Cass. com., 31 octobre 2006, n° 04-18.043
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Comité national olympique et sportif français
Défendeur :
Galec (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 2 juillet 2004), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 11 mars 2003, pourvoi n° 00-22.722), que la société Groupement d'achat Edouard Leclerc (la société Galec) titulaire de marques "Olymprix" déposées en 1987 et 1993, utilise ce terme pour l'organisation et la publicité d'une campagne annuelle de promotion à prix réduits dans les magasins à l'enseigne Edouard Leclerc ; que le Comité national olympique et sportif français (le CNOSF) l'a assignée en responsabilité, en se fondant notamment sur l'atteinte à des marques antérieures, et subsidiairement sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil, afin qu'il lui soit fait interdiction d'user de ce terme et qu'elle soit condamnée au paiement de dommages-intérêts ; que la cour d'appel a décidé que l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle instaurant une action spéciale en responsabilité, les dispositions de l'article 1382 du Code civil ne pouvaient être utilement évoquées s'agissant des mêmes faits ; que cet arrêt a été cassé ; que la cour d'appel a décidé que le CNOSF était fondé à opposer les dispositions du droit de la responsabilité délictuelle de droit commun pour parasitisme de ses marques d'usage notoires "Olympique" et "Jeux olympiques" et du terme "olympique", caractéristique de sa dénomination sociale, aux droits que la société Galec tenait de l'enregistrement de ses marques dénominatives "Olymprix", a interdit à la société Galec de faire tout usage du néologisme "Olymprix" à titre de marque ou autrement, seul ou intégré dans une formule telle que "transporteur officiel Olymprix", sous peine d'astreinte, et ordonné à la société Galec de procéder à la radiation de ses deux marques, conformément aux dispositions des articles R. 714-1 et R. 714-21 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que la société Galec fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen : 1°) qu'en l'absence d'un texte de droit interne ou de droit international protégeant la marque ou le nom notoirement connus contre toute usurpation ou imitation même pour désigner des produits différents, le fait de cette adoption ou de cette imitation pour des produits différents ne saurait constituer une faute ; qu'il n'en irait autrement que si cette adoption avait été faite dans l'intention de nuire ou qu'elle avait créé une confusion dans l'esprit du public de nature à préjudicier au propriétaire de la marque ; qu'en l'espèce, elle faisait valoir que s'agissant d'un conflit entre marques, le fait que ce conflit aurait été réglé non par les dispositions de la législation spéciale du Code de la propriété intellectuelle mais par le droit commun, ne dispensait pas le juge de rechercher si le fait de déposer la marque "Olymprix" en 1987 et 1993, dates à laquelle les marques notoires de services, telles que "Olympique" ou "Jeux olympiques" n'avaient aucune existence légale, celle-ci ne leur ayant été accordée que par les accords ADPIC entrés en vigueur le 1er janvier 1996, caractérisait, à cette date, l'intention de nuire ; qu'en se bornant à affirmer, dans des termes généraux, qu'en se plaçant dans le sillage de la marque notoire qu'elle dépréciait, la société Galec avait commis une faute, sans rechercher si cette faute était constituée avant le 1er janvier 1996, la cour d'appel n'a pas suffisamment caractérisé la faute retenue avant cette date au regard de l'article 1382 du Code civil ; 2°) que le terme "Olymprix" peut tout aussi bien être considéré comme se situant dans le sillage de l'olympisme que dans celui de l'olympe, les termes "olympe" ou "olympien", étant des termes courants, nom commun et adjectif, pour désigner l'ensemble des dieux de l'Olympe, puis la demeure des dieux et de là, le calme, la sérénité, voire l'excellence, ou encore plus certainement, notamment par des clients d'hypermarchés, dans celui d'Astérix, Obélix, Panoramix, et toute la confrérie des mots en ix ; qu'en affirmant péremptoirement que les marques "Olymprix" imitaient ou évoquaient les marques "Olympique" et "Jeux Olympiques" et qu'elles étaient exclusivement destinées à parasiter celles du CNOSF et à tirer profit de leur prestige tout en les avilissant par la connotation mercantile qu'introduit la syllabe finale " prix", sans autrement caractériser cette prétendue imitation, sauf à prétendre que des mots tels qu'olympe ou olympien seraient parasitaires, la cour d'appel n'a pas suffisamment justifié sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ; 3°) que le principe "generalia specialibus non derogant" s'oppose à ce qu'un comportement qui n'est pas incriminé par la loi spéciale puisse l'être par le droit commun ; que le critère de parasitisme ne saurait en aucune façon constituer un autre moyen de formuler le grief de contrefaçon que le législateur a, à dessein, entendu écarter par la loi spéciale et qui seul permet d'agir en nullité d'une marque ; qu'en ordonnant la radiation de la marque enregistrée, sans passer par la nullité, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1382 du Code civil ; 4°) que la cour d'appel qui a considéré que la protection de la marque notoire de service contre une imitation de celle-ci ne pouvait pas avoir lieu sur le fondement du droit des marques, mais uniquement sur celui du droit commun, et qui, cependant, pour sanctionner l'usage prétendument parasitaire d'une marque imitant la marque notoire a ordonné la radiation des marques auprès de l'INPI, en se fondant sur les dispositions du Code de la propriété intellectuelle n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en constatant qu'il est définitivement jugé en la présente instance que les marques "Olympique" et "Jeux Olympiques" sont des marques d'usage, non enregistrées, notoires, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise en relevant exactement que ce ne sont pas les lois et conventions internationales ultérieures qui ont conféré à ces marques de service une existence légale qu'elles n'auraient pas possédée jusqu'alors, puis décidé à bon droit que leur protection relève du droit commun de la responsabilité civile, a légalement justifié sa décision en retenant que le retentissement et la renommée des Jeux olympiques étant exceptionnels, la société Galec avait commis une faute en constituant des droits de marques imitant les signes caractéristiques du mouvement olympique, puis en les utilisant dans le but de profiter, sans bourse délier, de l'image d'excellence de ce mouvement ;
Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel n'était pas tenue, pour retenir souverainement que le terme "Olymprix" évoquait l'idée olympique, d'examiner toutes les autres associations d'idées pouvant naître de cette expression ;
Et attendu, enfin, qu'en ordonnant la radiation des marques détenues par la société Galec, selon les formes qui ne pouvaient qu'être celles fixées aux articles R. 714-1 et R. 712-21 du Code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel a souverainement apprécié, sans être tenue de prononcer de manière distincte la nullité de ces marques, le principe et les modalités de réparation du préjudice, notamment au regard de sa constatation selon laquelle une telle radiation était nécessaire pour empêcher la poursuite des actes parasitaires ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.