Conseil Conc., 7 décembre 2006, n° 06-D-37
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Décision
Pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles et produits pour cyclistes
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur le rapport oral de M. Avignon par Mme Aubert, vice-présidente, Mme Mader-Saussaye, MM. Combe, Flichy, Piot membres.
Le Conseil de la concurrence (secteur IV),
Vu la lettre enregistrée le 8 septembre 2004, sous le numéro 04/0063 F, par laquelle le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles et produits pour cyclistes ; Vu les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et le décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 ; Vu les observations présentées par les sociétés MC2R (Master Cycle), Cycles Cesbron, Collard et fils, Cycles Chiasson, Isly 2000, Sports cyclistes (cycles Pilorget), Cyclosport Pedegaye (Velocite), Cycles Chauvière, Robert (Cycles Robert), Le Penven, La cyclerie Pierre Rossé sport, société entreprise individuelle Dominique Nicole, José Alvarez SAS, SA Nethub, SARL Cycles et sports Tilly, SARL Ryder France, SARL Revaxion, SARL 2F2G, SARL Sofretin, SARL Toinet, SARL Vélo plus, Bicicletas de Alava, SARL Santini France, Look cycle international, Hutchinson SNC, Auchan France, Décathlon, Shimano France, Michelin, Time Sport international, Etablissements René Valdenaire, SN Intercycles SA, Royal Vélo France, Sidi Sport SRL, entreprise Yves Gauthier, et par le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement, les représentants des sociétés MC2R (Master Cycle), Cycles Cesbron, Collard et fils, Cycles Chiasson, Isly 2000, Sports cyclistes (Cycles Pilorget), Cyclosport Pedegaye (Velocite), Cycles Chauvière, Robert (cycles Robert), Le Penven, La cyclerie Pierre Rossé sport, société entreprise individuelle Dominique Nicole, José Alvarez SAS, SA Nethub, SARL Cycles et sports Tilly, SARL Ryder France, SARL Revaxion, SARL 2F2G, SARL Sofretin, SARL Toinet, SARL Vélo plus, Bicicletas de Alava, SARL Santini France, Look Cycle international, Hutchinson SNC, Auchan France, Décathlon, Shimano France composants cycles, Michelin, Time Sport international, établissements René Valdenaire, SN Intercycles SA, Royal Vélo France, entreprise Yves Gauthier, Les Créations Jean-Pierre, Wilier Triestina SPA, entendus lors de la séance du 11 octobre ; les sociétés Sidi sport SRL, Michenon, Two Lambs, Philamy, Sintema Fork SRL, ayant été règulièrement convoquées ; La représentante de la société Bouticycle toulousain entendue sur le fondement des dispositions de l'article L. 463-7 du Code de commerce ; Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LE SECTEUR DE LA DISTRIBUTION DE CYCLES ET DE PRODUITS POUR CYCLISTES
1. LES PRODUITS
1. En France, près de 20 millions de personnes font du vélo. Cette pratique reste occasionnelle et relève plus souvent du loisir que de l'exercice sportif ou d'un moyen de déplacement. Le vélo est majoritairement pratiqué par les hommes, par les personnes de moins de 50 ans (surtout par les personnes qui ont entre 25 et 35 ans).
2. Les cycles regroupent les vélos de ville, les vélos de course, les vélos tout chemin (VTC) et les vélos tout terrain (VTT).
3. Les produits pour cyclistes regroupent les équipements (cadres, fourches, guidons, selles, pédaliers, roues, freins, dérailleurs) et la bonneterie (cuissards, chaussures, vêtements).
4. Les données sur le marché sont nombreuses et principalement recueillies par l'observatoire du cycle créé par le Conseil national des professions du cycle (CNPC). Les nomenclatures des familles de cycles et les magasins pris en compte dans les grandes surfaces spécialisées ont été modifiés en 2002 et interdisent la comparaison de certains résultats antérieurs à 2001 (ce qui explique la présentation de tableaux distincts selon ces années).
5. Le nombre de vélos mis sur le marché (hors vélos jouets) a évolué comme suit :
6. Le nombre de vélos vendus, en volume et en valeur, a évolué comme suit (données CNPC) :
<emplacement tableau>
7. Le CNPC calcule, chaque année, le niveau moyen de prix par famille de cycles. Les prix moyens sont reportés ci-après :
8. En 2001, le prix de vente moyen d'un vélo, toutes catégories confondues, a augmenté de 9 %. On relève surtout une augmentation de plus de 100 euro du prix moyen du vélo de course.
9. Au sein de la catégorie produit pour cyclistes, le CNPC distingue les composants et les accessoires.
10. La consommation de ces différents produits a évolué comme suit :
<emplacement tableau>
2. LES FOURNISSEURS
11. Les fournisseurs de cycles et produits pour cyclistes regroupent des fabricants de cycles, des équipementiers et des grossistes. Les grandes surfaces spécialisées interviennent également comme fabricants, principalement pour les produits de marque de distributeurs.
Les principaux fabricants de cycles
12. Le secteur de la fabrication de cycles est dominé par les deux filiales du groupe suédois Cycleurope, un des principaux fabricants de cycles en Europe. Les sociétés Cycleurope Romilly (vélos de marque Gitane et Bianchi) et Cycleurope Industries ont réalisé en 2002 un chiffre d'affaires de 53 et 61 millions d'euro. Le groupe Cycleurope a créé en 1998 sa propre enseigne de commercialisation avec les franchisés Vélo et Oxygen.
13. Le groupe hollandais Accel Group, deuxième fabricant européen de cycles, possède deux filiales françaises, les sociétés Cycles Mercier France Loire et Cycles Lapierre. Ces sociétés ont réalisé en 2002 un chiffre d'affaires de 16 et 26 millions d'euro.
14. Le groupe japonais Yamaha corporation est présent sur le marché français du vélo via la société MBK Industrie.
15. Le groupe Renault est également fabricant de vélos par l'intermédiaire de sa filiale Renault Sport.
16. D'autres fabricants commercialisent des vélos sur le marché français tels que la société Planet Fun (spécialisée dans la fabrication de vélos pour les grandes surfaces telles que Décathlon, Go Sport et des hypermarchés), la société Mavic, qui appartient au groupe Adidas-Salomon depuis 1994, et la société Quantum International.
17. Enfin, des fabricants de cycles haut de gamme telles les sociétés italiennes Campagnolo, leader mondial du vélo route, Wilier, et la société espagnole Bicicletas de Alava (BH) interviennent sur le marché français par l'intermédiaire de réseaux de revendeurs.
Les principaux équipementiers
18. Les équipementiers fabriquent des composants et accessoires pour cycles.
19. La société Look Cycle international est leader mondial dans le secteur des pédales automatiques sur route et du cadre en carbone. Cette PME qui a réalisé en 2003 un chiffre d'affaires de 24,8 millions d'euro, dont 62 % à l'export, est également spécialisée dans la fabrication de pédales en carbone et de chaussures. Ses produits sont destinés au marché haut de gamme.
20. Le groupe Zéfal est le leader mondial de l'accessoire et de la pièce détachée pour vélos. Ce groupe orléanais contrôle la société Zéfal, spécialisée dans les pompes à vélos et les antivols, la société Chapak, fabricant de vêtements haut de gamme et d'accessoires pour cyclistes, et le réseau de distributeurs Véloland. En 2002, le groupe a réalisé un chiffre d'affaires de 16,4 millions d'euro, en majorité sur les marchés étrangers.
21. La société Time Sport international conçoit et fabrique des cadres, fourches, pédales et chaussures pour des vélos de course et VTT. La filiale française a réalisé en 2003 un chiffre d'affaires de 13,6 millions d'euro, dont 65 % à l'export.
22. La société Mavic est le leader français de la fabrication des roues de vélos.
23. Enfin, la société Shimano France est une filiale du groupe japonais Shimano, leader mondial dans l'accessoire. Elle est l'importateur, non exclusif, en France des produits de marque Shimano et a réalisé en 2003 un chiffre d'affaires de 14 millions d'euro.
Les grossistes
24. La société José Alvarez est une filiale du groupe Nethub depuis décembre 2000. Elle est importatrice d'articles de cyclisme et distribue notamment la marque Look aux adhérents du réseau Bouticycles qu'elle a créé en 1999. En 2002, elle a réalisé un chiffre d'affaires de 30 millions d'euro, dont 55 % réalisé avec le réseau de détaillants Bouticycles.
25. La société Royal Vélo France distribue des accessoires pour cycles et est l'importateur exclusif en France des chaussures cyclistes haut de gamme de marque Sidi.
26. Enfin, la société Valdenaire est l'importateur exclusif en France des cadres haut de gamme de marque Kuota fabriqués par l'entreprise italienne Sintema.
Les distributeurs au stade du détail
27. Les cycles et produits pour cyclistes sont commercialisés dans les grandes surfaces alimentaires, dans les grandes surfaces spécialisées et multisports (Décathlon, Go Sport ...) ainsi que chez des détaillants spécialisés.
28. Les principales enseignes de grandes surfaces spécialisées sont Décathlon (212 points de vente en France en septembre 2004), Go Sport (117 points de vente) et Super Sport (47 points de vente).
29. Les principales enseignes de détaillants multisports sont Sport 2000 (414 points de vente en France en septembre 2004), Intersport (402), Twinner (220) et Technicien du Sport (87).
30. A ces enseignes "multisports" s'ajoutent des enseignes de détaillants spécialisés dans le vélo. L'enseigne Vélo et Oxygen est contrôlée par le fabricant Cycleurope et regroupe 700 points de vente franchisés. L'enseigne Culture Vélo, contrôlée par la société Dossard 51, regroupe 38 points de vente, l'enseigne Véloland, contrôlée par le groupe Zéfal, compte 34 points de vente, dont 5 en succursales et 29 en franchise, l'enseigne Bouticycle, créée par la société José Alvarez, regroupe 120 détaillants, et l'enseigne Master Cycle, regroupe 28 points de vente.
31. Deux enseignes de détaillants spécialisés sont considérées par la profession comme des discounters. Il s'agit de l'enseigne Districycle, qui regroupe 25 franchisés en 2003, et de la société Serge Dutouron, spécialisée dans la vente par correspondance (plus de 50 % de son chiffre d'affaires).
32. La répartition des ventes de vélos entre ces trois circuits de distribution était la suivante (données CNPC) :
33. Les informations tirées de la base Xerfi montrent que la part des ventes en valeur des détaillants spécialisés a augmenté de 6 % en 2001 et de 5 % en 2003. Depuis cette date, ceux-ci tendent cependant à céder des parts de marché au profit des grandes surfaces multisports (Décathlon, Go Sport, etc ...), dans une croissance du marché intérieur alimentée essentiellement par les importations.
34. Les produits distribués dans ces trois réseaux ne sont pas totalement équivalents. Alors qu'en 2003, plus de 55 % des vélos jouets étaient commercialisés dans les grandes surfaces alimentaires et 10 % chez les détaillants spécialisés, 81 % des vélos de course étaient commercialisés par les détaillants spécialisés et 2 % seulement dans les grandes surfaces alimentaires. Les vélos à bas prix (entrée de gamme) sont principalement distribués dans les grandes surfaces alimentaires, les vélos de moyennes gammes (VTC) dans les grandes surfaces spécialisées et les hauts de gamme chez les détaillants.
35. Cela se traduit par des écarts de prix moyens significatifs des cycles vendus dans les trois réseaux (données CNPC) :
<emplacement tableau>
36. En 2001, le niveau moyen des prix pour les cycles commercialisés chez les détaillants spécialisés a augmenté de 30 %, alors que sur la même période, il a augmenté de 6 % dans les grandes surfaces spécialisées et baissé de 2 % dans les grandes surfaces alimentaires. En 2002, le prix moyen des détaillants spécialisés a augmenté de 11 %, alors qu'il a baissé de 1 % dans les deux autres réseaux. En 2003, le prix moyen des détaillants spécialisés a augmenté de 2,5 %.
37. Depuis plusieurs années, les grandes surfaces perdent du terrain au profit des grandes surfaces multisports alors que les détaillants spécialisés se maintiennent et restent leader pour les ventes en valeur.
38. Les composants et accessoires sont commercialisés principalement chez les détaillants spécialisés (45 % en 2003), dans les grandes surfaces spécialisées et multisport (37 % en 2003) puis dans les grandes surfaces alimentaires (18 % en 2003).
39. Le chiffre d'affaires annuel des trois réseaux de distribution, pour les cycles et les produits périphériques (composants de vélos, cadres, accessoires et équipement de la personne) est évalué comme suit :
<emplacement tableau>
B. LES FAITS ET LES GRIEFS NOTIFIÉS
1. LES FAITS
40. L'enquête menée à la suite d'une lettre de la SARL Centrale Districycles adressée au ministre de l'Economie dénonçant le comportement d'un réseau de revendeurs groupés au sein du GIE Master Cycle a permis d'analyser le comportement des acteurs présents sur le marché de la distribution des cycles et produits pour cyclistes.
41. Il est apparu dans l'enquête que des fournisseurs intervenant en tant que fabricants, importateurs ou grossistes et des distributeurs agissant dans le cadre de sociétés indépendantes des réseaux de distribution ou des grandes surfaces spécialisées se sont réunis et sont susceptibles d'avoir coordonné leur politique commerciale en vue de fixer des prix de vente minima de leurs produits. Il est d'autre part apparu que les distributeurs et les fournisseurs ont agi ensemble ou séparément pour faire respecter le niveau de ces prix en menaçant de cesser ou en cessant leurs relations commerciales avec le partenaire qui ne respectait pas les consignes.
42. L'analyse du dossier a fait également apparaître que des fournisseurs ont interdit aux détaillants de rétrocéder ou d'échanger des produits entre eux et ont empêché les "discounters" de s'approvisionner auprès de fournisseurs d'autres pays de la Communauté européenne.
43. Ces pratiques mises en œuvre par les fournisseurs de produits pour cycles et leurs distributeurs sont évoquées par des documents saisis lors de l'enquête administrative et par des déclarations des entreprises en cause.
44. Elles ont concerné essentiellement quatre types d'intervenants dans le secteur de la distribution des produits pour cycles :
??les fournisseurs de cycles et produits pour cycles : les sociétés Look, Hutchinson, Michelin, Shimano, Les Créations Jean-Pierre, Intercycles Bicicletas de Alava, Time Sport international, Willier et Sidi ;
??les grossistes et importateurs de cycles, comme les sociétés Valdenaire, Royal Vélo France, Philamy, Two Lambs ;
??les réseaux de distribution spécialisés Master Cycle, Bouticycles et leurs membres ;
??les grands distributeurs Auchan et Décathlon.
La concertation sur les prix au sein du GIE Master Cycle
Le fonctionnement du GIE Master Cycle
45. Le réseau de détaillants Master Cycle a été créé sous la forme juridique d'un groupement d'intérêt économique constitué le 4 avril 1997 (cote 2318-2333).
46. Les membres fondateurs du GIE étaient les personnes suivantes : la société La Cyclerie (Pierre Rossé Sport), la société Etablissements Muller (Cycles Vincent Muller), la société cycles Robert, la société Cycles Chiasson, M. Dominique X... (entreprise en nom personnel), société Cycles Cesbron, la société Cycles Vial et la société Collard et fils.
47. Entre 2000 et 2004, les administrateurs du GIE ont été les suivants : société Cycles Cesbron (2000 à 2004), société Collard et fils (2000 à 2004), société Cycles Chiasson (2000 à 2004), M. Dominique X... (2000 à 2004), société Michenon (2000), société Cycles Vial (2000 à 2002), société La Cyclerie (Pierre Rossé Sport) (2000 à 2002), société cycles Robert (2000 à 2001), société Sports Cyclistes (Cycles Pilorget) (2001 à 2004), société Isly 2000 (2002 à 2004) et société Cyclosport Pedegaye (2003 à 2004).
48. En décembre 2003, le GIE regroupait 23 entreprises qui exploitaient 28 magasins de cycles (Rapport d'enquête, annexe 26 cote 2132, p. 11 et 17-19 et cote 2133, p. 99).
49. Le contrat du GIE précise que les adhérents exercent de manière indépendante l'activité de détaillant et que sont exclus du groupement les distributeurs de la grande distribution, les grands magasins spécialisés, les franchisés, grossistes, importateurs et constructeurs, la vente par correspondance et plus généralement les magasins utilisant une ou des enseignes multi-sport à obédience nationale ou internationale. Le GIE a une fonction de centrale de référencement ; il est chargé de sélectionner et d'agréer les fournisseurs auprès desquels s'approvisionnent les membres.
50. Un document présentant la philosophie du groupement, daté de 2003, précise (rapport d'enquête annexe 26, cote 2132 p. 13-15) :
51. "Master Cycle : pourquoi se regrouper ...
Se regrouper permet non seulement d'assurer des volumes et de bénéficier de tarifs préférentiels ; cela permet surtout de créer une force visant à contrarier la suprématie des fournisseurs. Un souci entre un fournisseur et un adhérent Master Cycle : c'est le boycott de 32 magasins vis-à-vis de ce fournisseur".
52. Le chiffre d'affaires net du GIE s'est élevé à 73 000 euro en 2002 et 98 000 euro en 2003. Ce chiffre d'affaires est peu représentatif de l'activité globale du réseau qui a commercialisé en 2002 15 483 vélos pour un chiffre d'affaires d'environ 11,7 millions d'euro.
53. Le 1er avril 2004, le GIE a été dissous et mis en liquidation sous le régime conventionnel. Il a été radié du registre du commerce et des sociétés le 22 mars 2005 (cote 5223). Son activité a été reprise par une société créée à cet effet, la société MC2R qui a conservé le nom de Master Cycle.
54. Les membres fondateurs et détenteurs des parts sociales de cette société sont les personnes suivantes (cotes 5225-5243) : la société Collard et fils, la société Cyclosport Pedegaye, la société Cycles Cesbron, M. Dominique X... (entreprise en nom propre), la société Cycles Chiasson et la société Isly 2000. Les deux co-gérants sont M. Patrick Y... et M. Frédéric Z... .
La réunion de la Roche-sur-Yon du 26 mars 2001
55. Le 26 mars 2001, les adhérents du GIE se sont réunis à la Roche-sur-Yon. Le compte-rendu de la réunion précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2858 à 2861) :
"Présents : M. A... (Angers), M. B... (Rennes), M. C... (Cholet), M. D... (La Rochelle), M. Y... (Châlons), M. E..., M. F... (Dinan), M. G... (La Baule), M. H... (Brest), M. I... (Vannes), M. J... (Annecy), M. Z... (Tarbes), M. X... (Saint-Malo), M. et Mme K... (Olivet), M. et Mme L... (Saint Gaudens).
(...)
Coordinateur et animateur de la réunion : Pierre L...
(...)
Fournisseurs
(...)
Chapak : faire un courrier précisant que MC bloque toute commande en attendant une réponse claire au sujet de son choix de réseau (cf Districycles)
(...)
Santini : faire un courrier précisant que MC bloque toute commande en attendant une réponse claire au sujet de son choix de réseau (cf Distr cycles)
(...)
Soreco : récupérer les éléments en rapport avec Districycles
(...)
Remplaçants possibles :
- remplaçant possible à Chapak : Gore
- remplaçants possibles à Santini : Spotfull, Giodana, Biemme
- remplaçant possible à Chapak sacoches : Ortlieb".
56. La société Santini France (Santini) est une filiale du groupe italien Santini, spécialisée dans les articles textiles pour cyclistes. Sur ses tarifs, la société Santini mentionne un "prix public indicatif" (annexe 17 du rapport d'enquête, cotes 1995 à 2006). Elle n'a pas de réseau de distribution sélective (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2288 à 2289).
Les interventions du GIE auprès de la société Santini
57. Le 28 mars 2001, Mme L..., pour le compte du groupement, a adressé à la société Santini la lettre suivante (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2288 à 2289) :
"La cyclerie Pierre Rossé sport
Master Cycle
Sté Santini
Monsieur le directeur
Porter, le 28 mars 2001
Monsieur,
"Tous les adhérents du groupement national GIE Master Cycle se sont réunis ce lundi à La Roche/Yon.
Des doléances envers ae société Santini ont été exprimées par la majorité des détaillants présents. Depuis quelques mois, certains membres du GIE ont cessé toutes relations commerciales avec votre société. Le reste du groupement fera de même par solidarité même s'ils ne sont pas concernés régionalement pour l'instant. Les raisons qui sont à l'origine de cette rupture ne sont pas liées à la qualité de vos produits mais à une politique commerciale qui ne répond pas à l'attente de notre profession.
Vous n'êtes pas sans savoir que vos produits se trouvent dans la plupart des magasins "Districycles" qui polluent le marché en ne respectant aucune marge ni prix de vente des produits : nous nous refusons de leur servir d'argus.
Nous sommes un groupement solidaire constitué de professionnels du cycle installés depuis des années (...).
Quelques fournisseurs par le passé ont fait le même choix que votre Sté. Une vente à court terme auprès d'enseignes nouvelles qui travaillent avec une faible marge pour investir un marché dans lequel la plupart n'ont aucune expérience professionnelle.
(...)
Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous confirmer :
Votre politique commerciale pour 2001 et années à venir ?
S'il s'agit d'une erreur stratégique d'un de vos commerciaux ?
S'il s'agit d'une volonté délibérée de votre STE ?
Nous souhaitons vivement une réponse dans les plus brefs délais, nous avons le devoir d'informer nos adhérents de votre position et savoir si nous devons continuer à distribuer vos produits ...
Martine L...
Chargée de relations avec Sté Santini
Pour le GIE".
58. Le 29 mars 2001, M. Pierre L..., gérant de la société La Cyclerie Pierre Rossé Sport, a adressé la lettre suivante à M. Eric E..., coordinateur du groupement Master Cycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2287) :
"J'ai eu M. M... hier, pour l'instant il n'y a pas lieu de s'inquiéter (y compris vis-à-vis de Districycle). J'attends un courrier de sa part concernant l'historique et je ferai un rapport pour l'ensemble des adhérents.
Le courrier Santini a été fait, là par contre il ne faut pas être optimiste (mais sait-on jamais)". M. M... était responsable commercial pour la France d'une société d'approvisionnement, la Soreco.
59. Le 9 avril 2001, la société Santini a répondu ainsi au courrier de Mme L..., pour le GIE Master Cycle (annexe 3 du rapport d'enquête - cote 205) :
"Pour faire suite à notre conversation téléphonique du 30 mars dernier ainsi que votre fax du 29 mars qui a retenu toute notre attention,
Nous pouvons vous assurer de notre confiance envers les détaillants traditionnels que vous représentez. Notre politique commerciale depuis des années a toujours été de les privilégier. Il est pourtant impossible de refuser de travailler avec des GSS ou autres, mais quand nous prenons la décision de le faire nous exigeons que celles-ci respectent les prix de vente conseillés afin de ne pas troubler le marché.
Si l'une d'entre elles ne le faisait pas, nous interviendrions en envoyant notre commercial pour régler le problème dans le cas contraire, nous nous verrions dans l'obligation de prendre les mesures qui s'imposent.
Nous pouvons vous assurer de notre vigilance afin de continuer notre collaboration et le développement de votre groupement.
(...)
Jean-Marie N...".
60. Le 25 avril 2001, M. Pierre L... a adressé un nouveau courrier à la société Santini, lui demandant des précisions sur son comportement à l'égard du réseau Districycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 4037) :
"Nous revenons auprès de vous, suite à notre courrier du 28 mars, concernant la pollution tarifaire qui s'ensuit :
A réception de votre réponse du 9 avril 2001, et après en avoir référé à mes collègues du réseau Master Cycle, nous tenons à vous faire remarquer que nos doléances ne concernaient pas la GSS, comme vous pourrez le relire (...).
Notre interpellation concernait "Districycle" et sur ce sujet nous n'avons pas eu de réponse.
Nous vous demandons de nous renseigner sur votre stratégie de distribution. Si nous n'avons pas l'assurance que cette enseigne n'aura pas la possibilité de vendre vos produits nous cesserons définitivement toutes relations commerciales avec votre Sté. En effet, nous ne voulons pas servir d'argus à des gens qui n'ont de fond de commerce que le prix décalé (...)
Pierre L... pour le GIE".
61. Le 9 décembre 2003, M. Pierre L..., a déclaré (annexe 3 du rapport d'enquête - cotes 195 à 204) :
"Concernant la lettre du 28 mars 2001 de Mme L... à Santini. Les adhérents du GIE réunis à la Roche-sur-Yon ont constaté que les produits Santini (vêtements haut de gamme) étaient commercialisés à des tarifs très bas, qui ne pouvaient pas permettre aux détaillants de distribuer ces marques dans ces conditions. En tant que responsable du tandem, nous étions chargés pour le GIE d'informer ... des adhérents. Santini nous a répondu par courrier".
62. Le 19 mars 2004, M. Jean-Marie N..., gérant de la société Santini, a déclaré (annexe 17 du rapport d'enquête - cotes 1984 à 1990) :
"En 2001, le responsable de Master Cycle, M. L..., gérant de la Cyclerie, nous a demandé de cesser toute relation commerciale avec Districycle. Suite à notre refus d'obtempérer, le réseau Master Cycle sauf les cycles Gauthier, a cessé toute relation commerciale avec nous.
Concernant le courrier adressé le 9 avril 2001, si les grandes surfaces de sport ne respectent pas les prix publics conseillés, les mesures prises par Santini peuvent être les suivantes : ne pas les livrer rapidement, ne pas prendre rendez-vous pour présenter la collection. Suite à la demande de certains clients constatant que Districycle fait des prix trop bas, nous avons demandé à Districycle d'augmenter les prix de tous les produits, mais ceux-ci sont quand même au-dessous de notre prix public indicatif".
63. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société centrale Districycle, a précisé (annexe 1 du rapport d'enquête - cotes 118 à 127) :
"En ce qui concerne Santini, ce fournisseur nous a demandé d'augmenter les produits d'appel : les socquettes (lot de 3 paires blanches) passant de 11,50 euro à 12,95 euro, les cuissardes CX (augmentation de 10 %) et les collants CX".
64. Il résulte des déclarations ci-avant que tous les adhérents du GIE Master Cycle, sauf les cycles Gauthier, ont cessé leurs relations commerciales avec l'entreprise Santini qui a continué à livrer le réseau Districycle.
65. Dans une déclaration du 3 décembre 2003, M. Y..., secrétaire général du GIE Master Cycle, a expliqué ainsi la lettre adressée par M. L... à la société Santini :
"Il s'agit de l'expression d'un membre du groupement à l'égard de la société Santini. Master Cycle, après en avoir débattu, n'a jamais pris de décision de boycott à l'égard de la société Santini et n'a jamais adressé de message en ce sens à ses adhérents. D'ailleurs, certains de nos adhérents continuent de travailler avec cette entreprise" (annexe 2 du rapport d'enquête - cotes 144 à 154).
Les conditions d'agrément des membres du réseau
- Pour l'année 2002
66. Les principes d'agrément mis en place en 2002 sont exposés dans un document appelé "Procédures" daté du 5 avril 2002 (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2824 à 2838). Pour pouvoir être référencé au sein du groupement Master Cycle, le fournisseur doit remplir certains critères qui vont déterminer le niveau d'agrément obtenu. Les six critères sont les suivants :
- conditions tarifaires optimales pour l'adhérent ;
- remise en fin d'année au groupement de 1 % minimum ;
- assistance commerciale et service après-vente ;
- contribution publicitaire ;
- politique de distribution sélective (par des professionnels et hors VPC) depuis au moins trois ans ;
- engagement réel sur le terrain pour le respect des prix de marché.
67. Pour être "partenaire Master", le fournisseur doit remplir les six critères. Pour être "partenaire agréé", le fournisseur doit remplir au minimum les critères 1, 2, 3 et 6 et pour être "partenaire référencé", le fournisseur doit remplir au minimum les critères 1 et 3.
68. Dans l'attribution de l'agrément, le conseil d'administration du GIE joue un rôle essentiel (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2827) : "Un fournisseur est agréé dès lors que la totalité des membres du conseil d'administration a donné un avis favorable. Lorsque le conseil d'administration a choisi d'agréer un fournisseur auprès du groupement, la coordinatrice édite le contrat de distribution à partir du contrat type mis en place en début de saison et des conditions (proposées par le fournisseur) validées par le conseil d'administration".
69. Les documents internes au groupement, présentant les catégories de fournisseurs, précisent (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3895 à 3896) :
"Fournisseur Master
Il s'agit d'un partenaire qui s'est engagé dans le groupement depuis plusieurs années et qui propose des conditions préférentielles significatives à long terme. Ce fournisseur a une politique de distribution sélective orientée vers les professionnels du deux-roues et accorde une grande importance au respect du prix de marché.
De même, ce fournisseur par son comportement et son engagement démontre une réelle volonté de collaborer avec Master Cycle.
Les adhérents bénéficient de conditions très préférentielles (remise sur facture ou accès à la meilleure colonne de tarification, éventuellement remise de fin d'année) et d'une assistance commerciale tandis que le groupement se voit octroyer une remise de fin d'année et éventuellement une contribution publicitaire.
La contrepartie réside dans le fait que tous les adhérents doivent travailler avec ce fournisseur, sauf cas exceptionnels (ex : marque déjà distribuée par un autre détaillant dans la ville)".
70. Les fournisseurs ainsi agréés doivent signer un contrat de distribution (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2834 à 2836).
71. Ainsi, les fournisseurs "partenaires Master" et les "partenaires agréés" en 2002 se sont engagés à faire respecter les prix de marché.
72. Les sociétés partenaires Master en 2002 indiquées sur des fiches jointes à un document de Master Cycle définissant les trois catégories de ses fournisseurs étaient les suivantes : Bicicletas de Alava (BH), les Créations Jean-Pierre (Carnac), Hutchinson, Michelin et Intercycles (cotes 3900, 3903, 3911, 3912 et 3915).
73. Les sociétés partenaires agréées en 2002 étaient les suivantes : Acsud, Alcad, Atmosph'air, Bio racer, Bylo, CGN, Comet, Cycleurop, Giant, Gore bike wear, Ipone, Maillon, Michelin, Morgan blue, Moving, Orbea veneto, Orbita, Sacim, Soreco, Sunn, Time, Wheeler, France antivol, Shad, Nau, Spécialités TA, Abus (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3895 à 3896).
- Pour l'année 2003
74. Les principes d'agrément ont été modifiés en 2003. Le groupement a référencé 7 constructeurs de vélos et, pour les accessoires, trois partenaires principaux en qualité de "partenaires Master". Les autres fournisseurs ont été seulement agréés. Le document qui présente les conditions d'agrément précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2665 à 2666) :
"Rappelons tout de même qu'un fournisseur est nommé "Master" lorsque son comportement et son engagement démontrent une réelle volonté de collaborer avec Master Cycle".
75. Les trois fournisseurs d'accessoires "Master" en 2003 étaient les sociétés Bicicletas de Alava (BH), Hutchinson et Intercycles.
76. La société Intercycles a précisé, dans son courrier du 10 mars 2005 :
"Tarifs publics conseillés : les prix de nos tarifs publics sont tout à fait respectés par nos revendeurs. Je précise que le tarif Arcade concerne uniquement les vélos livrés sous la
marque Arcade. La gamme Arcade ne présente qu'à peine 20 % de notre chiffre d'affaires dans la mesure où notre activité est principalement axée sur la fabrication de vélos spéciaux à la marque de nos clients (...).
Les gammes fabriquées pour ces clients (Master Cycle et Supersport) sont des gammes spécifiques à leurs besoins et fabriquées pour Master Cycle sous la marque Master et pour Supersport sous la marque Techland. Les prix sont des prix nets sans aucun prix public conseillé. Pour ces clients, une partie des vélos vendus sont des vélos de notre fabrication et une autre partie sont des vélos d'import. Pour les accords commerciaux spéciaux, le seul à en avoir est Master Cycle (...)" (cote 8198).
L'intervention du conseil d'administration du GIE Master Cycle auprès de la société Bicicletas de Alava (BH)
77. La société Bicicletas de Alava est une société dont le siège est situé à Vitoria Gasteiz en Espagne. Elle fabrique des vélos haut de gamme de marque BH qui sont ensuite exportés dans différents pays. En France, ses produits sont commercialisés par l'intermédiaire de cinq commerciaux exclusifs.
78. Chaque année, la société BH établit un tarif de vente de prix TTC généralement constatés, qui sert de base pour le calcul des prix net HT des clients. Dans un courrier du 9 mars 20051 (cote 8319) auquel elle a joint la liste de ses prix publics conseillés en France pour les années 2001 à 2004, la société BH a précisé qu'il appartient au distributeur de respecter ou de ne pas respecter le prix de vente TTC.
79. Le 7 avril 2001, M. Patrick Y..., secrétaire général du groupement Master Cycle, a adressé à Pierre L..., membre du GIE Master Cycle, le courrier suivant (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3399 à 3400) :
"Pierre,
Comme convenu, lors de notre dernière conversation téléphonique, je te fais part de mes observations et de mon écoeurement, vis-à-vis de BH.
Lors des réunions de Toulouse et La Roche sur Yon, tu nous a exprimé la volonté de BH, de vouloir développer une saine politique sur le marché français, à travers des professionnels indépendants, et particulièrement avec le réseau Master Cycle.
Tu nous as garanti l'honnêteté et la valeur morale des dirigeants espagnols et en particulier, M. P... (...).
Les faits
En 1999/2000, grâce à la détermination et au sérieux de Dominique Sanders, nous avons commencé la distribution de BH dans notre magasin, et nous avons stoppé net dès que Supersport, nouvellement ouvert à Chalons, a commercialisé BH.
Au Rock d'Azur, en présence de Dominique Sanders, et en convenance avec M. P..., nous avons décidé de redistribuer BH, sous réserve que Supersport cesse immédiatement de vendre BH.
Ce qui fut fait, et nous avons apprécié.
Cet hiver, lors d'une visite de M. Q... qui nous a présenté Pascal R..., nous avons rediscuté de cet engagement de BH.
Notre position était claire : 1 seul vélo BH de la gamme 2001 vendu à Supersport, et nous rompions nos accords.
1 Outre l'organisation de sa distribution en Europe, les éléments joints au courrier présentent ses prix publics conseillés en France de 2001 à 2004.
Depuis, BH est devenu un fournisseur en plein essor dans notre magasin, témoin nos commandes à ce jour.
Personnellement, je me suis fait le promoteur de BH au sein de Master Cycle, comme tu le sais.
Aujourd'hui, la situation est la suivante : Supersport vient de distribuer X milliers de tracts avec un vélo BH 2001 à prix Promo, en première page (photo ci-jointe), et plusieurs vélos BH de la gamme 2001 sont en expo en magasin.
Que s'est-il passé ?".
80. Le 13 avril 2001, M. L..., gérant de la société La Cyclerie, a envoyé à M. P... de BH, pour le compte du réseau Master Cycle, le courrier suivant (annexe 26 du rapport d'enquête -cotes 3401 à 3402) :
"...convaincus par votre discours, nous avons pris la responsabilité de vous recommander au niveau national, comme nous le faisons depuis 6 mois dans notre secteur.
Cependant, nous avons été alertés par certains membres du réseau Master et particulièrement par les cycles Collard, sur le fait que "Supersport" communiquait avec des produits BH d'une part et avec des prix cassés d'autre part et ceci de plus dans des régions où vous avez garanti une distribution sélective et propre.
Comme vous le verrez avec le courrier et les photocopies des publicités qui nous ont été expédiés, le résultat en est catastrophique.
De plus, comme vous le lirez, nous sommes mis en cause personnellement, c'est quelque chose que nous n'admettons pas.
Si vous ne prenez pas les décisions qui s'imposent vis-à-vis de cette distribution, nous pourrions être amenés à remettre en cause notre implication envers BH et dans tous les cas votre capital confiance pourrait rejoindre très rapidement celui de vos concurrents sur le marché français, et vous subiriez comme eux les conséquences immédiates de ces actes. Vos commerciaux sur le secteur ont déjà perdu leur crédit et certains points de vente ne souhaitent déjà pas avoir affaire à eux, il vous appartiendra de régler ce problème également. Je vous remercie de prêter attention à mon courrier et de m'informer rapidement de la suite à donner à cette affaire.
(...)
Pierre L...
PS : au moment où nous finissons ce courrier notre point de vente Cycles Le Penven à Vannes (56) nous informe d'une communication régionale faite par Technicien du Sport avec un vélo marque Over X à moins de 2 000 Frs. Nous ne manquerons pas de vous tenir au courant de la situation".
81. Le 17 mai 2001, M. P..., de la société BH, a répondu au courrier de M. L... de la manière suivante (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3403 à 3404) :
"...nous vous confirmons que la marque BH suit une politique commerciale qui est établie pour favoriser tous les magasins professionnels du vélo, et qui évite la diversité des réseaux des ventes ainsi que les ventes massives de nos produits dans des grandes surfaces comme Supersport.
Nous avons commencé une collaboration commerciale avec Supersport au début de l'an 2000 avec une série limitée de pas plus de 10 produits de la marque BH, par contre nous reconnaissons que peu à peu la relation commerciale a beaucoup prospéré et comme résultat nous arrivons à la situation actuelle de concurrence dans certaines villes.
Afin de pouvoir contrôler cette situation, nous nous sommes adressés à la centrale de Supersport pour leur exiger d'arrêter des ventes de vélos BH dans tous les points où l'on puisse trouver un conflit parmi d'autres clients.
D'ailleurs et en considérant la gamme 2002, notre position est celle de réduire progressivement le nombre de modèles dans les magasins Supersport.
Veuillez trouver ci-joint un double de l'écrit adressé au responsable d'achats de Supersport.
Séries limitées
Nous avons réalisé deux opérations avec des séries limitées dans la gamme 2001, lesquelles malgré le bon fonctionnement n'ont pas été très bien envisagées. Après l'expérience, nous pouvons vous confirmer que dorénavant nous allons concentrer les séries limitées des vélos BH sur nos clients professionnels du vélo. Par contre, si l'on fabrique une série limitée pour les grandes surfaces (TDS ou Supersport), nous allons fixer un prix TTC ou sinon fabriquer les vélos sous d'autres marques".
Les pressions de la société Bicicletas de Alava sur le distributeur Supersport
82. Le 21 septembre 2001, la société BH a adressé le courrier suivant au distributeur Supersport (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3405) :
"Supersport
Mme Sophie S..., M. Stéphane T..., M. Sylvain U...
Allée de Coat à Noz
BP 119
35 573 Chantepie
Comme je vous l'avais annoncé lors de notre réunion du 12/06/01, puis dans le courrier du 03/07/01, la société BH, afin de continuer sa progression en France et d'y asseoir sa distribution, se doit d'avoir une politique commerciale très précise.
Cette expansion a été réalisée dans sa plus grande majorité par la mise en place d'une manière très réfléchie, de la gamme dans le réseau des spécialistes cycles en respectant les zones de chalandises de nos partenaires (...).
Nous nous devons donc de continuer à progresser dans le réseau de spécialistes du sport dans la mesure où la zone de chalandise n'est pas couverte par un spécialiste Cycle, sauf accord de ce dernier.
Nous vous demandons donc :
d'arrêter complètement la représentation et la vente de la marque BH dans les magasins suivants :
o Chalons en champagne
o Bayeux
o Mont-de-Marsan
o Tarbes
o Chambéry
o Chartres
De ne pas pratiquer en aucun cas la rétrocession de produits BH vers ces magasins non référencés.
De demander l'acceptation de la société BH pour l'ouverture d'une relation commerciale avec tout nouveau magasin de votre enseigne".
83. Dans le cahier de Mme Audrey Y..., coordinatrice du GIE Master Cycle, il est mentionné (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2497) :
"Rendez-vous BH 21/10/2001
(...)
Dès lundi, rapatriement des vélos BH présents dans les magasins Supersport. Supersport a accepté la proposition BH ? interdiction de vendre des vélos BH dans les magasins Supersport de Châlons, Bayeux, Mont-de-Marsan, Tarbes, Chambéry et Chartres".
Les résultats de l'action menée par le GIE Master Cycle et la société Bicicletas de Alava
84. Dans le document interne du réseau Master Cycle "Top 10 - avril 2002" sont regroupées des fiches sur les principaux fournisseurs référencés par le réseau (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3451 à 3476). Sur la fiche du fournisseur BH (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3454) sont mentionnés les prix d'achat HT et les prix de vente TTC de 10 vélos. En dessous de ces tarifs, figure la mention suivante :
"Intérêts à travailler avec ce fournisseur (arguments)
- marge assurée à 2".
85. Le 24 octobre 2001, M. Pierre L... et Mme Audrey Y..., du groupement Master Cycle, ont réalisé un dossier intitulé : "Pourquoi faut-il travailler avec BH ?" (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3393 à 3405). Dans ce document, destiné à tous les adhérents Master Cycle, il est indiqué :
"Chers Masters,
Comme vous le savez et malgré les imperfections constatées au long de l'année 2001, nous entretenons avec BH, en Espagne, des relations privilégiées. A de multiples reprises, suite à des dérapages de prix, la société BH est intervenue par courrier auprès des magasins ou centrales multisports concernés pour affirmer sa volonté de distribuer ses produits en priorité chez des professionnels et sa détermination à ne tolérer aucune gêne tarifaire de la part de ces derniers. Par conséquent, les secteurs concernés par ces pollutions de prix décalés devaient être fermés.
Comme vous pourrez le lire dans les pages suivantes, la société BH a été très transparente en nous informant, au fur et à mesure que nous leur faisions remonter nos doléances et nos informations, des échanges de courriers ou des solutions élaborées pour répondre à nos attentes. Cette année, c'est Supersport qui a été le plus concerné par ces problèmes.
Pour 2002, José Miguel P..., directeur marketing de BH, souhaitait distribuer sa marque uniquement par l'intermédiaire de professionnels du cycle. La loi sanctionne fortement la discrimination de distribution c'est-à-dire l'interdiction de vente. Ainsi, malgré sa volonté de privilégier le réseau traditionnel, Monsieur P... n'est pas en mesure de refuser de livrer Supersport.
Par contre, BH s'engage non seulement à ne plus livrer les Supersport de Chalons-en Champagne, Bayeux, Mont-de-Marsan, Tarbes, Chambéry, et Chartres (magasins ayant pratiqué des pollutions tarifaires) mais aussi à enlever tous les stocks de vélos BH présents dans ces magasins à compter de la semaine 44.
Monsieur P... nous assure qu'il sélectionnera progressivement les Supersport distributeurs de BH jusqu'à disparition complète de la distribution dans cette enseigne.
Notons donc que BH est prêt à se passer de la distribution de Supersport au niveau national ; ce pari sur le secteur traditionnel lui coûtera 2 350 000 Francs (CA 2001 pour l'ensemble des magasins Supersport). Cette confiance doit nous interpeller et nous devons les privilégier là où cela est possible. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de vous aider à analyser "pourquoi il faut travailler avec BH" dans les pages qui suivront (...).
(...)
Rentabilité d'une marque : les paramètres
??Marge réelle sur 12 mois
o Coefficient produit par produit à l'achat
o Prix du marché égal ou proche du prix conseillé
o Peu ou pas de produits à solder = marge conservée
o Dynamique
??Produits de référence par rapport aux produits concurrents
(...)
Rentabilité à long terme : la politique commerciale
??Distribution la plus sélective possible des produits
o Examen des zones de chalandise des points de vente existant
o Consultation des distributeurs existants avant toute nouvelle implantation
o Privilégier le réseau traditionnel au réseau multisport
??Paramètres Bonus
o Comité de vigilance par le respect des prix publics (...)".
86. A cette étude plusieurs documents ont été annexés : la lettre de Patrick Y..., la lettre de Pierre L... et deux courriers de la société BH cités ci-avant.
87. Dans le bulletin interne "Infos/échanges Master Hebdo" daté du 4 octobre 2003, il est indiqué (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3770) :
"Et oui, nous n'avons pas obtenu entière satisfaction chez BH, par exemple, ils ont choisi de ne plus nous protéger sur toutes les villes comme ils le faisaient précédemment et nous sommes conscients que les conditions commerciales accordées ne sont pas beaucoup plus généreuses que les conditions générales de vente (rappelons-nous toutefois qu'il est le seul fournisseur de vélos à nous permettre de marger 40 %)".
88. Au sujet de ce courrier, le GIE Master Cycle a indiqué : "Le fait de nous protéger sur toutes les villes signifie que désormais seuls les commerciaux BH ont la faculté de choisir leurs distributeurs" (Déclaration de M. Y... du 3 décembre 2003 - annexe 2 du rapport d'enquête, cotes 144 à 154).
