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Décisions

CCE, 19 juillet 2006, n° 2006-949

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Mesure mise en œuvre par les Pays-Bas en faveur de VAOP

CCE n° 2006-949

19 juillet 2006

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa, Vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a), Après avoir invité les parties intéressées à présenter leurs observations conformément auxdits articles (1), et compte tenu de ces observations, Considérant ce qui suit:

1. PROCÉDURE

(1) Par lettre du 12 juin 2002, enregistrée le 17 juin 2002, la Commission a reçu une plainte contre quatre aides prétendument illégales en faveur de la Vereniging van Aanbieders van Oud Papier (association de fournisseurs de vieux papiers, ci-après dénommée "VAOP"), sous la forme d'une exonération partielle de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée, de l'octroi d'un prêt par la Bank Nederlandse Gemeenten, ci-après dénommée "la BNG" et de l'octroi d'un prêt subordonné par quelques communes. Par lettres du 30 juillet 2002 et du 6 décembre 2002, la Commission a adressé aux autorités néerlandaises une demande de renseignements complémentaires, lesquels lui ont été fournis par lettres du 10 octobre 2002 et du 10 février 2003. Le 29 avril 2003, une réunion s'est tenue entre le plaignant et les services de la Commission. Par lettre du 5 mai 2003, le plaignant a signalé à la Commission qu'il avait l'intention de recueillir de plus amples informations sur cette affaire auprès des autorités néerlandaises et, sur cette base, de concentrer ensuite sa plainte sur certaines mesures seulement.

(2) Par lettre du 13 septembre 2004, le plaignant a fourni des données supplémentaires et a fait savoir qu'il souhaitait limiter sa plainte au prêt accordé par la BNG à VAOP. Sur la base de ces nouvelles informations, la Commission a adressé aux autorités néerlandaises, par lettre du 21 octobre 2004, une demande de renseignements complémentaires, lesquels lui ont été fournis le 17 décembre 2004. Le 3 mai 2005, la Commission a fait savoir aux Pays-Bas qu'elle avait décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité concernant le prêt accordé par la BNG et le prêt consenti par les communes participantes.

(3) Après avoir sollicité à deux reprises une prolongation du délai qui leur était imparti pour réagir à l'ouverture de la procédure, les autorités néerlandaises ont finalement communiqué leur réponse par lettre du 29 août 2005. Le 9 novembre 2005, la Commission a demandé des informations supplémentaires, lesquelles lui ont été fournies par lettre du 8 décembre 2005. Par courrier électronique du 4 mai 2006, la Commission a adressé une nouvelle demande d'informations aux autorités néerlandaises, qui lui ont répondu par lettres du 2 juin 2006 et du 19 juin 2006.

(4) La décision de la Commission d'ouvrir la procédure d'enquête formelle a été publiée au Journal officiel du 30 septembre 2005 (2). Le 28 octobre 2005, le plaignant a fait connaître ses observations sur cette décision et a demandé à la Commission de joindre à ces observations les lettres précitées du 12 juin 2002 et du 13 septembre 2004, de même que le compte rendu de la rencontre du 29 avril 2003, et de considérer les lettres comme en faisant partie intégrante. La version non confidentielle des deux lettres a été transmise aux Pays-Bas le 24 novembre 2005; les Pays- Bas ont fait parvenir leur réponse par lettre du 16 décembre 2005.

(5) Par lettre du 28 octobre 2005, la Commission a reçu des observations sur la décision d'ouverture de la procédure de la part de la prétendue bénéficiaire, VAOP, qui sollicitait par ailleurs une entrevue. Cette entrevue a été organisée le 31 janvier 2006. Par lettre du 27 mars 2006, VAOP a fourni de plus amples informations en complément aux observations formulées lors de l'entrevue.

2. DESCRIPTION

2.1. La bénéficiaire

(6) VAOP a été créée au début des années quatre-vingt-dix par plusieurs communes néerlandaises. Il s'agit d'une société coopérative sans but lucratif à responsabilité limitée proposant à ses membres certains services aux conditions les plus favorables qui soient. VAOP a plus particulièrement pour objet l'organisation, de façon optimale, de la collecte, du traitement initial (tri/compactage) et de la vente des vieux papiers en provenance du territoire des communes participantes, membres de l'association. Ces activités ont été étendues ultérieurement à la collecte de verre usagé et à d'autres déchets à valoriser.

