agence commerciale est exercée en réalité à titre principal ou déterminant. "
Le contrat conclu entre la SARL Garage Roger et la SAS RFA Bretagne stipule en son article 1-1:
" A titre principal, l'Agent Service est un commerçant qui agit en son propre nom et pour son propre compte afin d'assurer:
- la prestation de l'ensemble des services après-vente nécessaires à la garantie, à l'entretien et à la réparation des véhicules des marques distribuées par Renault, quel que soit le lieu d'achat du véhicule en question,
- la commercialisation des pièces de rechange fournies et distribuées par Renault;
- la réalisation des prestations de services liées à l'une des garanties offertes dans le réseau commercial du constructeur lors de la vente de véhicules d'occasion,
- la commercialisation des accessoires fournis et distribués par Renault ...
A titre accessoire, l'Agent Service est habilité à agir en qualité soit d'indicateur soit de mandataire du concessionnaire en vue de la vente de l'ensemble des véhicules neufs des marques distribuées par Renault...
1) Si l'agent service intervient en qualité de mandataire accessoire pour négocier à titre exclusif et pour le compte de son concessionnaire la vente de véhicules neufs des marques distribuées par Renault, ce qu'il ne pourra faire de façon active que dans la limite du territoire du concessionnaire, les parties conviennent, conformément à l'article 15 de la loi du 25 juin 1991 que les dispositions de ladite loi ne sont pas applicables à cette activité.
Si toutefois l'exécution du contrat faisait apparaître que l'activité de vente de véhicules neufs est exercée, à titre principal au déterminant, les dispositions de la loi du 25 juin 1991 seraient applicables à cette activité, à l'exclusion de son activité de prestations de services, de revente de pièces de rechange et d'accessoires, de ventes de véhicules d'occasion ou autres, dans lequel l'Agent Service agit toujours en son propre nom et pour son propre compte."
La SARL Garage Roger soutient que l'activité de mandataire de la concession Renault revêtait pour elle un caractère déterminant, qu'en effet, la prestations de services qu'elle assurait étaient indissociables de l'activité de mandataire en ce qu'elles sont toutes accomplies sous l'enseigne Renault, que la clientèle développée par elle est exclusivement une clientèle Renault, que son activité agent Renault représentait 80 % du chiffre d'affaires de l'activité réparation et que cette activité était subordonnée à son activité de vente de véhicules neufs, cette vente étant déterminante dans la mesure où elle permet d'assurer le service après-vente de Renault. Elle cite à cet effet un arrêt de la Cour d'appel de Grenoble en date du 8 novembre 2001 et un arrêt de la Cour d'appel de Nîmes en date du 17 avril 2003.
Il ressort de l'article 1-1 du contrat précité que la SARL Garage Roger assure la prestation de l'ensemble des services après-vente nécessaires à la garantie, à l'entretien et à la réparation des véhicules des marques distribuées par Renault, quel que soit le lieu d'achat du véhicule en question, ce qui signifie que cette prestation de services ne dépend pas des véhicules neufs vendus par la SARL Garage Roger dans son activité de mandataire, laquelle n'est en conséquence pas déterminante pour ce faire. De surcroît, le même contrat prévoit en son article 2-4 que l'Agent Service a la possibilité d'effectuer sous sa seule responsabilité des interventions sur des véhicules d'autres marques que celles du constructeur.
C'est donc à juste titre et par des motifs exacts et pertinents expressément adoptés par la cour que le tribunal a constaté que l'activité de mandataire de la SARL Garage Roger restait accessoire, peu important que la SARL Garage Roger ne soit pas inscrite au registre spécial des agents commerciaux, étant spécifié que les commissions perçues par la SARL Garage Roger représentaient 0,62 % du chiffre d'affaires HT sur l'exercice mars 2001- mars 2002, critère d'appréciation non critiqué par la Cour de cassation (Chambre commerciale, 12 juillet 2005, pourvoi n° 04-12.983) et que c'est l'activité de mandataire qui doit être appréciée et non l'activité résultant de l'enseigne Renault.
2) Sur la qualification de mandat d'intérêt commun :
La SARL Garage Roger soutient que le contrat d'Agent Service procure des avantages à chacune des parties et que l'objectif commun est l'accroissement de clientèle.