89. Le chiffre d'affaires de la société BH avec les magasins Supersport a évolué comme suit (annexe au courrier de la société BH du 9 mars 2005, cotes 8319 et suivants) : en 2000 : 170 371 euro, en 2001 : 307 827 euro, en 2002 : 55 248 euro. En 2003 et 2004, la société BH n'a rien vendu à la société Supersport.
La concertation sur les prix dans le réseau Bouticycles
Le fonctionnement du réseau Bouticycles
90. Le réseau de revendeurs Bouticycles est organisé autour des sociétés du groupe Nethub. Il est animé par la société Nethub, dont le nom commercial est Bouticycle, et qui est la société holding du groupe, mère de la société José Alvarez et de la société Cyfac. Le président du conseil de surveillance de la société Nethub est M. Jean-Luc V..., le président du directoire, M. Alain W... . Mme Françoise 1... et M. André 2... sont membres du directoire. La société Nethub conduit la stratégie du groupe et anime le réseau. En 2003, la société Nethub a réalisé un chiffre d'affaires de 1,6 million d'euro.
91. La société José Alvarez, filiale à 100 % de la société Nethub, est présidée par M. Alain W.... Le directeur général est Mme Françoise 1... et le directeur commercial M. André 2... . Cette société remplit plusieurs rôles : constructeur de cycles, distributeur exclusif de marques de cycles ou d'accessoires, grossiste en composants et accessoires pour des détaillants ainsi que centrale de référencement et centrale d'achat pour les distributeurs du réseau Bouticycle. En 2003, la société José Alvarez a réalisé un chiffre d'affaires de 30 millions d'euro.
92. La société Cyfac est également filiale de la société Nethub. M. Alain W... et Mme Françoise 1... sont administrateurs. Cette société est spécialisée dans la fabrication de cycles.
93. Le réseau Bouticycles regroupait 110 adhérents en janvier 2003 et 122 adhérents en 2004. Ces adhérents sont des détaillants indépendants, répartis sur l'ensemble du territoire. Les adhérents du réseau Bouticycle sont tous actionnaires de la société Nethub. En effet, chaque adhérent doit acheter au minimum 300 actions à 10 euro et verse une cotisation annuelle pour les services rendus (référencement, communication, etc).
94. Chaque adhérent signe un contrat d'adhésion (annexe 1943 à 1973). Il bénéficie d'une exclusivité sur sa zone de chalandise. Il s'engage à acheter 60 % de ses achats auprès de la société José Alvarez et bénéficie des conditions négociées auprès des fournisseurs par la société José Alvarez pour les 40 % restants.
95. Le conseil supérieur du réseau Bouticycles (CSRB) est une instance chargée de conseiller le directoire de la société Nethub sur les orientations générales du réseau et sur la stratégie de développement du groupe formé par la société Nethub et ses adhérents. Ce conseil est composé de responsables de la société Nethub et de la société José Alvarez, M. Alain W..., Mme Françoise 1..., et M. André 2..., ainsi que de membres du réseau Bouticycle, élus par les adhérents réunis en assemblée générale (liste des membres communiquée le 7 juillet 2005).
96. En 2002, les adhérents membres du CRSB étaient Mme Lyliane 3... (Bouticycle Toulousain), M. Michel 4... (Société Cycles et sport Tilly à Aulnay-sous-Bois), M. Serge 5... (société Sofretin à Aubagne), M. Philippe 6... (société Revaxion à Nice).
97. En 2003, les adhérents membres du CSRB étaient, outre Mme 3..., M. 4... et M. 6..., M. Jean-Marc 7... (société Ryder France à Croix (59)), M. Philippe 8... (société Toinet à Aix-les-Bains) et M. Jean-Marc 9... (société Vélo Plus à Ostwald (67)).
98. En 2004, les adhérents membres du CSRB étaient, outre Mme 3..., M. 8..., M. 6..., M. 9... et M. 7..., M. Joël 10... (société 2F2G à Lafox (47)).
99. Le CRSB se réunit au moins une fois par trimestre et les compte-rendus sont publiés dans l'hebdomadaire interne du réseau, Tandem Hebdo.
Les contrats de distribution de la société José Alvarez
100. Figurent dans le dossier des contrats proposés pour la saison 2002-2003 aux revendeurs du réseau Bouticycles par les sociétés Nethub et José Alvarez, laquelle est la centrale d'achat des distributeurs de ce même réseau (cotes 8632 à 8634)2. Ces contrats mentionnent des coefficients sur les prix de vente au détail.
101. Ainsi, le contrat José Alvarez pour les vélos Vitus mentionne (annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2144) :
"Coef 2".
102. Le contrat José Alvarez pour les produits Look précise (annexe 24 du rapport d'enquête - cotes 2145) :
"conditions tarifaires : remise 10 % sur tarif (coefficient 2,00 pour accessoires)".
103. Le contrat José Alvarez pour les vélos GT précise (annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2146) :
"Tarif coef. 1,60 (opportunity), tarif coef. 1,9 (privilège)".
104. Le contrat José Alvarez pour les vélos BMX précise (annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2147) :
"conditions tarifaires : remise de 12 % sur tarif de base GT/Felt et remise de 15 % sur tarif Vitus de base (coefficient 2 pour vélos et cadres)".
105. Enfin, le contrat José Alvarez pour les produits BMX (pièces et accessoires) précise (annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2148) :
"conditions tarifaires : remise de 12 % sur tarif de base (coefficient 2,1 pour pièces et accessoires toute l'année)".
Les clauses de ces contrats interdisant la rétrocession
106. Les adhérents du réseau Bouticycles bénéficient de l'exclusivité de l'enseigne sur leur zone de chalandise ainsi que de conditions tarifaires pour les marques distribuées par les sociétés José Alvarez et Cyfac qui est aussi une filiale du groupe Nethub.
107. L'adhésion au réseau Bouticycles est matérialisée par la signature d'un contrat prévoyant des droits et obligations réciproques. Le détaillant prend en particulier l'engagement de présenter tous les produits référencés par la société Alvarez et de réaliser avec ceux-ci au moins 70 % de son chiffre d'affaires (voir contrat d'adhésion Bouticycle, cotes 488-507).
108. Les conditions de vente de la société José Alvarez aux détaillants du réseau Bouticycles pour les vélos de marque Vitus, GT et les vélos BMX, entre le 1er septembre 2002 et le 31 août 2003, contiennent la clause suivante (annexe 24 du rapport d'enquête - cotes 2144, 2146 et 2147) :
"Chaque contrat (...) est accordé pour un et un seul point de vente déterminé par la raison sociale et l'adresse mentionnée sur ce présent contrat. Cet engagement est sous la responsabilité du responsable du magasin qui signe le contrat. Chaque magasin s'engage avec la marque (...) par l'intermédiaire de l'un de ses contrats, s'engage aussi à ne pas redistribuer de produits (...) sous forme de rétrocession ou d'échange à d'autres magasins sous contrat (...) ou non".
2 Documents adressés le 15 mars 2005 au rapporteur sur le rôle de la société Alvarez à l'égard des détaillants Bouticycle. La société Nethub est une holding dont fait partie la société Alvarez. Elle a donné son nom au réseau Bouticycles dont les membres détaillants sont actionnaires du groupe.
109. M. Alain W..., président du directoire de la société Nethub, justifie l'interdiction de rétrocession ou d'échange entre magasins par des raisons de sécurité (courrier de M. W... du 15 mars 2005, cotes 8632 à 8675 et courrier de son conseil du 10 août 2005, cotes 11422 à 11424). Le décret 95-937 du 24 août 1995 impose que les bicyclettes soient livrées au consommateur final entièrement montées selon les règles de l'art. Les produits concernés sont des vélos et l'interdiction des rétrocessions et échanges permettrait à la société José Alvarez de s'assurer du sérieux et de la capacité technique des détaillants qui distribuent ces bicyclettes. Ces dispositions qui interdisent dans certaines conditions la revente de produits n'ont donc pas eu, selon M. W..., pour objectif de faire obstacle à la libre concurrence et n'ont eu aucun effet sur les prix dont ont pu bénéficier les clients de la société José Alvarez.
La réunion des détaillants du Finistère
110. Le 7 décembre 2000, M. André 2..., directeur commercial de la société José Alvarez, a adressé à Mme 11... et à M. 12..., de la société Hutchinson, une télécopie de trois pages (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3089 à 3091). Cette télécopie, qui évoque une réunion des détaillants du réseau, inclut une lettre adressée à des détaillants, datée du 26 novembre 2000. Cette lettre précise :
"Brest le 26 novembre 2000
Chers collègues et détaillants,
Devant la menace Districycle, nous nous sommes regroupés à quelques détaillants de la pointe de Bretagne.
Nous avons constaté de visu, à la porte ouverte du magasin de Brest que certaines de nos marques phares y sont vendues à prix discount : Sidi, Colgano, Santini, Chapak, Campagnolo, Shimano, etc ...
Il en sera de même demain près de chez vous. Comme nous, vous devez vous poser des questions.
Quelle est la politique de nos fournisseurs ?
Quel est notre avenir ?
Vous aussi allez bientôt être concernés par cette franchise qui cherche à nous éliminer, ainsi que les intermédiaires d'ailleurs (représentants, grossistes). Cette franchise nous discrédite auprès de nos clients en bradant des produits que nous valorisons et développons depuis des années.
Nous prévoyons d'étendre ce mouvement au-delà du Finistère. Afin de le structurer nous avons besoin de votre aide.
Pour cela contactez l'un des magasins ci-dessous".
111. Les magasins signataires sont les suivants : Bretagne vélo, Hobby-cycles, Le Cam, Le Bigot, Le Gall, Le Saulx, Normant, Sport cycl'Aulne, Torch VTT et Vélo sprint.
Les consignes du CSRB sur les coefficients et les prix de vente
112. L'hebdomadaire Tandem Hebdo du 12 novembre 2001, distribué à l'ensemble des revendeurs du réseau, contient un article sur les remises accordées aux consommateurs. Cet article précise (cotes 9406 à 9409) :
"Les remises consommateurs ... attention à l'escalade !
Vendre ses prix, garder ses marges, ou comment résister au consommateur qui n'hésite plus lors de son passage à la caisse à demander de plus en plus (...).
Une remise ne doit jamais être banalisée et acquise sans contrepartie car sinon ce n'est plus un avantage mais un abandon de marge (...).
Soyons solidaires dans la tenue des prix. Pour rester longtemps au service de nos clients, il faut que nos entreprises demeurent rentables".
113. L'hebdomadaire Tandem Hebdo du 21 mai 2002 rend compte de la réunion du conseil supérieur du réseau Bouticycles (CSRB) du 15 mars 2002. Ce compte-rendu relate (cotes 9480 à 9485) :
"Débats et résolutions :
Résolution CSRB1 :
En 2005, au plus tard, le coefficient moyen d'un adhérent Bouticycles sera de 2".
114. L'hebdomadaire Tandem Hebdo du 20 janvier 2003 rend compte de la réunion du CSRB du 6 janvier 2003 en ces termes (cotes 9589 à 9592) :
"Etaient présents : Liliane 3..., Michel 4..., Philippe 6..., Alain W..., Françoise 1..., André 2... .
Absent : Serge 5...
(...)
Compétitivité
Construire une partie de nos activités en marque propre.
Nous avons à l'intérieur du réseau BTC des gens qui ne se comportent pas comme ils le devraient. Nous lancerons des actions pour faire respecter des tarifications qui permettent à tout le monde de vivre. Attention de ne pas se faire une réputation de remise dans les magasins - se servir de la carte de fidélité".
115. Les sociétés José Alvarez et Nethub soutiennent que la résolution du 15 mars 2002 sur le coefficient de 2 témoigne simplement d'un objectif pour les adhérents en matière de marge et ne représente en aucune manière une politique de prix imposés (Courrier du conseil de la société Nethub du 10 août 2005 - cotes 11 422 à 11 424). Elles ajoutent qu'il ne s'agit que d'un souhait émis par le CRSB qui n'a qu'une mission de conseil vis-à-vis du directoire de Nethub et ne dispose d'aucun pouvoir décisionnel. De plus, pratiquant des prix différents au sein du réseau, l'éventuelle application de ce coefficient déboucherait nécessairement sur des écarts de prix chez les adhérents. Enfin, elles estiment que les détaillants accordant de nombreuses remises tarifaires, une comparaison des prix pratiqués au sein du réseau permettrait facilement de confirmer l'existence d'écarts de prix significatifs.
L'intervention du réseau contre les prix des produits Look pratiqués par la société Dutouron
116. L'hebdomadaire Tandem Hebdo, réservé aux adhérents Bouticyles, a publié dans son numéro 96, daté du 26 janvier 2004, une lettre de Lyliane 3..., membre du CRSB, contre les prix bradés pratiqués par le distributeur Serge Dutouron (cote 9 724). Cette lettre précise :
"Beaucoup d'entre nous sont distributeurs Look et signent chaque année un contrat "d'agréé Look" leur imposant l'achat d'une quantité déterminée de cadres et d'accessoires. Nous sommes également signataires de la charte Look qui nous engage, entre autre, à offrir à nos clients, un maximum de professionnalisme et de haute technicité, pour le montage, le choix de leur cadre ...
En contrepartie, la société Look, propriétaire de sa marque, s'engage à maintenir notre zone géographique commerciale vierge de tout autre concurrent, et à ne distribuer ses produits qu'uniquement à travers les magasins agréés de son réseau.
La réalité est hélas différente, car la société Look a bien du mal à assurer l'étanchéité de son réseau, ce dont elle a pourtant l'obligation légale. Aujourd'hui, le problème est encore plus grave, car les produits Look 2004 sont bradés sur le site Internet www.sergedutouron.com. Le cadre KG 486 est vendu 2 200 euro au lieu de 2 799 euro par exemple. Je suis intervenue auprès de la société Look qui a dépensé en interne beaucoup d'énergie cette année pour contrer les approvisionnements en provenance de détaillants étrangers peu scrupuleux. Grâce à la mise en place d'un système de traçabilité de ses produits, Look peut affirmer actuellement qu'un cadre Look 2004 a été livré par un magasin Bouticycles à S. 15....
Ceci dit, je cherche surtout à provoquer aujourd'hui une réaction des distributeurs Look face au fléau que sont certains distributeurs VPC qui ne nous respectent pas et qui mettent en péril la pérennité de la distribution des produits Look comme celle de nos magasins.
Ainsi, j'ai engagé une action judiciaire à laquelle vous pouvez tous participer. Spontanément huit magasins ont formé notre "comité".
Ceux et celles d'entre-vous qui souhaitent nous rejoindre ou être informés peuvent me contacter : Lyliane 3... ...".
La réunion du CSRB du 2 février 2004 sur le sujet
117. Avant la réunion du conseil supérieur du réseau Bouticycles (CSRB) du 2 février 2004, Mme Lyliane 3..., membre de cette instance, a adressé aux membres du CSRB, et probablement à d'autres magasins du réseau Bouticycles, par courrier électronique ou par télécopie, la lettre suivante (annexe 5 du rapport d'enquête - cotes 638 à 640) :
"Aux membres de la CSRB
Chers confrères
L'ordre du jour de la prochaine réunion de la CSRB comporte l'alinéa Look/Dutouron.
Je travaille depuis quelques temps sur cette affaire et je vous livre ici un condensé de mes réflexions avec les éléments que j'ai recueillis.
Tout d'abord, je refuse de subir encore et toujours la concurrence déloyale de S. 15... dont l'ambition est de réduire à la portion congrue l'activité de nos magasins. La riposte de ceux qui s'alignent sur ses tarifs est tout à fait stupide et suicidaire.
Le chiffre d'affaires de S. 15... a augmenté de 35 % en 2002, 32 % en 2003 et il atteindra probablement 40 % en 2004. C'est donc ce que nous réaliserons encore en moins dans nos magasins. Sur son site Internet, on trouve maintenant les marques les plus prestigieuses comme Look, Time, Colgano, Kuota, etc ... Est-ce normal qu'un VPCiste vende ces marques avec à chaque fois des remises ou "cadeaux" en prime ? Est-ce normal que tous les détaillants professionnels que nous sommes acceptent cela sans rien faire, à part râler ?
Que devons-nous faire ?
Imposer à certains fournisseurs de ne plus livrer S. 15..., et intenter contre ce dernier, quand cela est possible bien entendu, des actions judiciaires "gagnantes".
Extrait de son site :
"Roues : 1er revendeur France ... Mavic (très largement)".
Et en plus il a toujours le petit mot méprisant à notre égard. Les 130 magasins qui composent notre réseau sont, de loin, le premier revendeur en France. Il va falloir le faire savoir, non pas auprès de nos clients, mais auprès de Mavic. Car si demain nous sommes tous capables de ne plus acheter une seule roue Mavic tant que Mavic livrera Dutouron, nous pourrons gagner la bataille contre Dutouron.
En ce qui concerne Look, nous avons tous été lésés par les ventes pirates de S. 15... qui n'aurait jamais dû pouvoir vendre des articles Look. Le fait est là, il a pu ... Trois avocats cogitent sur l'affaire. Ce qu'il faut bien savoir, c'est que le "contrat d'agrément" que nous a fait signer Look, c'est du vent. Plus exactement, il s'agit d'une terminologie commerciale flatteuse ou trompeuse, comme vous voulez.
Ce contrat comporte des obligations certaines à notre charge, notamment en matière d'approvisionnement. Mais il n'y a pas de contrepartie, c'est en quelque sorte un contrat unilatéral.
En effet, il vaut mieux pour vendre les produits Look, ne pas appartenir au réseau, qui fait peser des obligations assez contraignantes, et n'offre pas de réel avantage, sachant que la possibilité de s'approvisionner n'importe où n'est pas interdite.
Look, comme la plupart de nos fournisseurs n'a pas protégé son réseau de distributeurs par une charte de distribution sélective. C'est grave. 13... (président de la société Look) m'a certifié qu'il mettait en place cette charte dès le mois de juillet prochain. En attendant, il faut qu'on se débrouille avec les cadres 2004 soldés à - 20 % chez Dutouron et qu'on soit prêt à acheter la gamme 2005 dans 6 mois ... !!!
En conclusion, pour imposer une conduite à nos fournisseurs, il faut représenter une force d'achat importante. Soyons efficaces, donc soudés et solidaires, nous mènerons des actions fortes.
En trois jours, 20 magasins m'ont contactée et nous pesons quatre Dutouron. Peut-être pouvons-nous commencer à parler sérieusement.
Le but de certains fournisseurs est de nous diviser, notre force est de nous unir.
Lyliane 3...".
118. L'ordre du jour du CSRB du 2 février 2004 comprenait effectivement les relations entre les sociétés Look et Dutouron (annexe 22 du rapport d'enquête - cote 2 086).
Les suites de la réunion
119. Le 6 février 2004, Mme Lyliane 3... a adressé à la société Look Cycle international la lettre suivante (annexe 22 du rapport d'enquête - cotes 2087 à 2089) :
"Société Look
Monsieur Thierry 14...
(...)
Nous tenons à vous exprimer notre profonde inquiétude sur les agissements que nous avons pu constater, de la société Serge Dutouron SA, qui nous cause de très importants préjudices.
Comme vous le savez, la société Serge Dutouron SA commercialise, notamment par le biais de son site Internet (...) différents produits des gammes Look 2003 et 2004, à des prix très inférieurs à ceux que nous sommes en mesure de proposer aux clients de nos magasins.
(...)
Nous nous étonnons donc, comme nous avons eu l'occasion déjà de vous en faire part à plusieurs reprises, que la société Serge Dutouron SA puisse commercialiser vos produits, alors même qu'elle n'est pas agréée, et se prévaloir de la marque Look pour cette commercialisation.
(...) il semble que rien ne soit fait pour tenter de mettre fin aux agissements de la société Serge Dutouron SA.
Il nous paraît étonnant tout d'abord que vous ne soyez pas parvenu à identifier les sources d'approvisionnement de la société Serge Dutouron SA et pris les mesures adéquates.
Car, dans tous les cas, la société Serge Dutouron SA n'a pu se fournir en produits Look qu'auprès d'un de vos distributeurs.
Dès lors, de deux choses l'une :
- ou bien les produits proviennent de l'extérieur de l'Union européenne, et il nous semble dans ce cas que leur importation par la société Serge Dutouron SA pourrait constituer une commercialisation irrégulière au sein de l'Union européenne et une contrefaçon de la marque Look ;
- ou bien ils proviennent de l'intérieur de l'Union européenne et l'on peut supposer alors, si l'ensemble de vos distributeurs est astreint à la même obligation "de ne pas redistribuer le produit Look sous forme de rétrocession et d'échange à d'autres magasins (sous contrat Look ou non)", que la société Serge Dutouron SA s'est approvisionnée auprès d'un distributeur ; dans ce cas, la société Serge Dutouron SA se rend complice d'une violation d'engagements contractuels, ce qui pourrait constituer une concurrence déloyale.
(...)
Vous comprendrez dès lors que les distributeurs agréés Look, qui subissent directement les conséquences préjudiciables des agissements de la société Serge Dutouron SA, manifestent aujourd'hui un certain mécontentement en l'absence de prise de position de Look en leur faveur (...).
Aussi, nous pensons qu'une prise de position claire de Look à l'égard de la société Serge Dutouron SA ne pourra que recevoir le soutien des distributeurs agréés".
120. Le 12 mars 2004, Mme Lyliane 3... a déclaré (annexe 22 du rapport d'enquête - cotes 2078 à 2085) :
"La dernière réunion du Conseil supérieur du réseau Bouticycles a eu lieu le 2 février 2004 à Paris (Orly). C'est donc en vue de cette réunion que j'ai adressé un courrier électronique et fax à chaque membre du conseil supérieur sur la question de la concurrence déloyale de la société Dutouron sur les produits Look. J'avais demandé que cette question soit inscrite à l'ordre du jour. En effet, dès l'origine, notre magasin distribuait les produits Look. Cette marque représente plus de 70 % de nos ventes cadres, c'est-à-dire environ 40 % de notre chiffre d'affaires total.
(...)
Dès 2002, M. 15... distribuait Look mais avec toujours l'engagement de pratiquer des prix raisonnables. C'était l'engagement pris avec M. 2.... Mais comme à son habitude, il a détourné son engagement en respectant plus ou moins les prix mais en offrant à chaque fois des accessoires coûteux pour chaque vente de cadre (jeux de pédalier, feux de direction plus paire de roues, potence, etc ...). Face à cela nous avons voulu réagir car il s'agit de la survie de notre entreprise face à cette concurrence que nous estimons très déloyale. J'ai alerté tous mes collègues dans le réseau. J'avais d'abord écrit à Look au mois d'avril 2003. Entre temps, nous avons eu de nombreux échanges verbaux avec les commerciaux et des échanges téléphoniques.
(...)
Mais les offres ont continué de façon toujours plus agressive sur le site de Dutouron.
(...)
J'ai reçu le soutien d'une soixantaine de distributeurs Bouticycles. Je ne leur avais surtout pas demandé de cesser de s'approvisionner auprès de Look mais je voulais qu'ils exercent une pression sur Look. Lors de la réunion du 2 février 2004, la société Alvarez (MM. W..., 2... et Mme 1...) n'ont pas voulu prendre partie".
121. Par courrier du 10 août 2005, la société Nethub a fait valoir que la société Look est indépendante, que le problème de revente des produits Look par le réseau Dutouron n'a été mis en exergue que par un adhérent Bouticycles et que le CSRB n'a qu'une mission de conseil vis-à-vis du directoire de la société Nethub (cotes 11 422 à 11 424).
122. Le 10 février 2004, M. Serge 15... a adressé la télécopie suivante à la DDCCRF de Montauban (annexe 5 du rapport d'enquête - cotes 638 à 640) :
"Ci-joint le courrier adressé à nos fournisseurs représentant le compte-rendu d'une réunion Bouticycles. Une demande expresse que l'on peut qualifier de chantage afin qu'ils choisissent entre ce réseau et notre société. Le plus curieux est que c'est leur pression auprès de Look qui nous a empêchés d'être livrés directement alors que nous nous étions engagés à respecter leurs prix de vente imposés. Comprenne qui pourra !
La signataire de ce texte tient un magasin à Toulouse.
Concernant Look, plusieurs de nos clients nous ont signalé une affiche à l'entrée du magasin des cycles Motard, toujours à Toulouse, indiquant que les cadres Look que nous vendons ne sont pas garantis !". Le fax dont il est question est celui mentionné au paragraphe 118.
123. Le 19 février 2004, M. Gervais 16..., responsable de la société Helge Sport qui exploite un commerce de détail de cycles à Arras et ancien adhérent du réseau Bouticycles, a déclaré (annexe 20 du rapport d'enquête - cotes 2 060 à 2 065) :
"J'ai reçu, il y a quinze jours, un fax d'un responsable de la commission vélos et cadres de chez Bouticycles m'indiquant que les 130 magasins devaient faire pression sur Look pour que ce dernier ne livre pas Dutouron".
La concertation entre la société Look et les détaillants des réseaux Master Cycle et Bouticycles sur la distribution des produits Look
L'interdiction de la rétrocession dans les contrats de distribution du réseau Bouticycles
124. La société Look Cycle international propose aux détaillants pour la saison 2003-2004 trois types de contrats d'agrément en fonction du montant des achats annuels : un contrat Look
D1 pour des achats annuels d'au moins 41 500 euro, un contrat Look D2 pour des achats annuels d'au moins 25 000 euro et un contrat Look Corner pour des achats annuels d'au moins 67 000 euro (annexe 12 du rapport d'enquête - cotes 1 106 à 1 108). Elle a signé avec la société José Alvarez un contrat "accessoires Look Bouticycles" (annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2 145).
125. Les contrats Look D2, D1 et Corner précisent :
"Attention : chaque contrat Look D2, D1 ou Corner est accordé pour un et un seul point de vente déterminé par la raison sociale et l'adresse mentionnée sur ce présent contrat. Cet engagement est sous la responsabilité du responsable du magasin qui signe le contrat. Chaque magasin s'engage avec la marque Look par l'intermédiaire de l'un de ses contrats. Il s'engage aussi à ne pas redistribuer de produits Look sous forme de rétrocession ou d'échange à d'autres magasins (sous contrat Look ou non)".
126. Par courrier, la société Look a indiqué (courrier du 17 février 2005 - cotes 5499 à 5501) :
"La clause prévue sur nos contrats d'agrément et concernant l'engagement de non-rétrocession a pour objectif de faire correspondre le niveau de remise au chiffre d'achat effectivement réalisé par le détaillant pour son compte. Il est un complément de la mise en garde initiale "chaque contrat est accordé pour un et un seul point de vente". Nous savons que des dépannages entre détaillants existent, et quelquefois les encourageons, notamment en cas où un afflux de commande a généré une situation frustrante pour le consommateur. Aucun contrat n'a été dénoncé par Look pour non-respect de cette clause".
Les conditions tarifaires contenues dans ces contrats
127. S'agissant des contrats de distribution avec Look, parlant au nom du réseau Bouticycles, Mme 3... a déclaré aux enquêteurs le 12 mars 2004 : "Nous nous engagions également à ne pas rétrocéder la marchandise à qui que ce soit, y compris les membres du réseau Bouticycles. Il convient de préciser que tous les magasins Bouticycles ne vendent pas la marque Look. On pouvait néanmoins se rétrocéder la marchandise entre magasins distribuant les cadres Look" (Déclaration de Mme Liliane 3..., gérante de Bouticycle toulousain - annexe 22 du rapport d'enquête, cotes 2078 à 2085).
128. Le contrat Look D2 précise :
"conditions tarifaires : remise de 4 % sur tarif de base (coefficient 1,72 pour vélos et cadres, coefficient 1,88 pour accessoires)" (Contrat Look avec Cycles Thomas, annexe 19 du rapport d'enquête - cote 2055).
129. Le contrat Look D1 précise :
"conditions tarifaires : remise de 7 % sur tarif de base (coefficient 1,77 pour vélos et cadres, coefficient 1,94 pour accessoires)" (contrat Look avec SARL Cycle des Hauts Clos, annexe 24 du rapport d'enquête - cote 2187).
130. Le contrat Look Corner précise :
"conditions tarifaires : remise de 10 % sur tarif de base (coefficient 1,83 pour vélos et cadres, coefficient 2,00 pour accessoires)" (Contrats d'agrément Look Corner, Look D1, Look D2, annexe 12 du rapport d'enquête - cotes 1106 à 1108).
131. Le contrat "accessoires Look Bouticycles" convenu avec la société José Alvarez pour les adhérents du réseau Bouticycles précise :
"conditions tarifaires : remise de 10 % sur tarif de base "coefficient 2,00 pour accessoires" (Contrat Look accessoires, annexe 24 du rapport d'enquête, cote 2145).
132. Les tarifs 2004 pour les revendeurs mentionnent un tarif de base, un tarif D2, un tarif D1, un tarif Corner et un "prix public conseillé" pour chaque produit. Ces tarifs correspondent aux coefficients mentionnés dans les contrats (liste des prix revendeurs France 2004, annexe 12, cotes 1161 à 1163 et annexe 19 du rapport d'enquête, cotes 2056 à 2057).
Les refus de livrer d'autres réseaux de distribution
La réunion du 1er octobre 2001 avec le GIE Master Cycle
133. Un compte-rendu d'entretien du GIE Master Cycle avec la société Look Cycle international, daté du 1er octobre 2001 (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 299 à 2 300), précise :
"Ce rendez-vous a été proposé par la société Look (...)
Présentation de la politique de distribution Look pour 2002 :
- Dutouron a déjà distribué Look mais ne sera plus approvisionné à présent.
- Districycle n'est pas et ne sera pas fourni par Look.
Analyse des possibilités d'agrément adhérent par adhérent et obtention des conclusions suivantes :
- Frédéric Z... pourrait distribuer Look à Pau mais pas à Tarbes où un magasin est déjà agréé.
- Pierre L... pourrait distribuer Look à Saint-Gaudens mais pas à Toulouse où les distributeurs sont déjà nombreux.
- Bernard A... serait en concurrence, à Angers, avec les Cycles Charrier pour l'obtention de l'agrément.
- Louis 17... serait en concurrence avec Véloland pour l'obtention de l'agrément.
Pour les autres adhérents, il ne semble pas y avoir de difficultés".
134. Dans le cahier saisi dans son bureau, Mme Audrey Y..., coordinatrice du GIE Master Cycle, a indiqué (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 481 à 2 482) :
"Rdv Look lundi 1/10/01 16h00
Dutouron ? a eu du Look mais n'en aura plus
Districycle ? n'est pas fourni par Look
Si rétrocession ? rupture du contrat
Pb majeur F. Z... ? il doit s'engager à ne vendre du Look à Pau mais à Tarbes".
Les relations de Look avec le réseau Bouticycles
135. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société centrale Districycle, a déclaré (annexe 1 du rapport d'enquête - cotes 118 à 127) :
"Le fournisseur Alvarez refuse de nous vendre des cadres de marque Look sous prétexte que nos adhérents sont implantés dans les villes où leurs réseaux existent déjà. Alvarez nous a proposé des pédales Look à un prix trop élevé".
136. Le 10 décembre 2003, M. Serge 15..., président directeur général de la société Serge Dutouron, a déclaré (annexe 5 du rapport d'enquête - cotes 586 à 593) :
"En ce qui concerne les produits Look, la société Alvarez en octobre 2002 au salon Roc d'Azur a décidé de ne plus nous vendre les cadres suivant la décision de la société mère. Pendant l'année 2003 nous avons acheté près de 400 cadres Look auprès de plusieurs fournisseurs dont le principal Guerciotti. Le premier cadre Look de la gamme 2004 vendu à un particulier a fait l'objet d'un contrôle du magasin Bouticycles de Castelsarrasin. Depuis le fournisseur Guerciotti ne peut plus recevoir de cadres Look. Nous nous étions engagés depuis 3 ans auprès d'Alvarez à ne pas vendre par correspondance et à vendre au prix public imposé".
137. Le 9 mars 2004, M. Joël 18..., directeur commercial de la société Campagnolo France, a déclaré (annexe 16 du rapport d'enquête - cotes 1 922 à 1 932) :
"Look a eu un problème avec Dutouron qui s'est approvisionné en Espagne ou Italie en cadres. Look a remonté la filière grâce à une numération de chaque cadre et a sanctionné le distributeur espagnol ou italien".
138. Le 27 janvier 2004, la société Look Cycle international a répondu à une demande d'échange de pédales de la société Dutouron. Ces pédales ne seront échangées qu'à réception de la facture d'achat de la société José Alvarez (annexe 5 du rapport d'enquête - cote 644).
La demande de Bouticycles toulousain auprès de Look
139. Le 6 février 2004, la société Bouticycles Toulousain a adressé à la société Look Cycle international un courrier dans lequel elle dénonçait les prix bas des produits des gammes Look 2003 et 2004 commercialisés sur le site Internet de la société Serge Dutouron et demandait à la société Look Cycle international au nom des distributeurs agréés Look de faire en sorte que cette pratique cesse (annexe 22 du rapport d'enquête - cotes 2087 à 2089). Estimant que la société Serge Dutouron n'était pas tenue aux mêmes obligations en matière d'approvisionnement et de services après-vente que celles incombant aux détaillants du réseau aux termes de leur contrat d'agrément Look, elle s'étonnait : "que la société Serge Dutouron SA puisse commercialiser vos produits alors même qu'elle n'est pas agréée et se prévalait de la marque Look pour cette commercialisation ... car dans tous les cas la société Serge Dutouron n'a pu se fournir en produits Look qu'auprès d'un de vos distributeurs" (annexe 22 du rapport d'enquête- cotes 2087 à 2089).
140. En réponse à ce courrier, la société Look Cycle international a adressé la lettre suivante à Mme Lyliane 3..., pour le compte de l'association des agréés Look, ainsi qu'à de nombreux magasins agréés (annexe 22 du rapport d'enquête - cotes 2090 à 2091) :
"Chère Madame,
Votre courrier du 6 février évoque votre profonde inquiétude quant aux conséquences des agissements de la société Dutouron SA sur le fonctionnement de notre réseau d'agréés qui se voient en permanence contraints à rater des ventes ou à s'aligner sur des prix incompatibles avec leur équilibre financier.
Je vous félicite pour le dynamisme dont vous faites preuve dans cette affaire et vous assure que nous partageons totalement votre vision.
Je tiens cependant à vous faire remarquer qu'aucun fabricant ni distributeur n'a autant que Look pris une position à ce point nette contre les agissements de Dutouron.
Dès que nous en avons contractuellement eu les moyens, nous nous sommes opposés à toute relation d'affaire avec cette société et tenté d'enrayer ses approvisionnements parallèles.
Aucune livraison à Dutouron ne s'est faite avec notre consentement et nous avons pu exclure les revendeurs étrangers dont la traçabilité de nos produits donnaient la preuve de leur complicité.
Tout ceci a demandé beaucoup d'efforts et de persuasion, même si les résultats ne sont pas aussi parfaits que nous pourrions le souhaiter.
Je trouve donc un peu injuste l'image d'immobilisme de Look qui ressort de votre courrier et qui me semble bien différente de notre ouverture dans cette affaire et des relations que nous avons toujours eues, laissant nos avocats travailler ensemble à la solution la plus efficace.
Il n'en reste pas moins que la situation actuelle est intolérable. D'autant que même s'il dispose d'une source de produits raréfiée, le dommage provient surtout d'une communication agressive sur les prix qui perturbent le consommateur.
(...)
Le préjudice que nous subissons tous depuis plusieurs mois est évident, tant en volume des ventes que dans la dégradation des marges générées par nos produits. Il est donc dans nos absolues priorités de faire cesser par tous moyens légaux cette situation.
Il convient par contre de s'assurer que notre dossier est bétonné car l'évolution de la législation européenne en matière de règles de concurrence suscite l'existence d'aventuriers tels que Serge 15... qui profitent des efforts des revendeurs agréés, sans lesquels ils n'existeraient pas, et se contentent de prendre les ventes au moyen de remises insupportables à tout revendeur sérieux.
Notre réseau est manifestement, par l'indispensable technicité de ses agréés et la qualité des revendeurs choisis, l'exemple même d'une distribution sélective. Il faut toutefois s'assurer que la forme contractuelle régissant nos relations puisse apparaître clairement au tribunal qui sera sans aucun doute chargé de faire cesser ces reventes et probablement d'évaluer les préjudices que nous avons tous subis.
Les actions judiciaires que vous suggérez et que nous avons étudiées avant de recevoir votre courrier ne sont malheureusement pas, en l'état, des solutions applicables.
Nous avons travaillé à la résolution de ce problème et nous devrions être dans les jours prochains en mesure de faire des propositions d'action concrètes à l'ensemble de notre réseau.
(...)
Thierry 14...
PS : Votre courrier ayant été copié à de nombreux agréés Look, je leur adresse copie de ma réponse".
141. Dans un courrier daté du 17 février 2005 (cotes 5499 à 5501), la société Look Cycle international a précisé :
"J'ai effectivement répondu à un courrier du 6 février à Mme 3..., représentant l'association des agréés Look. J'ai indiqué que je souhaitais par tous les moyens légaux faire cesser une distribution préjudiciable aux intérêts de tous, consommateurs comme détaillants. La distribution notamment par Internet ou par correspondance des produits techniques de notre marque, d'origine inconnue, présente en effet des risques pour tous les usagers. La vente de composants de compétition en carbone, nécessite en effet une formation spécifique, permettant aux vendeurs de prodiguer aux consommateurs les meilleurs conseils, tant dans le choix du matériel le mieux adapté à leur pratique que pour l'assemblage des composants ou leur taille.
Une absence de conseils ou une mauvaise utilisation de nos produits peut en effet avoir des conséquences très dommageables pour le consommateur.
J'ajoute que le risque d'importation de copies de provenance diverse pour une marque aussi renommée que la notre est réel. Il en circule du reste en ce moment à Taiwan.
Nous avons donc mis en place une distribution sélective (...)
En ce qui concerne l'exclusion des revendeurs étrangers évoqués dans ce courrier, vous comprendrez sans doute qu'il s'agissait pour nous de calmer un réseau rendu furieux par les agissements de certains et qui menaçait sérieusement de boycotter notre marque.
Ne vendant à l'étranger qu'à des distributeurs exclusifs et indépendants, nous n'avons aucun moyen d'exclure un revendeur, même si nous en avions l'intention.
Nous n'avons donc aucune possibilité de prendre des mesures à l'encontre d'un revendeur étranger avec lequel nous n'avons aucune relation commerciale.
Renseignements pris cependant, les relations entre notre distributeur italien et la société Guerciotti sont bonnes et la société Serge Dutouron fait partie de nos détaillants agréés".
L'intervention du réseau Bouticycles contre les cycles Dutouron
142. Le 10 février 2004, M. Serge 15... a adressé la télécopie suivante à la DDCCRF de Montauban (annexe 5 du rapport d'enquête - cotes 638 à 640) reproduite au point 123. Elle se termine ainsi :
"Concernant Look, plusieurs de nos clients nous ont signalé une affiche à l'entrée du magasin des cycles Motard, toujours à Toulouse, indiquant que les cadres Look que nous vendons ne sont pas garantis !".
143. Le gérant de la société Espace Cycle Motard a précisé, dans un courrier daté du 24 février 2005 (cote 5443) :
"L'affiche dont vous me parlez a été mise en place par un client sur un panneau destiné à la clientèle "Info randonnées - vente occasion - programme Cyclo sportif". Au sujet de nos tarifs Look, sachez que nous avons l'habitude de pratiquer le prix conseillé moins 10 %".
144. L'affiche transmise (annexe au courrier de la société Cycle Motard du 24 février 2005 - cote 5444), qui aurait été apposée par un client, est en fait une lettre de la société Look Cycle international datée du 21 octobre 2003. Cette lettre précise :
"Monsieur,
Les Cycles Dutouron n'étant pas référencés comme client Look, nous ne pouvons pas appliquer la garantie légale constructeur pour raison de non connaissance d'origine du produit.
Dans ce cas, vous pouvez prendre contact avec un revendeur Look agréé de votre région (qui vend plus cher que les cycles Dutouron mais offre un service) avec lequel nous traiterons directement et lui communiquerons la démarche à suivre.
Dans l'attente de vos démarches, veuillez agréer, Monsieur, nos sincères salutations distinguées.
(...)
Le service après-vente".
La justification de cette intervention
145. Elle a été développée par Mme 3... dans les termes suivants :
"Ensuite, l'autre obligation était de respecter le prix de vente conseillé. Cependant, compte tenu de la concurrence locale, notamment sur Toulouse, nous pouvons pratiquer des prix inférieurs aux prix conseillés. Nos prix affichés sont toujours les prix conseillés mais nous faisons assez régulièrement ces remises de 10 % mais pas au-delà. A partir du mois de mars-avril 2003, nous avons eu des clients qui nous ont demandé ces prix pour nous aligner sur les offres faites par la société Serge Dutouron. Dès 2002, M. 15... distribuait Look mais avec toujours l'engagement de pratiquer des prix raisonnables. C'était l'engagement pris avec Monsieur 2.... Mais comme à son habitude, il a détourné son engagement en respectant plus ou moins les prix mais en offrant à chaque fois des accessoires coûteux pour chaque vente de cadre (jeux de pédaliers, (...) plus paires de roues, potence, etc ...).
Face à cela, nous avons voulu réagir car il s'agit de la survie de notre entreprise face à cette concurrence que nous estimons très déloyale. J'ai alerté tous mes collègues dans le réseau. J'avais d'abord écrit à Look au mois d'avril 2003 et ensuite une nouvelle lettre au mois de novembre 2003. Entre temps, nous avions eu de nombreux échanges verbaux avec les commerciaux et des échanges téléphoniques.
Look m'avait répondu qu'ils avaient organisé la traçabilité des produits. Ce qui leur avait permis de découvrir quelques sources d'approvisionnement en Dutouron (notamment Guerchioti en Italie). Ils ont pris des dispositions pour faire cesser ces approvisionnements parallèles. Mais les offres ont continué, de façon toujours plus agressive sur le site de Dutouron. Devant cela, j'ai confié l'examen de notre contrat de distribution avec Look à un avocat qui, après analyse, nous a indiqué que nous n'avions que des obligations envers Look et aucun engagement de leur part de protection du réseau.
J'ai fait connaître ces conclusions à tous les Bouticycles qui distribuent Look. Ceux-ci ont réagi auprès des commerciaux de Look, ou directement auprès de Look. C'est donc à la suite de cela que j'ai proposé [que] cette question soit inscrite à l'ordre du jour"(annexe 22 du rapport d'enquête, cotes 2078 à 2085).
146. Les pressions du fournisseur, la société Look Cycle international, et des détaillants des réseaux Master Cycle et Bouticycles ont été suivies d'effet. En effet, en 2005, la société Serge Dutouron ne commercialise plus sur Internet les produits Look de la gamme 2005. Sur son site, à la date du 3 février 2005, il est précisé que les produits Look de la gamme 2005 sont vendus exclusivement en magasin et aucun prix de vente n'est mentionné3.
La concertation entre la société Hutchinson, les détaillants et les grandes surfaces pour le respect des prix conseillés
147. La société Hutchinson est l'un des deux principaux fournisseurs de pneumatiques en France avec la société Michelin. Elle est leader sur le segment des pneumatiques pour VTT, alors que la société Michelin est leader sur le segment des pneumatiques pour route.
148. La société Hutchinson commercialise ses produits auprès de détaillants, de grandes surfaces spécialisées et de grandes surfaces alimentaires. Elle édite des tarifs de vente public TTC conseillés (annexe 8 du rapport d'enquête (PV d'audition) - cotes 722 à 732 et annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 051 et 3054 à 3 060).
La coordination de la politique commerciale avec le réseau Master Cycle
3 Extrait site Internet de la société Dutouron pour 2005.
149. Le 14 juin 2001, Mme Dominique 11..., directrice du département pneumatiques de la société Hutchinson, a rédigé une note interne, destinée au directeur commercial, sur la politique à mener vis-à-vis du réseau Master Cycle et des distributeurs Districycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 104 à 3 106). Cette note précise :
"Samuel
Pour M. A...
Mon point de vue sur le message à passer pendant et après votre appel - par fax de façon à disposer d'un document écrit de notre part pour sa réunion du 18 juin.
- La notoriété de notre marque passe non seulement par l'accueil du produit par le consommateur mais également et surtout l'harmonie entre nos distributeurs et notre politique commerciale orientée marque, qualité et prix.
- (...)
- Master Cycle et les Ets Cesbron ont été très sensibles à cette politique, ce qui nous a valu d'être reconnus comme partenaire à part entière et nous ne pouvons que nous en féliciter.
- Nous entendons bien RENFORCER le partenariat et saurons répondre aux exigences commerciales et promotionnelles que le groupement MC sera amené à décider, dans le respect bien entendu de notre propre stratégie et nos impératifs de gestion.