(7) VAOP n'est pas une entreprise à intégration entièrement verticale. Elle ne fait qu'organiser les activités citées pour ses membres et sous-traite en grande partie les tâches opérationnelles, telles que le transport des déchets, à d'autres entreprises. C'est la raison pour laquelle l'association n'employait en 2002 que 20 travailleurs pour un chiffre d'affaires de 27,5 millions d'euro. VAOP facture aux autorités locales les frais inhérents à la collecte et au traitement initial des déchets à valoriser en provenance de leur district et leur verse, en contrepartie, les recettes générées par la vente des déchets valorisables aux producteurs de matériaux recyclés (par exemple, le papier recyclé).

(8) Les autorités fiscales néerlandaises ne considèrent pas VAOP comme un organisme public.

(9) La première entité créée a été l'association de coopération à responsabilité limitée Coöperative Vereniging VAOP B.V. Au cours des années, cette société mère a fondé diverses filiales dans lesquelles elle a intégré le volet opérationnel de ses activités. Ces filiales sont des sociétés à responsabilité limitée. La Commission examinera toutes ces entreprises en tant que groupe constituant une entité économique unique ("VAOP"), étant donné que la société mère possède un intérêt majoritaire dans toutes les filiales. Les filiales sont comprises dans les comptes consolidés de la société mère. En outre, la BNG, le créancier le plus important de VAOP, a conclu un contrat de prêt uniquement avec le groupe et non pas avec chacune des entreprises, bien que ce contrat fixe également des plafonds de crédit pour certaines de ces filiales. Enfin, le contrat mentionne des garanties réciproques entre les différentes entreprises du groupe; ainsi chaque entreprise doit-elle répondre envers la BNG des dettes des autres entreprises du groupe.

2.2. Le marché

(10) Les activités de VAOP ont enregistré une forte croissance au cours des années quatre-vingt-dix. Durant les premières années de cette décennie, la part de marché de l'association a atteint entre 25 et 30 % du marché néerlandais de la collecte de vieux papiers. Parallèlement, VAOP est un acteur important sur le marché du traitement des vieux papiers (tri/compactage). Par ailleurs, VAOP a pénétré le marché néerlandais de la collecte de verre usagé, dont elle est devenue l'un des leaders. Certaines entreprises opérant sur ces marchés sont des filiales d'entreprises étrangères.

(11) Bien qu'aux Pays-Bas, les autorités locales soient tenues d'assurer la collecte sélective des vieux papiers et leur placement sur le marché du recyclage, la manière dont ces activités doivent être accomplies n'est pas réglementée. Aussi la plupart des communes néerlandaises organisentelles des procédures d'appel d'offres pour leur attribution. Dans le cadre de ces procédures, VAOP est entrée en concurrence directe avec des entreprises du secteur privé offrant les mêmes services (3). En outre, VAOP s'efforce de gagner de nouveaux membres en établissant des contacts avec les communes et en leur proposant de rejoindre l'association. Dans les cas considérés, VAOP peut être réputée entrer également en concurrence avec des entreprises du secteur privé (4), qui tentent de recruter les mêmes clients.

2.3. Les deux mesures

(12) Premièrement, la BNG a accordé à VAOP, en mars 1998, une facilité de crédit d'un montant de 16,3 millions NLG (7,4 millions d'euro) ("la première mesure"). Le 31 décembre 1997, le bilan consolidé de VAOP faisait apparaître que les fonds propres s'élevaient à 0,8 million NLG (0,4 million d'euro) pour un total de bilan de 17,3 millions NLG (7,9 millions d'euro). Un an plus tard, après l'expiration du prêt, les fonds propres et le total du bilan se montaient respectivement à 0,09 million NLG (0,04 million d'euro EUR) et 29,1 millions NLG (13,2 millions d'euro).

(13) Deuxièmement, les autorités locales ont accepté, dans le courant de 2001, de transformer une partie des montants que VAOP leur devait - en leur qualité de fournisseurs de vieux papiers - en un prêt de 3 millions NLG (1,3 million d'euro) ("la deuxième mesure"). Fin 2000, VAOP avait essuyé de lourdes pertes après la faillite de l'une de ses filiales. Le 31 décembre 2000, les comptes consolidés de VAOP révélaient un montant de fonds propres négatifs de 3,4 millions NLG (1,5 million d'euro). À cette même date, le total du bilan atteignait 32,1 millions NLG (14,5 millions d'euro). Étant donné que le principal créancier de VAOP, la BNG, avait négocié des nantissements sur la quasi-totalité des actifs, ce prêt non couvert pouvait être considéré comme subordonné aux créances de la BNG. C'est la raison pour laquelle il a été appelé "prêt subordonné".