Le contrat ne prévoit pas de mandat à titre principal mais seulement à titre accessoire. Il n'est aucunement démontré que la SARL Garage Roger ait agi à titre de mandataire de la SAS RFA Bretagne dans son activité principale, c'est-à-dire au nom et pour le compte de la SAS RFA Bretagne, et l'activité accessoire dont il vient d'être dit qu'elle n'est pas déterminante ne peut conférer au contrat d'Agent Service la qualification de mandat d'intérêt commun.
La SARL Garage Roger doit être déboutée de sa demande et le jugement sera confirmé.
Sur l'irrégularité de la résiliation du contrat :
1) Au regard du Règlement CE n° 1475-95 de la Commission européenne du 28 juin 1995:
La SARL Garage Roger fait valoir que le Règlement CE n° 1475-95 applicable aux accords par lesquels le cocontractant fournisseur charge le cocontractant revendeur de promouvoir la distribution et le service de vente et d'après-vente de produits déterminés du secteur des véhicules automobile et donc applicable en l'espèce, prévoit un délai de préavis de deux ans alors que le délai de préavis stipulé à l'article 8-1 litigieux fixe ce délai à six mois.
L'article 1er du Règlement CE n° 1475-95 du 28 juin 1995 dispose que :
"Conformément à l'article 85 § 3 du traité, l'article 85 § 1 est déclaré inapplicable, dans les conditions fixées par le présent règlement, aux accords auxquels ne participent que deux entreprises et dans lesquels une partie à l'accord s'engage vis-à-vis de l'autre à ne livrer, à l'intérieur d'une partie définie du Marché commun:
1) que à celle-ci ou
2) que à celle-ci et à un nombre déterminé du réseau de distribution, dans le but de la revente des véhicules automobiles neufs déterminés à trois roues ou plus destinés à être utilisés sur la voie publique et, en liaison avec ceux-ci, leurs pièces de rechange."
Le Règlement CE n° 1475-95 concerne en conséquence des accords d'exclusivité relatifs à la livraison pour revente de véhicules automobiles neufs déterminés et, en liaison avec ceux-ci, leurs pièces de rechange. En l'espèce, la SARL Garage Roger ne fait pas de l'achat pour revendre mais est mandatée par son concessionnaire pour vendre au nom et pour le compte de celui-ci, elle n'exerce pas son activité dans le cadre d'un réseau de distribution exclusive et son activité principale de réparation et d'entretien et commercialisation de pièces de rechange n'est pas liée aux seules voitures neuves Renault vendues. Le Règlement CE n° 1475-95 ne lui est pas applicable.
2) Sur le caractère abusif de la résiliation:
La SARL Garage Roger expose que la SAS RFA Bretagne a gravement manqué à l'obligation de loyauté qui lui incombe, en parfaite collusion frauduleuse avec la SARL Keralum, et que la rupture de relations contractuelles anciennes a été brutale et abusive compte tenu de la brièveté du délai de six mois. Elle soutient que le non-respect d'un délai de préavis raisonnable qui est suffisant à lui seul pour caractériser une rupture abusive est accompagné de nombreux agissements déloyaux. Elle sollicite la condamnation solidaire de la SAS RFA Bretagne et de la SARL Keralum à lui payer la somme de 633 046,33 euro correspondant au revenu d'activité généré par l'enseigne Renault sur deux années (623 608,66 euro) et au préjudice matériel subi du fait de la dénonciation de son contrat (9 437,67 euro). La SARL Garage Roger se fonde sur les articles 1134 et 1147 du Code civil à l'égard de la SAS RFA Bretagne et sur les articles 1382 et 1383 du Code civil. Dans les deux régimes de responsabilité, il convient de rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité directe entre les deux.
Sur la brièveté du délai de préavis :
La SARL Garage Roger a en toute connaissance de cause accepté la clause du contrat à durée indéterminée conclu le 22 janvier 1997 prévoyant que dans l'intérêt réciproque des parties, celle qui désirerait y mettre fin devra en prévenir l'autre par lettre recommandée avec accusé de réception en respectant un préavis de six mois. Ce délai de préavis a été respecté par la SAS RFA Bretagne. A l'appui de sa demande, la SARL Garage Roger cite une jurisprudence de la Cour d'appel de Limoges qui a considéré que la rupture abusive de relations contractuelles de 20 ans était exclusivement représentée par la brièveté du délai de préavis qui a fait subir à l'agent un changement considérable de sa situation professionnelle dans des circonstances imprévisibles. Or, sur ce point, la SARL Garage Roger ne justifie d'aucune circonstance particulière qui lui aurait laissé espérer fallacieusement la poursuite du contrat ou qui ait justifié l'octroi d'un délai plus long, le seul fait qu'elle ait engagé des frais en vue de remplir les conditions de normes exigées par la concession Renault soit 9 437,67 euro, qui correspondent à l'acquisition d'un ordinateur en janvier 2001 pour la somme de 2 552,61 euro ou à des loyers de crédit-bail mobilier à compter d'avril 2000, très antérieurs à la résiliation du contrat, et qui résultent de la simple exécution de son contrat d'agent service, étant insuffisant à démontrer l'abus de droit. Par ailleurs, outre que la SARL Garage Roger ne démontre pas avoir subi une perte de deux années d'activité, elle ne rapporte pas non plus la preuve que ce prétendu préjudice soit en relation directe avec le caractère brutal de la rupture invoqué.