- L'arrivée d'un nouveau distributeur à travers l'ouverture de magasins Districycle nous contraint aujourd'hui à renforcer notre position rigoureuse face aux éventuelles dérives tarifaires, perturbantes pour le marché.
Voici donc les décisions prises à ce jour :
- ne pouvant afficher un refus de vente
- et préférant gérer en direct ce nouveau réseau plutôt qu'encourager les réseaux parallèles européens, nous avons affirmé avec fermeté les conditions selon lesquelles nous entendions les livrer :
Dès aujourd'hui
o prix tarifs TTC conseillés
o produits systématiquement étiquetés aux prix TTC
o respect de notre politique tarifaire.
Nous les contrôlons et si ces directives ne devaient pas être respectées, nous saurions tarir la source d'approvisionnement. Nous ne souhaitons pas que cette distribution se fasse au détriment des intérêts de nos partenaires tels que Master Cycle.
A nous d'assurer le contrôle du réseau et d'en tirer les conclusions et mesures à prendre.
(...)
Voilà Samuel mes principales idées et suggestions sur le sujet
D. 11... 14.6.01".
150. Le 15 juin 2001, Samuel 12..., directeur commercial de la société Hutchinson, a adressé à M. A..., responsable du GIE Master Cycle une télécopie lui exposant la politique commerciale de la société Hutchinson vis-à-vis du réseau Districycle et du réseau Master Cycle, reprenant les principes énoncés dans la note de Mme 11..., directrice du département pneumatiques. Cette télécopie précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 097 à 3 098) :
"Monsieur A...,
Ce fax fait suite à notre échange téléphonique de ce jour concernant le rappel de nos politiques commerciales respectives ainsi que le renforcement à venir du partenariat Mastercycle/Hutchinson et que nous pouvons résumer comme suit :
1) politique commerciale
Je tiens à insister sur ce point essentiel, nous poursuivons notre politique orientée marque, qualité et prix, que ce soit en France ou à l'international. Cela nous a valu d'être reconnu comme partenaire Master Cycle et nous y sommes toujours très sensibles.
2) le réseau Districycle
Hutchinson a accepté de fournir ses produits en direct à un nouveau distributeur dans le cadre très strict de respect de nos prix de vente publics conseillés. Un courrier très récent rappelle que tout manquement à cette position nous amènerait à reconsidérer notre collaboration. Nous devrions être amenés à constater très rapidement :
- un repositionnement des prix,
- un étiquetage systématique des produits à la vente,
- des prix pratiqués conformes à notre tarif PVC.
Des contrôles sont en cours et nous ne manquerons pas de vous tenir au courant.
3) Master Cycle
Nous avons bien noté que le réseau Master Cycle souhaite accélérer son évolution et renforcer son partenariat avec les marques.
(...)
Nous pouvons également faire figurer à l'ordre du jour la mise en place d'un calendrier promotionnel spécifique à Master Cycle et qui devra vous amener à constater :
1/ des "actions exclusives" produit ;
2/ des prix attractifs ponctuels pour votre clientèle ;
3/ une fidélisation accrue ;
4/ une dynamique magasin dans tout le réseau Master Cycle.
Tout ce que nous venons d'échanger sur le respect des prix, la nécessité de structurer nos partenariats respectifs, le rappel de nos axes commerciaux et ses applications sur le terrain, nous responsabilise en tant qu'acteur d'un marché qui doit se professionnaliser.
Le partenariat avec Master Cycle va dans ce sens et c'est bien ce que nous valoriserons à terme".
151. Cet engagement de la société Hutchinson pour le respect des prix conseillés lui a permis d'être agréée "partenaire Master" en 2002 et 2003 (voir paragraphes 66 à 74).
152. Le 12 septembre 2002, Mme Audrey Y..., coordinatrice du groupement Master Cycle, a adressé une télécopie de sept pages à M. 19..., de la société Hutchinson (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 110 à 3 114). Cette télécopie précise :
"Monsieur,
Je vous fait parvenir ci-joint un extrait du catalogue édité par "Destocksport", une société de vente par correspondance.
Les prix affichés sont inacceptables tant ils sont bas et constituent pour les professionnels du Cycle une entrave supplémentaire à leur activité dans un contexte économique déjà peu favorable.
J'espère vivement que la société Hutchinson agira pour combattre cette pollution des prix".
153. Le 18 septembre 2002, M. 20..., directeur commercial et marketing de la société Hutchinson, a envoyé une télécopie à Melle Audrey Y..., du groupement Master Cycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 344 et 3107 à 3 108). Cette télécopie précise :
"Copie P. 19... date : 17 septembre 2002
Objet : veille concurrentielle
Madame,
Nous accusons réception de votre télécopie du 12 courant dont les termes ont retenu toute notre attention.
Ainsi que vous le soulignez, nous avons également constaté la présence de produits Hutchinson dans le catalogue dont vous faites mention, à des prix que nous jugeons effectivement tout à fait inacceptables.
En conséquence, nous vous informons que nous mettons tout en œuvre pour remonter à la source et stopper ce type de procédés qui nuisent à notre activité commerciale".
154. Le 3 mai 2003, Mme Audrey Y..., coordinatrice du groupement Master Cycle, a adressé une télécopie à M. Patrick 19..., de la société Hutchinson (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 375 à 2 377). Dans cette télécopie, elle fait part du mécontentement de revendeurs de son réseau face aux prix de vente pratiqués pour des pneumatiques Hutchinson par le réseau Peugeot MTC et dans le catalogue Décathlon :
"Dans le cadre de notre partenariat, je me permets de te faire part des dysfonctionnements constatés.
On vient de me faire part des promotions proposées par le réseau Peugeot MTC sur des pneumatiques ... Compte-tenu des dates de validité de cette opération, on ne peut rien y faire mais il est clair que nos statistiques en pneus scooter Hutchinson risquent d'en subir les conséquences ... Par ailleurs, nous avons constaté dans le catalogue Décathlon Cycle 2003, que le pneu Carbon Comp était à 29,99 euro alors que le prix public conseillé est de 36,70 euro ; pour information. Nous reprendrons contact dès mon retour de congés donc à partir du 9 mai".
155. Le 9 décembre 2003, M. Pierre L..., gérant de la société La Cyclerie Pierre Rossé Sport (groupement Master cycle), a déclaré (annexe 3 du rapport d'enquête - cotes 195 à 204) :
"En ce qui concerne les fournisseurs de pneumatiques, je ne commercialise pas les pneus Michelin car ce fabricant ne contrôle pas les circuits de distribution. Avec Hutchinson, nous pratiquons les prix moyens constatés en France. La marge moyenne avec ces produits est de 40 %".
Les pressions exercées sur le réseau Districycle pour le respect des prix conseillés
156. Le 23 novembre 2000, Samuel 12..., directeur commercial de la société Hutchinson, a envoyé une télécopie à M. Hervé 21..., de la centrale Districycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 117 à 3 119). Cette télécopie précise :
"Cher Monsieur,
Ce fax fait suite à notre réunion du 12/11/00 dans nos locaux où nous avions convenu d'aborder les points suivants :
1/ Tarification 2001
Vos conditions d'achats ont été confirmées pour la saison prochaine, à savoir :
- barème 2001 avec conditions grossistes/relais
- un engagement annuel de 600 KF
- un prix de vente public conseillé : l'objectif étant que nous puissions constater les écarts les plus faibles par rapport à ceux affichés globalement sur le marché.
Voici le détail des écarts maximum à appliquer en tenant compte de votre système de remise : prix à l'unité ? net, prix par 6 ?- 3 %, prix par 10 ? - 3 %
A/ gamme 2001 : pas de remise à l'unité
Cela concerne les gammes suivantes : (...)
? Pour toutes ces références, merci de bien vouloir reprendre nos prix de vente public affichés dans notre tarif.
B/ Autres
La tolérance de prix pour les produits à l'unité est la suivante :
- Excel - 5 % (...)
- Mosquito - 3 % (...)
- Python - 3 % (...)
- Alligator - 3 % (...)
- Tpo Slick - 3 % (...)
- Chambres à air : nous avons bien noté que nos chambres ne sont pas référencées.
Pour information, nous vous renvoyons vos 3 pages où nous avons noté certaines anomalies sur des références que vous souhaitez commercialiser. Exemples : les pneus à bandes réflectorisantes.
En conclusion, ce qui nous amène à vous proposer un taux de remise réduit sur des pneumatiques vient de l'analyse des produits de la concurrence. Nous notons qu'avec - 10 % de remise sur les prix de vente public conseillés, les niveaux de prix proposés par nos concurrents restent très élevés. En ce qui nous concerne, les prix de vente publics sont calculés au plus juste du marché".
157. Le 7 décembre 2000, la société Districycle a transmis à la société Hutchinson, par télécopie, trois pages de tarifs de pneus. En bas de la première page, il est indiqué (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 123 à 3 126) :
"Pour information
Certains tarifs de pneus sont non publiés ou sont en cours.
Hutchinson et Continental nous ont demandé de pratiquer les prix publics conseillés dans un souci d'harmonisation du marché.
Nous nous sommes pliés à ces demandes dans un premier temps, cependant nous constatons déjà que les prix imposés ne sont pas respectés chez nos concurrents.
Nous attendons de voir l'évolution du marché pour sortir un tarif définitif".
158. Le 8 décembre 2000, Samuel 12..., directeur commercial de la société Hutchinson, a envoyé une télécopie à M. Hervé 21..., de la centrale Districycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3 120 à 3 121). Cette télécopie précise :
"Nous venons de recevoir un fax de votre part sans courrier complémentaire explicatif et dont le contenu nous oblige à réagir immédiatement.
Nous avons convenu ensemble d'appliquer les prix de vente publics en vous confirmant nos actions concernant ceux qui ne les appliquent pas actuellement.
Or, rien dans notre conversation téléphonique ne laissait transparaître votre argumentaire de bas de page auprès de vos magasins.
En effet, vous laissez entendre que nous ne faisons pas respecter nos prix, ce qui ne serait pas le cas de Michelin (...)
Merci de bien vouloir nous indiquer clairement la position que vous souhaitez prendre à court terme, vis-à-vis d'Hutchinson afin de vérifier si nos objectifs convergent".
La surveillance des prix dans les magasins Districycle
159. Un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, concernant la semaine du 26 février au 2 mars 2001, précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 989 à 2 992) :
"problèmes de tarifs chez Dutouron. Voir si possibilité de les faire relever parallèlement avec les autres intervenants du marché (Distri, Alrié, Laleurand)".
160. Un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la semaine du 26 au 30 mars 2001, précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 972 à 2 974) :
"Districycles Athis-Mons : "prix cassés" sur l'ensemble de la gamme Hutchin - 20 % - 30 %".
161. Dans un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la période du 28 mai au 1er juin 2001, sont portées les mentions suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2 993 à 2 996) :
"Districycle Brest ... Problèmes de prix
(...)
Districycle Rennes Entrevue avec MM. 21... et O... voir note
(...)
Districycle Tours Tarif public donné pour s'assurer des bons prix
(...)
Entrevue O.../21... (Districycle) ? hausse des prix effectuée (laborieuse car ne maîtrise pas encore l'informatique)".
162. Le 7 juin 2001, M. Patrick 19..., directeur des ventes de la société Hutchinson, a adressé à la société Districycle le courrier suivant (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3 093) :
"A l'attention de MM. 21... et O...
Messieurs,
Ce courrier fait suite à notre visite du 28 mai dernier dans vos locaux.
Comme convenu, nous vous confirmons les termes de nos échanges portant plus particulièrement sur le respect de notre politique tarifaire à savoir :
- A la signature de votre engagement 2001, vous vous êtes engagés à respecter notre tarif public conseillé TTC (hormis quelques aménagements, dûment validés par notre direction commerciale et la personne de M. 12..., qui laissaient apparaître des écarts maximum de 7 %).
- Lors de mes différentes visites auprès de vos magasins, j'ai été contraint de constater que nos préconisations de prix ne sont pas respectées : tous nos produits phares sont vendus en moyenne 30 % en dessous de notre tarif public conseillé TTC, en particulier le Carbon Comp Gold TS 700x23C vendu au prix de 160 F TTC au lieu de 229 F TTC.
- Lorsque j'ai évoqué cet état de fait, vous m'avez fait part de problèmes informatiques vous mettant dans l'impossibilité de réajuster vos tarifs dans l'immédiat.
- Afin de pallier à cette situation dans les plus brefs délais, vous vous êtes engagés à ce que :
o Vos magasins soient approvisionnés de produits sans étiquette, ni ancien prix,
o Et, de renvoyer à vos magasins, avant le 11 juin 2001, des étiquettes aux tarifs préconisés.
A cette date, notre équipe commerciale passera au sein de vos magasins afin d'observer les prix pratiqués sur les articles de notre gamme".
163. Dans un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la semaine du 4 au 8 juin 2001, sont portées les mentions suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2968 à 2970) :
"Districycle Craponne Les prix semblent respectés".
164. Dans un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la période du 5 au 9 novembre 2001, sont portées les mentions suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2953 à 2955) :
"Districycle St-Brieux : relevé de prix, prix aux tarifs fixés il y a un mois carbon comp gold 199 F".
165. Dans un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la période du 2 au 6 septembre 2002, sont portées les mentions suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2997 à 3000) :
"Un nouveau magasin Districycle est ouvert à Lillers dans le Pas-de-Calais. Ci-dessous les prix que j'ai relevé incognito
pneus carbon pv ttc 28 euro pv conseillé 36,70 euro
excel souple 11,43 euro 13,6 euro
reflex gold souple 20 20,60 euro 24,20 euro
23 21,35 euro 25,20 euro
reflex kevlar 23 18,70 euro 22,00 euro
Cela est gênant pour les clients de mon secteur qui eux selon notre politique commerciale pratiquent les prix conseillés".
166. Dans un rapport d'activité d'un commercial de la société Hutchinson, qui concerne la période du 14 au 18 octobre 2002, sont portées les mentions suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3007 à 3008) :
"Districycle 69 craponne prix non respectés".
167. Dans une lettre adressée le 10 septembre 2003 aux enquêteurs (annexe 1 du rapport d'enquête - cote 137), la SA centrale Districycle a déclaré :
"Monsieur,
Malgré mon emploi du temps surchargé, je vous transmets un résumé des faits marquants depuis la dernière visite du service des répressions des fraudes de St Brieuc.
Octobre 2002 Michelin France nous a demandé d'augmenter nos prix de vente en contrepartie de meilleures conditions sur nos prix d'achats.
Novembre 2002 Santini France nous a demandé d'augmenter nos prix de vente par rapport à nos concurrents.
Toutes ces recommandations ou pressions ont été faites par téléphone ou sur des salons".
La surveillance des prix pratiqués dans les magasins Auchan
168. La société Auchan France exploite, directement ou par le biais de filiales, 121 hypermarchés répartis sur le territoire national.
169. La société Hutchinson est, entre 2001 et 2004, le seul fournisseur de pneumatiques pour cycles référencé par la société Eurauchan pour le compte de la société Auchan France.
170. Dans un courrier daté du 18 mars 2005, la société Auchan précise que la centrale d'achat peut indiquer aux hypermarchés un prix conseillé de vente mais que les magasins déterminent eux-mêmes leurs prix de vente.
171. La société Hutchinson communique à la société Auchan les prix de vente conseillés qui doivent être appliqués dans les magasins. Ainsi, les offres de prix à la société Auchan, applicables à compter du 1er mars 2001 et du 1er avril 2001, mentionnent les prix d'achat HT et les prix de vente conseillés (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2917).
172. Le 15 février 2001, Dominique 11..., de la société Hutchinson, a adressé à M. Patrick 22..., de la société Auchan, le courrier électronique suivant (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2924) :
"Comme convenu, nous vous confirmons notre proposition promotionnelle pour le 2ème trimestre 2001 :
opération petits prix (août 2001)
- lot de 2 chambres (toutes références confondues) prix magasin : 11,52 F HT le lot
- lot de 2 pneumatiques (toutes références confondues) prix magasin : 28,84 F HT le lot
Ces prix correspondent à l'offre promotionnelle confirmée pour toute l'année 2001.
Opération prix d'appel sur produit haut de gamme (septembre 2001)
- Caméléon : prix magasin nets : 40,46 F HT (au lieu de 47,60 F HT) Prix public conseillé TTC : 69 F TTC (au lieu de 79 F TTC) (...)
- On the Rocks : prix magasins nets : 38,29 F HT (au lieu de 40,05 F HT) prix public conseillé TTC : 69 F TTC (au lieu de 79 F TTC)".
173. Une note manuscrite a été saisie dans le bureau de M. 19..., chef des ventes de la société Hutchinson (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2985). L'écriture de ce document est similaire à celle d'un rapport d'activité de M. 23..., commercial au sein de cette même société (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2981 à 2984). Sur cette note, il est indiqué :
Janvier 2003 Selle Italia menace d'augmenter nos prix d'achat si nous ne relevons pas nos prix de vente.
Aout 2003 Pression auprès de Wilier de certains détaillants de la région de Marseille et Avignon pour que ce fournisseur ne livre plus les magasins franchisés Districycle de leurs régions respectives. La réaction du fournisseur Wilier a été de menacer d'augmenter nos prix d'achat de 5 %.
"Auchan Avignon sud
(...)
RJ Monsieur 24... le 14/3, qui remplace Monsieur 25... (promotion). Magasin ayant eu en 2000 des produits haut de gamme. Monsieur 24... a mis en promo ces produits.
Je l'ai informé qu'il devait respecter le tarif public.
Il m'a promis de réajuster les prix.
Lors de la visite de contrôle du 29/03, j'ai constaté que rien n'a été fait.
Prix à ce jour : (...)".
174. Le jeudi 19 avril 2001, Dominique 11..., de la société Hutchinson, a rédigé un compte rendu d'entretien téléphonique avec la société Auchan (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2918). Ce compte rendu précise :
"Entretien téléphonique du 18 avril 2001 avec P. 22..., Auchan
(...)
4/ Promotions
Pour accélérer la reprise des ventes, M. 22... souhaite qu'on lui soumette début semaine prochaine plusieurs types de promotions :
A) une promotion en Juin "déstockage"... Alligator TS noir ... en proposant que le magasin vende le produit en prix public 129 F TTC au lieu de 169 F TTC
B) une autre promotion "en août et en octobre" qui se doit d'être la proposition "petits prix" et On the Rocks et Caméléon que nous avions proposées à validation fin février".
175. Cette offre promotionnelle a été confirmée par courrier électronique du 20 avril 2001 de la société Hutchinson à la société Auchan (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3076). Ce courrier précise :
"Pour faire suite à l'entretien téléphonique du 18 courant entre P. 22... et D. 11..., nous vous confirmons les termes de l'offre promotionnelle suivante :
opération déstockage
période juin 2001
1500 pneumatiques Alligator 26x2.00
(...)
prix de vente net : 68,25 F HT (...)
prix public promo conseillé : 129 F TTC (au lieu de 169 F TTC)".
176. Le 27 avril 2001, la société Hutchinson a adressé un courrier électronique à la société Auchan pour récapituler les offres promotionnelles des mois de juin, juillet, août et septembre 2001 ainsi que les promotions prévues au premier semestre 2002 (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3077 à 3078). Pour chaque opération promotionnelle sont précisés les prix promotionnels d'achat et les prix d'achat avant promotion, ainsi que les prix publics promotionnels conseillés et les prix publics conseillés avant promotion. Ce courrier précise :
"calendrier des promotions individuelles/premier semestre 2001
Ce calendrier vous est adressé par poste ce jour. Dès réception nous vous saurions gré de bien vouloir enregistrer nos gencod promotionnels des articles sélectionnés pour le mois de mai afin de garantir les prix promos lors des passages en caisse des trois références concernées.
Par ailleurs, nous nous permettons de vous rappeler que nous n'avons pas reçu en retour notre catalogue fournisseur incluant les dernières modifications que vous avez validées".
177. Le 30 mai 2001, une télécopie de la société Hutchinson à destination de la force de vente de la société Hutchinson précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2920) :
"objet : opération promotionnelle Auchan
(...)
La centrale vient de valider l'offre promotionnelle suivante :
Pneu Alligator (...)
Prix promo : 68,25 F HT (prix net de toute remise).
Prix TTC promo conseillé 129 F".
178. Le 10 juillet 2001, la société Hutchinson a adressé un courrier électronique à la société Auchan pour de nouvelles opérations promotionnelles. Pour les trois offres promotionnelles prévues sont mentionnés les prix d'achat promotionnels et les prix d'achat avant promotion, ainsi que les prix publics conseillés promotionnels et les prix publics conseillés avant promotion (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3080). Ce courrier précise :
"Ces articles sont d'ores et déjà enregistrés chez nous sous les codes et prix promotionnels : les magasins peuvent commander. Durée de l'offre en magasin juillet-août.
Nous vous proposons d'envoyer un fax à chaque magasin, détaillant ces trois articles promotionnels : vous trouverez ci-joint le modèle conçu à cet effet".
179. Le modèle de la télécopie élaboré par la société Hutchinson et destiné à être diffusé auprès de l'ensemble des magasins Auchan rappelle ces trois dernières offres promotionnelles (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3081). Le document mentionne les anciens et les nouveaux prix d'achat ainsi que les anciens et les nouveaux prix publics conseillés TTC.
180. Le 1er mars 2002, la directrice du département pneumatique de la société Hutchinson a précisé, dans un courrier électronique à destination d'autres commerciaux de la société Hutchinson, qu'il convenait désormais d'éviter de mentionner les prix de ventes publics conseillés (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3087). Ce courrier précise :
"subject : Auchan promo
(...)
6) compte tenu de ma récente rencontre de mardi, je pense qu'il faut désormais éviter d'écrire les propositions de prix de vente publics TTC conseillés même pour les promos. Ces informations doivent rester verbales".
181. Le 6 mars 2002, M. Pierre 26..., de la société Hutchinson, a adressé à M. 19..., chef des ventes de la société Hutchinson, la télécopie suivante (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2932) :
"1) Auchan : aurons-nous bientôt le référencement avec les modifications nécessaires, ainsi que les prix publics ? Les magasins qui ont déjà passé cde les réclament".
182. Sur ce document, ont été ajoutées au stylo les mentions suivantes :
"P. 19... ?P. 26... le 6 mars 02
1) Auchan - j'ai RDV le 13 mars. Logiquement je récupère le référencement 2002 avec les prix TTC".
Les discussions sur les prix pratiqués dans les magasins Décathlon
183. L'enseigne Décathlon est leader sur le marché français de la distribution spécialisée d'articles de sport et de loisirs. A la date du 30 juin 2004, elle regroupe en France 316 magasins qui sont des établissements secondaires de la société Décathlon. Elle se distingue de ses concurrents par la grande taille de ses magasins et la part occupée dans ses assortiments par ses propres marques de distributeur.
184. En ce qui concerne les négociations avec les fournisseurs de pneumatiques pour cycles, il convient de distinguer les négociations pour les pièces de première monte, destinées aux ateliers de fabrication, et les négociations pour les produits qui sont revendus dans les linéaires. Les négociations sont distinctes et le présent dossier ne concerne que les relations commerciales pour les produits revendus en linéaires ou dans les ateliers de service après-vente. Pour cette dernière activité, les achats sont réalisés par un "chef de marché".
185. En ce qui concerne les prix de vente au détail, les magasins reçoivent les articles accompagnés d'un Code et d'un prix de vente. La société Décathlon a précisé (courrier de la société Décathlon du 15 juin 2005 - cotes 11 279 à 11 281) :
"Les directeurs de magasins, qui sont titulaires d'une délégation de pouvoirs, ne sont nullement tenus d'appliquer ces prix de vente. Ils ont toute latitude pour les modifier s'ils souhaitent par exemple, s'aligner sur un concurrent situé dans leur zone de chalandise. Ils n'ont besoin, pour ce faire, ni de solliciter l'autorisation du siège, ni même de l'informer".
186. Le 17 novembre 2000, Mme Dominique 11..., directrice du département pneumatiques de la société Hutchinson, a confirmé par courrier électronique à M. François 27..., chef de marché pièces détachées cycle de la société Décathlon, les conditions d'une opération promotionnelle. Ce document précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3 182) :
"Suite à votre demande téléphonique du 16 oct et à celle de ce jour, nous vous confirmons les conditions convenues pour cette opération spéciale :
produit : alligator 26x2 TS noir Code 510412
quantité : 2000
remise spéciale sur vos conditions habituelles : - 20 %
prix promotionnel net de chaque pneumatique remise déduite : 55,38 F HT
Prix public de la paire : 199 F TTC au lieu de 338 F TTC
Délai de livraison : en principe lundi 20 dans l'après-midi (...)
Nous attendons comme convenu votre bon de commande pour cet après-midi et vous en remercions".
187. Un courrier électronique du 20 novembre 2000, de Cécile 28..., de la société Hutchinson, à M. François 27..., chef de marché pièces détachées cycle de la société Décathlon, précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3143) :
"Pour répondre à votre promotion de Noël, nous vous proposons le Krono comp gold 700x23 (...)
L'offre que nous vous consentons est basée sur la promotion réalisée avec succès en mai dernier, à savoir :
- 1 Krono comp gold 700x23, tringles souples, au prix de 169,95 F TTC (au lieu de 189,95)
- nous vous proposons le pneu à 76,30 F HT (au lieu de 84,79 F)".
188. Le 21 décembre 2000, M. François 27..., de la société Décathlon, a adressé à Mme Dominique 11..., de la société Hutchinson, le courrier électronique suivant (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3147 à 3148) :
2/ opérations commerciales 2001 :
? mars avril 2001 : oui pour le Mosquito Gold à 299 F
? mai 2001 : oui pour le Réflex mais à 129 F soit - 20 % de remise
? juin 2001 : oui pour les paires de pneus (arrivée impérative en magasin pour le 1er mai 2001).
? juillet 2001 : opération tour de France à voir.
? septembre 2001 : Rock d'azur : oui pour une opération avec produit complémentaire.
3/ Déstockage
? oui pour le Success gold mais à 99 Frs soit 40 % de remise quantités
? oui pour le Krono comp mais à 129 Frs soit 30 % de remise quantités
Voilà j'espère que j'aurais moi aussi répondu à votre attente, j'attends maintenant l'ensemble de ces confirmations par écrit".
189. Tous les prix mentionnés dans ce courrier électronique correspondent à des prix de vente au consommateur (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3157 à 3158).
190. Le 25 janvier 2001, Mme Cécile 28..., de la société Hutchinson, a précisé par courrier électronique à M. François 27..., de la société Décathlon, les conditions de l'opération de déstockage sur les pneumatiques Success gold (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3159) :
"Objet promotion Hutchinson 2001
Je souhaite vous apporter des précisions concernant l'opération de déstockage avec le pneumatique Success gold 700x23 tringles souples à 99 FF PVP.
Cette offre que nous avons confirmée pour vous, est également menée auprès de notre réseau de détaillants en France, aux mêmes conditions de prix de vente public, sur une période très courte de 7 jours.
Nous souhaitons que l'opération menée avec vous soit sur cette même période, fixée la dernière semaine de février, sachant que nous allons baliser chaque packaging du Success avec un autocollant visibilisant la promo et indiquant :
- le prix de 99 FF
- les dates de promotion".
191. Le 31 janvier 2001, M. François 27... a répondu par courrier électronique à Mme 28... (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3160) :
"Voici toutes les réponses à vos questions :
* déstockage avec le pneumatique Success gold (...) à 99 FF PVP ? nous ne ferons pas l'opération, la période est bonne mais une semaine c'est trop court. Dommage car vous nous aviez confirmé votre accord sur un précédent message. Je pensais que nous étions exclusifs.
(...)
* mars avril 2001 : opération 2 Mosquito gold 26x2.00 tringles souples, quantité 3000 paires, date avoir les produits à partir du 15 mars 2001
* mai 2001 fête du vélo, sur le pneu Refex gold 700x23TS à 129 FF ? non
* juin 2001 : opération 15 000 lots de 2 caméléon TR + 2 chambres à air 26 au prix de 99 F TTC le lot.
Les dates de cette opération ? 7 juin au 30 juin 2001".
192. Dans un courrier électronique interne à la société Hutchinson daté du 2 mars 2001 (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3161), Mme Cécile 28... a rappelé à M. Samuel 12... et Mme Dominique 11..., les opérations promotionnelles avec Décathlon qui étaient confirmées et celles qui étaient refusées ou en attente de réponse :
"1/ promotions 2001
1.1/ confirmation sur les opérations suivantes :
a/ 2 Mosquito gold 26x2.00 à 299 F + planche autocollants cadeau 3000 lots date : 15/3 au 15/4 bandeau en 4 langues - 4 prix proposés à M. 27....
b/ 2 Caméléon Asie + 2 chambres à air à 99 FF 15000 lots Opération lancée, préparée et commandée par 18... date : 7 au 30/6 relais radio même période.
1.2 non acceptation des opérations suivantes
a/ déstockage sur le Succes : trop tôt souhaitait le faire fin mars début avril
b/ fête du vélo en mai sur le Reflex à 149 F : souhaitait au prix de 129 F
c/ juillet : opé tour de France sur le carbon comp : il n'a pas confirmé, ne sachant pas encore à fin janvier. Je pense lui reproposer avec un détail plus précis lors de l'envoi de cette opération promotionnelle à tous les réseaux.
1.3 En attente de réponse
a/ opération Noël 2001 sur l'offre proposée le 01/02 suivante :
1 Mosquito Gold 26x2.00 + 1 ch à air 26 = 159 FF TTC".
193. Le 4 décembre 2001, Mme Cécile 28... a adressé à M. François 27... le courrier électronique suivant (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 3173 à 3176) :
"Objet : offres spéciales janvier-février 02
Conformément à notre plan de campagne 2002, nous vous proposons une opération "offre spéciale" pour la période du 09/01 au 17/02/02
(...)
offre pour 200 magasins Décathlon en France
1 lot spécial de différents pneus (8 références) identiques par magasin
6 semaines d'opération : du 09/01
- 30 % de remise minimum par produit pour le consommateur
PRODUITS CONSTITUANT CETTE OFFRE
(...)
1/ produit Excel bleu TR(...)
prix public promotionnel = 6,99 euro TTC (au lieu de 10,37 euro)
prix de vente promotionnel = 3,60 euro HT (au lieu de 4,23 euro HT)
(...)
2/ produit Excel bleu kevlar TR 700x23C
prix public promotionnel = 11,49 euro TTC (au lieu de 16,62 euro)
prix de vente promotionnel = 4,90 euro HT (au lieu de 6,14 euro HT)
(...)
3/ produit Python gold (...)
prix public promotionnel = 18,99 euro TTC (au lieu de 27,29 euro)
prix de vente promotionnel = 10,20 euro HT (au lieu de 12,00 euro HT)
(...)
4/ produit Top slick air light (...)
prix public promotionnel = 12,99 euro TTC (au lieu de 18,60 euro)
prix de vente promotionnel = 6,19 euro HT (au lieu de 7,16 euro HT)
(...)
5/ produit Alligator gold (...)
prix public promotionnel = 17,99 euro TTC (au lieu de 25,76 euro)
prix de vente promotionnel = 9,37 euro HT (au lieu de 11,02 euro HT)
(...)
6/ produit Reflex gold (...)
prix public promotionnel = 16,99 euro TTC (au lieu de 25,15 euro)
prix de vente promotionnel = 8,85 euro HT (au lieu de 10,41 euro HT)
(...)
7/ produit Excel rouge (...)
prix public promotionnel = 9,49 euro TTC (au lieu de 13,57 euro)
prix de vente promotionnel = 4,98 euro HT (au lieu de 5,86 euro HT)
(...)
8/ produit Bomber (...)
prix public promotionnel = 8,49 euro TTC (au lieu de 12,35 euro)
prix de vente promotionnel = 4,43 euro HT (au lieu de 5,21 euro HT)".
194. Le 5 décembre 2001, François 27... a répondu, par courrier électronique, que l'opération n'était pas possible en l'état. Il a précisé qu'il ne souhaitait pas être pénalisé en terme de marge (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 3173).
195. Dans une télécopie datée du 21 décembre 2001 (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 2928), Mme Cécile 28... a précisé à l'équipe commerciale France de la société Hutchinson :
"confidentiel
objet : promotions soldes janvier 02 - Décathlon
bonjour,
nous vous informons de l'opération promotionnelle menée par Décathlon, à l'occasion des prochaines soldes de janvier :
validité du 09/01/02 au 17/02/02
produits concernés : (...)
principe de l'opération : - 30 % sur le prix de vente public
- 1 réflex gold (..) = 13,99 euro (au lieu de 19,80 euro TTC)
- 1 excel rouge (...) : 9,49 euro TTC (au lieu de 13,57 euro TTC)
- 1 bomber (...) : 8,49 euro TTC (au lieu de 12,35 euro TTC)
présentation de la promotion :
Autocollant mis sur chaque Packaging TS ou TR indiquant "promo - 30 %".
L'action des autres fournisseurs pour le respect par les revendeurs des prix conseillés
196. Il apparaît, à travers les pièces du dossier que d'autres fournisseurs de cycles et produits pour cycle ont agi pour que les prix conseillés soient respectés par les revendeurs, soit en imposant des clauses spécifiques dans les contrats de distribution, soit en intervenant directement pour assurer une surveillance des prix pratiqués.
En ce qui concerne la société Shimano
197. La société Shimano France composants cycles est filiale à 100 % du groupe Shimano, leader mondial de l'accessoire (1,2 milliard d'euro de chiffre d'affaires pour le groupe au niveau mondial). En France, la société Shimano France composant cycles a des accords commerciaux avec des grossistes, des réseaux de détaillants et des détaillants. Elle édite et distribue des tarifs "prix publics conseillés" (annexe 14 du rapport d'enquête, cotes 1343 à 1385).
198. Son contrat "partenaire plus 2004" précise (annexe au courrier de la société Shimano du 7 mars 2005, cotes 5923 à 5924) :
"article 4-4 : Le détaillant partenaire s'engage à respecter une politique de prix de marché conforme aux exigences de Shimano France".
199. Le contrat "contrat chaussures Shimano 2004" précise (annexe 14 du rapport d'enquête, cotes 1803 à 1804) :
"article 8 : prix publics : le signataire s'engage dans la mesure du possible à respecter les prix publics conseillés édités par la société Shimano France à l'exception de la période légale des soldes".
200. Le 14 mars 2005, M. André 29..., directeur général de la société Shimano France Composants Cycles, a déclaré (projet de PV du 14 mars 2005, cotes 11079 à 11082) :
"Pour la France, nous diffusons des tarifs "agents" pour les revendeurs, qui ne sont pas fondés sur des tarifs de vente conseillés aux consommateurs. Nous diffusons également chaque année des tarifs conseillés au stade de détail, dans deux types de catalogues : le " catalogue prix publics conseillés " qui est distribué à l'ensemble des détaillants et des grossistes et, de manière exceptionnelle, auprès de consommateurs qui en font la demande, et le catalogue Bike Gear qui a vocation a être distribué auprès des consommateurs.
Les prix conseillés sont déterminés chaque année par la société Shimano France, en fonction de la concurrence et des prix du marché. Les coefficients applicables aux prix de vente "agents" pour déterminer les prix publics conseillés sont variables selon les produits ou les groupes de produits. Il n'y a aucune consigne du groupe Shimano ou de la maison mère européenne pour harmoniser les prix de vente publics conseillés dans les différents pays. La question de la détermination des prix de vente publics conseillés pour les pièces détachées est du ressort exclusif de notre société.
En ce qui nous concerne, nous n'avons jamais, jusqu'à présent, organisé de campagnes promotionnelles nationales avec des prix de vente publics conseillés.
Par ailleurs, les détaillants déterminent leurs prix de vente librement, certains vendent en dessous des prix publics conseillés, d'autres, moins nombreux, vendent à des prix supérieurs. Nous ne disposons d'aucun relevé de prix au stade du détail. Compte tenu du nombre de références, plus de 7000, ces relevés seraient très coûteux à organiser et sans intérêt car nous n'avons jamais organisé de système de surveillance des prix pratiqués par les revendeurs et jamais mis en place une police des prix.
Pourtant, de nombreux détaillants nous reprochent de ne pas organiser une police des prix.
Les détaillants sont très vigilants et suivent attentivement les prix pratiqués par les "discounters" de la profession. Il s'agit principalement de sociétés qui vendent sur Internet ou de revendeurs qui cherchent à se distinguer par des pratiques de bas prix.
En ce qui concerne le réseau Districycle, il vend des produits de marque Shimano à très bas prix. En fait, dans la mesure où il dispose d'une société spécialisée dans l'assemblage, la société Pro Cadre, il obtient, pour la première monte, auprès du groupe Shimano, ou d'importateurs italiens ou hollandais, ou encore auprès d'autres constructeurs, des produits Shimano en vrac à bas prix qu'il peut revendre dans ses points de vente dans le rayon pièces détachées à des prix imbattables.
En ce qui concerne la société Dutouron, il n'est pas client de la société Shimano France. Il s'approvisionne en produits Shimano probablement à l'étranger, ce qui lui permet de pratiquer des prix bas.
Les dispositions prévues par l'article 4-4 du contrat "partenaire plus" qui précisent : "le détaillant partenaire plus s'engage à respecter une politique de prix de marché conforme aux exigences de Shimano France" et par l'article 8 du "contrat chaussures Shimano 2004" qui précisent : "Prix publics : le signataire s'engage dans la mesure du possible à respecter les prix publics conseillés édités par la société Shimano France à l'exception de la période légale des soldes", ont été insérées à la demande des détaillants qui souhaiteraient que Shimano organise une police des prix afin que les prix publics conseillés soient respectés. Nous n'avons jamais vérifié le respect de ces clauses car nous ne contrôlons pas les prix de vente pratiqués par les détaillants".
201. L'article 4-4 du contrat "Partenaire plus" et l'article 8 du "contrat chaussures Shimano" ont été supprimés en 2005 (courrier de la société Shimano du 7 avril 2005, cotes 11075 à 11082).
202. Dans l'audition précitée du 14 mars 2005, la société a souligné : "la société Shimano France se trouve en concurrence pour la distribution des pièces détachées Shimano auprès des points de vente avec d'autres sociétés dont la société Eurostar et avec les deux importateurs espagnols. Cette concurrence permet à certaines enseignes d'obtenir des remises supplémentaires lors des négociations commerciales. Les enseignes comme Intersport, Go sport, Supersport ou Cycle coop nous mettent régulièrement en concurrence les uns avec les autres".
En ce qui concerne la société les Créations Jean-Pierre (Carnac)
203. La société Les Créations Jean-Pierre est spécialisée dans la fabrication de chaussures de sport de marque Carnac et l'importation d'accessoires pour cycles et cyclistes tels que les gants Roeckl et les lubrifiants Motorex.
204. Les chaussures pour cyclistes de marque Carnac sont des produits de haute et moyenne gamme. Les principaux produits concurrents sont les chaussures de marque Sidi, importées par la société Royal Vélo France, les chaussures Shimano, les chaussures Northwave, importées par la société Eurostar ou encore les chaussures de marque John Luck, importées par la société José Alvarez.
205. Ce fabricant travaille principalement et directement avec les détaillants, indépendants ou en groupement, et quelques grandes surfaces de sport telles que Intersport. Il ne travaille pas avec les magasins Supersport, Bouticycles et Districycle.
206. La société Les Créations Jean-Pierre a édité des tarifs pour les détaillants sur lesquels figurent les prix d'achat et les prix de vente TTC conseillés, appelés prix public TTC ou prix unitaire de vente public conseillé (annexe 26 du rapport d'enquête, cotes 3220 à 3224 et 3229 à 3232).
207. Le 15 janvier 2004, M. Georges 30..., président directeur général de la société, et M. Xavier 30..., responsable du bureau d'études, ont déclaré (annexe 9 du rapport d'enquête, cotes 815 à 823) :
"Les clients bénéficient de remises de volume de 6 à 10 %. Il existe également des remises de groupement (1,5 à 2 %) sur le volume d'achats des magasins appartenant au groupement. Les représentants de Carnac ont notamment pour rôle de vérifier le respect des prix de vente conseillés. Ce prix de vente correspond à un coefficient multiplicateur de 1,85 remise en plus (chaussures).
Nous n'avons pas d'exemple où des détaillants n'ont pas respecté les prix de vente conseillés".
208. La société propose aux détaillants des contrats de mise en place et des contrats de pré-saison. Tous ces contrats pour les années 2002, 2003 et 2004 contiennent les clauses suivantes (annexe 9 du rapport d'enquête, cotes 824 à 833) :
"Obligations du client
c) Respecter les prix de vente public conseillés par Carnac.
Durée du contrat
(...)
Il pourra être rompu même en cours d'année dans les cas suivants :
- non-respect des prix de vente conseillés
(...)
OUI, j'ai bien pris connaissance de toutes les conditions du contrat mentionnées ci-dessus et je m'engage à les respecter. (case à cocher)".
209. Parmi les signataires de ces contrats en 2003 et 2004, on trouve de nombreux détaillants indépendants, des détaillants appartenant au réseau Culture Vélo, au réseau Master Cycle, au réseau Midpy et deux magasins Intersport (annexe 9 du rapport d'enquête, cotes 828 à 833).
En ce qui concerne la société Michelin
210. La société Michelin est l'un des deux principaux fournisseurs de pneumatiques pour cycles avec la société Hutchinson.
211. En 2002, ce fournisseur a été référencé en qualité de "partenaire agréé" par le groupement Master Cycle. Il s'est donc engagé à faire respecter les prix de marché.
212. En septembre 2002, le GIE Master Cycle a signalé à M. Frank 31..., de la société Michelin, les prix bas pratiqués sur les produits Michelin par une société marseillaise. Le 13 septembre 2002, M. 31... a répondu au groupement Master Cycle par le courrier électronique suivant (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 2345) :
"De : 31..., Frank/[email protected]
A : mastercycle/[email protected]
Envoyé vendredi 13 septembre 2002 12:10
Objet : veille concurrentielle
Bonjour,
J'ai bien reçu votre information et vous en remercie. J'informe dès aujourd'hui notre représentant du Sud-Est afin qu'il prenne contact avec cette société Marseillaise car celle-ci n'a pas de compte chez nous ! Même si nous ne sommes pas le plus bradé des pneumatiques sur ce document, les prix pratiqués sur une gamme aussi importante me laissent perplexe quant à la disponibilité des produits".
213. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société Centrale Districycle, a déclaré (annexe 1 du rapport d'enquête, cotes 118 à 127) :
"En ce qui concerne Michelin, le fournisseur nous a demandé en octobre 2002 d'augmenter notre prix de vente au détail du pneu Pro-race de 26 euro à 29 euro. Cette demande était la contrepartie d'un avantage consenti à la société Procadre, la vente de pneus de première monte à environ 12 euro, alors que le prix d'achat est habituellement de 16 euro. Suite à cette demande, nous avons augmenté notre prix pendant 6 mois, le portant de 26 à 29 euro. Les ventes ayant chuté, nous sommes passés en prix de vente public conseillé à 27 euro".
214. Toutefois, le groupement Master Cycle a estimé que la surveillance des prix de marché par la société Michelin était insuffisante. Sur la fiche établie par le GIE Master Cycle s'agissant des conditions de vente accordées par la société Michelin aux membres du groupement Master Cycle pour l'année 2003, il est indiqué (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 2687) :
"Informations complémentaires
Michelin est un fournisseur complémentaire et ne doit pas représenter le fournisseur principal en pneumatique dans les magasins adhérents Master Cycle, leur politique de prix n'étant pas du tout maîtrisée (faible marge, prix cassés dans de nombreux réseaux de distribution ...)".
215. Le 3 mai 2003, Audrey Y..., coordinatrice du GIE Master Cycle, a envoyé une télécopie à M. Jérôme 32... de la société Michelin (annexe 26 du rapport d'enquête, cotes 2368 à 2370). Dans ce document, elle reproche à la société Michelin d'organiser des promotions avec les magasins Décathlon et de ne pas faire respecter les prix du marché :
"Dans le cadre de notre partenariat, je me permets de vous faire part des dysfonctionnements constatés (...). Quelle surprise de constater le pack Pro Race, un ingénieux concept malheureusement ignoré par les détaillants. Il est évident que pour le consommateur acheter deux pneus Pro Race + 2 chambres + 2 fonds de jante + 3 démonte-pneus au prix de 2 pneus (soit environ 68 euro) c'est plutôt intéressant !
Par ailleurs, j'ai également constaté que Michelin remboursait 4 euro pour l'achat d'un pneu Pro Race ou Carbon (...) en contrepartie du ticket de caisse Decathlon : que faites vous pour les détaillants ?