3. MOTIFS D'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE D'ENQUÊTE FORMELLE

(14) La Commission a ouvert la procédure d'enquête formelle parce qu'elle doutait qu'un investisseur normal en économie de marché aurait mis en œuvre la première mesure. La Commission observe qu'à l'époque considérée, VAOP disposait de fonds propres minimes. En outre, l'étendue du nouveau prêt semble particulièrement importante au regard du total du bilan de l'emprunteur. Bref, le risque induit par ce prêt aurait été trop grand pour un investisseur normal en économie de marché.

(15) S'agissant de la seconde mesure, la Commission doutait qu'un créancier opérant dans des conditions de marché normales eût accepté de convertir sa créance en un tel prêt subordonné. En effet, ce prêt semblait très risqué, vu la mauvaise situation financière de l'entreprise et le fait que la BNG avait constitué des nantissements sur tous les actifs. Enfin, la Commission doutait qu'un créancier dans une économie de marché n'eût pas exigé des intérêts plus élevés.

(16) Par conséquent, la Commission présumait que les deux mesures étaient susceptibles de constituer une aide d'État en faveur de VAOP et étaient dès lors illégales au regard de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

4. OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES

(17) La Commission a reçu les observations suivantes de la part du plaignant. En ce qui concerne la première mesure, il déclare que la politique générale et la pratique constante de la BNG consistent à proposer des produits financiers aux organismes publics et aux organismes liés aux pouvoirs publics à des conditions non conformes au marché. Il analyse ensuite l'importance des fonds propres de VAOP et conclut que la structure du bilan était loin d'être saine. Le manque de fonds propres était considérable. Il souligne également le montant élevé des dettes. Dans ces circonstances, le prêt accordé par la BNG a permis à VAOP d'étendre ses activités, en dépit d'un manque de fonds propres, et ce, à faible coût. Le plaignant pense qu'un prêt si risqué n'aurait pas été accordé par une banque privée et qu'il constitue dès lors une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

(18) Le plaignant soutient également qu'attendu que la situation financière de VAOP ne s'est pas améliorée au cours des années, la BNG n'aurait pas dû continuer à financer cette entreprise.

(19) Pour ce qui est de la seconde mesure, le plaignant indique que ce prêt subordonné comportait de très nombreux risques, compte tenu de l'importance des dettes de VAOP qui, en cas de faillite, seraient les premières à être apurées. Le rendement sur le prêt était insuffisant pour compenser ce risque. Par conséquent, ce prêt serait lui aussi constitutif d'une aide d'État.

(20) La Commission a reçu les observations suivantes de la part de VAOP, la prétendue bénéficiaire. Au sujet de la première mesure, VAOP affirme qu'il s'agissait d'une transaction purement commerciale, compatible avec le principe de l'investisseur en économie de marché. VAOP fait remarquer qu'elle avait également contacté plusieurs banques privées, qui lui avaient proposé un financement à des conditions qui ne différaient pas beaucoup de celles offertes par la BNG. VAOP a produit une copie d'une offre de financement signée par [une banque privée] (*) datée du 7 janvier 1998.

(21) S'agissant de la seconde mesure, VAOP déclare qu'elle n'était pas tenue de contracter le soi-disant prêt subordonné auprès des communes. Sur la base de ses statuts et des contrats de fourniture conclus avec les communes, VAOP ne pouvait être tenue de verser aux fournisseurs de vieux papiers un montant plus élevé que ses liquidités ne le lui permettaient. En outre, VAOP avait le droit d'imposer des obligations à ses membres sous la forme d'une "cotisation annuelle", qui permettait de couvrir des coûts d'exploitation ou qui pouvait être considérée comme du capital-risque. La direction de VAOP a décidé de créer une créance des communes participantes à l'égard de VAOP, une possibilité qui était également prévue dans le contrat conclu avec les communes.