Elle doit être déboutée de sa demande à ce titre.
2) Sur les agissements déloyaux:
Il est constant qu'au cours de l'année 2001 Monsieur Roger a averti la SAS RFA Bretagne de son intention de vendre son garage, envisageant ainsi de mettre fin à ses relations contractuelles avec la SAS RFA Bretagne, et que celle-ci lui a adressé Monsieur SARL Keralum. Les négociations entreprises ont abouti à un deuxième projet de compromis de vente en date du 6 mai 2002 qui a échoué. Il ressort d'un courrier de Monsieur et Madame Keralum en date du 18 mai 2002 adressé à Monsieur Roger et non contesté, qu'il a été, par son comportement, à l'origine de l'échec de la vente. En vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, Monsieur Keralum était libre de s'installer en qualité d'Agent Service Renault à Plemeleuc, étant rappelé qu'aucune exclusivité n'est attachée à cette activité.
Au motif que les agissements déloyaux constitutifs d'un détournement de clientèle sont constitués, dont il résulte nécessairement un préjudice pour la victime, la SARL Garage Roger réclame précisément et exclusivement la somme de 633 046,33 euro correspondant au revenu d'activité généré par l'enseigne Renault sur deux années soit 623 608,66 euro et la somme de 9 437,67 euro du fait de la dénonciation de son contrat. Si effectivement les agissements déloyaux, dès lors qu'ils sont établis, génèrent un préjudice, encore faut-il que le préjudice dont la réparation est sollicitée soit en lien direct avec les agissements fautifs constatés. En l'espèce, à défaut de tout autre préjudice réclamé, il convient de constater que la somme de 9 437,67 euro n'est pas demandée du fait desdits agissements et qu'il n'est démontré aucun lien de causalité directe entre ces mêmes agissements et la perte, de surcroît non justifiée, de deux années d'activité, étant observé que la SARL Garage Roger, qui ne fait pas non plus la preuve d'une perte de clientèle, a cédé son fonds de commerce le 30 avril 2004 au prix de 129 500 euro alors que le projet de compromis de vente en date du 6 mai 2002 prévoyait un prix de vente de 121 960 euro. Dans ces conditions, la demande de la SARL Garage Roger sur ce fondement ne peut prospérer.
La demande subsidiaire formée par la SARL Garage Roger de désignation d'un expert pour établir son préjudice sera rejetée, une mesure d'instruction n'ayant pas pour objet de suppléer à la carence des parties dans l'administration de la preuve.
Sur les autres demandes:
Il n'est pas démontré que la SARL Keralum ait en mains les documents comptables (bilans) de la SARL Garage Roger alors que ces documents doivent être publiés au RCS et sont ainsi aisément consultables.
S'agissant de la propriété du compresseur de ressort, la SARL Keralum n'oppose aucun moyen ou argument à la demande de la SARL Garage Roger à laquelle il sera fait droit.
La SARL Keralum sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, la mauvaise foi de la SARL Garage Roger n'étant pas démontrée.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAS RFA Bretagne et de la SARL Keralum les frais irrépétibles qu'elles ont engagés pour faire valoir leurs droits. La SARL Garage Roger sera condamnée à payer à la SAS RFA Bretagne la somme de 1 200 euro et à la SARL Keralum celle de 2 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs, Décerne acte à la SAS Réagroup Bretagne anciennement SAS RFA Bretagne de sa nouvelle dénomination sociale, Réforme partiellement le jugement déféré, Dit que la SARL Keralum n'est pas propriétaire du compresseur à ressort, Pour le surplus, Confirme le jugement, Y ajoutant, Condamne la SARL Garage Roger à payer la somme de 1 200 euro à la SAS Réagroup et la somme de 2 000 euro à la SARL Keralum en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la SARL Garage Roger aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.