A plusieurs reprises nous avons évoqué ensemble le non-respect fréquent des prix de marché sur les pneus Michelin. Vous m'aviez répondu que vous aviez beaucoup oeuvré pour faire désormais respecter les prix de marché et que le seul souci restait Dutouron. Avec les deux opérations mentionnées précédemment vous aidez les distributeurs à ne pas respecter les prix de marché.
Deux hypothèses sont envisageables : soit vous arrêtez de telles opérations, soit vous en faîtes profiter tous les distributeurs mais continuer dans cette voie me paraît peu opportun".
En ce qui concerne la société Time Sport international
216. La société Time Sport international est spécialisée dans la fabrication des pédales, des cadres et des chaussures. Elle est leader, avec la société Look, pour les cadres en carbone. Pour les cadres en composite, tous les concurrents, à l'exception de Look, sont asiatiques : Shimano, Speed Play et Crank Brother. Pour les chaussures, les concurrents sont les produits de marque Sidi, Look, Carnac et Northway.
217. La société Time Sport international commercialise ses produits à des détaillants et à des grossistes. Les grossistes sont les Etablissements Guégan, les sociétés Marceau Babouot, Foray Rubin, Valdenaire et Free-Style.
218. Les tarifs grossistes et détaillants entre 2001 et 2004 mentionnent des "prix publics suggérés euro" (annexes au courrier de Time du 7 mars 2005, cotes 11202 à 11206 et 11240).
219. Les grossistes ont bénéficié en 2001 et 2002 d'un tarif préférentiel, inférieur à celui pratiqué à l'égard des détaillants (annexe 11 du rapport d'enquête, cotes 1075 à 1079). En janvier 2003, la société Time a décidé de réduire de 25 % à 15 % le montant de la remise consentie aux grossistes.
220. Le 13 janvier 2003, M. Franck 33..., directeur général de la société Valdenaire, a adressé à M. 34..., de la société Time Sport international, le courrier suivant (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 4522) :
"Nous avons appris votre souhait de reconsidérer la position des grossistes concernant la distribution de vos produits (pédales en ce qui nous concerne).
Nous tenons à vous rappeler que le partenariat établi entre Valdenaire SA et Time n'a jusqu'à ce jour connu aucun problème et que nous avons toujours tenu à respecter votre tarif France au centime près. (Aucune remise n'a jamais été accordée).
Nous trouverions dommage que les agissements de quelque(s) grossiste(s) irresponsable(s) vous amène à changer votre position. Nous vous rappelons que nous n'avons jamais démarché vos clients directs et que notre but est de pouvoir fournir en toute tranquillité les petits détaillants qui ne peuvent être clients chez vous".
221. Le 22 janvier 2003, la société Time Sport international a adressé le courrier suivant à M. 33..., ainsi qu'aux grossistes Guegan (Districycle), Marceau Babouot, Foray Rubin et Free Style (annexe 11 du rapport d'enquête, cote 985) :
"objet : politique grossiste
Comme vous le savez, dès l'origine, Time a toujours privilégié la vente directe de ses produits auprès des détaillants spécialisés.
Depuis quelques années cependant, de manière à toucher un certain nombre de détaillants que nous ne pouvions visiter, nous avons souhaité travailler avec quelques grossistes. C'est ainsi qu'une distribution mixte s'est mise en place.
Nous devons malheureusement aujourd'hui remettre celle-ci en cause. Il est avéré en effet, que nos produits, en particulier haut de gamme, sont proposés à des détaillants à fort potentiel à des conditions meilleures que celles que nous appliquons nous-mêmes en direct. L'écart de prix entre les deux tarifs grossistes/détaillants étant utilisés par certains pour consentir des remises particulièrement élevées. Cela n'est pas conforme à l'esprit de nos accords et ce n'est évidemment pas dans ce but que nous avons mis en place cette double distribution.
Nous sommes donc contraints de revoir notre stratégie et de définir les nouvelles conditions suivantes :
à compter de ce jour, pour toutes les nouvelles commandes, un nouveau tarif grossiste est établi. Celui-ci est inférieur de 15 % au tarif détaillant,
seuls les produits d'entrée de gamme sont dorénavant proposés à ce tarif grossiste, revenant ainsi aux modalités initiales.
Nous regrettons vivement d'être amenés à prendre de telles dispositions qui visent à redonner de la lisibilité à notre politique commerciale et qui, par souci de cohérence, doivent s'appliquer à tous.
(...)
Roland 34...".
222. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société centrale Districycle, a déclaré (annexe 01 du rapport d'enquête, cotes 118 à 127) :
"En ce qui concerne les produits Time (cadres carbone), mes revendeurs m'ont informé que les représentants de ce fournisseur ont indiqué que Districycle ne pourrait distribuer que la gamme 2003 et serait donc privée de la gamme 2004. Cette pression de Time est liée au fait que les magasins Districycle peuvent offrir 10 % du prix détail en cadeaux".
223. Le 18 décembre 2003, le service commercial de la société Time Sport international, a adressé la lettre suivante à la centrale de la société Districycle (annexe 11 du rapport d'enquête, cotes 978 à 979) :
"A l'attention de M. O...
(...)
Nous vous adressons un récapitulatif par famille de produit de la proposition de certification, par magasin, pour la saison 2003/2004. Un minimum d'achat de 2 modules est exigé pour toute première commande de saison.
Pour ce qui est de la livraison des modules VXR et VXRS dont vous avez enregistré les commandes moyennant un acompte versé par le consommateur, faisant l'hypothèse qu'il s'agit d'une quantité inférieure à 10 unités, nous nous engageons à vous livrer au fur et à mesure de nos disponibilités dans les tailles souhaitées. Pour des raisons indépendantes de notre volonté liées à la mise au point du produit mais aussi à des contraintes de fabrication, la production de nos modules carbones haut de gamme a pris plusieurs semaines de retard. Dans ces conditions, nous préférons vous aviser qu'il ne nous sera pas possible d'honorer pour cette saison 2003/2004 d'autres commandes de modules VXR et VXRS que celles précédemment citées.
Nous nous permettons de réitérer le fait qu'au cours de la saison écoulée, plusieurs consommateurs nous ont fait part d'un certain manque de professionnalisme de la part de vos magasins pour ce qui relevait du montage et de l'assemblage de nos modules carbone. Notre service SAV est intervenu à diverses reprises à ce sujet et nous en sommes préoccupés. Comme vous le savez, nos modules de carbone sont des produits de haute technologie qui exigent un savoir faire irréprochable de la part des détaillants qui les proposent.
(...)
service commercial France
Thérèse 35...".
224. Les tarifs "certification 2003-2004" portent la mention "coeff". Il s'agit du coefficient applicable au prix d'achat pour déterminer le prix de vente au stade du détail (annexe 11 du rapport d'enquête, cotes 975 à 977). La liste des magasins certifiés est jointe en annexe n° 932 à 946.
225. Les conditions générales de vente applicables jusqu'en 2005 précisent (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 4451) :
"Nos produits ne peuvent en aucun cas être exportés".
226. Par courrier du 11 avril 2005, la société Time Sport international a transmis ses nouvelles conditions générales de vente dans lesquelles la clause d'interdiction des exportations a été supprimée.
227. Le 2 février 2004, M. Roland 34..., président directeur général de la société Time Sport international, a déclaré (annexe 11 du rapport d'enquête, cotes 948 à 953) :
"En ce qui concerne le cadre carbone, celui-ci est un produit très technique qui nécessite une formation et une distribution par des professionnels qualifiés. Nous envisageons éventuellement de mettre en œuvre une distribution de spécialistes, sans exclusivité territoriale.
En ce qui concerne Districycle, nous avons indiqué à ce réseau que pour la gamme 2004 nous allions leur livrer tous les modules pour lesquels ils avaient enregistré des commandes (ensemble de gamme), mais qu'ensuite compte-tenu de nos délais de livraison, il nous paraissait difficile de leur livrer des nouvelles commandes. Le système de Districycle ne nous garantit pas que pour les cadres carbones, la distribution soit effectuée dans les règles de l'art techniques (problèmes de SAV).
En ce qui concerne la clause de nos conditions générales de vente, nos produits ne peuvent en aucun cas être exportés cette clause est fondée sur la traçabilité et la sécurité des produits. Cette clause ne s'applique plus aux cadres qui sont des produits semi-finis qu'il est nécessaire d'assembler avec tous les risques que cela comporte".
Le rôle des grossistes et des importateurs dans la surveillance des prix et des approvisionnements
Le refus concerté des sociétés Sintema et Valdenaire de livrer le réseau Districycle
228. La société établissements René Valdenaire, ci-après désignée sous le nom Valdenaire, est spécialisée dans la fabrication et le montage de pièces détachées pour vélos ainsi que le négoce qui représente 80 % de son chiffre d'affaires. Son chiffre d'affaires annuel s'élève à 5,9 millions d'euro. Sa clientèle est composée presque exclusivement de détaillants.
229. Elle est, en France, le distributeur exclusif de cadres, de fourches et de composants en carbone pour les cycles de marque Kuota, fabriqués par l'entreprise italienne Sintema.
230. La société Valdenaire a signé avec la société Sintema Forks un contrat de distribution exclusive pour la distribution des produits de marque Sintema et Kuota en France (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 4547 à 4550). Le contrat daté du 15 septembre 2003 précise :
"Prices and conditions
All sales will be effected at prices and upon such terms and conditions that Sintema establishes from time to time".
231. La société Sintema édite des "tarifs TTC publics France" pour les produits de marque Kuota (tarif 2003 annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 4530 à 4538).
232. Pour les produits de marque Kuota, la société Valdenaire dispose de revendeurs agréés (liste revendeurs agréés annexe 10 du rapport d'enquête - cotes 945 à 946).
233. Le 21 novembre 2001, la société Valdenaire a enregistré la commande de 8 cadres de la société Pro Cadre du groupe Districycle (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 4575).
234. Par la suite, la société Valdenaire a refusé d'honorer cette commande, au motif que le réseau était réputé comme discounter. La lettre de refus signée de Jean-Charles 36..., directeur commercial, précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 4574) :
"Procadre
MM. O... et 21...
(...)
Nous venons de recevoir de Sintema, votre commande de cadres Kuota, mais nous ne pouvons l'honorer.
En effet, sur les recommandations de Sintema, les produits Kuota ne peuvent être vendus par un réseau tel Districycle réputé comme Discounter.
Nous voulons protéger un véritable réseau d'indépendants respectant les prix de vente imposés".
235. Le 20 janvier 2004, M. Pierre 33..., président directeur général, M. Franck 33..., directeur général, et M. Jean-Charles 36..., directeur commercial de la société René Valdenaire, ont déclaré (annexe 10 du rapport d'enquête - cotes 870 à 879) :
"la société Pro Cadre, assembleur de Districycle, nous a commandé il y a deux ans des cadres bruts pour la marque Felino. Nous avons livré 4 ou 5 cadres. Des magasins Districycle nous ont commandé des cadres Kuota. Nous leur avons expliqué que leur politique de hard discounter ne se prêtait pas à une telle distribution. Ces magasins nous ont demandé des conditions spécifiques d'achat, ayant un tarif unique".
236. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société Centrale Districycle, a déclaré (annexe 1 du rapport d'enquête - cotes 118 à 127) :
"En ce qui concerne les cadres de marque Kuota, nous ne travaillons plus avec Valdenaire qui est devenu distributeur exclusif de Kuota".
La surveillance des prix des détaillants par ces deux sociétés
237. Le 31 décembre 2001, M. Jean-Claude 37..., agent commercial de la société Valdenaire, a adressé à M. Jean-Charles 36... la télécopie suivante (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 4560) :
"Destinataire J. Charles
J'ai récupéré un tarif "Dutouron" tarif 2002. Je te donne un exemple de ce que cet établissement propose = Sintema - Kuota
(...)
Ces prix sont bien sûr publics et TTC
Comment peut-il proposer ça ?
(...)
PS : Ce genre de tarif circule bien sûr chez tous les détaillants du S. Ouest".
238. Le 1er janvier 2002, M. Jean-Charles 36..., directeur commercial de la société Valdenaire, a répondu ainsi à M. Jean-Claude 37... (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 4555 à 4557) :
"Avec des détaillants comme Dutouron, Mallarte, Extrême Bike (Isselin) ; il faut s'attendre à ce genre de problème. Cependant, chez Sintema ils sont au courant depuis 2 mois que nous refusons de livrer ces trois clients et que donc, ils vont chercher à se procurer des cadres sur la Belgique, la Hollande et l'Italie. Ils ont déjà lancé des avertissements à leurs ? importateurs.
Compte tenu de la marge, des coûts de transport et des risques de rupture aucun d'eux ne se risquerait à les livrer. De +, nous nous sommes fait passer pour un club de triathlon et on a essayé de connaître les disponibilités de Ksano chez Dutouron = réponse "nous n'avons pas de cadre en stock, c'est nouveau ; on ne sait pas encore si on le vendra, c'est un référencement prévisionnel...(...)
De suite, Sintema a faxé à Dutouron pour lui dire de retirer cette ligne de son tarif. Il a répondu à Sintema sur le thème de la libre circulation des marchandises en CEE ... le refus de vente ...
Aujourd'hui, seuls mes clients sont livrés en Kuota !!! Il faut rassurer les clients. Montrer la pub du cycle hors-série ...
Si pour Kuota les cadres sont numérotés ainsi que la fourche correspondante, nous savons parfaitement qui a vendu le produit !! Si ce marquage disparaît la garantie tombe.
Par contre, pour les fourches, je ne peux pas faire grand chose. Sintema a près de 50 clients en Italie qui peuvent revendre en rétrocession à Dutouron ! Il doit avoir le même prix d'achat que MIDPI soit - 40 % sur le HT agent. Cela permet de travailler en discount tout en gagnant sa vie.
JClaude, je compte sur toi pour rassurer le MIDPY, les faire accrocher à Kuota pour une mise en place de 2 cadres / magasin et nous ferons tout pour bloquer Dutouron. S'il le faut nous appellerons 1 x mois pour avoir les dispo des cadres et dès que c'est chez lui, si ça peut l'être, j'en fais commander un et nous coupons l'herbe sous ses pieds.
Pour Valdenaire Kuota peut représenter en 2002 entre 2,5 et 3,5 MF ; en fait les 10 % de CA qui nous manquent pour moderniser notre outil de travail, dis-toi bien et fais passer le message aux clients que nous sommes prêts au bras de fer avec toutes ces verrues du marché.
Bonne année 2002.
J Charles".
239. Un courrier de la société Valdenaire, non daté, destiné à M. 38..., associé de la société des cycles Guionnet, précise (annexe 26 du rapport d'enquête - cote 4559) :
"NB : Ou en êtes-vous sur le référencement Kuota ? Nous multiplions les démarches pour couper l'herbe sous le pied de Dutouron, mais je ne vois pas arriver de mise en place du groupement".
240. Un courrier de la société Valdenaire, non daté, destiné à "Cathy", Cathy 39... étant agent commercial de la société Valdenaire, précise (annexe 26 du rapport d'enquête, scellé 2, cotes 2124, pages 8 verso et 9) :
"De Jean-Charles à Cathy
Cathy,
Evitez de livrer des clients du type Districycle ou ALRE, ces clients appuient toute leur politique commerciale en pratiquant des prix bas sur des articles à forte image et comme ils font de la VPC, toute la France est au courant ...
Je viens d'avoir plusieurs appels sur les cadres Kuota bradés par Marcarini alors que je leur demande de ne pas faire la moindre remise sur Kuota.
Je ne veux pas voir les lunettes vendues à 30 euro dans 15 jours ...
Nous avons assez de travail avec les clients qui respectent les marges de la profession. De plus, avec des marques comme Sintema ou Kuota, nous sommes vite repérés.
Je lui livrerai franco la gaine et le cintre mais je ne lui livre aucune paire de lunettes".
241. Sur un post-it collé sur la page précédente, il est indiqué :
"Catherine 39... commerciale Vendée-Bretagne" suivi de la mention "2001".
242. Le 20 janvier 2004, M. Pierre 33..., président directeur général, M. Franck 33..., directeur général, et M. Jean-Charles 36..., directeur commercial de la société René Valdenaire, ont déclaré (annexe 10 du rapport d'enquête - cotes 870 à 879) :
"Concernant Dutouron, ses procédés commerciaux et logistiques (cadres Kuota en cartons Look, conditionnement) ne répondent pas à l'image de marque des produits Kuota ; et son procédé de vente (VPC) au niveau national fait que 120 points de vente sont en concurrence directe avec lui. A partir de la distribution du cadre Kuota, le montage doit être effectué par un professionnel équipé, ce qui est en contradiction avec le système de vente par correspondance".
243. Le 10 décembre 2003, M. Serge 15..., président directeur général de la société Serge Dutouron, a déclaré (annexe 5 du rapport d'enquête - cote 586 à 593) :
"En ce qui concerne les cadres Kuota, nous avions passé une première commande il y a deux ans à Sintema avant que Valdenaire ne soit son distributeur exclusif. Sintema a refusé de nous livrer. Au salon du Roc d'Azur en octobre 2003, la responsable des Etablissements Valdenaire nous a indiqué que nous avions le droit d'acheter des cadres Kuota mais pas de les vendre".
La limitation des approvisionnements en provenance des grossistes étrangers
244. Les indications reproduites aux paragraphes 238 à 240 montrent que les dirigeants de la société Valdenaire se sont préoccupés de couper les approvisionnements à l'étranger de plusieurs détaillants accusés de pratiquer des prix bas. En accord en particulier avec la société Sintema, ils ont réussi à faire cesser toute livraison à la société Dutouron.
La clause de respect des prix conseillés dans les accords commerciaux de la société Royal Vélo France (RVF)
245. La société Royal Vélo France (RVF) est spécialisée dans la distribution au stade de gros d'accessoires pour cycles et pour cyclistes (chaussures, casques et vêtements). Elle est importateur exclusif des chaussures de marque Sidi et des produits de marque Giro et Bell. Ces fournisseurs diffusent des prix publics européens conseillés applicables au stade du détail (courrier de la société Royal Vélo France du 4 mars 2005, cotes 5129 à 5151) et (annexe du rapport d'enquête, cote 1197). La société RVF ne vend pas au stade du détail mais uniquement à des revendeurs.
246. Les accords commerciaux pour la saison 2003 (annexe au courrier de la société Dossard 51 (Culture Vélo) du 10 mars 2005, cotes 10160 à 10161), validés le 30 octobre 2002, et ceux pour la saison 2004 (annexe 13 du rapport d'enquête, cote 1323), signés le 30 novembre 2003, entre la société RVF et la société Dossard 51, pour le compte des détaillants du réseau Culture Vélo précisent :
"2) Remises par marques accessibles suivant le tableau ci-joint
La RFA ne sera versée que sous réserve d'aucun incident de paiement ou report de traite, et sous réserve du respect du prix public conseillé".
247. Le 17 mars 2005, M. Denis 40..., président directeur général de la société Dossard 51, centrale de référencement pour les magasins à l'enseigne Culture Vélo, a déclaré (PV d'audition de M. 40... du 17 mars 2005, cotes 11070 à 11071) :
"En ce qui concerne nos relations avec la société RVF, nous n'avons jamais eu de difficultés pour le paiement des ristournes de fin d'année, au motif que les prix conseillés n'auraient pas été respectés. Cette clause n'a à ce jour pas eu d'effet sur le comportement individuel des points de vente Culture Vélo".
La limitation par la société Royal Vélo France des livraisons des chaussures Sidi
248. Dans le cahier de Mme Audrey Y..., coordinatrice du GIE Master Cycle, il est mentionné (annexe 26 du rapport d'enquête - cotes 2537 à 2538) :
"Entretien RVF 17 décembre 2001
(...)
Districycles
Avant, Distri vendait bcp de Sidi sans se livrer chez RVF. Ils ont trouvé un accord ? aucune remise et aucune condition particulière. Auj, Distri achète 70 % des chaussures Sidi chez RVF. Distri a le droit de modifier à 15 % près le prix de vente public. Pb = le droit français interdit l'obligation de prix publics".
249. Dans sa déclaration du 3 décembre 2003 (annexe 2 du rapport d'enquête - cotes 144 à 154), Mme Y... a précisé au nom du GIE :
"Jusqu'en 2003, nous avons refusé d'agréer RVF comme fournisseur, car nous nous interrogions sur les sources d'approvisionnement en chaussures de marque Sidi dont RVF est l'importateur exclusif. Actuellement, nous avons référencé RVF en 2003 et 2004, car cet importateur nous a démontré qu'il veillait à la transparence des sources d'approvisionnement".
250. Le 14 octobre 2003, M. 41..., détaillant en cycles et accessoires de la ville d'Auch, a déclaré (annexe 6 du rapport d'enquête - cotes 661 à 662) :
"Entre juillet 2001 et juillet 2003, j'ai été livré normalement en chaussures de marque Sidi par mon fournisseur, la société Comet à San Sebastian en Espagne, que j'achetais à un tarif intéressant. A ma dernière commande, j'ai été informé par fax qu'on ne pouvait plus me livrer pour ce produit, sans explication. J'ai appelé par téléphone le représentant de l'entreprise Comet, qui m'a expliqué qu'en raison de plaintes de l'importateur français de ces articles, auprès du fabricant italien Sidi, celui-ci a fait pression sur la société Comet pour qu'elle cesse ses livraisons. Il s'agit de l'entreprise Royal Vélo France à Saint-Thibaut dans l'Aube. Les livraisons ont cessé, de la part de Comet, pour l'ensemble du territoire français. Je précise que je continue à m'approvisionner auprès de cette société pour d'autres articles, et que la restriction ne concerne que la marque Sidi. Les chaussures de la marque Sidi sont une référence incontournable pour les cyclistes. Elles sont utilisées par 60 % des coureurs professionnels, et bénéficient d'une importante promotion télévisuelle en particulier. Ce sont les plus vendues et les plus demandées. Le prix public de vente en France, pour la référence "energy" est de 195 euro, alors que ce produit est vendu en Andorre à 128,80 euro ; la société RVF, importateur exclusif, dispose d'un réseau de revendeurs, dont la société Minic 2000 à Rennes. Au tarif de cette entreprise, la référence "energy" est à 117,39 euro alors que la société Comet pratiquait un prix de 89,95 euro. L'importateur RVF, en s'arrangeant pour empêcher les approvisionnements des distributeurs à l'étranger, se garantit une marge bénéficiaire importante, en permettant à ces distributeurs de pratiquer un tarif supérieur de 31 % à celui pratiqué en Espagne, par exemple".
251. Ce même jour, M. 41... a communiqué à l'enquêteur de la DGCCRF le fax suivant de la société Comet (annexe 6 du rapport d'enquête, cote 669) :
"30/07/03
Comet
Monsieur, Suite à conversation je vous confirme que nous n'avons pas l'autorisation de vendre les produits Sidi en France. L'exclusivité pour cette marque est pour la société RVF. Sportivement Gérard".
Les clauses de respect des prix de la société Philamy
252. La société Philamy est une jeune société située à Manosque en Provence. Le responsable est M. Derrick 42.... Cette société est spécialisée exclusivement dans la distribution auprès des détaillants des équipements de cycles haut de gamme de marque FSA, Lizard Skin, Marzocchi et Thomson.
253. La société Philamy, qui a indiqué dans un courrier du 9 mars 2005 au rapporteur que la plupart des contrats avec ses fournisseurs sont des "gentlemen's agreement" non formalisés et courants dans la profession, a signé avec un fournisseur de cycles italien, la société Marzocchi, un contrat de distribution exclusive (annexe au courrier de la société Philamy du 9 mars 2005, cotes 8165 à 8184). L'article 3.19 du contrat précise :
"the distributor shall not engage any commercial practices (for example, but without limitation, as regards the level of the resale prices) which could damage the image and the good name of the Products and Marzocchi".
254. Par ailleurs, la société Marzocchi communique à la société Philamy des listes de prix avec des "minimum retail price (VAT excl)" (annexe au courrier de la société Philamy du 9 mars 2005, cotes 8185 à 8188).
255. Chaque année, la société Philamy édite elle même pour ses revendeurs des catalogues qui mentionnent des "prix public euro TTC conseillés".
256. Pour pouvoir revendre en France les produits de marque Marzocchi, les détaillants signent avec la société Philamy un contrat renouvelable tous les ans selon les indications contenues dans le courrier du 9 mars 2005 précité (paragraphe 253) et qui mentionne les clauses suivantes (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 4392) :
"Engagement du centre Marzocchi
(...)
- respecter les prix de vente conseillés".
257. Tous les contrats ne contiennent pas cette clause. En effet, un contrat "engagement du centre Marzocchi", proposé en septembre 2003 à la société Motobécane Jacky, ne contenait pas cette clause sur le respect des prix conseillés (annexe 23 du rapport d'enquête, cotes 2121 à 2123).
258. La liste des 53 distributeurs signataires d'un contrat "centre Marzocchi" est annexée au courrier du 9 mars 2005 précité.
Les clauses des conditions générales de vente de la société Two Lambs limitant la liberté des prix
259. La société Two Lambs est une SARL unipersonnelle dont le siège social est situé à Chambéry. Cette société importe en France des vélos et cadres de la marque "Cube" et a réalisé en 2004 un chiffre d'affaires de 810 191 euro (annexe à lettre au rapporteur du 11 avril 2005, cote 11091).
260. La société Two Lambs établit et diffuse auprès de ses clients revendeurs des tarifs de vente conseillés (annexe 26 du rapport d'enquête, cote 4433).
261. Les conditions générales de vente en 2003 pour les détaillants précisent (annexe 26 du rapport d'enquête, cotes 4431 et 4432 et annexe au courrier du 11 avril 2005, cotes 11101 à 11104) :
"Conditions de vente
a) (...)
b) Implantation et coefficient de travail :
Niveau 1 : commande de 3 vélos complets coef de 1.80
Niveau 2 : commande de 4 à 9 vélos complets coef de 1.85
Niveau 3 : commande de 10 vélos et plus coef de 1.90
A partir du 20e vélo commandé en cours d'année, coef. de 1.90 automatiquement.
(...)
Vente par correspondance :
-Interdite à tarifs réduits
-La société Two Lambs développant un réseau traditionnel de revendeurs ne souhaite pas avoir ses produits en vente dans les catalogues divers de promotion et de vente. Toutefois contacter Two Lambs pour accord exceptionnel concernant la vente des produits à tarifs conseillés".
262. Les conditions générales de vente en 2004 pour les détaillants précisent (annexe au courrier du 11 avril 2005) :
"Conditions de vente
a) (...)
b) nouveaux distributeurs 2004 :
<emplacement tableau>
A partir du 20ième vélo commandé dans l'année : coef à 1.90 avec LCR 30 jours
(...)
Ventes par correspondance :
-Interdites à tarifs réduits
-La société Two Lambs développant un réseau traditionnel de revendeurs ne souhaite pas avoir ses produits en vente dans les catalogues divers de promotion et de vente. Toutefois contacter Two Lambs pour accord exceptionnel concernant la vente des produits à tarifs conseillés".
263. Dans un courrier du 11 avril 2005, M. 43..., gérant de la société Two Lambs a précisé :
"Afin de vérifier le respect des conditions de vente, nous donnons des coups de téléphone anonymes à nos magasins, de plus nos commerciaux, qui sont sur le terrain, nous tiennent au courant s'ils constatent des dérives (...) nous avons accepté que nos produits soient intégrés dans un catalogue, celui de Sportmaniac en 2003".
L'action de la société Wilier pour l'application de ses prix de vente
264. La société Wilier a son siège social en Italie et commercialise des vélos et des cadres. Pour les vélos, les principaux concurrents sont les marques italiennes Colnago, Pinarello, Gios et Bianchini.
265. En France, les produits sont distribués par l'intermédiaire de deux agents commerciaux : M. René 44... à Vedene dans le Vaucluse et M. 45... à Toulouse.
266. La société Wilier diffuse des tarifs "prix au public" (annexe 15 du rapport d'enquête, cotes 1901 à 1911).
267. Le 2 mars 2004, M. René 44... a déclaré (annexe 15 du rapport d'enquête, cotes 1872 à 1879) :
"Les revendeurs s'engagent à respecter le prix de vente conseillé. La marge conseillée sur le tarif de base est de 1,80. En Italie, cette marge est de 1,7.
Les distributeurs nous contactent lors de salons ou m'appellent. Nous leur fournissons les conditions de vente, et leur demandons de respecter les prix conseillés (...).
Mon rôle est de surveiller le bon fonctionnement des prix sur le marché français de façon qu'il n'y ait pas de gros dérapages de prix.
(...)
Nous avons en plus de nos revendeurs traditionnels des groupements comme Midpy et Districycle.
Le groupement Midpy ne m'achète que des cadres. Ils bénéficient de remises de 8 % et achètent par paiement anticipé. Nous avons contrôlé les prix des cadres et avons constaté que les prix affichés correspondaient aux prix de vente conseillés.
Concernant le réseau Districycle, ce dernier par l'intermédiaire de la centrale d'achat traite directement avec Wilier.
Nous essayons de préserver une zone de chalandise pour chaque magasin lors de l'agrément d'un distributeur (zone environ de 30 km).
Nous avons un accord avec la centrale Districycle pour que les produits Wilier ne soient pas présents dans les magasins situés dans la même zone de chalandise que nos revendeurs traditionnels.
Nous avons un nouveau distributeur sur la région parisienne la société Vélo 9. Celui-ci m'a contacté pour me demander des informations sur les prix pratiqués par Districycle dans sa zone.
La société Tinazzi qui travaillait avec Wilier nous a quittés notamment à cause des problèmes avec le Districycle de Marseille.
(...)
Districycle achète, à ma connaissance, des pièces de vélos qu'elle assemble elle-même. Les prix sont élaborés avec Wilier en fonction du marché français. Nous avons été obligés de réduire la marge de 2 à 1,8 en fonction des nouvelles formes de distribution en France".
268. Le 8 octobre 2003, M. Patrick O..., président directeur général de la société Centrale Districycle, a déclaré (annexe 1 du rapport d'enquête, cotes 118 à 127) :
"Wilier a menacé sous la pression de ses distributeurs français entre autres Bouticycles de Marseille et d'Avignon, d'augmenter mes prix d'achat de 5 % si nos distributeurs locaux continuaient à appliquer une remise de 10 % sous forme de cadeaux sur leurs produits. Nous avons augmenté nos prix mais nos magasins continuent d'appliquer une remise de 10 % sur nos prix conseillés".
2. LES GRIEFS NOTIFIÉS
269. Sur la base des éléments analysés ci-dessus, les griefs suivants ont été notifiés :
Au groupement Master Cycle, à ses membres et à certains de ses fournisseurs
Grief n° 1
270. Il est fait grief au GIE Master Cycle, aux entreprises adhérentes au GIE et représentées au conseil d'administration en 2002 : la société cycles Cesbron, la société Collard et fils, la société cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, la société cycles Vial, la société la Cyclerie (Pierre Rossé sport), la société Sports cyclistes (cycles Pilorget) et la société Isly 2000 (Philippe B...) et aux fournisseurs "partenaires Master" ou "partenaires agréés" suivants : la société Bicicletas de Alava (BH), la société les créations Jean-Pierre (Carnac), la société Hutchinson, la société Intercycles, la société Michelin et la société Time Sport international, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant sur des critères d'agrément anticoncurrentiels pour l'année 2002, à savoir l'engagement réel du fournisseur sur le terrain pour le respect des prix conseillés (prix de marché).
Grief n° 2
271. Il est fait grief au GIE Master Cycle, aux sociétés cycles Cesbron, Isly 2000, cycles Chauvière, cycles Chiasson, Collard et fils, cycles Gauthier, Torch'VTT, le Penven, cycles Leroy, cyclosport Pedegaye, Sports cyclistes (cycles Pilorget) et la cyclerie Pierre Rossé sport ainsi qu'à l'encontre de l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, en mars et avril 2001, en faisant pression sur les sociétés Santini France et Chapak, en cessant ou en menaçant de cesser toute relation commerciale avec ces fournisseurs, afin qu'ils refusent de livrer les magasins Districycle, au motif que ces derniers ne respectaient pas les prix conseillés.
Grief n° 3
272. Il est fait grief aux entreprises du groupement présents à la réunion de la Roche-sur-Yon, c'est-à-dire le GIE Master Cycle, les sociétés cycles Cesbron, Isly 2000, cycles Chauvière, cycles Chiasson, Collard et fils, cycles Gauthier, Torch'VTT, le Penven, cycles Leroy, cyclosport Pedegaye, Sports cyclistes (cycles Pilorget) et la cyclerie Pierre Rossé sport, à l'encontre de l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole ainsi que de la société Santini France, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant en avril 2001 pour exiger que les grandes surfaces spécialisées respectent les prix de vente conseillés et demander au réseau Districycle d'augmenter ses prix de vente.
Grief n° 17
273. Il est fait grief à la société Bicicletas de Alava, au groupement Master Cycle, aux entreprises adhérentes au GIE et présentes au conseil d'administration entre 2000 et 2004 : la société cycles Cesbron, la société Collard et fils, la société cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, la société Cycles Vial, la société la Cyclerie (Pierre Rossé sport), la société Sports cyclistes (cycles Pilorget), la société Isly 2000 (Philippe B...), la société cyclosport Pedegaye, la société Robert (cycles Robert) et la société Michenon, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant, entre 2000 et 2004, pour que les détaillants respectent les "prix de marchés" et que les magasins Supersport ou certains de ces magasins ne commercialisent pas les vélos de marque BH.
Aux entreprises du réseau Bouticycles
Grief n° 4
274. Il est fait grief à la société Nethub, à la société José Alvarez et aux entreprises adhérentes qui ont participé au CRSB en 2002, à savoir les sociétés Bouticycles Toulousain, cycle et sport Tilly, Sofretin et Revaxion, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en mettant en place des conditions de vente pour les vélos Vitus, GT et BMX, applicables entre le 1er septembre 2002 et le 31 août 2003, qui interdisent aux détaillants du réseau de redistribuer des produits sous forme de rétrocession ou d'échange à d'autres magasins, sous contrat ou non.
Grief n° 5
275. Il est fait grief à la société Nethub, à la société José Alvarez et aux adhérents membres du CRSB en 2002 et 2003, à savoir les sociétés Bouticycles Toulousain, cycles et sport Tilly, Sofretin, Revaxion, Ryder France, Toinet et Vélo plus, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant sur la détermination de coefficients dans les conditions de vente de la société José Alvarez aux détaillants du réseau, sur la résolution adoptée au cours de la réunion du CSRB du 15 mars 2002 selon laquelle en 2005, au plus tard, le coefficient moyen d'un adhérent Bouticycles devait être de 2 ainsi que sur la décision prise au cours de la réunion du CRSB du 20 janvier 2003 de lancer des actions pour faire respecter les prix conseillés.
Grief n° 6
276. Il est fait grief à la société Nethub, à la société José Alvarez et aux adhérents membres du CRSB en 2004, à savoir les sociétés Bouticycles toulousain, Toinet, Revaxion, Vélo plus, Ryder France et 2F2G, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en ayant fait pression sur la société Look Cycle international afin que cette dernière cesse de livrer la société Serge Dutouron, notamment en lui adressant un courrier daté du 6 février 2004.
A la société Look Cycle international et à ses distributeurs des réseaux Master Cycle et Bouticycles
Grief n° 7
277. Il est fait grief à la société Look Cycle international d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en mettant en place des contrats de distribution D1, D2 ou Corner pour ses distributeurs, contenant une clause interdisant aux distributeurs de redistribuer les produits Look sous forme de rétrocession ou d'échange à d'autres magasins, sous contrat Look ou non.
Grief n° 8
278. Il est fait grief à la société Look Cycle international, au GIE Master Cycle et aux entreprises adhérentes du groupement et présentes au conseil d'administration en 2001 : la société cycles Cesbron, la société Collard et fils, la société cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, la société cycles Vial, la société la Cyclerie (Pierre Rossé sport), la société Sports cyclistes (cycles Pilorget) et la société cycles Robert d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en octobre 2001, en se concertant pour empêcher les revendeurs Serge Dutouron et Districycle de distribuer les produits Look et en se concertant pour que certains revendeurs de produits Look ne soient pas en concurrence dans une même zone de chalandise.
Grief n° 9
279. Il est fait grief à la société Look Cycle international, à la société Nethub, à la société José Alvarez et aux adhérents membres du CRSB en 2004 à savoir les sociétés Bouticycles toulousain, Toinet, Revaxion, Vélo plus, Ryder France et 2F2G, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité CE en se concertant pour empêcher les revendeurs Districycle et Serge Dutouron de commercialiser les produits Look. Notamment, la concertation a conduit la société Look Cycle international à prendre des mesures pour que le distributeur Serge Dutouron ne puisse plus s'approvisionner auprès d'un grossiste italien.
Aux autres fournisseurs et à leurs distributeurs
Grief n° 10
280. Il est fait grief à la société Shimano France composants cycles d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en mettant en place pour ses revendeurs des contrats "partenaires plus 2004", contenant une clause selon laquelle le détaillant s'engage à respecter une politique de prix de marché conforme aux exigences de Shimano France, et des contrats "chaussures Shimano 2004", contenant une clause selon laquelle le signataire s'engage dans la mesure du possible à respecter les prix publics conseillés édités par la société Shimano France.
Grief n° 11
281. Il est fait grief à la société les Créations Jean-Pierre d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en mettant en place en 2002, 2003 et 2004, des contrats pour ses détaillants contenant une clause selon laquelle le distributeur est obligé de "respecter les prix de vente public conseillés par Carnac".
Grief n° 12
282. Il est fait grief à la société Hutchinson d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant, entre 2000 et 2003, avec ses distributeurs pour que ces derniers respectent les prix de vente publics qu'elle a établis.
Grief n° 13
283. Il est fait grief à la société Hutchinson et au groupement Master Cycle, à savoir au GIE Master Cycle et aux entreprises adhérentes au GIE et présentes au conseil d'administration entre 2001 et 2003 : la société cycles Cesbron, la société Collard et fils, la société cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, la société cycles Vial, la société la Cyclerie (Pierre Rossé sport), la société Sports cyclistes (cycles Pilorget), la société Isly 2000 (Philippe B...), la société cyclosport Pedegaye et la société Robert (cycles Robert), d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant, entre 2001 et 2003, pour que les distributeurs, et plus particulièrement les revendeurs Districycle, respectent les prix conseillés (prix de vente publics) établis par la société Hutchinson.
Grief n° 14
284. Il est fait grief à la société Hutchinson et à la société Auchan d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant, en 2001 et 2002, sur les prix de vente au détail des produits Hutchinson pratiqués dans les magasins Auchan.
Grief n° 15
285. Il est fait grief à la société Hutchinson et à la société Décathlon d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant, en 2000 et 2001, sur les prix de vente au détail des produits Hutchinson pratiqués dans les magasins Décathlon.
Grief n° 16
286. Il est fait grief à la société Michelin d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant en 2002 et 2003 avec les détaillants pour que ces derniers, et plus particulièrement les revendeurs Districycle, respectent les prix "de marché" des pneumatiques Michelin.
Grief n° 22
287. Il est fait grief à la société Time Sport international d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en refusant de vendre certains articles à des distributeurs pratiquant des prix inférieurs aux "prix publics".
Grief n° 23
288. Il est fait grief à la société Time Sport international d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité CE en ayant adopté des conditions générales de vente interdisant à leurs clients d'exporter leurs produits.
Aux grossistes et aux importateurs
Grief n° 18
289. Il est fait grief à la société Royal Vélo France d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant avec ses revendeurs pour qu'ils respectent les prix de vente conseillés.
Grief n° 19
290. Il est fait grief à la société Sidi Sport et à la société Royal Vélo France d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité CE en se concertant pour empêcher un grossiste espagnol, la société Comet, de livrer des chaussures de marque Sidi à un détaillant sur le territoire français.
Grief n° 20
291. Il est fait grief à la société Sintema et à la société établissements René Valdenaire d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant pour que les distributeurs respectent les prix de vente publics édités par la société Sintema, notamment en refusant de vendre aux détaillants qui vendent à des prix inférieurs aux prix publics, plus particulièrement les revendeurs Districycle et Serge Dutouron.
Grief n° 21
292. Il est fait grief à la société Sintema et à la société établissements René Valdenaire d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité CE en se concertant pour empêcher certains distributeurs de s'approvisionner auprès de grossistes étrangers.
Grief n° 24
293. Il est fait grief à la société Philamy d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en ayant mis en place, pour ses revendeurs "centre Marzocchi", des contrats contenant une clause selon laquelle le revendeur s'engage à respecter les prix de vente publics conseillés.
Grief n° 25
294. Il est fait grief à la société Two Lambs d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en interdisant aux revendeurs, dans ses conditions générales de vente, de vendre par correspondance à tarif réduit et en exigeant qu'ils obtiennent un accord préalable pour la vente des produits à tarifs conseillés dans des catalogues.
Grief n° 26
295. Il est fait grief à la société Wilier d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant avec les détaillants afin qu'ils respectent ses prix de vente publics.
3. SUR LES SOCIÉTÉS MISES EN CAUSE PAR LA NOTIFICATION DES GRIEFS
296. La société MC2R estime que la notification de griefs a été envoyée par erreur à la société Cycles Robert. Celle-ci n'exerce plus d'activité dans le cycle depuis le 29 décembre 1999, date à laquelle elle a cédé cette branche d'activité. Elle n'a pu donc participer aux réunions du GIE incriminées dans la notification de griefs et qui sont postérieures.
297. La société Cycles Robert a continué d'exister et après la cession de son activité de cycles en 1999, elle a continué de faire partie du conseil d'administration du GIE. Le grief n° 17 lui a été notifié à bon droit.
298. La société Bouticycle toulousain à la Salvetat Saint Gilles en Haute Garonne a vendu son fonds de commerce à la Sarl Jolly et a continué d'exister à une autre adresse après la vente du fonds. La notification de griefs faite à la première adresse n'a pas atteint son destinataire. La société Bouticycle toulousain n'a pas été partie à la procédure et doit être mise hors de cause.
299. La société Cycles Vial n'a pas été destinataire de la notification des griefs. Elle doit être mise hors de cause.
II. Discussion
A. APPRÉCIATION JURIDIQUE D'ENSEMBLE
300. Les pratiques visées dans la notification de griefs concernent des ententes horizontales entre distributeurs indépendants regroupés dans les réseaux Master Cycle et Bouticycles visant à faire pression sur les fournisseurs de cycles afin qu'ils cessent leurs livraisons aux autres distributeurs concurrents pratiquant des prix discount. A ces concertations ont adhéré certains fournisseurs qui ont donc participé aux ententes précédentes. Les pratiques visées concernent en outre des ententes verticales sur les prix entre fournisseurs et distributeurs, et enfin des clauses contractuelles convenues entre les fournisseurs et les distributeurs (de conditions générales de vente ou de contrats de distribution) comportant des clauses considérées comme anticoncurrentielles (clauses portant sur les prix, interdisant les exportations ou les rétrocessions entre distributeurs).
1. SUR L'ACCORD DE VOLONTÉ DANS LES ENTENTES HORIZONTALES
301. Le juge communautaire a défini la pratique concertée comme celle qui vise "une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (arrêt du 14 juillet 1972, ICI/Commission, précité, point 64). Les critères de coordination et de coopération retenus par la jurisprudence de la Cour, loin d'exiger l'élaboration d'un véritable "plan", doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence et selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le Marché commun. S'il est exact que cette exigence d'autonomie n'exclut pas le droit des opérateurs économiques de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter de leurs concurrents, elle s'oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact, directe ou indirecte entre de tels opérateurs, ayant pour objet ou pour effet soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on est décidé à, ou que l'on envisage de, tenir soi-même sur le marché" (CJCE, 16 décembre 1975, Suiker Unie UA aff jointes 114-73, TPICE, LVM c/Commission 29 avril 1999). En conséquence, la qualification de pratique concertée n'est pas limitée aux seuls comportements sur le marché mais peut aussi s'appliquer à une forme de coordination et à des prises de contacts entre les entreprises, supposant en cela un accord de volonté pour mener ensemble une telle concertation.
302. Dans l'arrêt Anic du 8 juillet 1999, la Cour de justice des communautés européennes en déduit que : "comme cela résulte des termes mêmes de l'article 85 [devenu l'article 81], paragraphe 1, du traité la notion de pratique concertée implique, outre la concertation entre les entreprises, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments.
(...) Or, d'une part, il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire qu'il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. Il en sera d'autant plus ainsi lorsque la concertation a lieu sur une base régulière au cours d'une longue période (...)