5. OBSERVATIONS DES PAYS-BAS

(22) Concernant la première mesure, les Pays-Bas déclarent que l'octroi d'une facilité de crédit par la BNG ne peut être imputé à l'État. Les autorités néerlandaises soulignent que la BNG est une société anonyme. Elles reconnaissent certes que les actions de la BNG sont la pleine propriété de l'État, des provinces et des autorités locales et que certains membres du conseil des commissaires sont nommés par ces autorités, mais elles font remarquer dans le même temps que ce conseil des commissaires ne s'occupe pas des activités commerciales journalières de la banque, qui relèvent de la responsabilité de l'administration. Les statuts ne comportent pas de dispositions au titre desquelles l'administration devrait observer les lignes directrices du conseil des commissaires dans l'offre des produits financiers. De surcroît, aucune disposition ne prescrivait la consultation ou l'autorisation du conseil des commissaires pour l'octroi du prêt considéré; celui-ci relevait de la responsabilité exclusive de l'administration. Enfin, les autorités néerlandaises insistent sur l'absence de tout autre élément permettant de conclure que cette opération bien précise devait être imputée aux pouvoirs publics.

(23) Les Pays-Bas soutiennent également que, dans l'hypothèse où le prêt pourrait être imputé aux pouvoirs publics, les conditions en seraient acceptables pour un investisseur en économie de marché. Ils concèdent que des fonds propres plus importants seraient souhaitables, mais le risque de perte pour la BNG était limité grâce à différentes sûretés, notamment l'hypothèque de premier rang sur les créances commerciales de VAOP, qui devait correspondre à 100 % du montant du prêt. Ils indiquent ensuite que le prêt a été consenti à un moment où l'entreprise n'était pas en difficulté et présentait des perspectives favorables. À l'époque, il n'était pas possible de prévoir la très grave détérioration de la situation financière.

(24) S'agissant de la seconde mesure, les Pays-Bas rappellent que VAOP est un "organe non lucratif" qui transfère à ses membres les recettes nettes de la vente de déchets recyclables collectés dans leur district. Début 2001, compte tenu de sa situation financière précaire consécutive à la faillite d'une des ses filiales opérant dans le domaine du recyclage du verre, VAOP a décidé de ne pas verser aux communes participantes une petite partie des recettes de la vente de déchets engrangées en 2000 (5), mais de convertir ce montant en un prêt subordonné d'une durée de cinq ans.

À l'époque, la BNG menaçait, à défaut de fonds propres supplémentaires tels que ce prêt subordonné, de ne pas poursuivre le financement de VAOP, ce qui aurait entraîné sa faillite. Premièrement, les Pays-Bas déclarent que, sur la base de ses statuts et des contrats conclus avec les communes participantes, VAOP n'était pas tenue de verser ce montant de 3 millions NLG (1,3 million d'euro) aux communes participantes parce qu'il dépassait les moyens dont l'entreprise disposait. Pourtant, VAOP a décidé de créer, à hauteur de ce montant, une créance des communes à l'égard de l'entreprise sous la forme d'un prêt porteur d'intérêts. Deuxièmement, les Pays-Bas font remarquer que, du point de vue des autorités locales, cette conversion d'une partie de leurs créances en un prêt constituait une option plus favorable que la faillite. En effet, à ce moment-là, les autorités locales détenaient des créances sur VAOP à hauteur de 5,7 millions NLG (2,59 millions EUR), qui n'étaient pas garanties par des sûretés. Les autorités néerlandaises ont calculé qu'en cas de faillite, les communes auraient récupéré environ 1,2 million NLG (0,5 million d'euro), de sorte qu'elles auraient subi une perte nette de 4,5 millions NLG (2,05 millions d'euro). Elles se sont donc comportées comme des créanciers en économie de marché en acceptant la conversion d'un montant de 3 millions NLG (1,3 million d'euro) de créances sur VAOP en un prêt, qui permettait à VAOP de poursuivre ses activités et d'avoir la certitude que la BNG continuerait à la financer.

6. APPRÉCIATION

6.1. Présence d'une aide

La première mesure

(25) L'article 87, paragraphe 1, du traité CE dispose que "sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions".

(26) Selon la jurisprudence constante de la Cour de Justice des Communautés européennes (6) "(...), il résulte du principe d'égalité de traconsident entre entreprises publiques et privées que les capitaux mis à la disposition d'une entreprise, directement ou indirectement, par l'État, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, ne sauraient être qualifiés d'aides d'État (...) Dès lors, selon une jurisprudence également constante, il y a lieu d'apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d'une taille qui puisse être comparée à celle des organismes gérant le secteur public aurait pu être amené à procéder à des apports de capitaux de la même importance (...), eu égard notamment aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à la date desdits apports."

(27) Pour déterminer si l'octroi d'une facilité de crédit par la BNG constitue une aide, la Commission doit donc vérifier si cette transaction respecte le principe de l'investisseur privé en économie de marché, tel qu'exposé par la Cour dans l'arrêt précité.