D'autre part, une pratique concertée telle que définie ci-dessus relève de l'article 85, paragraphe 1, du traité, même en l'absence d'effets anticoncurrentiels sur le marché.
D'abord, il découle du texte même de ladite disposition que, comme dans le cas des accords entre entreprises et des décisions d'associations d'entreprises, les pratiques concertées sont interdites, indépendamment de tout effet, lorsqu'elles ont un objet anticoncurrentiel.
Ensuite, si la notion même de pratique concertée présuppose un comportement des entreprises participantes sur le marché, elle n'implique pas nécessairement que ce comportement produise l'effet concret de restreindre, d'empêcher ou de fausser la concurrence".
303. La Cour de justice a poursuivi cette analyse dans l'arrêt Sarrio du 16 novembre 2000 (aff C-291-98) en précisant les éléments de nature à renverser la présomption de l'accord de volonté : "le fait qu'une entreprise ne donne pas suite aux résultats des réunions n'est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à l'entente à moins qu'elle ne se soit distanciée publiquement de son contenu". La Cour a récemment confirmé sa position dans un arrêt du 28 juin 2005, (Dansk Industrie c/Commission (C-189-02 P et autres) : "Aux fins de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité (devenu article 81, paragraphe 1, CE), il suffit qu'un accord ait pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence, indépendamment de ses effets concrets. En conséquence, dans le cas d'accords se manifestant lors de réunions d'entreprises concurrentes, une infraction à cette disposition est constituée lorsque ces réunions ont un tel objet et visent, ainsi, à organiser artificiellement le fonctionnement du marché. Dans un tel cas, la responsabilité d'une entreprise déterminée du chef de l'infraction est valablement retenue lorsqu'elle a participé à ces réunions en ayant connaissance de leur objet, même si elle n'a pas, ensuite, mis en œuvre l'une ou l'autre des mesures convenues lors de celles-ci. La circonstance d'une participation à l'entente d'entreprises dominantes ou particulièrement puissantes, susceptibles de prendre des mesures de rétorsion envers d'autres participants, nettement moins puissants, au cas où ceux-ci se distancieraient publiquement du contenu des réunions dont l'objet est anticoncurrentiel, l'assiduité plus ou moins grande de l'entreprise aux dites réunions ainsi que la mise en œuvre plus ou moins complète des mesures convenues ont des conséquences non pas sur l'existence de sa responsabilité, mais sur l'étendue de celle-ci et donc sur le niveau de la sanction (voir, arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C-238-99 P, C-244-99 P, C-245-99 P, C-247-99 P, C-250-99 P à C-252-99 P et C-254-99 P, Rec. p. I-8375, points 508 à 510).
Il en découle que la circonstance (...) que [l'entreprise mise en cause] n'a pas mis en œuvre et ne pouvait d'ailleurs pas mettre en œuvre la mesure de boycottage convenue lors de la réunion du 24 mars 1995 n'est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à cette mesure, à moins qu'elle ne se soit distanciée publiquement de son contenu, ce que ladite [entreprise] n'a pas allégué".
304. En droit communautaire, l'accord de volonté d'une entreprise est par conséquent démontré par sa participation à une ou plusieurs réunions ayant un objet anticoncurrentiel, à moins qu'elle ne s'en soit distanciée publiquement, sans qu'il soit besoin de constater la mise en œuvre effective des décisions prises. L'absence de mise en œuvre est un élément à prendre en compte, non pas pour qualifier l'infraction mais pour établir le montant de la sanction.
305. En droit national, et s'agissant de réunions tenues dans le cadre statutaire d'une organisation professionnelle, la solution pouvant être différente pour les réunions occultes ou secrètes entre concurrents, le Conseil a précisé, dans sa décision n° 04-D-07 du 11 mars 2004 relative à des pratiques relevées dans le secteur de la boulangerie dans le département de la Marne, le standard de preuve requis pour démontrer la participation d'une entreprise à une entente horizontale anticoncurrentielle au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce:
"La preuve de la participation des artisans boulangers à l'entente mise en œuvre par la Fédération résulte de la commission par ceux-ci de l'une au moins des pratiques suivantes:
- la participation à la réunion d'organisation de l'entente du [../../..] dans des conditions démontrant leur adhésion à l'entente ;
- la contribution à la mise en œuvre de l'entente, par la diffusion de consignes arrêtées lors de cette réunion ;
- l'application de ces consignes en connaissance de cause.
(...) En droit communautaire, la seule participation même passive d'une entreprise à une réunion dont l'objet est anticoncurrentiel suffit à établir sa participation à l'entente, sauf si cette entreprise démontre qu'elle n'a pas souscrit aux pratiques anticoncurrentielles décidées lors de la dite réunion en s'en distanciant publiquement (Cour de Justice des communautés européennes, 16 novembre 2000 Sarrio SA C-291-98). Le Conseil de la concurrence et la Cour d'appel de Paris exigent cependant que le concours de volontés nécessaire à l'incrimination d'une entreprise pour entente se soit manifesté par une adhésion plus explicite à l'action collective décidée lors de ladite réunion, soit par la participation ultérieure à d'autres réunions ayant le même objet anticoncurrentiel, soit par l'application concrète des mesures décidées lors de cette réunion".
306. Dans cette affaire, le Conseil a estimé que le seul fait d'avoir participé à une assemblée générale ordinaire de la Fédération départementale de la boulangerie et boulangerie pâtisserie de la Marne n'était pas suffisant en soi pour caractériser la démarche volontaire des artisans boulangers à participer à une entente anticoncurrentielle. En effet, les artisans boulangers régulièrement convoqués à une réunion statutaire n'étaient pas en mesure de connaître l'objet anticoncurrentiel de cette réunion. Dans ce contexte, le Conseil a considéré que le concours de volonté était démontré lorsque l'entreprise, ayant participé ou non à cette réunion, a adhéré à l'entente par la preuve de son accord à l'entente de prix, la diffusion des consignes arrêtées lors de cette réunion ou par l'application des mesures concrètes décidées lors de cette réunion ou lorsque l'entreprise a participé à plusieurs réunions ayant le même objet anticoncurrentiel.
307. La Cour d'appel de Paris a précisé, dans son arrêt du 26 octobre 2004, "que la participation des demandeurs à cette entente est établie, qu'ils aient participé à cette assemblée générale et signé la feuille de présence (...), diffusé les consignes de la fédération en tant que délégués de secteur (...), ou encore appliqué ces consignes (...) Qu'il y a lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de considérer que l'accord des volontés des demandeurs sur une hausse concertée du prix de la baguette de pain est établi, qu'ils aient ou non participé à l'assemblée générale de la fédération".
308. Compte tenu de ces éléments repris dans la décision n° 06-D-03 bis relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des appareils de chauffage (points 678 et suiv.), le Conseil retiendra en l'espèce, comme il l'a énoncé dans cette dernière décision, que l'accord de volonté est démontré dans deux hypothèses :
- si l'entreprise n'a participé qu'à une seule réunion ayant un objet anticoncurrentiel dès lors qu'il est également établi qu'elle a adhéré à cet objet, notamment par la diffusion des consignes adoptées ou encore par l'application des mesures décidées au cours de cette réunion.
- si l'entreprise a participé à plusieurs réunions ayant le même objet anticoncurrentiel.
2. L'ACORD DE VOLONTÉ DANS LES ENTENTES VERTICALES
309. En matière d'accords verticaux, la preuve de l'entente peut résulter de la signature, par les parties, de contrats ou de conditions générales de vente comportant des clauses à objet anticoncurrentiel.
310. En l'absence de telles clauses, il faut distinguer les situations dans lesquelles les relations fournisseurs/distributeurs s'insèrent dans le cadre de relations contractuelles suivies et habituelles, des situations dans lesquelles les relations sont ponctuelles et hors de tout contrat de distribution ou de concession, ainsi que le Conseil l'a souligné dans une décision n° 06-D-04 bis relative à des pratiques relevées dans le secteur de la parfumerie de luxe.
311. Dans le cadre de relations contractuelles suivies entre fournisseur et distributeurs, les distributeurs ne peuvent être considérés comme ayant accepté tacitement, par avance, lors de la signature du contrat de distribution ou de concession, toute pratique voulue par le fournisseur. C'est ainsi que si la pratique du fournisseur (interdiction d'exporter ou imposition de prix) ne peut se rattacher à aucune clause du contrat "en tenant compte, le cas échéant, de tous les autres facteurs pertinents, tels que les buts poursuivis par ce contrat à la lumière du contexte économique et juridique au regard duquel celui-ci a été conclu" (Cour de justice des communautés européennes, 13 juillet 2006, Volkswagen, C 74-04, § 45), les distributeurs ne peuvent être considérés comme ayant accepté tacitement, par avance, l'invitation du fournisseur à commettre une pratique anticoncurrentielle. Mais dès lors que cette invitation adressée par le fournisseur aux distributeurs a été effectivement acceptée par les distributeurs, l'accord de volonté de ces derniers est démontré.
312. En dehors de telles relations, l'invitation du fournisseur à commettre une pratique anticoncurrentielle et l'acquiescement des distributeurs doivent être démontrés. La Cour de justice a, dans son arrêt du 6 janvier 2004 (Bayer, C-2-01 P et C-3-01 P), jugé que "Pour qu'un accord au sens de l'article 85 [devenu 81], paragraphe 1, du traité puisse être réputé conclu au moyen d'une acceptation tacite, il est nécessaire que la manifestation de volonté de l'une des parties contractantes visant un but anticoncurrentiel constitue une invitation à l'autre partie, qu'elle soit expresse ou implicite, à la réalisation commune d'un tel but, et ce d'autant plus qu'un tel accord n'est pas, comme en l'espèce, à première vue, dans l'intérêt de l'autre partie, à savoir les grossistes" (§ 102 de l'arrêt).
3. L'appréciation des accords verticaux
313. Le règlement n° 2790-1999 du 22 décembre 1999, concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées constitue, dans le cadre de l'application du droit interne, un "guide d'analyse", depuis 2000 ; le Conseil considère en effet que les restrictions verticales doivent être analysées en tenant compte de ces principes, même lorsque l'analyse n'en est effectuée qu'au regard du droit national.
314. Ce règlement prévoit une exemption d'application du paragraphe 1 de l'article 81 aux accords de distribution, dits "accords verticaux", conclus entre des distributeurs et un fournisseur, lorsque, notamment, la part détenue par le fournisseur sur le marché pertinent sur lequel il vend ses biens et services ne dépasse pas 30 %, et ce, sous réserve que ces accords ne comportent pas de restrictions caractérisées, énumérées à l'article 4 : il s'agit de "la restriction de la capacité de l'acheteur de déterminer son prix de vente (...)" (a) ; de "la restriction concernant le territoire dans lequel, ou la clientèle à laquelle, l'acheteur peut vendre les biens ou services contractuels" (b) ; de la restriction des ventes actives ou passives au sein d'un réseau de distribution sélective (c) ; et enfin de la restriction des livraisons croisées au sein d'un réseau de distribution sélective" (d).
315. Les pratiques qui imposent des prix de revente, limitent la production ou les ventes ont nécessairement un objet anticoncurrentiel, sans qu'il soit besoin de mesurer leurs effets concrets.
316. Ainsi qu'il résulte d'un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 8 juillet 1999 (Anic), les pratiques concertées, comme les accords entre entreprises ou les décisions d'associations d'entreprises, sont interdites "lorsqu'elles ont un objet anti-concurrentiel, indépendamment de tout effet". La Cour énonce à ce propos qu'"il est de jurisprudence constante que, aux fins de l'application de l'article 85§1 du traité, la prise en considération des effets concrets d'un accord est superflue, dès lors qu'il apparaît qu'il a pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence".
317. De même, le Conseil de la concurrence a, dans une décision n° 02-D-36 du 14 juin 2002, énoncé qu'"il résulte des termes de l'article L. 420-1 du Code de commerce qu'une pratique anti-concurrentielle est prohibée, même si elle n'a pas eu d'effet réel sur le jeu de la concurrence, dès lors que l'intention de ses auteurs était d'obtenir un tel effet".
318. Il résulte de ce qui précède que les effets d'un accord ayant pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence ne sont pas nécessaires à la caractérisation d'une entente : leur prise en compte est seulement utile pour évaluer le montant de la sanction.
319. Le fait qu'une clause ayant pour objet de restreindre la concurrence n'ait pas été mise en œuvre par les cocontractants ne suffit donc pas à la soustraire à l'interdiction de l'article 81 § 1 du traité (Cour de justice des communautés européennes, 21 février 1984, 86-82).
4. Les preuves des ententes verticales sur les prix
320. Ainsi que l'a indiqué le Conseil dans la décision n° 06-D-04 bis relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la parfumerie de luxe, l'ingérence du fournisseur dans la politique de prix du distributeur contrevient à l'article L. 410-2 du Code de commerce qui énonce : "Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence". L'alignement volontaire des prix au détail s'oppose donc à la libre détermination de ces prix par la concurrence. L'article L. 442-5 du Code de commerce fait d'ailleurs de la pratique de prix imposés une infraction pénale, définie indépendamment du pouvoir de marché détenu par le producteur, réprimant "le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale".
321. L'article L. 420-1 du même Code tire la conséquence du principe de la libre fixation des prix en prohibant de manière expresse, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché les ententes qui tendent "à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse".
322. Selon une jurisprudence constante, rappelée dans les décisions n° 04-D-33 et n° 05-D-06, le Conseil considère qu'un alignement des prix peut résulter d'une entente horizontale directe sur les prix entre distributeurs ou encore d'une série d'ententes verticales entre chaque fournisseur et chacun de ses distributeurs autour d'un prix de revente déterminé par ce fournisseur. Elle peut aussi résulter de la mise en œuvre d'une entente horizontale qui a conduit les distributeurs à décider de faire pression sur un fournisseur pour que celui-ci refuse de livrer ou agisse pour rendre plus onéreuses les conditions d'achat d'un réseau de distribution concurrent.
323. Pour faire la distinction entre ces différentes situations - entente illicite ou parallélisme admissible de comportement - le Conseil considère, en dehors des hypothèses simples où l'accord de volonté résulte de la signature par les parties d'un contrat comportant une clause aux termes de laquelle le distributeur s'engage à respecter les prix imposés par le fournisseur, que la preuve de l'entente verticale, qui suppose un accord de volonté entre les entreprises, est rapportée lorsqu'un faisceau d'indices "graves, précis et concordants" converge pour établir les trois points suivants :
- en premier lieu, les prix de vente au détail souhaités par le fournisseur sont connus des distributeurs ;
- en deuxième lieu, une police des prix a été mise en place pour éviter que des distributeurs déviants ne compromettent le fonctionnement durable de l'entente ;
- en troisième lieu, ces prix, souhaités par le fournisseur et connus des distributeurs, sont significativement appliqués par ces derniers.
B. SUR LE COMPORTEMENT DES MEMBRES ET DES PARTENAIRES DU GIE MASTER CYCLE (GRIEFS 1, 2, 3, 8, 17)
324. Il a été reproché :
??au GIE Master Cycle, à ses entreprises membres et à ses partenaires agréés de s'être concertés pour imposer des prix de revente en conditionnant l'agrément des membres du réseau au respect des prix conseillés (grief n° 1) ;
??au GIE Master Cycle et à ses membres d'avoir exercé des pressions et menaces de ne pas livrer les magasins de la centrale Districycle qui ne respectaient pas les prix conseillés (grief n° 2) ;
??au GIE Master Cycle et à ses membres de s'être concertés avec la société Santini pour exiger des grandes surfaces et du réseau Districycle le respect de ces prix (grief n° 3) ;
??au GIE Master Cycle et à ses membres de s'être concertés avec la société Look pour empêcher les revendeurs de distribuer des produits Look (grief n°8) ;
??à la société Bicicletas de Alava dénommée aussi BH du nom de sa marque, au GIE Master Cycle et aux entreprises adhérentes de s'être concertés entre 2000 et 2004 pour faire respecter les prix fixés par les détaillants du réseau et pour empêcher l'approvisionnement de certains magasins Supersport en vélos de la marque BH (grief n°17).
325. Les pratiques visées en l'espèce concernent principalement une concertation horizontale entre les distributeurs appartenant au GIE Master Cycle, qui ont discuté au cours de réunions des moyens à mettre en œuvre auprès de leurs fournisseurs afin que ceux-ci ne livrent pas la centrale Districycle, qui pratiquait des prix "discount". Elles visent aussi des ententes verticales constituées d'une part de manière explicite dans les conditions posées à l'agrément des fournisseurs membres du réseau et d'autre part, par l'adhésion de certains fournisseurs, notamment les sociétés Santini, Look et Bicicletas de Alava à la concertation organisée par les distributeurs.
1. LE MARCHÉ ET L'IMPUTATION DES PRATIQUES
Sur le marché de référence et la position de Master Cycle sur ce marché
326. La société MC2R qui succède au GIE Master Cycle fait valoir sa position négligeable concernant la revente des cycles et produits cyclistes. A l'époque des faits, elle regroupait 25 points de vente et réalisait un chiffre d'affaires de 12 millions sur un marché de 3 milliards d'euro, sa part de marché ayant connu une baisse continue de 1,91 % en 2001 à 1,23 % en 2003. Elle estime que, faute de définition du marché de produits et géographique, les entreprises sont dans l'incapacité d'appréhender de manière objective et précise l'étendue et les effets des pratiques reprochées. Elle expose enfin que face à la concurrence des hypermarchés généralistes et des grandes surfaces de sport, qui importent des produits à bas prix provenant des pays asiatiques, les détaillants spécialisés en vélos de course et VTT ont connu une baisse des ventes de 8 % en volume.
327. Mais la notification de griefs a défini avec précision les produits qui ont fait l'objet des griefs ainsi que les divers intervenants du circuit de distribution des cycles et produits pour cyclistes, qu'il s'agisse en amont des fabricants, des équipementiers et des grossistes et en aval des diverses formes de distribution.
328. La présentation détaillée des réseaux de revendeurs et de leurs relations avec les fournisseurs de cycles et de produits liés à la pratique du vélo, complétée par une définition très précise des griefs notifiés, a permis aux entreprises de connaître de manière précise l'étendue et les effets des pratiques qui leur étaient reprochées.
329. Le Conseil a d'ailleurs rappelé, dans sa décision n° 05-D-27 du 15 juin 2005, que "les pratiques qui ont fait l'objet de la notification de griefs sont recherchées au titre de la prohibition des ententes. Il n'est alors pas nécessaire de définir le marché avec précision, comme en matière d'abus de position dominante, dès lors que le secteur et les marchés ont été suffisamment identifiés pour permettre de qualifier les pratiques qui y ont été constatées et de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre (...)".
330. La circonstance que le GIE et les entreprises membres occupent sur le secteur en cause une position faible avec des parts de marché en baisse entre 2001 et 2003 ne saurait avoir d'incidence sur la qualification des pratiques d'entente horizontale ou verticale mises en œuvre dans le cadre du GIE mais peut être un élément d'appréciation à prendre en compte dans l'appréciation de leurs effets sur le marché et, par conséquent, des sanctions à prononcer.
Sur l'adhésion de chaque entreprise du réseau à l'entente
331. La société MC2R fait valoir d'une part que les entreprises destinataires des griefs, quoique membres du GIE, restaient des entreprises autonomes qui n'avaient pas d'obligation d'approvisionnement exclusif auprès de lui et que, d'autre part, les griefs n° 1, 2, 3, mais aussi les griefs n° 8, 13 et 17 ont été adressés aux entreprises membres de son conseil d'administration sans qu'aucune intervention personnelle et directe de chacune d'entre elles à la commission des pratiques ait été démontrée. Dans ces conditions, la simple appartenance des entreprises au conseil d'administration du GIE ne peut rapporter la preuve de leur participation à l'entente, en l'absence d'éléments montrant que les pratiques en cause résulteraient de décisions prises par cette instance.
332. Comme indiqué au paragraphe 308, l'accord de volonté à une entente horizontale est démontré lorsqu'une entreprise a participé à une réunion à objet anticoncurrentiel et qu'elle a par ailleurs manifesté son adhésion à cet objet. Cette adhésion n'est pas nécessairement explicite mais peut résulter de tout élément montrant que l'entreprise en cause a directement ou indirectement appliqué les consignes décidées en commun.
333. Cette analyse s'applique en conséquence aux entreprises membres du GIE Master Cycle dès lors qu'il est démontré qu'elles ont participé à au moins une réunion à objet anticoncurrentiel et, qu'en tant que membres du conseil d'administration du GIE, elles ont nécessairement participé à la mise en œuvre des décisions prises dans ce cadre. Dans l'analyse de chacun des griefs notifiés, le rôle des adhérents et des membres du conseil d'administration du GIE dans la commission des pratiques reprochées sera examiné en détail.
2. SUR L'ACTION CONCERTÉE ENTRE LES DÉTAILLANTS DU RÉSEAU (GRIEF N°2)
334. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 55 à 65 que les membres du conseil d'administration du groupement de distributeurs de cycles "Master Cycle", se sont réunis le 26 mars 2001 à La Roche sur Yon et qu'au cours de cette réunion ont été annoncées des actions à l'encontre de deux fournisseurs, Chapak et Santini, afin que ceux-ci adoptent une position claire au sujet du choix de leur réseau, car il leur était reproché de vendre leurs cycles à des enseignes discount, et notamment Districycle. Il a été décidé de leur envoyer des courriers précisant que "Master Cycle bloque toute commande en attendant une réponse claire au sujet de (leur) choix de réseau". Ces résolutions ont été exécutées. Madame L... de la société Cyclerie Pierre Rossé Sport, membre fondateur du GIE et membre du conseil d'administration, a envoyé le 28 mars 2001 une lettre à la société Santini, lui expliquant que "tous les adhérents du groupement GIE Master Cycle (s'étaient) réunis (...) lundi à La Roche Sur Yon" et avaient au cours de cette réunion exprimé des préoccupations à l'encontre de la société Santini. Elle ajoutait que si déjà "certains membres du GIE (avaient) cessé toutes relations commerciales avec (la) société", "le reste du groupement fera(it) de même par solidarité", à cause de la "politique commerciale (de la société) qui ne répond pas à l'attente de (la) profession", les produits de Santini se trouvant dans la plupart des magasins Districycles" qui polluent le marché en ne respectant aucune marge ni prix de vente des produits". Les réactions de la société Santini à ce premier courrier étant "décevantes" pour le groupement, Monsieur L... a adressé un nouveau courrier à la société Santini, le 25 avril 2001, toujours au nom du GIE. Constatant que la "pollution tarifaire" perdurait, et "après en avoir référé à (ses) collègues du réseau Master Cycle", il précisait que les doléances du groupement visaient spécifiquement Districycles, et que si Santini n'arrêtait pas de livrer Districycles, Master Cycle cesserait "définitivement toutes relations" avec lui. A la suite de ces courriers, M. N..., gérant de la société Santini a déclaré : "suite à notre refus d'obtempérer, le réseau Master Cycle sauf les cycles Gauthier, a cessé toute relation avec nous". Si Santini n'a pas interrompu ses livraisons à Districycles, il a demandé à Districycles d'augmenter les prix de tous ses produits.
Les arguments des parties
335. Les entreprises en cause considèrent que le dossier n'apporte pas la preuve concrète d'une concertation des détaillants, la seule participation à la réunion de la Roche-sur-Yon étant insuffisante à elle seule pour rapporter cette preuve.
336. La société MC2R estime qu'aucune pièce du dossier n'atteste d'une quelconque pression sur la société Chapak. Le compte rendu de la réunion de certains adhérents du GIE à La Roche-sur-Yon montrerait, selon elle, que l'hypothèse de l'envoi d'un courrier a été évoquée mais sans avoir été suivie d'application. S'agissant de la société Santini, les échanges de courrier intervenus en 2001 entre la société Cyclerie Pierre Rossé sport, membre du GIE, et la société Santini n'engageraient pas le groupement, Pierre Rossé agissant à titre personnel. Elle soutient que son action unilatérale n'a pas fait l'objet d'une décision du conseil d'administration et qu'aucune note n'a été adressée par le GIE à ses membres demandant la rupture des relations commerciales avec la société Santini. S'agissant des effets de l'action convenue lors de la réunion de La Roche sur Yon, ils seraient inexistants, tous les membres du GIE ne travaillant pas avec la société Santini et ceux qui étaient déjà en relation d'affaires avec elle ayant poursuivi normalement leurs relations commerciales avec cette société après cette réunion. Le GIE considère de plus que la réponse du 9 avril 2001 de la société Santini aux lettres de M. Pierre L..., loin de constituer un indice de concertation, manifeste au contraire la volonté de cette dernière de rester libre de choisir ses clients et de contrôler elle-même les conditions de commercialisation de ses produits.
337. La société Cycles Gauthier avance que, n'ayant jamais été membre du conseil d'administration du GIE ainsi que l'attestent les listes de ses membres figurant au dossier, elle n'a eu aucune responsabilité dans le groupement qu'elle a d'ailleurs quitté en 2005. Elle prétend en outre que sa simple participation à la réunion du 26 mars 2001 ne valait pas adhésion à une concertation illicite, surtout si l'on tient compte que, comme l'ont révélé l'enquête et les factures d'achat produites, la société Cycle Yves Gauthier a continué à commander des articles auprès des fournisseurs Santini et Chapak. Elle expose enfin que le GIE n'était en définitive qu'une centrale de référencement, sans influence sur les adhérents qui restaient libres de leur politique d'achat. La simple menace de boycott évoquée à cette occasion par les dirigeants d'une structure regroupant 22 petits détaillants indépendants, ne pouvait, selon elle, recevoir la moindre application dès lors que ceux-ci entretenaient des relations directes avec les fournisseurs qu'ils soient ou non référencés par le GIE.
L'appréciation du Conseil
Sur l'objet anticoncurrentiel de la réunion de la Roche sur Yon
338. Si les termes du compte-rendu de la réunion de la Roche-sur-Yon coordonnée et animée par Mr Pierre L... (paragraphe 55) ainsi que celui de son ordre du jour ne révèlent pas que les débats entre membres du GIE ont porté sur les prix de vente pratiqués par les détaillants du réseau, la lettre de Mme L... (paragraphe 57) adressée à la société Santini le 28 mars 2001, soit deux jours après la réunion des membres du GIE, éclaire le contenu réel de ces débats qui a porté sur les prix pratiqués dans les réseaux de distribution concurrents. La société Districycle a été accusée de "plomber" le marché par des prix jugés trop bas par les détaillants présents.
339. Le compte rendu adressé aux adhérents par Mme L..., non pas à titre personnel mais pour le compte du GIE, rapporte les débats en ces termes : "Des doléances envers la société Santini ont été exprimées par la majorité des détaillants présents" et "Vous n'êtes pas sans savoir que vos produits se trouvent dans la plupart des magasins Districycle qui polluent le marché en ne respectant aucune marge ni prix de vente des produits". La réunion a eu pour objet la discussion des prix consentis par la société Santini à l'enseigne Districycle et des prix de vente pratiqués par elle dans ses magasins.
340. Les membres présents à la réunion ont de plus décidé de réagir en demandant l'intervention du GIE auprès des sociétés Chapak et Santini, comme l'atteste le compte rendu de la réunion (paragraphe 55). Contrairement à ce que soutiennent les parties, la société cyclerie Pierre Rossé n'a pas, à cet égard, agi de manière unilatérale mais en tant que représentant du GIE. En effet, M. Pierre L..., présidait non pas à titre personnel, mais en qualité de dirigeant du groupement, la réunion de la Roche-sur-Yon au cours de laquelle la question des pressions sur les fournisseurs a été débattue.
Sur l'application des décisions prises en commun
341. S'il n'est pas démontré que les menaces contre la société Chapak ont été mises en application, la correspondance de la société cyclerie Pierre Rossé atteste en revanche qu'une action a été menée vis-à-vis de la société Santini conformément au souhait des membres du GIE.
342. La société Santini a été sommée de redéfinir sa stratégie sous la menace d'un refus du GIE de distribuer ses produits.
343. Dans un premier temps, elle a répondu qu'il ne lui était pas possible de cesser de vendre aux grandes surfaces spécialisées mais a assuré le GIE de son engagement à faire respecter les prix de vente conseillés.
344. Dans un deuxième temps, après une nouvelle intervention de M. L... demandant à Santini de ne pas livrer la société Districycle et devant le refus de Santini d'obtempérer, le réseau Master Cycle a, selon la déclaration d'un responsable de la société Santini, cessé toute relation commerciale avec elle (paragraphe 62).
345. La société Santini a indiqué par ailleurs qu'elle avait finalement demandé à la société Districycle d'augmenter ses prix, demande confirmée par une déclaration de la société Districycle du 8 octobre 2003 (paragraphe 63).
346. Il résulte de cette analyse que le GIE Master Cycle et ses adhérents ont discuté des prix de vente au public pratiqués dans des réseaux de distribution concurrents lors de la réunion de La Roche-sur-Yon et ont évoqué des actions à mettre en place à l'égard de la société Santini. Par ailleurs, les correspondances échangées entre la société Cyclerie Pierre Rossé, en tant que représentant du GIE, et la société Santini les 28 mars et 25 avril 2001, la note du 29 mars 2001 de M. L... au coordinateur de groupement ainsi que la déclaration de la société Districycle constituent un faisceau d'indices précis et concordants démontrant que les mesures décidées au cours de la réunion de la Roche-sur-Yon ont été appliquées en accord avec les membres du GIE.
347. Constitue une pratique concertée prohibée le fait pour un groupement d'achat ou de référencement et ses membres de faire obstacle aux livraisons d'un fournisseur à des distributeurs ou à des circuits de distribution concurrents (avis de la Commission de la concurrence du 30 octobre 1986 relatif aux pratiques commerciales des centrales d'achat Di-Fra, ArcoAssociation et Serfaal). Cette pratique a un objet anticoncurrentiel, contraire à l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Sur l'adhésion personnelle des membres du GIE
348. S'agissant de l'adhésion personnelle de chaque entreprise membre du GIE à l'entente, le Conseil exige conformément à la jurisprudence rappelée au paragraphe 308, que le concours de volonté permettant l'incrimination d'une entreprise se soit manifesté soit par une adhésion à l'action collective décidée lors d'une réunion, soit par la participation ultérieure à d'autres réunions ayant le même objet anticoncurrentiel, soit par l'application concrète des mesures décidées.
349. Or, en l'espèce, si des membres du groupement ont participé à une réunion dont l'objet était anticoncurrentiel et si plusieurs déclarations concordantes montrent qu'ils ont été informés des actions menées par le GIE, l'adhésion concrète et personnelle de chaque participant à la réunion ne peut se déduire que de la déclaration de la société Santini indiquant (paragraphe 62) que tout le réseau Master Cycle sauf les cycles Gauthier a cessé en 2001 d'avoir des relations commerciales avec elle.
350. Or, si cette déclaration montre l'adhésion à l'action collective définie en commun, elle ne permet pas cependant de s'assurer que chaque participant a adhéré personnellement à cette action collective, dès lors notamment que certains n'entretenaient aucune relation commerciale avec la société Santini et que d'autres n'ont pas cessé de s'approvisionner auprès d'elle.
351. En revanche, le GIE Master Cycle a exercé des pressions et formulé des menaces à l'encontre de la société Santini à plusieurs reprises, en exécution des décisions arrêtées lors de la réunion, dans ses courriers des 28 mars et 25 avril 2001. Ces actions ont été engagées en son nom et menées en accord avec son conseil d'administration. En effet, de par ses statuts, le conseil d'administration est l'organe délibérant du GIE qui le représente et l'engage vis-à-vis des tiers, notamment dans le choix des fournisseurs référencés. En interne, dans les relations avec les adhérents, il est doté des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances au nom du groupement.
352. En conséquence, les participants à la réunion de la Roche-sur-Yon qui étaient au surplus membres, à cette période, du conseil d'administration du GIE ont participé à la mise en œuvre de la pratique reprochée. Il s'agit en l'espèce des sociétés Cesbron, Chiasson, Collard, Sports cyclistes (Pilorget), la Cyclerie Pierre Rossé et l'entreprise Dominique Nicole.
353. Il n'est donc pas démontré que la sociétés Isly 2000 qui n'a pas participé à la réunion de la Roche-sur-Yon ainsi que les sociétés cycles Chauvière, cycles Gauthier, Torch'VTT, le Penven, cycles Leroy et cyclosport Pedegaye qui n'étaient pas membres du conseil d'administration du GIE en 2001 ont mis en œuvre une pratique anticoncurrentielle prohibée.
354. En revanche, il est établi que le GIE Master Cycle, et les entreprises membres de son conseil d'administration en 2001 présentes à la réunion de La Roche-sur-Yon, citées ci-dessus au paragraphe 354, ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en faisant pression en mars et avril 2001 sur la société Santini pour que celle-ci cesse de livrer les magasins de l'enseigne Districycle.
3. SUR L'ENTENTE VERTICALE ENTRE LE GIE MASTER CYCLE ET LA SOCIÉTÉ SANTINI POUR LE RESPECT DES PRIX CONSEILLÉS (GRIEF N° 3)
Arguments des parties sur l'application des mesures demandées par le GIE
355. La société MC2R observe que ce grief, en tant qu'il a été notifié au GIE et à ses membres, fait double emploi avec le grief n° 2. Ses arguments en défense sont donc identiques. Elle expose que les courriers adressés à la société Santini n'ont eu aucun effet sur le marché, la demande d'augmentation des prix de Santini n'ayant porté que sur trois références : les socquettes, les cuissards et les collants cyclistes. De plus, rien n'indique que ces augmentations ont été effectivement appliquées par Districycle.
356. Le grief notifié à la société Santini, manifeste l'adhésion de cette société à la concertation décidée au sein du GIE.
357. La société Santini confirme que le GIE Master Cycle souhaitait qu'elle cesse tout approvisionnement des magasins Districycle. Devant les pressions subies, la société a essayé de rassurer le GIE sans jamais chercher à imposer à un de ses clients, grande surface spécialisée ou détaillant traditionnel, le respect d'un prix de vente minimum. Elle n'a jamais demandé à ses commerciaux de surveiller ces prix et de sanctionner ceux qui ne les respectaient pas. Elle expose que les courriers échangés avec le GIE, par l'intermédiaire de la société cyclerie Pierre Rossé, font au contraire foi de sa résistance, car malgré les menaces répétées du GIE, elle a continué à fournir Districycle.
358. C'est essentiellement dans un souci d'apaiser la guerre commerciale que se livraient Master Cycle et Districycle, en d'autres termes dans le souci de ménager la "chèvre et le chou" que la société Santini aurait demandé à Districycle de procéder à quelques relèvements de prix. Mais elle n'aurait rien imposé et ces prix, même ajustés à la hausse, seraient restés en-dessous du prix public indicatif de la société. La société Santini indique enfin que le GIE Master Cycle a interrompu lui-même toute relation commerciale avec elle.
Appréciation du Conseil
359. Plusieurs éléments du dossier démontrent l'adhésion de la société Santini à la concertation décidée entre le GIE et ses membres, lors de la réunion de la Roche-sur-Yon. Les courriers échangés entre le GIE et la société Santini (paragraphes 57 à 60) font apparaître à la fois la demande adressée par le GIE à Santini pour que cette société fasse respecter par les grandes surfaces de sport les prix publics conseillés et l'action de cette dernière pour que le réseau Districycle augmente ses prix. La déclaration du président directeur général de la centrale Districycle figurant au paragraphe 64 établit qu'à la suite de la demande de la société Santini, il a effectivement augmenté les prix des socquettes, des cuissardes et des collants.
360. Si la hausse des prix qui en a résulté n'a porté que sur trois références, elle a cependant concerné des produits largement consommés par les cyclistes et présentés par la centrale Districycle comme des produits d'appel. La concertation n'est donc pas demeurée sans effet.
361. S'agissant du GIE et des membres du conseil d'administration, il est exact que les pratiques qui leur sont reprochées au titre du grief n° 3 sont déjà couvertes par le grief n° 2. Ils ne sauraient donc se voir condamnés deux fois pour les mêmes pratiques, en vertu du principe non bis in idem. Le grief n° 3 n'est pas retenu à l'encontre du GIE Master Cycle et des sociétés Cesbron, Chiasson, Collard, Sports cyclistes (Pilorget), la Cyclerie Pierre Rossé et l'entreprise Dominique Nicole.
362. En revanche, il est établi que la société Santini a adhéré à la concertation entre le GIE et ses membres, en imposant à l'enseigne Districycle d'augmenter les prix des produits Santini. Cette société a donc enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
4. SUR LES CONDITIONS D'AGRÉMENT DES FOURNISSEURS AU RÉSEAU MASTER CYCLE (GRIEF N° 1)
363. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 66 à 76 qu'a été saisi chez un administrateur du GIE, un document intitulé "Procédures" daté du 5 avril 2002 (paragraphe 66), qui indique de manière détaillée la procédure à suivre par un fournisseur qui désire devenir "partenaire Master", "partenaire agréé" ou "partenaire référencé" du GIE. L'agrément dans les deux premières catégories est subordonné à un "engagement réel sur le terrain pour le respect des prix de marché". Ce document précise aussi le rôle des adhérents du GIE et du conseil d'administration. A la réception de la demande d'agrément, le responsable du réseau établit une fiche référendum envoyée à tous les adhérents qui ont trois jours pour donner leur avis. Au vu de l'ensemble des réponses données, le conseil d'administration décide l'agrément à l'unanimité comme le précise la charte d'agrément : "un fournisseur est agréé dès lors que la totalité des membres du conseil d'administration a donné son avis" (paragraphe 68). A partir de cette décision du conseil d'administration, la coordinatrice édite le contrat de distribution à destination du fournisseur. Une fiche d'agrément est alors élaborée et remise aux adhérents du réseau afin d'être intégrée dans leur documentation commerciale.
Sur l'existence d'une procédure d'agrément contenant une clause de respect des prix conseillés et sur l'adhésion des entreprises membres du conseil d'administration du GIE
364. La société MC2R estime que le document intitulé "Procédures" daté du 5 avril 2002 (paragraphe 66) n'était qu'un projet établi par le GIE Master Cycle qui n'a pas été mis en application. Aucun courrier ou pièce du dossier ne démontrerait l'intervention du GIE auprès de ses membres pour recevoir l'aval définitif sur ce document ; aucune décision du conseil d'administration n'a entériné sa mise en œuvre. Dans ces conditions, aucune constatation effectuée n'infirme les propos du président du GIE du 13 janvier 2004, selon lesquels : "le projet d'agrément des fournisseurs Master et agréés n'a pas été mis en place". Par ailleurs, le document intitulé "Master Cycle et ses partenaires", censé démontrer la mise en œuvre de la procédure, fait référence à une restructuration du groupement discutée lors du salon mondial des deux roues de septembre 2001, antérieure au projet du mois d'avril 2002 et n'apporte donc ni la preuve de l'existence de la procédure en cause, ni a fortiori de la mise en œuvre effective de la clause de respect des prix en accord avec les fournisseurs (premier point).
365. Les entreprises membres du conseil d'administration contestent leur adhésion aux décisions du GIE (second point).
366. Mais sur le premier point, contrairement à ce que soutiennent les parties, plusieurs éléments du dossier montrent que la procédure d'agrément a effectivement été mise en œuvre. En premier lieu, le GIE lui-même écrit, dans un document intitulé "Master Cycle ses partenaires" : "nous avons mis en place un principe d'agrément des fournisseurs consistant à attribuer un agrément différent selon le niveau d'engagement du fournisseur ... Fournisseur master ... Ce fournisseur a une politique de distribution sélective orientée vers les professionnels des deux roues et accorde une grande importance au respect du prix du marché" (cote 3895). Dans la liste de ces fournisseurs, on trouve notamment les sociétés Bicicletas de Alava, Les Créations Jean-Pierre, Hutchinson, Michelin, Intercycles et Time Sport international (paragraphes 72 et 73). En second lieu, le document "Master Cycle et ses partenaires" atteste également de sa mise en œuvre. Contrairement à l'observation du GIE, ce document a été rédigé après la tenue du salon des deux roues et fait le point sur la procédure d'agrément des fournisseurs nouvellement mise en place. Il précise que ces fournisseurs ont été agréés parce qu'ils se sont engagés à faire respecter les prix conseillés. Il est complété par une série de fiches fournisseurs agréés détaillant les conditions commerciales obtenues, notamment des entreprises citées plus haut. Le fait que le dossier présentant la procédure d'agrément soit postérieur au bilan dressé par le GIE vraisemblablement à la fin de 2001 ou au début de 2002 est sans influence sur la preuve de la pratique, dès lors que le dossier décrit une procédure qui a manifestement été utilisée ainsi que l'attestent les fiches des fournisseurs agréés jointes au bilan dressé par le GIE. Le GIE a reconnu l'année suivante que le système a fonctionné en 2002 et perduré en 2003. Le bilan de cette procédure ressort des fiches présentant les partenaires agréés en 2003, à savoir les sociétés Hutchinson, Intercycles, Bicicletas de Alava, Les Créations Jean-Pierre et Time Sport international. Il convient à cet égard de noter que par rapport à l'année 2002 manque la fiche Michelin. Il n'est donc pas exclu qu'en 2003 cette société n'ait pas souhaité continuer à être un partenaire agréé du groupement.
367. Cette nouvelle procédure mise au point en 2002 par les membres du GIE pour le compte des entreprises membres a obligé les fournisseurs et les détaillants à s'entendre sur le prix de vente au détail des produits distribués dans le cadre de ces contrats. Portant sur les prix conseillés, la clause de respect de prix est considérée dans le règlement n°2790-1999 de la Commission du 22 décembre concernant l'application de l'article 81 paragraphe 3 du traité comme une disposition qui n'est pas susceptible de bénéficier d'une exemption automatique, dès lors que, comme indiqué à l'article 4 de ce règlement, elle a pour objet : "la restriction de la capacité de l'acheteur de déterminer son prix de vente".
368. L'absence au dossier d'éléments démontrant que ces clauses de respect des prix ont bien été respectées par les fournisseurs agréés et leurs distributeurs n'a pas d'effet sur la qualification de la pratique en cause, qui constitue une entente verticale anticoncurrentielle par son objet, en vertu de la jurisprudence rappelée aux paragraphes 314 à 317.
369. Sur le second point, il ressort du dossier que la procédure d'agrément des fournisseurs était mise en œuvre par le conseil d'administration du GIE, tant au niveau de l'élaboration des règles que de l'octroi des agréments, et de la surveillance des fournisseurs au cours des réunions du groupement.
370. C'est donc à juste titre que la notification de griefs a retenu la participation du GIE et des entreprises membres du conseil d'administration dans la mise en place de la procédure d'agrément en 2002.
371. Il résulte de ce qui précède que la clause sur l'engagement pour le respect des prix, imposée par le GIE aux fournisseurs agréés, telle qu'elle a été mise en place en 2002 par le GIE Master Cycle et les membres de son conseil d'administration à cette période, à savoir les sociétés Cycles Cesbron, Collard et fils, Cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, les sociétés Cycles Vial, La Cyclerie (Pierre Rossé sport), Sports Cyclistes (cycles Pilorget) et Isly 2000 (Philippe B...) a eu un objet anticoncurrentiel contraire à l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Sur l'adhésion des fournisseurs à cette procédure
Les arguments des parties
372. Les fournisseurs mis en cause contestent s'être engagés sur le respect de prix conseillés. Tous exposent n'avoir pas, en pratique, respecté ce critère d'agrément.
L'appréciation du Conseil
373. Les seuls éléments du dossier attestant la qualité de fournisseur Master s'engageant au respect des prix conseillés sont constitués par des fiches établies par le GIE au nom de chaque fournisseur et jointes en annexe au dossier "Procédure".
374. Ainsi que l'ont indiqué en séance les représentants des sociétés mises en cause et le commissaire du Gouvernement, aucun contrat de distribution mis au point en 2002 ou 2003 signé entre Master Cycle et les fournisseurs agréés, reprenant explicitement la clause sur le respect des prix n'a été versé au dossier. De même, aucun document ne permet d'établir la liste de fournisseurs auxquels un dossier d'agrément aurait été adressé.
375. Il apparaît dans ces conditions que, si cette procédure a bien été mise en œuvre, il n'est pas possible de savoir avec quels fournisseurs et selon quelles modalités elle a été appliquée.
376. Le grief n° 1 n'est pas retenu à l'encontre des fournisseurs.
5. SUR L'ENTENTE VERTICALE ENTRE LA SOCIÉTÉ LOOK ET LE RÉSEAU MASTER CYCLE (GRIEF N° 8)
377. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 133 et 134 qu'une réunion a eu lieu entre les membres du GIE Master Cycle et la société Look, le 1er octobre 2001 et qu'au cours de cette réunion a été évoqué l'arrêt d'approvisionnement en produits Look des sociétés Dutouron et Districycle.
Arguments des parties
378. Pour la société Look, la réunion du 1er octobre n'aurait eu aucun caractère anticoncurrentiel. Elle a profité du salon du mondial des deux-roues pour inviter tous ses distributeurs et faire le point avec eux de l'état d'avancement des demandes d'agrément. En tout état de cause, cette réunion n'aurait pu avoir pour objectif, ni d'empêcher certains revendeurs de distribuer les produits Look, ni de décider d'agréer tel ou tel distributeur puisqu'à cette époque, les agréments Look étaient donnés par la société Alvarez en sa qualité de distributeur unique des produits Look.
379. La société MC2R souligne que cette réunion n'a pas été proposée par le GIE mais par la société Look qui voulait présenter sa politique de distribution pour 2002. Elle fait valoir qu'à cette époque, aucun distributeur membre du GIE Master Cycle n'était agréé par Look et n'avait de relations commerciales avec elle.
380. Dans ces conditions, selon la société, les termes du compte rendu de l'entretien entre Look et le GIE Master cycle n'auraient aucun caractère anticoncurrentiel puisqu'ils relatent l'analyse présentée par Look sur les possibilités d'agrément des magasins et de référencement dans certaines zones géographiques à des détaillants, qui n'étant pas agréés, ne pouvaient pas, à l'instar des sociétés Districycle et Dutouron, distribuer les produits Look.
Appréciation du Conseil
381. A l'époque des faits, aucun membre du GIE Master Cycle n'était un distributeur agréé par la société Look. Dans cette situation, le document qui a fondé le grief peut s'analyser comme l'expression de la position de la société Look à l'égard de distributeurs sans doute désireux d'obtenir l'agrément mais qui étaient alors obligés de passer par la société José Alvarez pour se fournir en produits Look.
382. A supposer même - ce qui n'est pas démontré dans le dossier - qu'en réalité la société Look agréait elle-même ses distributeurs et décidait la distribution de ses produits pourtant confiée en exclusivité à la société José Alvarez, les éléments du dossier ne démontrent ni la portée réelle de la décision évoquée par Look de ne pas livrer Dutouron et Districycle ni le consentement du GIE Master Cycle et ses membres à cette décision.
383. Par ailleurs, s'agissant des zones géographiques dans lesquelles les distributeurs étaient référencés, l'utilisation du conditionnel pour décrire cette répartition à Pau, Saint Gaudens et Angers montre qu'il s'agissait de conditions posées par la société Look pour donner l'agrément à la distribution des produits Look dans ces zones, cette société envisageant de redéfinir sa politique de distribution.
384. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le refus de la société Look Cycle international de livrer les magasins Dutouron et Districycle, mentionné dans le compte rendu de la réunion du 1er octobre 2001, résulte d'une concertation organisée avec le GIE Master Cycle et ses membres. La pratique n'est donc pas établie.
6. SUR L'ENTENTE VERTICALE ENTRE LE GIE MASTER CYCLE ET SON FOURNISSEUR BICICLETAS DE ALAVA (GRIEF N° 17)
385. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 77 à 89 que le GIE Master Cycle est intervenu, par l'intermédiaire de Pierre L..., membre du conseil d'administration du GIE, auprès du fournisseur Bicicletas de Alava (ci après BH), afin que celui-ci arrête d'approvisonner l'enseigne Supersport.
386. Dans un courrier du 7 avril 2001, le secrétaire général du GIE fait part à M. Pierre L... de son "écoeurement vis à vis de BH" qui distribue des produits aux magasins discount Distrisport et des menaces à envisager contre ce fournisseur d'arrêter de distribuer ses produits BH dans les magasins des adhérents du réseau Master Cycle, comme il avait été décidé en 1999/2000. Dès le 13 avril 2001, M. L... écrit au directeur de BH pour le compte du réseau Master Cycle, que les membres du réseau ont été "alertés par certains membres du réseau Master (...) sur le fait que "Supersport" communiquait avec des produits BH d'une part et avec des prix cassés d'autre part(...)". Il ajoutait : "Si vous ne prenez pas les décisions qui s'imposent vis-à-vis de cette distribution, nous pourrions être amenés à remettre en cause notre implication envers BH et dans tous les cas votre capital confiance pourrait rejoindre très rapidement celui de vos concurrents sur le marché français, et vous subiriez comme eux les conséquences immédiates de ces actes". La société BH répondait le 17 mai qu'elle avait exigé l'arrêt des ventes de vélos BH dans tous les points de vente Supersport. Ces pressions auprès de Supersport se sont matérialisées dans un courrier du 21 septembre exigeant l'arrêt de la vente des produits BH dans plusieurs sites de Supersport. A la suite de cette intervention, le GIE constate en octobre 2001, que bien que BH n'ait pas pu arrêter totalement la distribution de ses produits dans l'enseigne Supersport, à cause de la loi, ce fournisseur doit être retenu comme un fournisseur avec lequel "il faut travailler", car il a mis fin, par ses interventions aux "pollutions de prix décalés", faisant "remonter (les) doléances" du réseau Master Cycle et s'engageant à "sélectionner progressivement les Supersport distributeurs de BH jusqu'à disparition complète de la distribution dans cette enseigne". Ce fournisseur privilégie "le réseau traditionnel au réseau multisport et assure "un comité de vigilance par le respect des prix publics". Dès 2002, le chiffre d'affaires de la société BH avec Supersport a été divisé par 6 pour disparaître complètement en 2003 et 2004.
Arguments des parties
387. La société MC2R, qui rappelle que le GIE n'imposait à ses adhérents aucune obligation d'achat, avance d'abord que, n'entretenant pas de relations commerciales avec BH en 2004, les pratiques reprochées ne peuvent concerner que les années 2002 et 2003. Elle soutient que les courriers internes au groupement n'indiquent pas que BH a cessé ses relations commerciales avec Supersport à la demande de Master Cycle. Le grief retenu à cet égard ne se fonderait que sur la baisse du chiffre d'affaires réalisé entre 2000 et 2004 par BH avec les magasins Supersport sans qu'il soit démontré que cette diminution est le résultat d'une action de Master Cycle. Le courrier adressé par un membre du groupement à BH le 13 avril 2001 ne serait pas par ailleurs suffisant, selon la société, pour démontrer l'entente.
388. Il en est de même, selon elle, du courrier adressé le 21 septembre 2001 par BH à Supersport lui demandant d'arrêter de démarcher certains magasins situés dans six villes alors que Master Cycle n'était présent que dans deux d'entre elles. En réalité, la décision de BH de ne pas travailler avec les grandes surfaces mais seulement avec le réseau traditionnel des spécialistes du vélo aurait été prise en 1996 antérieurement à la création du GIE. C'est de sa propre initiative et à titre purement expérimental qu'en 2001, BH aurait confié quelques références à Supersport.
389. De son côté, la société Bicicletas de Alava (BH) indique qu'étant spécialisée dans les produits haut de gamme, elle n'a pas souhaité avoir des relations commerciales avec les grandes surfaces spécialisées mais a privilégié des professionnels du cycle disposant d'un atelier et livrant des vélos parfaitement réglés et montés au consommateur. Néanmoins, elle a, à titre expérimental, noué des relations en 2000 et 2001 avec le magasin Supersport à Chalons. Elle aurait continué à livrer les magasins de cette chaîne en 2002 et 2003 mais en moindre quantité compte tenu de la baisse de leur demande. Elle explique que si elle a cessé de travailler avec cette enseigne, c'est en raison des mauvaises conditions de présentation de ses marques et d'un service insuffisant au consommateur. Cette cessation des relations commerciales ne serait pas le résultat d'une entente avec le GIE Master Cycle, car à la date à laquelle elle est intervenue, BH n'entretenait plus de relations contractuelles avec ce réseau, celles-ci ayant pris fin le 31 décembre 2003.
390. La société BH considère enfin que cette pratique n'est pas susceptible d'être examinée au titre de l'article 81, car la nature et le volume des produits en cause échangés ne sont pas susceptibles d'affecter le courant des échanges entre les Etats membres.
Appréciation du Conseil
Sur la partie du grief relative à l'entente sur les prix dans le réseau Master Cycle
391. Plusieurs éléments du dossier montrent que le groupement Master Cycle était, dès le début de l'année 2001, très préoccupé des prix "cassés" que pratiquait l'enseigne Supersport sur les produits BH dans des zones où étaient installés des détaillants membres du réseau : le courrier interne du GIE en date du 7 avril 2001 (paragraphe 79) "1 seul vélo BH de la gamme 2001 vendu à Supersport et nous romprons nos accords"; la lettre d'un membre du GIE adressée le 13 avril 2001 à BH (paragraphe 80) "nous avons été alertés par certains membres du réseau sur le fait que Supersport communiquait avec des produits BH, d'une part, et avec des prix cassés, d'autre part, et ceci de plus dans des régions où vous avez garanti une distribution sélective et propre"; des notes ou dossiers internes au groupement d'octobre 2001 et d'avril 2002 sur l'intérêt de travailler avec BH (paragraphes 84 et 85) : "Rentabilité d'une marque ... prix du marché égal ou proche du prix conseillé" ou "intérêt de travailler avec ce fournisseur : marge assurée à 2".
392. Toutefois, ces indications ne sont pas suffisamment précises pour permettre de conclure que BH en tant que fournisseur de cycles haut de gamme et les distributeurs du réseau de Master Cycle se sont entendus pour fixer ensemble un prix public conseillé et le faire respecter par les membres du réseau. En effet, aucun indice précis ne permet de dire qu'ils ont ensemble débattu des prix de ce fournisseur. S'il est vrai que le GIE s'est plaint des prix pratiqués par certains magasins Supersport, les données manquent pour affirmer que BH et Master Cycle ont voulu ensemble imposer un prix de vente public dans ces magasins. Les éléments disponibles - à savoir la plainte de certains détaillants de Master Cycle - montrent au contraire que Supersport ne pratiquait pas les prix que le groupement aurait souhaités.
393. Dans ces conditions, il n'est pas établi que la société BH, le GIE Master Cycle et ses membres se sont entendus pour fixer le prix des produits BH vendus dans certaines enseignes Supersport.
Sur la partie du grief relative à la rupture des approvisionnements
394. Les lettres précédemment citées des 7 avril, 13 avril 2001 et 24 octobre 2001 du GIE, des 17 mai et 21 septembre 2001 de BH (paragraphes 79 à 82) montrent d'une part que le GIE a menacé de rompre toute relation commerciale avec BH si celui-ci continuait de livrer certains magasins Supersport, d'autre part que BH a fini par s'exécuter. BH a, en effet, demandé le 21 septembre 2001 à Supersport, d'une part, d'arrêter de vendre la marque dans certains de ses magasins et d'autre part lui a interdit de rétrocéder les produits BH. Dans la lettre du 24 octobre 2001, elle a pris un engagement encore plus précis : celui d'enlever tous les stocks de vélos BH des magasins en cause mais aussi d'arrêter progressivement toute distribution de ses produits chez Supersport.
395. De fait, si en 2000 et 2001, le chiffre d'affaires réalisé par BH chez Supersport a bien prospéré comme le reconnaissent les parties, il a brutalement chuté en 2002 pour être nul en 2003.
396. Les termes de la correspondance ci-dessus citée montrent que BH a répondu dès 2001 à la demande très précise du réseau Master Cycle et que la rupture d'approvisionnement des magasins Supersport ainsi consentie a été amorcée en 2002 pour être totale en 2003.
397. Cette action concertée a limité volontairement le débouché des produits BH dans des magasins directement en concurrence avec ceux du réseau de distribution Master Cycle. Elle a empêché tout approvisionnement de ces magasins sans être justifiée par des raisons objectives et non discriminatoires. En effet, toutes les interventions du GIE Master Cycle relatives à Supersport ont été motivées par sa politique de prix et non par le souci d'assurer la cohérence et la qualité de la distribution des vélos BH. Si l'entente verticale sur les prix eux-mêmes n'est pas démontrée, les propos répétés du GIE sur le maintien des marges qu'autorise une collaboration avec BH ou la vigilance sur le respect des prix publics confirment l'existence d'une concertation anticoncurrentielle motivée par le souci commun d'éviter toute concurrence par les prix, qui a eu pour objet et pour effet d'écarter, sans raison objective, un réseau concurrent de la distribution des produits BH.
398. Dans ces conditions, il apparaît que la société BH, en accord avec le réseau Master Cycle et ses membres qui étaient à la fois encouragés par le groupement à travailler avec BH et informés des démarches accomplies auprès du fournisseur espagnol pour qu'il ne livre pas d'autres réseaux concurrents, a mis en œuvre une entente de nature anticoncurrentielle.
399. La suppression de toute relation commerciale entre BH et le GIE qui semble s'être produite en 2004 laisse subsister la pratique mise en œuvre au cours des années 2002 et 2003.
400. De la même manière que pour les griefs n° 2 et 3, il n'existe pas d'éléments suffisants au dossier démontrant l'accord de chaque entreprise membre du GIE à cette entente. Les représentants du GIE sont intervenus auprès de la société BH au nom du conseil d'administration du GIE et ont rendu compte aux adhérents des résultats de l'action engagée en 2001 et de l'intérêt de travailler avec cette entreprise. Il n'est pas établi que chaque entreprise membre du conseil d'administration a personnellement consenti à l'entente.
401. Le grief n° 17 n'est pas retenu à l'encontre des sociétés Cycles Cesbron, Collard et fils, Cycles Chiasson, l'entreprise en nom personnel Dominique Nicole, les sociétés Cycles Vial, La Cyclerie (Pierre Rossé sport), Sports Cyclistes (cycles Pilorget) et Isly 2000 (Philippe B...), la société Cyclosport Pedegaye, la société Robert et la société Michenon.
402. Seuls la société BH et le GIE Master Cycle ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en s'entendant pour que les magasins de l'enseigne Supersport ne soient pas livrés en produits BH.
403. Le grief n'ayant pas été notifié sur le fondement de l'article 81 du traité CE, il n'y a pas lieu de répondre aux arguments des parties sur l'absence d'affectation sensible du commerce intra-communautaire.
7. SUR LA CONCERTATION ENTRE LES MEMBRES DU RÉSEAU BOUTICYCLES ET SES PARTENAIRES (GRIEFS N° 4-5-6-9).
404. Il a été reproché à des entreprises membres du réseau Bouticycles :
??d'une part, d'avoir mis en place en 2002 et 2003 pour certaines marques de vélo des conditions de vente qui interdisaient aux détaillants du réseau de redistribuer à d'autres magasins des produits sous forme d'échange ou de rétrocession (grief n° 4) ;
??d'autre part, de s'être concertés pour déterminer des coefficients à appliquer pour fixer les prix de vente des adhérents et organiser des actions pour faire respecter cette tarification (grief n° 5) ;
??d'avoir exercé des pressions sur la société Look pour qu'elle cesse de livrer un distributeur concurrent (grief n° 6) ;
??enfin, de s'être concertés avec cette dernière pour empêcher les revendeurs Districycle et Dutouron de commercialiser les produits de marque Look (grief n° 9).
405. Les pratiques en cause constituent des ententes horizontales pour ce qui concerne les griefs n° 5 et 6 relatifs à des échanges d'information entre les membres du réseau Bouticycle. Elles révèlent pour ce qui concerne les griefs n° 4 et 9 des ententes verticales explicites illustrées par des clauses des contrats de distribution et des échanges entre le réseau Bouticycle et un de ses fournisseurs.
7.1. SUR LA CONCERTATION HORIZONTALE À L'INTÉRIEUR DU RÉSEAU SUR LES PRIX ET LES COEFFICIENTS MOYENS DE MARGE DES DÉTAILLANTS (GRIEF N° 5)
406. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 110 à 115, que la menace présentée par la société Districycle à l'encontre des détaillants du réseau Bouticycle est signalée dès novembre 2000 par le directeur commercial de la société Alvarez à la société Hutchinson. L'hebdomadaire du réseau, Tandem Hebdo, distribué à tous les revendeurs du réseau, appelle à la solidarité dans la tenue des prix. Enfin, ce même hebdomadaire publie à destination des adhérents le compte-rendu d'une réunion du conseil supérieur du réseau Bouticycles du 15 mars 2002 (ci-après CSRB). Au cours de cette réunion, a été adoptée "la résolution CSRB1 : En 2005, au plus tard, le coefficient moyen d'un adhérent Bouticycles sera de 2". Cette résolution est développée au cours d'une réunion du CSRB du 6 janvier 2003, annonçant "des actions pour faire respecter des tarifications qui permettent à tout le monde de vivre".
Arguments des parties
Sur la nature des informations échangées
407. En leur qualité de tête du réseau, les sociétés José Alvarez et Nethub font d'abord remarquer qu'en vertu de la jurisprudence constante du Conseil, il est loisible à un groupement de commerçants de diffuser à ses adhérents des informations dès lors qu'elles ne sont pas de nature à influer sur le libre jeu de la concurrence et à remettre en cause la liberté de chaque détaillant de fixer librement ses propres tarifs. Elles rappellent que les prix conseillés ne deviennent illicites que dans des cas très particuliers, lorsque par exemple ils sont accompagnés de pressions directes ou indirectes sur les distributeurs pour leur imposer un prix unifié.
Sur les coefficients figurant dans les conditions de vente
408. Les parties observent, d'une part, que les coefficients incriminés concernent quatre contrats que la société José Alvarez faisait signer non seulement aux adhérents du réseau Bouticycles mais aussi à l'ensemble de ses clients pour la distribution des marques Look, Vitus, GT et BMX, d'autre part, que ce sont des coefficients propres à la société Alvarez qui n'ont fait l'objet d'aucune concertation avec les membres du réseau Bouticycles. De plus, il s'agissait d'un coefficient de marge conseillé en fonction du volume d'achats du client qui est resté ponctuel et n'a pas été accompagné de pressions, de clauses ou d'un système de surveillance obligeant le détaillant à les respecter. Enfin, elles remarquent que ces conditions de vente existaient déjà avant la création de Nethub, les réunions du CSRB, et étaient sans rapport avec le réseau Bouticyles.
Sur l'action du Conseil supérieur du réseau Bouticycles (CSRB)
409. Les sociétés Alvarez et Nethub rappellent que le CSRB était un organe informel sans aucun pouvoir vis-à-vis du réseau Bouticycles et était chargé de conseiller le directoire de Nethub sur la stratégie du groupe, de trancher les litiges entre Nethub et ses adhérents, enfin de veiller au respect de la charte du réseau. C'était un espace de discussion totalement transparent et non de décision ou de contrôle de la politique du réseau Bouticycles. A cet égard, Nethub comme les entreprises adhérentes du réseau Bouticycles n'étaient pas membres du CSRB qui était composé de six personnes élues par les détaillants Bouticycles.
410. Aucun grief ne saurait donc être adressé aux sociétés Alvarez et Nethub qui ne faisaient pas partie du CSRB.
411. A titre superfétatoire, celles-ci indiquent que, contrairement à ce qu'affirme la notification de griefs, la résolution n° 2 du 15 mars 2002 du CSRB relative aux coefficients et aux prix de vente était une simple indication du CSRB à Nethub sur la marge des adhérents donnée à la suite d'une réflexion sur la valorisation des entreprises et sur leur seuil de rentabilité. D'ailleurs, aucun élément du dossier y compris la résolution du 6 janvier 2003, dont José Alvarez reconnaît la formulation maladroite, ne démontre qu'un système de contrôle ou de pression ait été mis en place et à plus forte raison appliqué.
Sur l'absence d'effet de la pratique
412. Les sociétés en cause avancent en premier lieu que la simple communication de coefficients de marge ne pouvait en toute hypothèse influencer la politique des prix des revendeurs Bouticycles dans la mesure où ils sont tous dans des zones de chalandise différentes et qu'ils étaient liés pour les marques concernées par une clause d'exclusivité géographique.
413. En deuxième lieu, elles considèrent que le coefficient 2 était une indication objective et raisonnable donnée par les centres de gestion agréés pour les années 2000 et 2001. Les statistiques de ces organismes professionnels démontraient, qu'en dessous d'un coefficient de marge brute de 1,9 ou 2 sur le prix d'achat des articles, la rentabilité des points de vente était insuffisante pour assurer une rémunération minimale des exploitants.
414. La société Alvarez produit en troisième lieu des tableaux indiquant pour un échantillon représentatif de 40 revendeurs Bouticycles établi pour 2003 et 2004, d'une part, que les coefficients donnés par le CSRB n'ont pas été appliqués par les détaillants qui ont eu des marges inférieures à 1,9, d'autre part, que les valeurs des écarts-type autour des moyennes sont très diverses, aucun d'entre eux n'ayant un coefficient de 2.
415. Ces constatations démontrent selon elle que les détaillants ont fixé librement leur politique tarifaire, l'intervention du CSRB pour communiquer des coefficients moyens statistiquement observés ayant pour seul objet d'assurer la pérennité de revendeurs traditionnels face à la politique agressive des discounters. Elle note à cet égard qu'aucun relevé de prix ne démontre que les marges conseillées ont été appliquées pour déterminer les prix de vente aux consommateurs.
416. Les entreprises en cause observent enfin que, à supposer même que ces pratiques aient eu une influence sur la politique des prix des revendeurs, elles ne pouvaient avoir pour effet de limiter l'exercice de la concurrence entre les détaillants du réseau dans la mesure où les contrats les liant à la société Alvarez contenaient une clause d'exclusivité géographique et que la grande majorité des détaillants Bouticycles n'étaient pas par définition dans les mêmes zones de chalandise.
Appréciation du Conseil
417. La question qui se pose est de savoir si les membres du réseau Bouticycle se sont réunis et si leurs échanges intervenus dans le cadre du CSRB ont engagé tous les partenaires du réseau, ont porté sur les prix de vente des produits au consommateur et ont été accompagnés de la mise en œuvre d'actions, en particulier de consignes ou de pressions en vue de leur application par les détaillants membres du réseau.
Sur les réunions des membres du réseau Bouticycle
418. Il a été démontré que les détaillants du réseau se sont réunis en décembre 2000 à Brest (paragraphes 110 et 111). Au cours de cette réunion, a été discutée la question des prix discount de certaines marques pratiqués par les magasins Districycle. De même, le conseil supérieur du réseau Bouticycle (CSRB) s'est réuni en mars 2002 sur le problème des coefficients à appliquer pour calculer les prix de vente des revendeurs. Ce sujet a fait l'objet d'une résolution formelle qui a été confirmée lors de réunions ultérieures de cette instance tenues en janvier 2003 en vue de prendre des mesures pour faire respecter les tarifications et en février 2004 pour lancer des actions à l'encontre de la société Dutouron (paragraphe 117).
419. Les membres du réseau Bouticycle qui ont participé aux réunions du CSRB en 2002, 2003, 2004 ont discuté des prix constatés dans les enseignes concurrentes et débattu des mesures à prendre pour mettre fin à ce que les détaillants du réseau considéraient comme un bradage des produits qu'ils vendaient dans leurs boutiques.
Sur l'implication des sociétés Alvarez et Nethub dans le CSRB
420. Il n'est pas possible d'admettre que les sociétés Alvarez et Nethub n'ont eu aucune part dans les résolutions du CSRB au motif que celui-ci était composé de personnes physiques siégeant à titre individuel et non en tant que représentant leurs sociétés.
421. Comme indiqué aux paragraphes 90 à 98, les détaillants du réseau Bouticycles sont intégrés dans la société Nethub qui définit la stratégie et anime le réseau. Ils sont tous actionnaires de la société Nethub. Celle-ci en tant que holding contrôle avec une participation de 100 % sa filiale, la société Alvarez, qui fabrique, distribue, gère les stocks et les achats pour le compte des détaillants du réseau. Le CSRB assure la liaison entre les divers acteurs du réseau. A ce titre, il n'est pas seulement composé des adhérents élus par les détaillants du réseau mais aussi des responsables des sociétés Alvarez et Nethub qui en contrôlent le fonctionnement.
422. Dans ces conditions, les décisions ou résolutions du CSRB sont opposables à l'ensemble des membres du réseau. Car, si formellement ce conseil n'a qu'un rôle consultatif, il est élu à l'occasion de l'assemblée générale de Nethub dont chaque détaillant est actionnaire. Il donne son avis sur les adhésions et démissions au sein du réseau Bouticycle. Il est en outre composé de tous les responsables qui à l'intérieur du groupe Nethub ont le pouvoir de décision et discutent en permanence de la stratégie du groupe avec des représentants élus des détaillants.
423. L'indication portée sur le compte rendu de la réunion de ce conseil du 15 mars 2002 publié dans le journal de Bouticycles Tandem Hebdo de mai 2002 selon laquelle : "les résolutions sont déjà mises en place" (cote 9480) est significative du réel pouvoir du CSRB.
424. Dans ce journal adressé à tous les membres et aux fournisseurs du réseau, les consignes et actions à mener sont clairement décrites et ne sont pas, contrairement aux allégations des entreprises, le reflet d'une libre expression individuelle de quelques adhérents. A cet égard, le compte rendu de la réunion du 6 janvier 2003 (paragraphe 114), paru dans cette publication, illustre à la fois l'objet anticoncurrentiel des réunions du CSRB et l'implication personnelle des dirigeants du réseau- en l'espèce M. W... - qui, en sa qualité de président directeur général des sociétés Nethub et Alvarez, participait aux séances du CSRB.
Sur la nature des coefficients proposés par le CSRB
425. Dans son avis n° 94-D-42 relatif au transport routier de voyageurs dans le département du Haut-Rhin, le Conseil de la concurrence a considéré que : "S'il est loisible à un syndicat professionnel ou à un groupement professionnel de diffuser des informations destinées à aider ses membres dans la gestion de leur entreprise, l'aide ainsi apportée ne doit pas exercer d'influence directe ou indirecte sur le libre jeu de la concurrence à l'intérieur de la profession, en particulier les indications données ne doivent pas avoir pour objet ou pouvoir avoir pour effet de détourner les entreprises d'une appréhension directe de leurs propres coûts qui leur permette de déterminer individuellement leurs prix".
426. Or, en l'espèce, les résolutions du CSRB sur les coefficients à appliquer par les détaillants ne sont pas le simple reflet de la communication d'informations statistiques disponibles ailleurs mais le fruit d'une stratégie concertée au niveau de ce comité.
427. En effet, les informations données par les parties en cause, elles-mêmes relatives aux statistiques comptables de l'Union des centres de gestion agréés, montrent que s'agissant de l'activité cycles vente et réparation, le coefficient de marge nette variait de 1,7 à 2 selon l'importance du chiffre d'affaires réalisé. Si, compte tenu de leur taux de marge brute en 2003, le coefficient moyen de marge des 40 détaillants Bouticycles se situait autour de 1,7, il était effectivement tentant pour le réseau Bouticycles de se fixer pour objectif un redressement de ce taux pour tendre vers un coefficient de 2.
428. La réalisation pouvait certes passer par une action de relèvement des prix de vente qui n'aurait pas présenté un caractère anticoncurrentiel si elle avait été mise en œuvre par chaque détaillant de manière autonome dans le cadre de la libre gestion de son entreprise.
429. Or tel n'a pas été le cas en l'espèce. Il apparaît en effet qu'à travers les résolutions du conseil supérieur de Bouticycles, les membres du CSRB ne se sont pas seulement bornés à diffuser des informations statistiques sur les taux de marge de la profession que les détaillants membres de centres de gestion agréés connaissaient déjà. Ils ont clairement fixé un objectif : celui d'atteindre en 2005 le coefficient de 2. La présence dans le compte rendu de la réunion du CSRB du 15 mars 2002 (paragraphe 113) des mots "Débats" et "Résolution" montre que les échanges intervenus ont eu pour but de s'entendre sur un taux de marge moyen à respecter par tous les adhérents, taux devant s'appliquer au prix d'achat hors taxe des produits pour obtenir un prix de vente commun à l'ensemble des adhérents Bouticycles.
430. La preuve est également rapportée dans le dossier que ces objectifs ont été accompagnés d'initiatives mises en place pour en assurer la surveillance et le respect. Tel est le sens de la délibération du CSRB du 6 janvier 2003 qui a précisé, d'une part, que des actions seraient lancées pour faire respecter les tarifications et, a mis en garde d'autre part les détaillants contre les remises excessives susceptibles de compromettre l'alignement des prix voulu par le CSRB (paragraphe 114).
431. La présence de ce coefficient dans certains contrats de fourniture de la société Alvarez des vélos Vitus, GT, BMX et de certains produits Look pour la saison 2002-2003 prouve l'action menée en ce sens depuis 2002 et au moins depuis la réunion du CSRB du 21 mai 2002 (paragraphe 113) au cours de laquelle la décision a été prise d'agir pour que tous les adhérents de Bouticycles aient un coefficient de 2 au plus tard en 2005.
432. Ainsi la concertation sur les prix à l'intérieur du réseau a porté sur les prix de vente à faire respecter par les détaillants pour qu'au final, ceux-ci obtiennent des taux de marge conformes à l'objectif défini en commun. A cette occasion, ont été envisagées des actions pour obtenir le résultat recherché. L'objet anticoncurrentiel de cette pratique est établi.
Sur les effets de cette pratique
433. Il n'est pas démontré que les prix de vente fixés par les détaillants à partir du coefficient de marge conseillé ont été appliqués à tous les produits vendus dans le réseau Bouticycles.
434. Toutefois, figurent dans le dossier des contrats de commande portant sur les accessoires Look et BMX, les vélos Vitus, GT et BMX montrant que le réseau s'est efforcé de mettre en œuvre le coefficient pour des produits couramment vendus dans les magasins Bouticycles. En effet, sur les contrats type de ces produits pour la campagne 2002/2003 (paragraphes 101 à 105) était indiqué, avec le taux de remise obtenu du fournisseur, le coefficient à appliquer par les détaillants au prix d'achat pour obtenir un prix de vente aligné pour tous les magasins.
435. Cette recommandation, confirmée et étendue dans le cadre des discussions menées au sein du CSRB a donc pu avoir une influence directe sur la fixation des prix dans le réseau Bouticycles. Elle a conduit des entreprises intervenant à des stades différents du circuit de distribution à limiter la liberté des revendeurs dans la fixation de leurs prix. Une telle pratique a conduit à fixer des prix à un niveau nécessairement plus élevé que celui qui aurait résulté des décisions prises de manière autonome par chaque détaillant.
436. Enfin, il convient de rappeler qu'ainsi qu'il est rappelé au paragraphe 318, la démonstration des effets réels n'est pas nécessaire à la qualification de la pratique.
Sur l'implication des détaillants membres du CSRB à la commission des pratiques
437. Il convient de ne retenir le grief qu'à l'encontre des entreprises qui ont participé aux réunions à objet anticoncurrentiel et qui ont réitéré leur comportement en s'associant aux décisions du groupement, à savoir les sociétés membres du CSRB Nethub, Alvarez, Sport Tilly, Sofretin et Revaxion.
438. Le grief ayant été notifié à toutes les entreprises membres du CSRB en 2002 et 2003 et les pratiques en cause ayant été décidées au cours des réunions du 15 mars 2002 et du 6 janvier 2003 intervenues avant le renouvellement de cette instance au début de l'année 2003, il convient de ne pas retenir les sociétés Vélo Plus, Toinet et Ryder France qui n'étaient pas membres du CSRB en 2002 et n'ont pas participé à la réunion du 6 janvier 2003.
439. Dans ces conditions, il est établi que les sociétés Nethub et Alvarez ainsi que les entreprises membres du CSRB en 2002, à savoir les sociétés Sport Tilly, Sofretin et Revaxion ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en se concertant pour fixer le coefficient à appliquer à leur prix d'achat afin d'atteindre le taux de marge décidé en commun.
7.2. SUR LA CONCERTATION HORIZONTALE ENTRE LES MEMBRES DU RÉSEAU BOUTICYCLES POUR EMPÊCHER LES LIVRAISONS DE PRODUITS LOOK À LA SOCIÉTÉ DUTOURON (GRIEF N° 6)
Arguments des parties
440. La société Nethub prétend que la concertation avec le fournisseur pour le contraindre à ne pas livrer un tiers, retenue à sa charge n'est pas caractérisée. S'il est vrai que les relations avec la société Look ont été mises à l'ordre du jour de la réunion du 2 février 2004 du CSRB, c'est Mme 3..., gérante de la société Bouticycles toulousain qui en a pris l'initiative. Les autres membres du conseil n'ont donné aucune suite à cette demande et n'ont envisagé aucune action concertée contre la société Look. Ensuite, le courrier de Mme 3..., adressé à Look sur le papier à en-tête de son entreprise, est dû à l'initiative personnelle de cette dernière qui n'a pas reçu l'accord du CSRB et qui, d'ailleurs, ne menaçait pas Look de boycott mais lui demandait des explications sur son attitude. La société Nethub souligne encore que le mécontentement de Mme 3... n'était pas illégitime. En effet, en qualité de fabricant de cycles de moyen et haut de gamme, aux caractéristiques techniques particulières, la société Look, sans aller toutefois jusqu'à imposer des critères stricts propres aux contrats de distribution sélective, demandait cependant aux détaillants du réseau un haut niveau de service après-vente, d'entretien et de conseil, très contraignant en terme de stockage et donc de coût de gestion des pièces détachées, alors qu'au même moment elle livrait ces mêmes pièces à des sociétés de vente par correspondance comme la société Serge Dutouron affranchies de tout service lié à la commercialisation des produits.
Appréciation du Conseil
Sur la concertation entre les membres du CSRB
441. Aucun élément du dossier ne permet de démontrer que la décision de boycotter la société Look a été prise par le CSRB et relayée par lui auprès des membres du réseau.
442. En effet, ne figurent au dossier que des courriers émanant de Madame 3..., membre du CSRB, et membre de la "commission vélos" (paragraphes 116 et suiv.) : une lettre datée du 26 janvier 2004 appelant les membres du réseau à réagir face à la politique commerciale de Look qui, en approvisionnant Dutouron, permet que ses produits soient bradés ; une lettre annonçant à ceux-ci que le problème Look sera évoqué lors de la réunion du CSRB du 2 février 2004. Ces documents ainsi que la déclaration du 12 mars 2004 de Mme 3... (paragraphe 120), confirmée par ses propos en séance, montrent qu'elle a pris l'initiative de mettre la question de la concurrence déloyale de la société Dutouron à l'ordre du jour du CSRB. Mais aucune résolution formelle n'ayant été adoptée ce jour là, la preuve que les membres du CRSB ayant assisté à cette réunion ont adhéré à la proposition de Mme 3... n'est pas rapportée, même si deux déclarations de distributeurs, Dutouron et Helge Sport (paragraphes 122 et 123) font état d'un relatif succès de l'exhortation de Mme 3... auprès des adhérents du réseau (paragraphe 146). Au surplus, ainsi que l'a déclaré Mme 3..., trois membres sur six de cette instance ont refusé de prendre partie pour faire pression sur la société Look.
443. En l'absence d'indices démontrant l'accord de volonté des entreprises membres du CSRB en 2004, la pratique n'est pas établie, l'attitude de Mme 3... ne pouvant, à elle seule, constituer une entente.
Sur l'application de ces consignes
444. La société Dutouron, directement concernée par le refus de livraison, fait valoir pour démontrer cette application un fax adressé par Mme 3... le 6 février 2004 (paragraphe 119) demandant aux membres du CSRB d'agir auprès de certains fournisseurs comme Look afin qu'ils refusent de le livrer. Aucun élément ne vient étayer sa mise en œuvre.
445. Il en est de même de la déclaration d'un autre adhérent de Bouticycles, exploitant d'un commerce de détail de cycles à Arras, évoquant un fax adressé aux 130 magasins par un responsable de la commission vélo du réseau (paragraphe 123). Le texte de ce fax, sans doute celui déjà produit par la société Dutouron, n'a pas été recueilli par l'enquêteur et ne figure pas au dossier.
446. Ces éléments ne peuvent rapporter la preuve de l'application par la société Look des demandes de Mme 3....
447. Dans ces conditions, il n'est pas démontré d'entente anticoncurrentielle entre Mme 3... et la Société Look.
7.3. SUR L'ENTENTE VERTICALE MISE EN OEUVRE ENTRE LE RÉSEAU BOUTICYCLES ET LA SOCIÉTÉ LOOK (GRIEF N° 9)
448. Il a été reproché à la société Look, ainsi qu'à des entreprises adhérentes au réseau Bouticycles et membres du CSRB en 2004 de s'être concertées pour empêcher les revendeurs Serge Dutouron et Districycle de distribuer les produits Look (grief n° 9).
Arguments des parties
449. Les sociétés Nethub et Alvarez, pour le compte du réseau Bouticycles, avancent que ce grief fait double emploi avec le grief n° 6 sur l'entente interne au réseau Bouticycles. Leurs arguments de défense sont donc identiques.
450. La société Look estime que les éléments de l'enquête et de l'instruction ne permettent pas d'apporter la preuve de la concertation, entre Look et le réseau Bouticycles pour empêcher Districycle de commercialiser les produits Look car elle n'est étayée que par la seule déclaration du président directeur général de Districycle, dont les éléments évoquent l'attitude du distributeur Alvarez, mais non celle de la société Look. La concertation pour empêcher la société Serge Dutouron de vendre ces mêmes produits ne serait pas, en deuxième lieu, davantage démontrée, la déclaration de M. Serge 15... en date du 10 décembre 2003 visant la société Alvarez et non Look.
451. La société Look fait valoir qu'elle s'est trouvée devant un véritable dilemme. Le réseau Bouticycles menaçait de boycotter ses produits alors qu'elle ne pouvait rien faire contre la société Dutouron qui s'approvisionnnait en produits Look en Italie. Elle indique avoir toutefois essayé de faire preuve de compréhension à l'égard de Bouticycles en montrant qu'elle allait dans le sens de ses demandes. La lettre de février 2004 (paragraphe 141) participe, selon elle, de cette démarche d'apaisement en direction des détaillants. En toute hypothèse, elle n'aurait jamais reçu la moindre application. D'ailleurs, à supposer qu'elle ait eu cette intention, elle n'avait pas les moyens de l'appliquer. C'était en effet la société Alvarez qui en tant que distributeur indépendant livrait Dutouron en produits Look. Look ne pouvait davantage agir auprès du revendeur italien auprès duquel s'approvisionnait la société Dutouron avec lequel Look n'avait aucune relation commerciale. Elle remarque enfin que la société Dutouron n'a jamais cessé de vendre sur Internet des produits Look, en particulier 600 cadres de vélo en 2003-2004.
Appréciation du Conseil
452. Les déclarations des sociétés Districycle et Dutouron en date des 8 octobre et 10 décembre 2003 (paragraphes 135 et 136) font état de refus par la société Alvarez de leur vendre des cadres de marque Look fin 2003, antérieurement à la campagne déclenchée par Madame 3... début 2004. Elles ne peuvent donc servir à étayer l'existence d'une entente entre la société Alvarez et la société Look.
453. Aucun élément ne vient par ailleurs démontrer l'existence d'une entente entre Look et des autres membres du réseau auxquels a été notifié le grief, pour empêcher la livraison à des entreprises concurrentes, de produits Look.
454. Si la société Look s'est opposée à toute relation commerciale de ses revendeurs en France et à l'étranger avec la société Dutouron et a même été jusqu'à proposer d'exclure les revendeurs étrangers qui n'avaient pas respecté ses consignes en remontant la filière d'approvisionnement grâce à la numérotation de ses cadres, ces pratiques résultent de pressions de distributeurs non identifiés dans le présent dossier.
455. Par ailleurs, le fait que la société Serge Dutouron ne commercialisait plus en 2005 sur Internet les produits Look de la gamme 2005 ne peut être avancé pour démontrer que les pratiques de Look ont été suivies d'effet dans la mesure où la société Look a agréé la société Dutouron dans son réseau de distribution sélective mis en place en 2005 et que l'article 5-1 du contrat de distribution disposait : "Il est interdit au détaillant agréé de vendre les produits contractuels sur Internet ou par correspondance sur catalogue, dans la mesure où l'une des causes essentielles et déterminantes de la mise en place d'un réseau de distribution sélective par Look est que la vente des produits contractuels doit être faite avec des services de conseil, de démonstration, de montage et d'après-vente rendus par des personnes formées et qualifiées" (cote 13309).
456. Il résulte de ce qui précède que la pratique d'entente n'est pas établie.
8. SUR L'INTERDICTION DE LA RÉTROCESSION DE CERTAINS PRODUITS DANS LE CONTRAT D'ADHÉSION AU RÉSEAU BOUTICYCLES (GRIEF N° 4)
457. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 106 à 109 que pour adhérer au réseau Bouticycles les détaillants devaient s'approvisionner auprès de la société Alvarez, à raison de 70 % des achats, avec la restriction suivante : les produits achetés à cette société ne pouvaient être revendus par les membres du réseau sous forme de "rétrocessions ou d'échange à d'autres magasins".
Arguments des parties
Sur l'implication du réseau Bouticycles dans la pratique en cause
458. La société Nethub, en tant qu'animatrice du réseau Bouticycles, estime qu'elle n'est pas concernée par les clauses incriminées, d'une part, parce qu'elles concernent les contrats que la société Alvarez faisait signer à ses clients distribuant les produits des marques Vitus, GT ou BMX qu'ils soient ou non adhérents du réseau Bouticycles, d'autre part, du fait qu'aucun élément du dossier ne démontre qu'elle a participé à leur élaboration.
459. Par ailleurs, les sociétés Cycles Tilly, Ryder France, Revaxion, 2F2G, Sofretin, Toinet et Vélo plus, appartenant au réseau Bouticycles, font valoir que leurs responsables étaient en 2002 membres du CSRB à titre personnel et non en tant que représentants de leur entreprise. Elles ne peuvent donc être accusées d'avoir concouru à l'élaboration des clauses incriminées dont il n'est au demeurant nullement démontré qu'elles ont été rédigées par le CSRB et imposées aux membres du réseau Bouticyle.
Sur la justification technique de ces clauses
460. La société Alvarez pour sa part, tout en reconnaissant l'existence de ces conditions, considère qu'elles étaient justifiées par le souci de s'assurer que les cycles vendus respectaient les normes de sécurité prévues par le décret n° 95-937 du 24 août 1995 relatif à la prévention des risques résultant de l'usage des bicyclettes. L'existence de ces clauses interdisant la rétrocession répondait, selon elle, en fait au double objectif, d'une part, de s'assurer que les produits ne soient pas livrés à des revendeurs tiers qui ne seraient pas sous contrat avec la société José Alvarez, d'autre part, s'agissant de produits livrés partiellement montés aux détaillants, de veiller à ce que ceux-ci ne montent pas des cycles avec des pièces détachées rétrocédées ou échangées qui ne soient pas conformes aux éléments constitutifs du modèle homologué.
461. Selon les dispositions de l'article 7 du décret précité, les distributeurs doivent notamment veiller à monter le cycle "conformément aux règles de l'art" et à vendre des bicyclettes "entièrement réglées". C'est la raison, indique la société Alvarez, pour laquelle ces clauses, relatives à des produits dont Alvarez assurait la distribution exclusive, étaient insérées uniquement dans les contrats des produits techniques, à savoir les cycles de moyenne et haut de gamme Vitus, GT et BMX. Ces contrats s'appliquaient aussi aux clients non adhérents au réseau Bouticycles qui pouvaient représenter jusqu'à 80 % du volume des produits en cause. Ils visaient donc un réseau non sélectif de distributeurs et ne concernaient pas de façon spécifique le réseau Bouticycles. En conséquence, ces clauses interdisant la rétrocession à des tiers à un réseau seraient parfaitement licites tant au regard de la jurisprudence nationale que communautaire.
Sur l'absence d'effet sur la concurrence
462. La société José Alvarez observe que les produits en cause n'étant vendus qu'en France et selon un même barème tarifaire appliqué à tous ses détaillants, l'interdiction de leur rétrocession ne pouvait avoir aucune influence sur les importations parallèles.
463. D'ailleurs, compte tenu du faible écart des remises entre les détaillants du réseau, ceux-ci n'avaient aucun intérêt à pratiquer la rétrocession sauf à se transformer en grossiste achetant en très grande quantité pour bénéficier de remises plus importantes. Dans ces conditions, la rétrocession ne pouvait être que très marginale.
464. Enfin, la société Alvarez indique que les achats de chacune des trois marques par les détaillants Bouticycles ne dépassaient pas 25 000 euro par an.
Sur les engagements de la société Alvarez
465. Les sociétés en cause demandent, en toute hypothèse, au Conseil de tenir compte, comme il l'a déjà fait dans plusieurs décisions, du retrait spontané par la société José Alvarez des clauses incriminées dans les nouveaux contrats Vitus, GT et BMX ainsi que leur suppression, par avenant signé par tous les revendeurs agréés, dans tous les contrats en cours.
Appréciation du Conseil
Sur l'implication du réseau Bouticycles dans la mise en place de ces clauses
466. Si la société Alvarez, qui construit des cycles et joue le rôle de grossiste en composants et accessoires pour cycles, est un distributeur exclusif des produits Vitus, GT et BMX, les relations commerciales qu'elle entretient avec les membres du réseau Bouticycles s'effectuent, pour les détaillants, dans le cadre d'une distribution organisée par le groupe Nethub auquel elle appartient.
467. Contrairement à ce que prétendent les sociétés Nethub et Alvarez, les clauses d'interdiction de rétrocession pour les produits en cause font partie intégrante du contrat d'adhésion qui lie tous les membres du réseau Bouticycles, au cours de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 août 2003.
468. En effet, les conditions de vente de ces produits figurent à l'annexe 4 du contrat d'adhésion Bouticycles qui, signé entre Nethub et chaque adhérent, précise les marques en distribution exclusive chez José Alvarez (cotes 488 à 507). Au paragraphe relatif aux obligations souscrites par chaque détaillant du réseau, le contrat d'adhésion indique : "l'adhérent s'engage sur tous les contrats de marques distribuées en exclusivité chez José Alvarez SA aux conditions particulières qui lui sont notifiées (voir les contrats de marques en annexe 4)" (cote 492). Or, parmi les conditions particulières notifiées pour les produits en cause, figurait l'interdiction de toute rétrocession.
469. Au sein du CSRB étaient débattues avec les responsables des société Néthub et Alvarez les questions qui intéressaient tous les détaillants, particulièrement des conditions de distribution des produits. Les entreprises membres du CSRB en 2002 ont donc nécessairement donné leur accord à l'interdiction de toute rétrocession qui était un élément essentiel du contrat d'adhésion du réseau Bouticycles.
Sur les clauses interdisant la rétrocession
470. L'interdiction de revente faite à d'autres distributeurs du réseau ou hors réseau est considérée par le règlement d'exemption CE 2790-99 comme une clause non susceptible de bénéficier de l'exemption automatique prévue à l'article 2 de ce règlement car elle restreint par sa nature même la clientèle à laquelle l'acheteur peut vendre des biens et services contractuels. L'article 4-b de ce règlement admet seulement quelques exceptions à cette interdiction générale, notamment pour les ventes par les membres d'un système de distribution sélective aux distributeurs non agréés.
471. Or, il n'est pas établi que les contrats de José Alvarez concernant les produits BMX, GT et Vitus (paragraphes 100 à 105) étaient des contrats de distribution sélective, dès lors que d'autres détaillants non membres du réseau Bouticycles vendaient également ces produits dont la société Alvarez avait la distribution exclusive. Les clauses incriminées s'appliquaient en réalité indifféremment à tous ses clients.
472. Ainsi qu'il est rappelé au paragraphe 318 de la décision, il n'est pas nécessaire de démontrer les effets de ces pratiques.
473. Si par ailleurs, en l'absence de tout élément dans le dossier relatif à leur application, il n'est pas exclu, qu'en insérant ces clauses, la société Alvarez a entendu s'assurer que ses revendeurs exclusifs ne fournissent pas en pièces détachées des revendeurs tiers sans contrat et a été animée par le souci de mettre sur le marché des produits conformes aux normes de sécurité légalement applicables, elle aurait dû recourir à un système de distribution sélective pour répondre à ces problèmes de sécurité, avec la réserve qu'il lui aurait été interdit de prohiber les échanges au sein du réseau.
474. Le Conseil prend acte de la suppression de ces clauses par les sociétés Alvarez et Nethub de tous les contrats en cours et nouveaux.
475. En conséquence, il est reproché aux sociétés Nethub et José Alvarez et aux sociétés Cycles et Sports Tilly, Sofretin et Revaxion membres du CSRB en 2002, d'avoir enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en insérant dans les contrats portant sur les produits BMX, GT et Vitus une clause d'interdiction de toute rétrocession.
C. LES CLAUSES D'INTERDICTION DE RÉTROCESSION DANS LES CONTRATS DE DISTRIBUTION DE LA SOCIÉTÉ LOOK (GRIEF N° 7)
476. Il a été reproché à la société Look, d'avoir introduit dans ses contrats de distribution des clauses interdisant la rétrocession de ses produits à d'autres magasins (grief n° 7).
Arguments de la société Look
477. La société Look estime que les dispositions communautaires du règlement n° 2790-1999 sur lesquelles est fondé le grief notifié ne peuvent s'appliquer en l'espèce, car les contrats signés jusqu'au 1er juillet 2004 par la société Look avec les détaillants ne sont pas des contrats de distribution sélective mais des contrats d'agréation dont l'objet essentiel était de fidéliser les détaillants en leur accordant des ristournes proportionnelles au volume de leurs ventes. La clause incriminée n'avait pas pour objectif de limiter la concurrence mais de faire correspondre le niveau de remise au chiffre d'affaires effectivement réalisé par le détaillant. Elle estime que cette clause n'a pas découragé les dépannages entre détaillants, qui étaient acceptés et même encouragés en cas d'afflux de commande, Look n'ayant dénoncé aucun contrat au motif qu'elle n'aurait pas été respectée.
478. Néanmoins, la société a indiqué qu'elle s'engageait à retirer de tous ses contrats de distribution les clauses interdisant la rétrocession.
Appréciation du Conseil
479. Comme indiqué au paragraphe 470, l'interdiction de revente faite à d'autres distributeurs est considérée par le règlement d'exemption CE 2790-99 comme une clause non susceptible de bénéficier de l'exemption automatique prévue à l'article 2 de ce règlement car elle restreint par sa nature même la clientèle à laquelle l'acheteur peut vendre des biens et services contractuels. L'article 4-b de ce règlement admet seulement quelques exceptions à cette interdiction générale, notamment pour les ventes par les membres d'un système de distribution sélective aux distributeurs non agréés.
480. En l'espèce, les contrats Look D2, D1 et Corner (paragraphes 127 à 130) ne sont pas des contrats de distribution sélective au sens où le règlement communautaire précité le définit, à savoir comme "un système de distribution dans lequel le fournisseur s'engage à vendre les biens ou les services contractuels, directement ou indirectement, uniquement à des distributeurs sélectionnés sur la base de critères définis, et dans lequel ces distributeurs s'engagent à ne pas vendre ces biens ou ces services à des distributeurs non agréés".
481. Dans ces conditions, cette clause a un objet anticoncurrentiel et ne peut être justifiée par le souci de faire correspondre le niveau des remises au chiffre des achats effectivement réalisés pour son compte par le détaillant. La circonstance que la société Look ait appliqué cette clause avec un certain laxisme et n'ait pas en pratique interdit la vente de ses produits à d'autres distributeurs non agréés, est indifférente à la qualification des faits, ainsi qu'il est rappelé au paragraphe 318 de la décision.
482. Il résulte de ces éléments que la présence de ces clauses dans certains contrats de distribution de la société Look Cycle international est une pratique anticoncurrentielle contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
D. SUR LES ENTENTES VERTICALES ENTRE LA SOCIÉTÉ HUTCHINSON ET SES PARTENAIRES DANS LA COMMERCIALISATION DES PRODUITS HUTCHINSON (GRIEFS N° 12, 13, 14 ET 15)
483. Il a été reproché à la société Hutchinson d'avoir organisé avec ses divers partenaires commerciaux des ententes verticales pour fixer les prix de vente au détail des produits fournis par elle.
484. Des griefs ont été notifiés :
??à la société Hutchinson pour s'être concertée avec ses distributeurs en 2000 et 2003 afin de faire appliquer les prix de détail fixés par elle (grief n° 12) ;
??à la société Hutchinson et au groupement Master Cycle pour s'être concertés entre 2001 et 2003 afin de faire respecter par les distributeurs concurrents les prix conseillés par la société Hutchinson (grief n° 13) ;
??à la société Hutchinson d'une part et aux sociétés Auchan et Décathlon de l'autre pour s'être entendues entre 2000 et 2002 afin de fixer le prix de vente au détail des produits Hutchinson (griefs n° 14 et 15).
1. SUR LA DÉFINITION DU MARCHÉ ET LES PRATIQUES REPROCHÉES EN GÉNÉRAL
485. La société Hutchinson conteste la conclusion générale selon laquelle "des fournisseurs (producteurs, importateurs, grossistes) et des distributeurs (indépendants ou en groupement) se sont concertés afin que les prix de vente au détail ne soient pas inférieurs à ces prix conseillés". Elle estime que l'imprécision dans la définition des marchés concernés et notamment de celui des pneumatiques pour cycles a conduit à une trop grande généralisation des pratiques reprochées et ne met pas le Conseil en mesure d'apprécier le comportement individuel de chaque entreprise au regard des éléments du dossier qui lui sont propres, de sa situation personnelle et de son environnement concurrentiel alors que cette analyse individuelle est un préalable indispensable à la qualification des pratiques.
486. Mais, en l'espèce, n'a pas été notifié aux entreprises en cause un grief d'entente générale mais 26 griefs analysant, d'une part, leur comportement à l'intérieur de deux réseaux de distribution, d'autre part, les relations entre les fournisseurs, les grossistes et les distributeurs indépendants ou regroupés dans des réseaux de distribution. Chacun de ces griefs repose sur des éléments de fait retenus à l'égard de chaque entreprise figurant au dossier et qu'il appartient au Conseil d'apprécier.
2. SUR L'ENTENTE VERTICALE ENTRE LA SOCIÉTÉ HUTCHINSON ET SES DISTRIBUTEURS SPÉCIALISÉS (GRIEFS N° 12 ET 13)
Arguments de la société Hutchinson
Concernant la concertation sur les prix avec le réseau Districycle et le groupement Master Cycle
487. La société Hutchinson fait valoir qu'aucun des critères requis par la jurisprudence pour démontrer une entente verticale sur les prix n'est rempli. Même s'il existe une certaine surveillance des prix par Hutchinson, le respect des prix Hutchinson par ses distributeurs ne serait pas démontré.
488. La société fait valoir que le tableau intitulé "prix en euro TTC saison hiver 2003" du rapport administratif, page 81, ne présente les prix que de deux produits présentés dans huit points de vente. Sur un total de 9 références seul le prix de 4 d'entre elles correspond au prix conseillé par Hutchinson, les 5 autres prix, soit la majorité, étant différents.
489. Enfin, il existe dans le dossier des déclarations de la société Hutchinson montrant que les prix de vente des distributeurs, notamment Districycle, sont en dessous de ses prix conseillés. Les courriers adressés à Districycle le 7 juin 2001 et reçus du groupement Master Cycle le 12 septembre 2002 et le 3 mai 2003 attestent de cette réalité.
Appréciation du Conseil
Sur la concertation d'Hutchinson et de ses distributeurs sur les prix de vente au détail (grief n° 12)
490. Dans sa jurisprudence traditionnelle en matière d'entente verticale entre fournisseurs et distributeurs rappelée au paragraphe 323, le Conseil de la concurrence considère que pour caractériser une entente sur des prix minima, il convient de réunir les indices suivants :
??la constatation tout d'abord que les prix de vente au détail ont été évoqués au cours des négociations commerciales entre ces partenaires ;
??l'application effective de ces prix par les distributeurs qui révèle l'existence de l'accord de volonté ;
??la mise en place enfin d'un système de contrôle et de surveillance nécessaire au fonctionnement durable de cette entente.
491. Les éléments du dossier susceptibles de mettre en cause la société Hutchinson sont présentés aux paragraphes 148 à 166. Ils sont relatifs aux relations commerciales entre la société Hutchinson, d'une part, le groupement Master Cycle et le réseau Districycle, d'autre part, et fondent le grief n°13. Dans ces conditions, la simple allusion dans une correspondance échangée entre le GIE Master Cycle et Hutchinson aux tarifs des sociétés Peugeot MTC (paragraphe 154) et Destock Sport (paragraphe 152) ou la seule lettre de Bouticycles à la société Hutchinson au sujet de leur partenariat mais ne portant pas sur les prix conseillés (cote 3089), ne peut démontrer que la société Hutchinson s'est entendue avec ces distributeurs, qui du reste n'étaient pas accusés d'aligner leurs prix sur ceux conseillés par Hutchinson, mais de pratiquer des prix trop bas.
492. En l'absence de tout autre élément de preuve, il n'est donc pas établi qu'entre 2000 et 2003 la société Hutchinson s'est concertée avec ses distributeurs pour imposer les prix de vente de ses produits.
Sur l'entente entre la société Hutchinson et les membres du groupement Master Cycle sur le prix de vente au détail des produits Hutchinson dans les magasins Districycle (grief n° 13)
493. Plusieurs éléments contenus dans les échanges de correspondance entre la société Hutchinson, le GIE Master Cycle et la société Districycle suggèrent tout d'abord que les prix de vente au détail ont été évoqués entre le fournisseur et ses distributeurs tels :
??dans la note interne du 14 juin 2001 de la société Hutchinson relative au partenariat avec Master Cycle (paragraphe 149), les expressions "politique rigoureuse face aux dérives tarifaires, politique commerciale orientée marque, qualité et prix" et "respect de notre politique tarifaire" ;
??dans la télécopie du 15 juin 2001 adressée au GIE Master Cycle au sujet des exigences imposées à tout nouveau distributeur (paragraphe 150), les mentions "Hutchinson a accepté de fournir ses produits ... dans le cadre très strict de respect de nos prix de vente publics conseillés" ou "des prix pratiqués conformes à notre tarif PVC" ;
??l'échange de correspondance intervenue en septembre 2002 entre Master Cycle et Hutchinson (paragraphe 152) au terme duquel les deux partenaires considèrent que les prix catalogue de la société Destock sport "sont inacceptables tant ils sont bas" ;
??dans la lettre du 3 mai 2003 adressée par la coordinatrice du groupement Master Cycle à la société Hutchinson (paragraphe 154) la mention "nous avons constaté dans le catalogue Décathlon cycle 2003 que le pneu carbon comp était à 29,90 euro alors que le prix public conseillé est de 36,70 euro".
494. Si ces documents ne permettent pas de démontrer que les entreprises ont fixé d'un commun accord le prix de vente au détail à pratiquer dans le réseau Master Cycle, ils constituent cependant des indices de ce que, dans le cadre de leurs relations commerciales, elles discutaient fréquemment de leur préoccupation de ne pas voir pratiquer des prix de vente au détail trop bas dans les autres réseaux de distribution.
495. Le dossier montre que Master Cycle a attiré l'attention de Hutchinson sur les prix pratiqués dans ces autres réseaux et qu'en retour Hutchinson a tiré les conséquences de cette analyse en mettant en place un système de surveillance et de contrôle des prix de ces distributeurs. En juin 2001, Hutchinson a lui-même indiqué que des contrôles étaient en cours dans les magasins Districycle (paragraphe 150). Le GIE Master Cycle a aussi participé à cette surveillance comme l'atteste le fax adressé par la coordinatrice du groupement à Hutchinson.
496. Mais aucune constatation ne permet de déduire que les distributeurs de Master Cycle ont participé à la concertation sur les prix souhaités par la tête de leur réseau et par Hutchinson. Il n'y a eu ni communication de ces prix aux membres du groupement, ni organisation d'un débat au sein du groupement en vue d'associer les membres à cette stratégie.
497. Aux paragraphes 156 à 158, sont mentionnés des lettres et des fax échangés entre la société Hutchinson et le réseau Districycle montrant que la société Hutchinson a fait pression sur la centrale Districycle pour que :
dans les conditions d'achat 2001 du réseau, l'écart entre le prix de vente public conseillé et les prix affichés globalement sur le marché soit le plus faible possible et que les prix conseillés pour un certain nombre de références soient purement et simplement repris par le réseau ;
les prix publics conseillés soient pratiqués par le distributeur ;
les prix de vente publics convenus soient appliqués et les actions nécessaires à cette application mises en place ;
la politique tarifaire définie en commun et à l'application de laquelle le distributeur s'est engagé soit effectivement respectée.
498. S'ils attestent que, dans ses relations commerciales avec le réseau Master Cycle, la société Hutchinson a cherché, grâce aux informations fournies par des responsables du groupement, à imposer le respect de ses prix de vente conseillés, les documents analysés plus haut n'indiquent pas que le comportement d'Hutchinson ait eu lieu en accord avec les adhérents du réseau Master Cycle, membres du conseil d'administration.
499. La pratique n'est donc pas établie.
3. SUR L'ENTENTE VERTICALE AVEC LES SOCIÉTÉS AUCHAN ET DÉCATHLON (GRIEFS N° 14 ET 15)
Arguments de la société Hutchinson
500. La société Hutchinson indique que, comme l'a d'ailleurs relevé le rapport administratif, la concertation reprochée n'a porté que sur des opérations promotionnelles ponctuelles organisées dans les deux réseaux dans le cadre d'accords de coopération commerciale conclus entre Hutchinson et chaque distributeur. Ces accords variaient dans leur contenu d'une enseigne à l'autre. Concrètement, la société réalisait des supports de publicité sur les lieux de vente qui nécessitaient que le distributeur communique le prix qu'il souhaitait pratiquer pour le produit concerné. La réduction de prix qui résultait de ces opérations était décidée par le distributeur mais, était selon Hutchinson, le plus souvent supportée par le fournisseur.
501. Par ailleurs, les offres promotionnelles dont Hutchinson a pris dans certains cas l'initiative n'ont pas empêché les sociétés Auchan et Décathlon de fixer elles-mêmes leurs prix de vente promotionnels, les prix de ces offres ne constituant finalement qu'une variété de prix de vente conseillés.
Arguments de la société Auchan France
502. Pour cette société, le grief notifié repose uniquement sur la mention par la société Hutchinson de prix de vente conseillés dans les propositions commerciales adressées à la société Auchan.
503. Elle précise qu'une concertation avec Hutchinson n'avait aucun sens puisque la centrale d'achat Auchan communiquait les prix conseillés aux magasins qui fixaient eux-mêmes leur propre prix.
504. Auchan fait aussi remarquer qu'il n'est produit aucun relevé de prix ni aucun indice démontrant l'accord avec le fournisseur sur les prix conseillés. Aucune réponse ou demande pour une concertation avec la société Hutchinson n'a été faite par la société Auchan. A cet égard, l'interprétation donnée dans la notification de griefs au compte rendu d'un entretien téléphonique entre les deux sociétés laissant penser que la société Auchan a sollicité une offre de la société Hutchinson en proposant un prix public est inexacte. L'auteur de la demande était en réalité la société Hutchinson qui proposait à la fois une campagne publicitaire qui n'a eu aucune suite et un prix public promotionnel des pneus Alligator à 129 F. Ces pneus ont été vendus en 2001 par 10 magasins seulement et pour des prix moyens allant de 112 à 169 F.
505. La société produit les dépliants publicitaires de ses campagnes promotionnelles de mai-septembre 2001 et janvier-juillet 2002 qui montrent que les pneus Hutchinson ont été exclus de ces campagnes.
506. Elle présente une analyse des prix pratiqués dans ses magasins qui ont vendu des produits Hutchinson durant cette période démontrant que les prix de vente dans le cadre des offres promotionnelles proposées par Auchan pour les pneus Alligator, Caméleon, On the Rock et Reflex ont été à la fois différents des prix conseillés par Hutchinson mais aussi différents d'un magasin à l'autre.
Arguments de la société Décathlon
507. La société Décathlon fait remarquer que la fabrication sous sa propre marque et la vente de cycles constituent pour elle une activité majeure avec 2 millions de vélos Décathlon vendus en France en 2005.
508. Elle considère tout d'abord que les faits rapportés ne reflètent pas l'existence d'un accord de volonté sur des prix de revente minima. Ils reposent en effet sur des mails échangés entre l'acheteur de pièces détachées pour cycles chez Décathlon et les services commerciaux de Hutchinson qui, voulant activer les ventes dans les magasins, proposaient des rabais à Décathlon.
509. Pour 2001, les opérations promotionnelles ont concerné trois références, dont deux pour lesquelles Hutchinson a baissé ses prix de vente et demandé à Décathlon d'en faire autant dans ses magasins et une troisième proposée à un prix de 99 F qui n'a pas été repris dans le catalogue Décathlon. Pour les quatre autres références, aucun accord n'a été trouvé.
510. Pour 2002, le principe des promotions recommandées par Hutchinson était une remise de 30 % minimum par produit qui s'analyse en réalité en un prix de revente maximum. Le mail du 21 décembre 2001 auquel fait référence la notification de griefs est une information interne donnée aux équipes commerciales sur la campagne de promotion menée par Décathlon. Il ne contient nulle trace d'un échange de consentement entre ces deux sociétés.
511. Un tel échange de consentement n'était du reste pas possible, selon Décathlon, compte tenu de la position de l'acheteur dans la société. Cette fonction sert à concevoir l'assortiment de références et à négocier les prix d'achat. En aucun cas, l'acheteur n'intervient dans la détermination des prix conseillés aux magasins qui relève de la direction commerciale et, dans le cas des opérations promotionnelles, d'une cellule interne animée par la direction de la communication. De plus, chaque magasin est autonome et peut, sans autorisation préalable du siège, baisser les prix de ses produits, interdisant par là même toute concertation générale sur les prix.
512. Décathlon porte à la connaissance du Conseil des éléments de son catalogue promotionnel 2001 et des prix des magasins démontrant que ceux-ci n'ont pas répercuté pour ce qui concerne les pneus Caméléon les prix évoqués entre l'acheteur d'Auchan et Hutchinson et ce aussi bien en 2001 qu'en 2002. Elle rappelle enfin deux éléments du dossier - l'un un fax entre deux responsables commerciaux d'Hutchinson sur le prix du pneu Reflex Gold 23 et l'autre une télécopie de Master cycle à Hutchinson sur le prix du pneu Carbon Comp - constatant des écarts de prix de 13 % entre deux magasins de l'enseigne et de 18 % avec le prix public conseillé.
Appréciation du Conseil
Sur la concertation entre Hutchinson et Auchan (grief n° 14)
513. Les documents relatifs aux relations commerciales entre les entreprises portent pour l'essentiel sur les promotions organisées en 2001 et plus marginalement en 2002. Les courriers des 15 février, 19 avril, 20 avril, 27 avril, 30 mai, 10 juillet 2001 et des 1er et 6 mars 2002 (paragraphes 171 à 182) montrent qu'il y a eu des échanges sur les prix promotionnels des pneus et chambres à air à pratiquer par Auchan. Cette dernière société ne peut donc arguer de la liberté des magasins de fixer en définitive leur prix de vente, à partir du moment où dans leurs négociations avec le fournisseur, les acheteurs Auchan s'étaient entendus avec lui sur un prix de vente au détail à recommander à leurs hypermarchés. Les prix de vente au détail ont donc été évoqués dans les négociations commerciales entre ces sociétés.
514. Il n'en demeure pas moins que ces négociations n'ont porté que sur des prix promotionnels. Comme l'indique par ailleurs la société Auchan, ce n'est pas elle mais la société Hutchinson qui a souhaité le 19 avril 2001 lancer une opération promotionnelle dans le cadre de laquelle les rabais accordés sur les prix de vente ont été partagés entre le fournisseur et le distributeur comme l'attestent les conditions d'organisation de la promotion sur le produit haut de gamme de septembre 2001 évoquées dans le courrier électronique du 15 février 2001 (paragraphe 172). Il pouvait être nécessaire au fournisseur de connaître les prix de vente promotionnels afin de réaliser les supports publicitaires de la campagne promotionnelle.
515. Mais ne figurent pas au dossier d'éléments permettant d'établir que les prix promotionnels proposés ont été systématiquement communiqués par Auchan à ses magasins. Les dépliants publicitaires produits par Auchan montrant que les produits Hutchinson n'ont pas été compris dans les campagnes promotionnelles de 2001 et 2002 ne sont contredits par aucun autre élément permettant de considérer que ces sociétés se sont concertées sur les prix des promotions proposées dans les magasins de l'enseigne. La société Auchan donne par ailleurs des séries de prix non discutables qui montrent que ses prix de vente n'étaient pas alignés sur les prix conseillés. A propos de ses offres promotionnelles comme de ses ventes courantes des produits Hutchinson, la société Auchan n'a pas donné son accord aux propositions faites par Hutchinson et a déterminé librement ses prix de vente aux consommateurs et la société Hutchinson n'a pas surveillé les prix pratiqués dans les magasins de l'enseigne Auchan.
516. Dans ces conditions, à défaut d'application des prix discutés par ces entreprises, la pratique d'entente notifiée aux sociétés Hutchinson et Auchan n'est pas établie.
Sur la concertation entre Hutchinson et Décathlon (grief n° 15)
517. A propos des opérations promotionnelles organisées en 2000, 2001 et 2002, les sociétés Hutchinson et Décathlon, non contentes de négocier leurs conditions commerciales, ont fixé en commun les prix publics promotionnels de nombreux produits Hutchinson en vente dans les magasins Décathlon.
518. Bien que ces prix promotionnels, étant des prix de vente maxima conseillés, comme le montre l'indication de la société Hutchinson "30 % de remise minimum par produit pour les consommateurs" dans son courrier électronique du 4 décembre 2001 (paragraphe 193), puissent évoluer à la baisse chez le distributeur, l'indice de concertation demeure.
519. Le signataire des lettres et des engagements avec la société Hutchinson était le responsable du marché pièces détachées cycles de Décathlon. Celui-ci négociait les prix de vente conseillés à ses magasins par la société Décathlon au niveau central. Dans ces conditions, il est démontré que Hutchinson et Décathlon se sont entendues pour fixer ensemble le prix promotionnel de vente aux consommateurs.
520. En effet, même si les discussions ont porté sur des baisses de prix que voulait imposer la société Hutchinson pour relancer ses ventes, elles ont pu avoir une influence sur les décisions prises par les directeurs de magasin en les conduisant à reprendre tels quels les taux de remise proposés. Cette pratique a donc pu consister à imposer un prix de revente minimum.
521. Cependant, en l'absence d'éléments dans le dossier démontrant d'une part que les prix publics promotionnels fixés ont été repris dans les catalogues Décathlon, d'autre part que les magasins ont effectivement appliqué ces prix promotionnels, il n'est pas établi que Décathlon a adhéré aux propositions de la société Hutchinson. A cet égard, un élément du dossier incline d'ailleurs à conclure en ce sens. Le responsable achat pièces détachées cycle de Décathlon a répondu aux propositions de prix publics promotionnels pour janvier-février 2002 présentées par la société Hutchinson dans une lettre du 5 décembre 2001 (cote 3173) par laquelle il a refusé ces offres au motif qu'il ne souhaitait pas être pénalisé en terme de marges.
522. Il apparaît ainsi que les prix promotionnels publics conseillés des produits n'ont pas été fixés dans une entente verticale entre Hutchinson et Décathlon mais ont été plus probablement des éléments d'une négociation commerciale dans laquelle Hutchinson a cherché à relancer ses ventes en proposant des baisses de prix de la part du distributeur tandis que Décathlon a résisté à ces suggestions, souhaitant qu'Hutchinson baisse lui aussi ses propres prix de vente et participe financièrement à ces campagnes.
523. Dans ces conditions, la pratique d'entente notifiée aux sociétés Hutchinson et Décathlon n'est pas davantage établie.
E. SUR LES ENTENTES VERTICALES MISES EN OEUVRE PAR LES AUTRES FABRICANTS
1. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ SHIMANO (GRIEF N° 10)
524. Il a été reproché à la société Shimano d'avoir mis en place dans ses contrats de distribution des clauses imposant à ses revendeurs de respecter les prix de vente conseillés de ses produits.
Arguments de la société Shimano composants cycles
525. La société Shimano estime que l'article 4.4 du contrat "partenaire plus 2004", qui stipule de manière générale que le détaillant s'engage à respecter une politique de prix de marché conforme aux exigences de Shimano, ne doit pas être interprété comme imposant un prix de vente aux distributeurs mais les obligeant à vendre les produits à un prix qui ne dévalorise pas sa marque eu égard aux exigences de l'entreprise sur la qualité de ses produits.
526. Elle indique que dans les contrats "Chaussures Shimano 2004", l'indication de "dans la mesure du possible" montre qu'aucune obligation effective n'était imposée aux distributeurs d'appliquer les prix conseillés. Ces clauses ont du reste été supprimées de tous les contrats dès le mois de septembre 2004.
527. Aucun élément ne démontre, selon elle, qu'elle a imposé à ses distributeurs ou grossistes des clauses d'interdiction de revente entre professionnels et distributeurs ni qu'elle a mis en place un système de contrôle de ces prix nécessaire au fonctionnement durable de l'entente. Des fax de septembre 2004 et janvier 2005 d'un détaillant de cycles, qui figurent au dossier, montrent au contraire l'insistance dont les petits revendeurs faisaient preuve pour obtenir en vain de sa part qu'elle effectue cette police des prix.
528. Elle expose enfin que compte tenu de la durée limitée de leur mise en œuvre, de leur champ d'application restreint (200 revendeurs sur 1200 au total) et de la forte concurrence existant sur le marché concerné, aussi bien entre les fabricants qu'entre les réseaux de distribution, les pratiques en cause n'ont pas causé de dommage à l'économie.
Appréciation du Conseil
529. La pratique reprochée à la société Shimano repose sur deux séries de contrats (paragraphes 198 et 199) qui expriment bien l'accord entre les détaillants concernés et la société Shimano pour le respect des prix conseillés édités par la société. Peu importe à cet égard que ces clauses aient été introduites à la demande des détaillants dès lors que les deux parties ont signé les contrats qui les contiennent. La mention du respect des prix "dans la mesure du possible" n'enlève rien au caractère certain de cette clause incitant les revendeurs de la société Shimano à la coordination des prix de vente.
530. Même s'il n'est pas démontré que des discussions ont eu lieu entre Shimano et les détaillants pour déterminer le niveau réel et le détail de ces prix, l'existence de ces clauses qui renvoient aux prix publics conseillés édités par la société Shimano traduit nécessairement une concertation en vue d'appliquer les prix souhaités, auxquels se sont engagés les signataires des contrats.
531. En toute hypothèse, comme il a été vu au paragraphe 314, une telle clause insérée dans un contrat liant un fournisseur et ses revendeurs est considéré par le règlement communautaire sur les restrictions verticales comme insusceptible de bénéficier d'une exemption automatique et a un objet anticoncurrentiel, la preuve de l'effet n'étant pas requise pour la qualification de la pratique.
532. L'accord direct de fixation des prix dans les contrats, résultant de la clause sur le respect des prix de vente contenue dans les contrats de distribution signés par environ 200 revendeurs rend inutile la recherche des autres critères d'application que sont l'existence d'une police des prix et l'alignement des prix des détaillants.
533. En conséquence, la société Shimano, en mettant en œuvre avec ses revendeurs signataires des contrats "partenaires plus 2004" une clause destinée à fixer les prix de détail des produits couverts par ces contrats, a enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
2. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ LES CRÉATIONS JEAN-PIERRE (GRIEF N° 11)
534. Il a été reproché à la société Les Créations Jean-Pierre dénommée aussi société Carnac d'avoir introduit dans les contrats de ses détaillants pour 2002, 2003 et 2004 une clause obligeant ceux-ci à respecter les prix de vente conseillés.
Arguments de la société
535. La société Les Créations Jean-Pierre estime que ces prix ne peuvent en aucun cas être qualifiés de prix imposés tels que le Conseil lui-même les a qualifiés dans de nombreuses affaires. Si les contrats de pré-saison de la société contenaient une clause de respect obligatoire des prix, celle-ci n'a jamais été discutée avec les revendeurs et notamment ceux du réseau Master Cycle. Elle existait d'ailleurs avant le référencement de la société auprès du groupement et a été retirée dès le stade de l'enquête administrative. S'agissant de l'application de ces prix par les distributeurs, la société Les Créations Jean-Pierre conteste la déclaration de son président directeur général du 15 janvier 2004 sur le respect par tous les détaillants des prix conseillés et sur le rôle des représentants de la société dans la surveillance de ces prix. Elle considère que ces propos, prononcés dans l'urgence des sollicitations des enquêteurs, ne reflètent pas la réalité.
536. Pour appuyer sa démonstration, cette entreprise verse au dossier des déclarations de plusieurs de ses agents commerciaux et de détaillants qui vont en sens contraire ainsi qu'un tableau de prix pratiqués par six de ses clients en 2002 montrant que les prix conseillés n'étaient pas respectés.
537. Enfin, la société fait remarquer que les contrats contenant les clauses incriminées ne concernaient que 15 % de ses clients et qu'elle affrontait une concurrence très vive d'un très grand nombre de marques connues des cyclistes qui importaient leurs chaussures de Taiwan et de Chine, ce qui l'a obligée à délocaliser en Slovaquie son usine de fabrication de chaussures pour cyclistes.
Appréciation du Conseil
538. Il a été montré aux paragraphes 206 et 207, que la société en cause éditait chaque année d'une part des tarifs indiquant à la fois les prix d'achat et de vente conseillés à ses détaillants, d'autre part des contrats dont certaines clauses faisaient obligation au détaillant de respecter les prix de vente conseillés. Dans ses déclarations aux enquêteurs, le représentant de la société a indiqué que ce prix de vente correspondait pour l'ensemble des magasins à un coefficient multiplicateur de 1,85. Il a reconnu que non seulement les commerciaux de la société avaient pour mission de vérifier le respect des prix de vente conseillés mais aussi que tous les détaillants respectaient ces prix de vente conseillés. En outre, le contrat lui-même, en prévoyant comme clause de rupture, le non respect des prix conseillés, obligeait à l'avance le détaillant signataire à jouer pleinement le jeu de l'entente verticale.
539. En introduisant dans ses contrats de distribution une clause de respect des prix conseillés la société Créations Jean-Pierre a commis une pratique contraire aux prévisions de l'article L. 420-1 du Code de commerce, considérée par le règlement n° 2790-1999 concernant l'application de l'article 81-3 du traité à certaines catégories d'accords verticaux comme une clause non susceptible de bénéficier d'une exemption.
540. En conséquence, en introduisant une telle clause dans ses contrats de pré-saison, la société Les Créations Jean Pierre a enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
3. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ Michelin (GRIEF N° 16)
541. Il a été reproché à la société Michelin de s'être concertée avec ses revendeurs, particulièrement ceux de la société Districycle, pour faire respecter le prix de marché des pneus Michelin.
Arguments de la société Michelin
542. A titre liminaire, la société Michelin, qui ne réalise que 0,08 % de son chiffre d'affaires dans le cycle, dont l'essentiel est constitué par les pneumatiques de remplacement vendus en tant que pièces de rechange à des grossistes ou des grandes surfaces de sport, s'étonne de ce que, dans la notification de griefs, elle soit considérée comme ayant été à l'initiative d'une pratique visant à augmenter les prix de vente au détail de ses produits alors que toutes les déclarations des entreprises parties au dossier montrent que Michelin était considérée comme un élément perturbateur du marché qui ne contrôlait pas les prix de détail et qui approvisionnait sans distinction l'ensemble des détaillants quelle que soit leur politique tarifaire.
543. L'entreprise prétend qu'en s'appuyant sur une seule déclaration de Districycle, déclaration de surcroît inexacte, la notification de griefs n'établit en rien l'entente verticale entre Michelin et les détaillants.
Sur l'action de Michelin pour l'augmentation des prix des pneus ProRace
544. Michelin considère comme inexacte la déclaration du président de Districycle du 8 octobre 2003 selon laquelle elle aurait subordonné en octobre 2002 l'octroi d'un prix avantageux d'achat de ses pneus à 12 euro au lieu de 16 contre l'engagement que devait prendre Districycle d'augmenter son prix de vente au détail de 26 à 29 euro. Michelin produit des factures adressées en 2002 à la SARL Procadre, dont M. O..., président de Districycle était le gérant, qui font apparaître que des prix d'achat proches ou égaux à 12 euro ont été appliqués bien antérieurement au prétendu engagement demandé à Districycle.
545. En revanche, elle fait valoir, en appuyant son analyse sur des factures qu'elle adressait à Districycle, qu'elle lui vendait des pneumatiques de remplacement à un prix qui n'a jamais varié de 16 euro. Elle explique le caractère erroné de la déclaration de M. O... par une confusion entre les prix des pneumatiques de première monte et de remplacement.
Sur l'application du prix de revente
546. La société Michelin soutient qu'à supposer même que le prix de vente ait été porté par Districycle à 29 euro sous l'effet d'une contrainte qu'elle aurait exercée, ce qui n'est nullement démontré dans le dossier, cette augmentation n'a été que temporaire puisque Districycle a décidé 6 mois plus tard de baisser le prix de revente à 27 euro. Cette baisse des prix a d'ailleurs été pratiquée unilatéralement par Districycle sans aucune intervention de Michelin. Aucun relevé de prix effectué dans l'enquête ou apporté en l'espèce par le plaignant n'est susceptible d'établir les prix effectivement pratiqués dans les magasins franchisés de Districycle.
Appréciation du Conseil
547. Le seul élément du dossier démontrant la pratique reprochée à Michelin est une déclaration de Districycle relative à la demande de Michelin présentée en octobre 2002 pour que Districycle augmente son prix de vente (paragraphe 212). Cette déclaration évoque un avantage déjà consenti à la société Procadre en contrepartie duquel est demandée une hausse du prix de vente.
548. A défaut d'autres éléments venant en préciser le sens, cette déclaration semble comporter de fait une confusion entre les pneumatiques vendus à la société Procadre pour la première monte et ceux vendus à Districycle en tant que pièces de remplacement. Son contenu même n'est pas totalement explicite et peut aussi bien refléter un conflit d'intérêt courant dans la négociation commerciale entre un fournisseur et un distributeur.
549. Il n'apparaît donc pas que cette concertation, qui n'a porté que sur une catégorie de pneus distribuée dans le réseau Districycle et a eu une durée limitée, ait un objet anticoncurrentiel, des entreprises et notamment des entreprises faisant partie du GIE Master Cycle (paragraphe 214) déclarant que les produits Michelin étaient plutôt vendus à des prix cassés dans les réseaux de distribution.
550. Aussi, en l'absence de tout relevé des prix de vente des produits en cause et de toute preuve de police des prix, il n'est pas établi que la société Michelin se soit concertée avec ses distributeurs pour mettre en place une politique de prix imposés.
4. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ TIME SPORT INTERNATIONAL (GRIEFS N° 22 ET 23)
551. Il a été reproché à la société Time Sport international, d'une part, d'avoir refusé de vendre des articles à des distributeurs qui pratiquaient des prix inférieurs aux "prix publics" (grief n° 22), d'autre part, d'avoir adopté des conditions de vente interdisant à ses clients d'exporter les produits livrés (grief n° 23).
Arguments de la société Time Sport international
552. La société Time Sport international (Time), société française de haute technologie, a fait valoir qu'elle est spécialisée notamment dans la fabrication de pédales automatiques et de cadres haut de gamme dont la valeur moyenne, sans les composants ni l'assemblage, est de 2 750 euro. L'assemblage de ces produits, en particulier des fourches en carbone, constitue une opération délicate qui doit être effectuée par un spécialiste pour garantir la sécurité du produit fini et donne lieu au paiement de primes d'assurance coûteuses contre les risques entraînés par un montage défectueux.
Sur la concertation relative au refus de vente à la société Districycle pour non respect des prix conseillés (grief n° 22)
553. Si la société Time reconnaît que ses tarifs font mention de "prix publics" suggérés, elle fait valoir qu'elle n'a pris aucune disposition contractuelle imposant des prix de revente aux détaillants, ni mis en œuvre une politique de prix imposés. A supposer même qu'elle l'ait voulu, elle n'aurait pas pu le faire dans la mesure où, ne vendant pas de vélos, elle n'avait aucun pouvoir de contrôle sur le prix du produit final.
554. Par ailleurs, les documents mis en avant pour justifier les griefs concernent quelques grossistes que la société a choisis de référencer à partir de 2001 pour pallier les insuffisances de sa distribution aux détaillants et ne donnent pas d'indication sur les prix de vente au détail. Ainsi, les termes du courrier de Monsieur 33... du 13 janvier 2003 ont trait aux prix de vente qu'il consentait lui-même, en tant que grossiste, aux détaillants. De même, la note de la société Time du 22 janvier 2003 n'évoque pas les prix aux consommateurs mais les prix plus bas que certains grossistes consentaient à des détaillants à fort potentiel, par ailleurs démarchés par la propre force de vente de la société.
555. D'après la société, l'affirmation du président directeur général de la centrale Districycle, qui rapporte des propos de représentants de Time selon lesquels cette centrale serait privée de la gamme 2003 des produits Time est tout à fait inexacte. S'il y a eu quelques problèmes de livraison sur deux modèles de la gamme VXR et VXRS de cadres, Districycle a été régulièrement livrée en 2003, 2004 et 2005.
Sur les clauses interdisant l'exportation des produits Time (grief n° 23)
556. La société reconnaît l'existence de cette clause qui a été reprise par erreur d'anciens contrats destinés aux distributeurs étrangers de la société qui bénéficiaient de l'exclusivité territoriale dans leurs pays respectifs et qui a été maintenue par simple négligence, la société n'ayant aucun intérêt à appliquer des règles défavorables au développement de son chiffre d'affaires.
557. Cette disposition qui a depuis été corrigée n'a du reste jamais fait l'objet d'une mesure de rétorsion vis-à-vis des clients qui la transgressaient. La société Time cite à cet égard les sociétés Routens, Dutouron mais aussi les établissements Istore qui, via leur site Internet, vendent des produits Time dans le monde entier.
Appréciation du Conseil
Sur le refus de livraison à des distributeurs pratiquant des prix inférieurs aux prix publics (grief n° 22)
558. La pratique de refus de vente qui fonde le grief repose d'une part sur la déclaration du responsable de la centrale Districycle le 8 octobre 2003 (paragraphe 222) faisant état de propos de représentants de Time rapportés par ses revendeurs et d'autre part sur la lettre adressée par Time Sport à Districycle (paragraphe 223) faisant part de restriction de livraison portant sur deux modèles spécifiques. A eux seuls, ces éléments ne peuvent démontrer une pratique de refus de vente pour non respect des prix imposés.
559. De plus, aucune indication du dossier n'atteste que ce refus, évoqué au demeurant de manière indirecte, a été appliqué.
560. Par ailleurs, s'agissant des prix, il apparaît que tant la déclaration de M. 33... (paragraphe 220) que la note de Time relative à ses relations commerciales avec ses grossistes (paragraphe 221) ne peuvent être utilisées pour fonder le grief car ils évoquent non des prix publics qui résulteraient d'un accord entre le fabricant et le détaillant mais les prix d'achat de certains grossistes auprès de Time. Ces documents ne peuvent pas être interprétés en ce sens que Time aurait demandé aux grossistes d'imposer aux détaillants des prix de vente publics de ses produits.
561. Dans ces conditions, les seuls documents susceptibles d'être retenus à l'appui du grief sont des documents commerciaux pour 2003 et 2004, qui concernent les relations commerciales de Time avec les détaillants (paragraphe 224). L'indication dans ces documents d'un coefficient multiplicateur, figurant après les mentions relatives au délai de paiement et aux remises quantitatives, ne peut à elle seule signifier que ce coefficient devait être appliqué par le détaillant pour calculer son prix de vente. D'ailleurs, les prix de vente suggérés par Time à ses propres points de vente, tels qu'ils figurent dans son tarif France 2003-2004 (Rae, cotes 981, 1075 à 1076 et 1078 à 1079), ne résultent pas de l'application de ces coefficients aux prix d'achat des magasins. L'imprécision de ces calculs de prix comme le défaut d'application des coefficients attestent en toute hypothèse du caractère peu contraignant des prix suggérés par Time, élément qui par ailleurs n'est contredit par aucune pièce permettant de constater que Time surveillait l'application des tarifs conseillés.
562. Il n'est donc pas établi que la société Time a mis en place un système de calcul et de surveillance des prix publics des détaillants assorti d'un refus de vente imposé à ceux qui ne respectaient pas les prix imposés.
Sur l'interdiction d'exporter les produits Time (grief n° 23)
563. La clause d'interdiction d'exporter introduite dans les conditions générales de vente a eu un objet anticoncurrentiel qui n'est pas susceptible, en vertu du règlement de 1999, de bénéficier de l'exemption automatique prévue par ce règlement.
564. Il n'est pas démontré dans le dossier qu'elle a été appliquée par la société Time laquelle, au demeurant, réalisait 70 % de son chiffre d'affaires à l'exportation et n'avait apparemment aucun intérêt à limiter les exportations de produits connus dans le monde entier et qui étaient en concurrence avec ceux d'autres entreprises européennes.
565. Il n'en demeure pas moins que la présence de cette clause dans les conditions générales de vente de la société jusqu'en 2005 a eu pour effet de limiter les échanges intracommunautaires en empêchant les distributeurs des autres pays de s'approvisionner en produits Time.
566. En conséquence, la société Time Sport international a enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce en insérant dans ses conditions générales de vente une clause interdisant les exportations, limitant ainsi le commerce entre les pays de l'Union européenne. En toute hypothèse, l'interdiction d'exporter est prohibée quel qu'en soit l'effet.
F. SUR LES ENTENTES VERTICALES MISES EN OEUVRE PAR LES GROSSISTES ET IMPORTATEURS POUR LE RESPECT DES PRIX (GRIEFS N° 18, 19, 20, 21, 24, 25, 26).
1. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ ROYAL VÉLO FRANCE (GRIEFS N° 18 ET 19)
567. Il a été reproché à la société Royal Vélo France de s'être concertée d'une part avec ses revendeurs pour qu'ils appliquent les prix de vente conseillés (grief n° 18) et, d'autre part, avec la société Sidi Sport pour empêcher un grossiste espagnol de livrer ses produits en France (grief n° 19).
La concertation sur les prix de vente au détail (grief n° 18)
Observations de la société Royal Vélo France
568. La société Royal Vélo France, qui distribue en France des accessoires pour cycles et travaille avec de nombreux fournisseurs, fait valoir tout d'abord que la notification de griefs aurait dû distinguer le marché amont de l'approvisionnement en équipements pour cyclistes et le marché aval de l'approvisionnement des détaillants auprès des grossistes et importateurs, seul concerné par la procédure, qui met en jeu des séries variées de produits. A ce stade, il n'existe pas un marché de la chaussure haut de gamme qui serait représenté par les chaussures Sidi. De plus, pour le consommateur, il existe une véritable substituabilité entre les différentes qualités de chaussures en raison de la progressivité des prix pratiqués par les revendeurs qui distribuent des gammes variées de chaussures. Les surfaces spécialisées telles que Décathlon et Go Sport, qui ont aussi des marques propres, commercialisent également des gammes très diverses de chaussures.
569. Seule visée par le grief, elle estime que la preuve d'une concertation sur les prix de vente au détail n'est pas apportée. L'application d'un prix de vente au détail minimum n'a jamais été évoquée au cours des négociations commerciales entre RVF et ses revendeurs. La déclaration de la coordinatrice du GIE Master Cycle montre au contraire qu'elle reprochait à Royal Vélo France de ne pas faire appliquer dans le réseau Districycle les prix de vente publics. En réalité aucun prix minimum n'a été imposé à Districycle qui a continué à être approvisionné par Royal Vélo France. De plus, la fiche fournisseur Culture Vélo, indiquant que la remise de fin d'année ne serait versée que sous réserve du respect du prix public conseillé, n'empêchait pas les adhérents du réseau Culture Vélo de pratiquer des réductions de prix à la caisse. Cette clause n'a donc pas été suivie d'effet et Royal Vélo France a versé les ristournes de fin d'année à tous les revendeurs en fonction des seuls volumes d'achat réalisés. La société Culture Vélo a confirmé lors de son audition du 17 mars 2005 qu'elle n'avait jamais eu de difficulté pour le paiement des ristournes de fin d'année au motif que les prix conseillés n'auraient pas été respectés.
570. De fait, les prix conseillés n'ont pas été appliqués par les détaillants, certains revendeurs de chaussures Sidi pratiquant des prix inférieurs, la plupart accordant systématiquement des remises sur les prix affichés dans les catalogues. Pour Royal Vélo France, le comparatif effectué dans le rapport administratif entre le tarif Royal Vélo France hiver 2003 et le prix public catalogue Culture Vélo n'a aucune signification car il ne prend pas en compte les réductions de prix effectuées à la caisse hors catalogue. A l'appui de ses dires, la société présente des tableaux montrant que pour 27 modèles de chaussures Sidi, les prix publics affichés par les revendeurs Master Cycle, Culture Vélo Georget, Futuromshop, XX cycles sont proposés à des prix systématiquement inférieurs aux prix publics conseillés par Royal Vélo France, ce qui exclut tout système de police des prix.
571. A titre subsidiaire, Royal Vélo France considère, qu'à supposer même que les prix en cause ont été imposés à Culture Vélo, cette pratique ne serait pas répréhensible puisque les magasins de ce réseau ne se font pas concurrence, car ils appartiennent tous à des zones de chalandise différentes. Elle cite à cet égard la décision n° 97-D-77 du Conseil relative à des pratiques relevées dans le réseau de distribution de la société Home Salons France, au terme de laquelle le Conseil n'a pas jugé anticoncurrentielle la fixation concertée des prix à l'intérieur d'un réseau de magasins qui bénéficiaient d'une exclusivité territoriale sur des zones de chalandise différentes.
Appréciation du Conseil
572. La pratique de prix imposés à l'intérieur d'un réseau conduit ses membres à ne pas fixer leurs prix de manière autonome alors que leur affiliation à un réseau, qui s'accompagne le plus souvent d'une protection territoriale exclusive, en leur permettant d'assurer une distribution qualitative fondée sur des services rendus au consommateur, devrait les garder de toute concertation sur leurs prix de vente.
573. La clause des accords commerciaux passés entre Royal Vélo France et Culture Vélo (paragraphe 246) indique que le respect des prix publics conseillés était obligatoire et engageait les deux partenaires qui ne pouvaient ignorer la portée de cette disposition. La présence de cette clause dans le contrat de fournisseur montre la réalité de la concertation entre Royal Vélo France et le réseau Culture Vélo et matérialise en elle-même l'accord de volonté des partenaires.
574. Certes, la mise en place d'un contrôle propre à assurer l'application de cette clause n'est pas avérée. Dans ses écritures, la société Royal Vélo France a fourni, pour une vingtaine de modèles de chaussures vendus en 2000 dans le réseau Master Cycles et sur les sites Internet de plusieurs de ses clients, des tableaux comparatifs de prix montrant des différences systématiques entre ses prix conseillés et les prix plus bas affichés dans les catalogues des revendeurs.
575. Par ailleurs, faute de tout relevé des prix effectivement pratiqués dans les magasins de l'enseigne Culture Vélo, il n'est possible ni de dire dans quelle mesure les prix pratiqués dans ce réseau étaient identiques aux prix conseillés par Royal Vélo France, ni de contredire la déclaration du président directeur général de la société Dossard 51 (paragraphe 247) selon laquelle la clause de respect des prix n'a pas été appliquée.
576. Cependant, dès lors qu'elle figure dans un accord commercial, il n'est pas nécessaire de rechercher les conditions dans lesquelles la clause incriminée a été mise en œuvre. En effet, la présence d'une clause de respect des prix dans les accords commerciaux passés entre ces entreprises assortie d'une disposition prévoyant que la remise de fin d'année ne sera pas versée en cas d'inexécution de cet engagement revêt en elle-même un objet anticoncurrentiel qui n'est pas susceptible de bénéficier d'une exemption au titre du règlement communautaire.
577. Le fait que cette pratique n'a été reprochée qu'à la société Royal Vélo France et non à chacun de ses fournisseurs ayant signé le contrat de fourniture n'enlève rien à la réalité du grief retenu à l'encontre de la société Royal Vélo France à qui incombait par ailleurs la mise au point et la rédaction des accords commerciaux signés avec la société Dossard 51 pour le compte des détaillants du réseau Culture Vélo.
578. De plus, il n'est pas contesté que les chaussures Sidi, distribuées par la société Royal Vélo France, sont en concurrence avec d'autres marques de chaussures pour cyclistes vendues notamment par les sociétés Les Créations Jean-Pierre, Look, Nike Adidas et Shimano. Ainsi qu'il a été noté au paragraphe 318, cette considération n'a pas d'influence sur la qualification des pratiques reprochées mais peut seulement avoir une incidence sur la détermination de la sanction, les effets des pratiques étant atténués par l'existence d'une concurrence intermarques.
579. Enfin, les conditions de la jurisprudence n° 97-D-77 citée plus haut ne sont pas réunies, aucun élément du dossier ne venant démontrer que chacun des revendeurs de Royal Vélo France disposait d'une zone d'exclusivité territoriale sur sa zone de chalandise.
580. En conséquence, il est établi que la société Royal Vélo France, en insérant dans ses contrats de distribution une clause de respect des prix conseillés, a mis en œuvre une pratique anticoncurrentielle contraire à l'article L. 420-1 du Code de commerce.
La concertation avec la société Sidi Sport pour empêcher un grossiste espagnol de vendre les produits Sidi en France (grief n° 19)
581. Il résulte des constatations opérées aux paragraphes 248 à 251, qu'à la demande de son importateur exclusif en France, la société Royal Vélo France, le fabricant de cycles Sidi a fait pression sur un revendeur espagnol, la société Comet, afin que celui-ci cesse d'approvisionner les distributeurs de cycles français, et notamment Districycle.
Observations de Royal Vélo France
582. La société Royal Vélo France considère qu'aucun élément n'étaye le grief notifié. Selon elle, les propos du détaillant d'Auch, retenus à charge, s'expliquent par le fait que Royal Vélo France s'inquiétait du développement des ventes actives du grossiste espagnol Comet au mépris du contrat de distribution exclusive qu'elle avait signé pour la France avec Sidi. Elle a alors demandé à Sidi de faire respecter cette exclusivité et a même fait procéder auprès de la société Dutouron à des constatations par huissier de ces approvisionnements actifs. En revanche, ajoute t-elle, elle n'est pas intervenue concernant les livraisons passives de Comet en France.
583. Enfin, elle expose qu'avec un prix de la chaussure Sidi Energy que Royal Vélo France fixait à 117,39 euro contre 89,95 euro par Comet, cette dernière société se garantissait une marge brute de 30 % alors qu'elle n'assumait pas les charges financières de communication, de sponsoring, de service après-vente sur lesquelles reposait l'image de ce produit dans le public français que Royal Vélo France, en tant que distributeur exclusif, avait développée.
Observations de la société Sidi
584. Cette société indique que sa marque était interchangeable avec les autres marques distribuées sur le territoire et achetées aussi bien par les cyclistes occasionnels que professionnels. Elle expose que dans ses contrats n'est fait mention d'aucune mesure de restriction de la liberté d'exporter du distributeur et confirme qu'elle n'a pris aucune mesure de rétorsion à l'encontre de la société espagnole Comet.
Appréciation du Conseil
585. Il résulte du b) de l'article 4 du règlement de 1999, mentionné au paragraphe 314, que s'il est possible à un fournisseur de restreindre les ventes actives de ses acheteurs directs vers un territoire ou une clientèle concédés exclusivement à un autre acheteur, cette protection doit cependant permettre les ventes passives vers ces territoires ou clientèles.
586. La déclaration du détaillant d'Auch et le fax de la société Comet (paragraphes 250 et 251), ne permettent pas d'apprécier dans quelle mesure l'interdiction de livraison de la société Comet a été appliquée. Le dossier ne contient pas non plus d'information sur les modalités et la date de la concertation supposée entre Royal Vélo France et Sidi.
587. L'explication donnée par Royal Vélo France dans ses écritures concernant le maintien de l'autorisation donnée à la société Comet d'assurer des ventes passives sur le territoire français et son droit en tant que distributeur exclusif d'interdire les ventes actives peut certes être contestée dans la mesure où la déclaration du détaillant d'Auch et le fax de la société Comet adressé aux enquêteurs évoquent un refus de faire des ventes aussi bien actives que passives à destination du revendeur.
588. Cependant, il est difficile d'apprécier si ce refus de livrer résulte de l'interdiction faite par Royal Vélo France de toute vente passive ou de l'ignorance par la société Comet de la différence exacte entre ces deux types d'opérations, cette société ayant pu outrepasser l'injonction du fabricant. Il est possible que l'interdiction de livraison ait concerné les seules ventes actives comme l'affirme la société Royal Vélo France qui justifie son attitude par le fort développement de ces ventes par Comet et son désir de faire respecter le contrat de distribution exclusive signé pour la France avec Sidi.
589. Il n'est pas en conséquence démontré que les sociétés Royal Vélo France et Sidi Sport se sont concertées pour empêcher la société Comet de répondre passivement à des commandes de produits Sidi en France. Le grief n° 19 n'est pas retenu à leur encontre.
2. EN CE QUI CONCERNE LES SOCIÉTÉS ÉTABLISSEMENTS RENÉ VALDENAIRE ET SINTEMA (GRIEF N° 20 ET 21)
590. Il a été reproché à ces deux sociétés de s'être entendues, d'une part, pour que les distributeurs de la société Valdenaire respectent les prix publics de vente édités par la société Sintema (grief n° 20), d'autre part, pour empêcher des distributeurs de s'approvisionner auprès de grossistes étrangers (grief n° 21).
Sur les prix imposés (grief n° 20)
Arguments de la société établissements René Valdenaire
591. La société fait tout d'abord valoir que, contrairement aux griefs relevés à l'encontre des autres sociétés mises en cause, le grief qui lui a été notifié ne précise pas la période sur laquelle les pratiques reprochées ont été mises en œuvre. En l'absence de précision sur la date et la durée des faits, il ne lui est pas possible d'organiser sa défense, d'invoquer leur éventuelle prescription et de savoir si elle peut prétendre à l'application des sanctions prévues antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi NRE.
592. En ce qui concerne ensuite la distribution des produits Kuota, essentiellement des cadres de vélo en carbone, elle explique que toute imposition d'un prix de vente est en pratique impossible car ces éléments sont très rarement vendus au détail mais sont intégrés par les revendeurs professionnels avec d'autres éléments pour effectuer le montage du vélo.
593. S'agissant de la concertation sur les prix, la société estime que la clause du contrat de distribution du 15 septembre 2003 qui fonde le grief, en ce qu'elle semble induire l'obligation pour Valdenaire de respecter les conditions de vente fixées par Sintema, a été mal interprétée. Elle ne concerne pas les prix publics de vente des produits Kuota mais leurs conditions d'achat par la société Valdenaire auprès de son fournisseur, comme d'ailleurs le montre la lecture de l'article 3 de ce contrat.
594. N'est pas davantage probant l'échange de correspondance entre Valdenaire et un détaillant du réseau Districycle utilisé pour démontrer le refus de livrer les détaillants qui ne respectaient pas le prix conseillé. Il n'est pas établi que cette décision a résulté d'un accord entre Sintema et Valdenaire. La société en cause a d'ailleurs finalement été livrée. Enfin, le rapprochement des prix conseillés de Sintema avec ceux pratiqués par les détaillants indique que ceux-ci étaient différents.
595. La déclaration d'un seul détaillant qui dit appliquer le prix public conseillé n'infirme pas cette analyse dès lors que c'est volontairement et non sur la pression de Valdenaire ou de Sintema qu'il a pu fixer son prix, à défaut de tout système de contrôle qu'aurait dû mettre en place ces entreprises si elles avaient voulu imposer leurs prix.
Appréciation du Conseil
596. Contrairement à ce qu'indique la société établissements René Valdenaire, il ressort du dossier qu'elle a multiplié les initiatives, sur les recommandations de la société Sintema, pour maintenir les prix de vente de ses produits à un niveau qu'elle estimait nécessaire pour protéger les distributeurs indépendants face aux discounters comme Dutouron ou Districycle. L'expression, dans les documents émis par la société Valdenaire, relative au respect des prix imposés (cote 4574) est dénuée de toute ambiguïté (paragraphe 234). Elle est suffisamment explicite pour ne pas avoir besoin d'être appuyée par la clause relative au prix dans le contrat de distribution du 15 septembre 2003 (paragraphe 230) qui, effectivement, lorsqu'on examine intégralement son contenu, est un contrat qui fixait les éléments de détermination des prix d'achat de Valdenaire auprès de Sintema et non des prix de vente aux consommateurs.
597. Il ne fait pas de doute que la société Valdenaire surveillait l'application de ces prix comme l'atteste la lettre du 31 décembre 2001 "J'ai récupéré un tarif Dutouron ... comment peut-il proposer ça" (paragraphe 237) ou dans un autre courrier "cadres bradés ... je ne veux pas voir les lunettes vendues à 30 euro dans 15 jours ... nous avons assez de travail avec les clients qui respectent les marges" (paragraphes 240).
598. Cependant, il n'est pas démontré que la surveillance des prix pratiquée par Valdenaire sur les recommandations de Sintema a eu un effet sur les prix des détaillants.
599. Les factures produites par l'entreprise relatives aux prix des cadres Kuota pratiqués chez les détaillants par rapport aux prix conseillés par Valdenaire montrent que les prix des détaillants sont très différents d'un magasin à l'autre et s'écartent toujours des prix conseillés. Elles confirment par ailleurs le fait que les détaillants facturaient ces cadres avec d'autres accessoires et ajoutaient des prestations de montage des vélos, ce qui rend plus difficile encore la comparaison de prix.
600. Dans ces conditions, la preuve n'est pas apportée que les détaillants livrés par la société Valdenaire ont appliqué les prix conseillés par cette dernière, ni que celle-ci, par des menaces décidées en concertation avec la société Sintema à l'égard des discounters, les a réellement empêchés de vendre les produits Kuota. La pratique de prix imposés n'est donc pas établie.
Sur l'approvisionnement des distributeurs auprès de grossistes étrangers (grief n° 21)
Arguments de la société Valdenaire
601. Selon la société, si la correspondance échangée le 31 décembre 2001 et le 1er janvier 2002 entre un représentant et le directeur commercial de Valdenaire montre que la société Valdenaire refusait de livrer trois détaillants en produits Kuota, elle ne prouve pas qu'elle a demandé à la société Sintema de faire pression sur les distributeurs des autres pays pour qu'ils refusent de livrer ces détaillants français. D'ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que ces détaillants n'ont pas pu se fournir dans les pays voisins.
602. En tout état de cause, à supposer que le Conseil retienne cette pratique, la société Valdenaire considère que, compte tenu de la part infime des cadres Kuota dans le marché du cycle de moyenne et haut de gamme, elle n'a causé aucun dommage à l'économie.
Appréciation du Conseil
603. La lettre du 1er janvier 2002 de la société Valdenaire (paragraphe 238) montre qu'elle refusait de livrer trois distributeurs en produits Kuota et que la société Sintema était au courant de cet état de fait. Elle montre aussi qu'elle envisageait de suivre, grâce à leurs numéros, les cadres de vélo distribués par des détaillants étrangers, tout en avançant qu'elle ne pouvait rien faire pour empêcher la rétrocession de fourches à la société Dutouron.
604. Aucun élément du dossier en revanche ne démontre que la société Valdenaire a demandé à la société Sintema de faire pression sur des grossistes étrangers pour qu'ils refusent de livrer certains détaillants français, ni, à supposer que tel ait été le cas, que la société Sintema a donné son accord à cette action et a exercé effectivement les pressions nécessaires.
605. En conséquence, à défaut de preuve de l'accord de volonté entre les deux entreprises et de l'impact réel du refus d'approvisionnement auquel des distributeurs français ont pu être confrontés, il n'est pas démontré que les sociétés établissements René Valdenaire et Sintema se sont concertées pour empêcher des distributeurs de s'approvisionner auprès de grossistes étrangers.
3. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ PHILAMY (GRIEF N° 24)
606. Il a été reproché à la société Philamy d'avoir mis en place, pour ses revendeurs des produits de la société italienne Marzocchi, un contrat de distribution exclusive contenant une clause selon laquelle ceux-ci s'engageaient à respecter les prix de vente publics conseillés.
607. La société Philamy n'a pas produit d'observations en réponse à la notification de griefs et au rapport.
Appréciation du Conseil
608. Il résulte des constatations figurant au paragraphe 256 qu'une clause de respect des prix conseillés figure dans certains contrats de distribution des produits de marque Marzocchi, signés entre Philamy et ses distributeurs. Cette clause a eu un objet anticoncurrentiel dès lors qu'elle a incité les distributeurs à aligner leurs prix sur les prix conseillés par le fournisseur.
609. Les éléments présentés aux paragraphes 253 à 256, révèlent en outre qu'étaient organisés entre la société Philamy et la société Marzocchi des échanges réguliers sur les prix. La société Philamy éditait périodiquement des catalogues de prix conseillés pour ses revendeurs tandis que la société Marzocchi adressait à la société Philamy des listes de prix minimum au détail. Le contrat de distribution exclusive conclu avec la société Marzocchi prévoit que la société Philamy, distributeur exclusif ne doit pas avoir de relation commerciale avec un détaillant qui ne respecte pas le prix de revente.
610. Les échanges de prix et le dispositif contractuel permettraient une police des prix sous forme de l'obligation insérée dans les contrats signés avec la société Philamy qui imposait aux détaillants français vendant les produits Marzocchi de respecter les prix de vente conseillés, sous peine de ne pas obtenir l'engagement.
611. Cette menace a pu être d'autant plus efficace que, dans une lettre du 9 mars 2005 adressée au rapporteur (cotes 8065 à 8066), la société Philamy a indiqué que ces contrats étaient renouvelés tous les ans. Elle disposait donc d'un moyen de pression permanent pour obtenir l'application des prix.
612. Certes, aucun document trouvé dans le cadre de l'enquête ne permet d'affirmer que les prix conseillés ont été appliqués et que les contrats des détaillants qui ne les respectaient pas ont été de ce chef dénoncés par la société Philamy, laquelle a avoué elle-même les difficultés rencontrées pour mettre en œuvre cette clause. Mais ainsi qu'il a été rappelé au paragraphe 318, l'absence de démonstration des effets d'une pratique anticoncurrentielle par son objet n'empêche pas leur qualification au regard de la prohibition des ententes.
613. En conséquence, la société Philamy a mis en œuvre dans les contrats de distribution des produits de la société Marzocchi des dispositions sur le respect des prix contraires à l'article L. 420-1 du Code de commerce.
4. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ TWO LAMBS (GRIEF N° 25)
614. Il a été reproché à la société Two Lambs, importateur de vélos et cadres de la marque Cube, d'avoir interdit à ses revendeurs de vendre par correspondance à tarifs réduits et d'avoir exigé d'eux son autorisation préalable pour vendre à des prix conseillés.
Arguments de la société Two Lambs
615. La société a démenti avoir effectué un contrôle téléphonique des prix de vente et indiqué que ses tarifs conseillés étaient purement informatifs, le revendeur ayant toute latitude pour faire des remises.
Appréciation du Conseil
616. Les dispositions propres à la vente par correspondance insérées dans les conditions générales de vente de la société (paragraphes 261 et 262) et les contrats de distribution s'analysent en une pratique de prix imposés aux distributeurs. Elles ont fait l'objet d'une surveillance par les commerciaux de la société, comme l'atteste la lettre du gérant au rapporteur (paragraphe 263).
617. Certes, la clause relative aux prix de vente n'a pas porté sur les ventes faites par les détaillants dans leurs magasins mais seulement sur les ventes par correspondance dont la société pouvait se préoccuper légitimement dans la mesure où elle cherchait à développer un réseau traditionnel de revendeurs à qui elle imposait un aménagement de leurs points de vente pour présenter les cadres de la marque Cube ainsi que la présence d'un personnel qualifié et d'un atelier spécialement équipé pour réaliser les opérations d'assemblage.
618. Mais s'il est normal dans ces conditions que la société Lambs ait veillé à ce que les distributeurs ne vendent pas par correspondance des produits Cube dans des conditions de nature à affaiblir l'image de la marque, la présence d'une telle clause limitant la liberté du revendeur de fixer ses prix n'est pas susceptible, en vertu du règlement n°2790-1999 de la Commission, de bénéficier d'une exemption au titre du progrès économique.
619. En conséquence, la présence dans les conditions générales de vente de la société Two Lambs d'une clause générale sur les prix de vente par correspondance, destinée à imposer un prix minimum de revente, constitue une pratique anticoncurrentielle contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
5. EN CE QUI CONCERNE LA SOCIÉTÉ WILIER (GRIEF N° 26)
620. Il a été reproché à la société Wilier, qui n'a pas produit d'observations en réponse à la notification de griefs et au rapport, d'avoir mis en œuvre une concertation avec ses revendeurs pour faire respecter les prix de vente conseillés.
Appréciation du Conseil
621. Le grief s'appuie sur la déclaration de l'un des agents commerciaux de la société (paragraphe 267) qui assure la distribution de ses produits en France.
622. Cette déclaration confirme tout d'abord l'existence de discussions entre la société et ses revendeurs pour le respect des prix conseillés, eux-mêmes calculés au moyen d'une marge conseillée de 1,80 applicable au tarif de base.
623. Elle confirme aussi que le rôle des agents commerciaux de la société Wilier était de surveiller les prix de manière à éviter les dérapages importants. Cette surveillance des prix mise en œuvre par la société et ses distributeurs peut être déduite de la déclaration du président directeur général de la centrale Districycle selon laquelle : "Wilier a menacé sous la pression de ses distributeurs français, entre autres Bouticycle de Marseille et d'Avignon, d'augmenter mes prix d'achat de 5 % si nos distributeurs locaux continuaient d'appliquer une remise de 10 % sous forme de cadeaux sur leurs produits" (paragraphe 268).
624. Cependant, il ne ressort pas des éléments du dossier que les revendeurs de cette société ont donné leur accord à l'application de ces prix. La déclaration du président directeur général du réseau Districycle confirmerait plutôt que, malgré les pressions de la société Wilier, ceux-ci n'appliquaient pas les prix conseillés.
625. En conséquence, il n'est pas établi que la société Wilier s'est concertée avec ses revendeurs pour fixer le prix de vente de ses produits.
G. SUR L'AFFECTATION DU COMMERCE INTRACOMMUNAUTAIRE
626. Les griefs n° 9 et 23 ont été retenus sur le fondement de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité CE dans la mesure où les pratiques mises en œuvre ont eu pour effet d'empêcher les livraisons en provenance ou à destination des autres pays de l'Union.
627. La société Royal Vélo France estime à titre liminaire que ce grief n'aurait pas dû lui être notifié sur la base de l'article 81 du traité dans la mesure où, compte tenu de son chiffre d'affaires, elle se trouve en dessous du seuil de 40 millions d'euro à partir duquel est présumée une affectation sensible du commerce intracommunautaire.
628. Trois éléments doivent être démontrés pour établir que les pratiques sont susceptibles d'avoir sensiblement affecté le commerce intracommunautaire : l'existence d'échanges entre États membres portant sur les produits faisant l'objet de la pratique (premier point), l'existence de pratiques susceptibles d'affecter ces échanges (deuxième point) et le caractère sensible de cette possible affectation (troisième point).
629. S'agissant des deux premiers points, les pratiques en cause ayant eu pour objet et effet de limiter les importations et les exportations au sein de l'Union, il est incontestable qu'elles sont, par leur nature même, susceptibles d'affecter le courant des échanges intracommunautaires.
630. S'agissant du troisième point, les lignes directrices de la Commission européenne relatives à la notion d'affectation du commerce (2004-C 101-07) citent au paragraphe 52 les deux seuils cumulatifs de minimis en deçà desquels un accord est présumé ne pas affecter sensiblement le commerce entre Etats membres :
??la part de marché totale des parties sur un marché communautaire en cause affecté par l'accord n'excède pas 5 % ;
??et, dans le cas d'accords verticaux, le chiffre d'affaires annuel total réalisé dans la communauté par le fournisseur avec les produits concernés par l'accord n'excède pas 40 millions d'euro.
631. Ce seuil de 40 millions d'euro est calculé, selon le paragraphe 54 des lignes directrices, sur la base des ventes totales hors taxes réalisées dans la Communauté, durant l'exercice écoulé, par les entreprises en cause avec les produits concernés par l'accord.
632. Or en l'espèce, les griefs notifiés sur la base de l'article 81 du traité ont concerné les produits suivants :
- s'agissant du grief n° 9 notifié aux sociétés Look international, Nethub et José Alvarez, les cadres de vélo Look ;
- s'agissant du grief n° 23 notifié à la société Time Sport international, les produits commercialisés par elle sans qu'il soit possible de dire précisément lesquels.
633. En France, la société Look Cycle international a réalisé un chiffre d'affaires de 24,8 millions d'euro et la société Time Sport international un chiffre d'affaires de 13,6 millions d'euro. Ces sociétés sont spécialisées dans la fabrication des cadres, fourches, pédales et accessoires pour cycles, produits concernés par les accords visant à en limiter l'échange au niveau communautaire. De son côté, la société Alvarez, importatrice d'articles de cyclisme a réalisé en 2002 un chiffre d'affaires de 30 millions d'euro.
634. Si les informations manquent pour mesurer le montant des ventes des produits en cause réalisées au sein de l'Union européenne, il est peu probable que pour chacun des produits en cause, à savoir les cadres de Vélo Look et les produits distribués par la société Time Sport international, le volume des affaires de ces deux sociétés ait dépassé le seuil de 40 millions d'euro et que la part de marché totale de ces entreprises sur le marché communautaire en cause ait excédé 5 %.
635. En conséquence, il peut être présumé que les pratiques relevées dans les griefs n° 9 et n° 23 n'ont pas eu d'effet sensible sur les échanges intracommunautaires.
636. Les pratiques notifiées dans les griefs n° 9 et n° 23 ne sont en conséquence pas susceptibles d'être prohibées au titre de l'article 81 du traité CE.
H. SUR LES SANCTIONS
637. Les pratiques retenues dans les griefs n° 2 et 3 ont été commises en mars et avril 2001, soit antérieurement au 18 mai 2001 date de l'entrée en vigueur de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. En vertu de la non rétroactivité des lois à caractère punitif, les dispositions introduites par cette loi à l'article L. 464-2 du Code de commerce, en ce qu'elles sont plus sévères que celles qui étaient en vigueur antérieurement, ne leur sont pas applicables.
638. Aux termes de l'article L. 464-2 du Code commerce dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2001 : "Le Conseil de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement soit en cas de non exécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie et à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 5 % du chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le maximum est de 1 524 490 euro (10 000 000 francs)".
639. En revanche, les autres pratiques révélées dans le dossier soit ont été commises postérieurement au 18 mai 2001, soit ont commencé antérieurement à cette date mais ont été poursuivies, s'agissant notamment des clauses anticoncurrentielles des contrats, postérieurement à cette date. La saisine du Conseil ayant été effectuée le 8 septembre 2004, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de cette même loi, les dispositions du livre IV du Code de commerce applicables aux pratiques analysées dans les griefs n°1, 4, 5, 7, 10, 11, 17, 18, 23, 24, et 25 sont celles issues de la loi du 15 mai 2001.
640. Aux termes de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction résultant de la loi du 15 mai 2001 : "Le Conseil de la concurrence peut (...) infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné (...) et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction. Si le contrevenant n'est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d'euro.
Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des derniers exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante".
1. SUR LA GRAVITÉ DES FAITS
641. La pratique d'entente horizontale visée au grief n° 2, entre les membres du réseau Master Cycle, visant à exclure certains distributeurs de cycles, à laquelle a adhéré la société Santini (grief 3) et la concertation horizontale sur les coefficients moyens de marge des détaillants du réseau Bouticycles (grief n°5), qui ont eu pour but l'exclusion ou l'éviction d'une catégorie de distributeurs, les discounters, de la distribution des cycles en France et ont conduit à faire pression sur ces réseaux de distribution concurrents afin que leurs prix s'alignent sur ceux de la distribution "traditionnelle", sont d'une particulière gravité au regard de la pratique décisionnelle du Conseil de la concurrence. Il en est de même de l'entente conclue entre le GIE Master Cycle et le fournisseur Bicicletas de Alava qui tendait aussi à exclure une chaîne de distribution ne respectant pas les prix conseillés (grief n° 17).
642. Par ailleurs, les autres pratiques sont relatives à l'insertion, dans les contrats de distribution des fournisseurs ou dans les conditions d'agrément des fournisseurs posées par le réseau Master Cycle, de clauses "noires", au sens du règlement communautaire de 1999, imposant soit le respect d'un prix "conseillé" (griefs n° 1, 10, 11, 18, 24 et 25), soit interdisant les exportations (grief n° 23), soit encore prohibant les ventes entre distributeurs. L'adoption de telles clauses, dont l'effet a été de renforcer l'action anticoncurrentielle des deux réseaux, et d'accentuer le verrouillage entre les différentes formes de distribution, revêt un caractère certain de gravité.
2. LE DOMMAGE À L'ÉCONOMIE
643. Il convient de noter tout d'abord que si les pratiques en cause ont été mises en œuvre entre 2000 et 2004, il n'existe pas d'élément dans le dossier autorisant à conclure qu'elles se sont poursuivies de manière continue au cours de cette période. Les ententes horizontales objet des griefs n° 2 et 3 ont été limitées dans le temps et celle objet du grief n° 5 ne s'est pas prolongée au delà des années 2002 et 2003. La pratique, objet du grief n° 17, a été mise en œuvre entre avril et octobre 2001. Ces pratiques ont donc eu dans l'ensemble une durée limitée.
644. Ensuite, il a été constaté durant cette période, que la concurrence n'a pas été supprimée sur la totalité des produits fournis par les entreprises aux détaillants des réseaux Master et Bouticycles ainsi qu'aux autres réseaux de distribution.
645. La concurrence a continué à jouer entre les différents réseaux de distribution car les grandes surfaces alimentaires mais surtout les magasins spécialisés et les grandes enseignes multisport ont proposé de plus en plus à leur clientèle des produits haut de gamme, de différentes marques.
646. Si les détaillants spécialisés représentent toujours la moitié du montant total des affaires du secteur dans le vélo de haute et moyenne gamme, ils tendent cependant à perdre du terrain au profit des grandes surfaces spécialisées multisport.
647. En ce qui concerne les vélos de course, objet des pratiques contestées, les distributeurs spécialisés ont conforté leur prédominance. Les chiffres fournis par l'Observatoire du commerce du cycle en France confirment cette opinion.
648. Sur les 158 400 vélos de course vendus en 2003, 81 % l'ont été par les détaillants spécialisés. En valeur, la vente des vélos de course a atteint 188 millions d'euro dont 88 % réalisés par les détaillants spécialisés. La grande technicité des produits, l'expertise technique des détaillants ainsi que la spécificité de la clientèle permettent d'expliquer ce phénomène.
649. Il n'apparaît pas cependant que cette prédominance, comme la hausse des prix constatée sur les cycles haut de gamme puissent s'expliquer par la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles par les réseaux Master Cycle et Bouticycles. Il est plus probable que les évolutions technologiques de ces produits avec l'apparition fréquente de nouvelles gammes de cycles toujours plus performantes pour répondre à la demande croissante de consommateurs exigeants expliquent la hausse de la demande de ces produits et l'évolution de leurs prix.
650. Représentant moins de 200 détaillants sur environ 2 000 revendeurs spécialisés répartis sur le territoire national, les réseaux en cause dans la présente affaire ont été en concurrence avec d'autres réseaux de détaillants plus puissants qu'eux et n'ont pu en outre imposer un véritable pouvoir de marché. A cet égard, aucun élément du dossier ne montre que les enseignes considérées comme des discounters par ces détaillants ont été gênées de manière significative dans la distribution de leurs produits (Dutouron et Districycle).
651. Du côté des fournisseurs, leur action sur les prix a été en toute hypothèse limitée par la concurrence des autres fabricants sur la quasi-totalité des produits et accessoires pour cycles. La nécessité pour ces entreprises de proposer à la clientèle de nombreux composants a provoqué une forte concurrence inter-marques sur l'ensemble de ces produits. Ils ont été également confrontés à l'apparition sur le marché de marques de distributeurs proposées par des enseignes puissantes à l'image de Décathlon.
652. De plus, les fabricants doivent faire face à l'accroissement des importations dans le secteur. Le taux de pénétration des importations a gagné 5,5 points entre 2002 et 2003 pour s'établir à 54,8 %. La parité dollar/euro a rendu les importations compétitives sur le marché français, notamment en provenance des pays asiatiques, les livraisons en provenance de Taïwan et de la Chine représentant durant cette période plus de 35 % des importations (pour les vélos bas de gamme).
653. L'ensemble de ces éléments, et notamment la constatation que le marché des cycles de moyenne et haute gamme destinés à la pratique sportive du cyclisme ainsi que des pièces détachées et accessoires pour cyclistes est resté concurrentiel, permet de considérer que le dommage créé par la mise en œuvre de ces pratiques a été limité et n'a pas fortement pénalisé le consommateur ni en terme de prix, ni en terme de qualité et de variété des produits offerts.
3. SUR LE MONTANT DE LA SANCTION
La société MC2R et les membres du réseau Master Cycles
654. La SARL MC2R, qui était le GIE Master Cycle au moment des faits, a pris une part déterminante dans les actions de pressions du réseau sur les fournisseurs Santini et Chapak afin que ceux-ci cessent de livrer la société Districycle (grief n° 2), sur BH afin qu'il cesse de livrer Supersport (grief n° 17) et a élaboré un critère d'agrément des fournisseurs travaillant avec le réseau fondé sur leur respect des prix imposés (grief n° 1), pratiques prohibées par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 167 715 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels constatés précedemment, il y a lieu de lui infliger une amende de 1 300 euro.
655. Les sociétés SARL Cycles Cesbron, Collard, Chiasson, l'entreprise individuelle Dominique Nicole, Cyclerie Rossé Sport et Sports Cyclistes ont participé, en tant que membres du conseil d'administration du réseau Master Cycle, à l'action collective du réseau visant à travers Santini à exclure des distributeurs concurrents pratiquant des prix discount (grief n° 2) et à la conception de la clause anticoncurrentielle d'agrément des fournisseurs (grief n° 1), pratiques prohibées par l'article L. 420-1 du Code de commerce.
656. La société SARL Cycles Cesbron a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 3 047 347 euro au cours de l'exercice clos le 31 janvier 2006. En fonction des éléments généraux et individuels constatés précédemment, il y a lieu de lui infliger une amende de 15 200 euro.
657. La SA société Collard et fils a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 6 973 423 euro, au cours de l'exercice clos le 30 septembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels constatés précédemment, il y a lieu de lui infliger une amende de 34 900 euro.
658. La SARL Chiasson a réalisé un d'affaires en France et mondial hors taxes de 2 189 000 euro, au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels constatés précédemment, il y a lieu de lui infliger une amende de 10 900 euro.
659. L'entreprise individuelle Dominique Nicole a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 356 900 euro au cours du dernier exercice clos le 31 mai 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 1 800 euro.
660. La SARL Cyclerie Rossé Sport a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 877 532 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 4 300 euro.
661. La SARL Sports Cyclistes a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 655 994 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 3 200 euro.
662. La SARL Isly 2000 a participé à l'élaboration du critère anticoncurrentiel d'agrément des fournisseurs du réseau Master Cycle (grief n° 1). Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 807 148 euro au cours du dernier exercice clos le 31 janvier 2004, seul exercice communiqué par l'intéressée. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 2 020 euro.
Les sociétés Néthub, Alvarez et les entreprises membres du réseau Bouticycle
663. Les sociétés Nethub, SAS José Alvarez, Cycles et Sports Tilly, Sofretin et Revaxion, membres du CSRB en 2002, ont participé à l'entente sur les coefficients de prix (grief n° 5) et ont adopté, pour les membres du réseau Bouticyle, une clause comportant une interdiction de rétrocession des produits vendus par la société Alvarez (grief n° 4), pratiques prohibées par l'article L. 420-1 du Code de commerce.
664. La société Nethub a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 2 050 057 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 10 300 euro.
665. La SAS José Alvarez a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 34 651 396 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment évoqués, il y a lieu de lui infliger une amende de 173 300 euro.
666. La SARL Cycles et Sports Tilly a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 670 195 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment évoqués, il y a lieu de lui infliger une amende de 3 400 euro.
667. La SARL Sofretin a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 1 631 925 euro au cours du dernier exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 8 200 euro.
668. La SARL Revaxion a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 2 078 392 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 10 400 euro.
Les fournisseurs et négociants
669. La société Bicicletas de Alava s'est entendue avec le GIE Mastercycles visant à cesser de livrer Supersport (grief n° 17), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires mondial hors taxes de 44 043 41 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 110 000 euro.
670. La SA Time Sport international a inséré des clauses d'interdiction d'exportation dans ses contrats (grief n° 23), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 14 719 721 euro au cours de l'exercice clos le 31 juillet 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 36 800 euro.
671. La SA Les Créations Jean Pierre a inséré dans ses contrats une clause portant sur les prix de détail de ses distributeurs (grief n° 11), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 2 106 842 euro au cours de l'exercice clos le 30 avril 2006, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 5 300 euro.
672. La SARL Santini France a adhéré à l'entente entre le GIE Master Cycle et ses adhérents visant à cesser de livrer la société Districycle (grief n° 3), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce et commise avant l'entrée en vigueur de la loi du 15 mai 2001. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France hors taxes de 1 739 777 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 4 300 euro.
673. La SA Look Cycle international a inséré dans ses contrats une clause interdisant la rétrocession de ses produits entre distributeurs (grief n° 7), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 25 444 745 euro au cours de l'exercice clos le 30 juin 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 63 600 euro.
674. La SAS Shimano France composants cycles a inséré dans ses contrats une clause portant sur les prix de détail de ses distributeurs (grief n° 10), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 21 881 464 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 54 700 euro.
675. La SARL Philamy a inséré dans ses contrats une clause portant sur les prix de détail de ses distributeurs (grief n° 24), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 2 073 462 euro au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 5 200 euro.
676. L'EURL Two Lambs a inséré dans ses contrats une clause portant sur les prix de détail de ses distributeurs (grief n° 25), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 958 612 euro au cours de l'exercice clos le 30 septembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précédemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 2 400 euro.
677. La société Royal Vélo France a inséré dans ses contrats une clause de respect des prix conseillés (grief n° 18), pratique prohibée par l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle a réalisé un chiffre d'affaires en France et mondial hors taxes de 7 738 101 euro, au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2005, dernier exercice clos disponible. En fonction des éléments généraux et individuels précedemment constatés, il y a lieu de lui infliger une amende de 19 300 euro.
Décision
Article 1er : La société Bouticycle Toulousain et la société Cycles Vial sont mises hors de cause.
Article 2 : Les pratiques visées sous les griefs n° 2, 6, 8, 9, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 19, 20, 21, et 26 ne sont pas établies à l'encontre des sociétés Cycles Chauvière, Cycles Gauthier,Torch'VTT, Le Penven, Cycles Leroy, Cyclosport Pedegaye, Michenon, Cycles Robert, Ryder France, SARL Toinet, Velo Plus, 2F2G, Intercycles, Hutchinson, Michelin, Sidi Sport, Sintema, Etablissement René Valdenaire, Wilier, Auchan, et Décathlon.
Article 3 : Il est établi que les sociétés MC2R, Cesbron, Collard et Fils, Chiasson, Dominique Nicole, La Cyclerie Rossé Sport, Sports cyclistes, Isly 2000, Néthub, Alvarez, Bouticycle toulousain, Cycles et sports Tilly, Sofretin, Revaxion, Bicicletas de Alava, Les Créations Jean Pierre, Time Sport International, Santini France, Look Cycle International, Shimano France, Royal Vélo France, Philamy et Two Lambs ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 et de l'article 81-1 du traité CE.
Article 4 : Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :
à la société MC2R une sanction de 1 300 euro ;
à la SARL Cycles Cesbron une sanction de 15 200 euro ;
à la SA Collard et fils une sanction de 34 900 euro.
à la SARL Chiasson une sanction de 10 900 euro ;
à la société entreprise individuelle Dominique Nicole une sanction de 1 800 euro ;
à la SARL Cyclerie Rossé Sport une sanction de 4 300 euro ;
à la SARL Sports Cyclistes une sanction de 3 200 euro ;
à la société Isly 2000 une sanction de 2 020 euro ;
à la sa Nethub une sanction de 10 300 euro ;
à la SAS José Alvarez une sanction de 173 300 euro ;
à la SARL Cycles et Sports Tilly une sanction de 3 400 euro ;
à la SARL Sofretin une sanction de 8 200 euro ;
à la SARL Revaxion une sanction de 10 400 euro ;
à la société Bicicletas de Alava une sanction de 110 000 euro ;
à la SA Time Sport International une sanction de 36 800 euro ;
à la SA Les Créations Jean-Pierre une sanction de 5 300 euro ;
à la SARL Santini France une sanction de 4 300 euro ;
à la SA Look Cycle International une sanction de 63 600 euro ;
à la SAS Shimano France composants cycles une sanction de 54 700 euro ;
à la SARL Philamy une sanction de 5 200 euro ;
à l'EURL Two Lambs une sanction de 2 400 euro ;
à la société Royal Vélo France une sanction de 19 300 euro.