(28) À la demande de la Commission, les autorités néerlandaises ont fourni, outre une copie du contrat de services financiers de mars 1998, une copie des documents internes de la BNG qui décrivent chaque étape du processus décisionnel qui a conduit à l'octroi de ce prêt à VAOP, à savoir: la proposition du service responsable de la gestion des comptes datée du 21 janvier 1998, l'avis de la personne chargée d'évaluer les risques du crédit daté du 22 janvier 1998 et la décision positive de la commission de crédit datée du 26 janvier 1998. Ces documents font apparaître que la BNG a identifié et analysé les risques liés au prêt considéré, parmi lesquels l'existence de fonds propres très limités. Sur la base des résultats de cette analyse, la BNG a attribué une faible notation ("C-") à VAOP. En contrepartie des risques constatés, la BNG a décidé de poser des conditions strictes et d'exiger des sûretés importantes. La BNG a ainsi notamment exigé de toutes les parties (VAOP et ses filiales) qu'elles engagent leur responsabilité solidaire pour les dettes des autres parties du groupe ("déclaration de codébiteur de toutes les parties au contrat de services financiers"). Le fait que la BNG ait constitué l'hypothèque de premier rang sur différentes créances commerciales de VAOP est également significatif. VAOP devait remettre chaque mois à la BNG une liste des nantissements constitués sur les créances commerciales, dont la valeur devait correspondre à 100 % au moins du montant accordé par la banque. La commission de crédit a décidé que le prêt pouvait être consenti si ces différentes conditions et sûretés en faveur de la BNG étaient consignées dans le contrat de prêt. Le nouveau contrat de prêt comprenait également un prêt existant de 5 millions NLG (2,2 millions d'euro). Ce nouveau contrat augmentait la créance potentielle de la BNG sur VAOP, la faisant passer du maximum existant de 5 millions NLG (2,2 millions EUR) à 16,3 millions NLG (7,4 millions d'euro). L'augmentation nette se chiffrait par conséquent à 11,3 millions NLG (5,1 millions d'euro).

(29) Ces documents montrent que la BNG a accompli les activités de prêt normalement, selon ses procédures normales, et a exigé des sûretés importantes pour l'octroi de ce prêt.

(30) La Commission constate également que [...] (*) avait proposé en janvier 1998 d'accorder un prêt à VAOP. Ce prêt aurait été octroyé en sus de la facilité de crédit existante de 5 millions NLG consentie par la BNG. Le montant du financement proposé par [...], à savoir 7,3 millions NLG (3,3 millions d'euro), est certes inférieur au financement supplémentaire finalement proposé par la BNG (11,3 millions NLG (5,1 millions d'euro), mais en représente tout de même une partie considérable. Les taux d'intérêts (125 et 150 points de base) que [...] proposait dans son offre étaient inférieurs aux taux d'intérêts en vigueur pour les entreprises en difficulté ou pour l'octroi de fonds propres. Il en ressort, contrairement aux doutes émis à ce sujet par la Commission dans sa décision d'ouvrir une procédure d'enquête formelle, qu'une banque privée aurait pu accepter d'accorder un prêt considérable à VAOP en dépit de fonds propres très réduits (7).

(31) La Commission a comparé le taux d'intérêt pratiqué par la BNG au taux proposé par [...] (8). Le taux calculé par la BNG est légèrement inférieur à celui de [...]. Premièrement, la Commission constate cependant que la BNG avait (et a encore) des coûts d'exploitation très faibles, beaucoup plus faibles que [...] (9). Deuxièmement, le contrat de prêt signé entre la BNG et VAOP comportait diverses commissions d'octroi au cas où VAOP aurait effectivement eu recours à certaines facilités de crédit. La proposition de [...] ne prévoyait pas expressément le paiement de telles commissions d'octroi. Enfin, il est probable qu'en raison de la proposition de [...], la BNG a été incitée à formuler elle-même la meilleure proposition possible (dans les limites de ses lignes directrices en matière d'octroi de crédits et moyennant la fourniture de sûretés importantes) pour ne pas perdre les activités d'un client existant qui avait l'occasion d'étendre ses activités, une probabilité qui semblait raisonnable à l'époque. Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que, même si elle a octroyé des moyens à un taux inférieur à celui proposé par une banque privée, la BNG s'est comportée comme un investisseur en économie de marché lorsqu'elle a consenti ce prêt en 1998. Par conséquent, ce prêt ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

(32) Le plaignant soutient également qu'un créancier en économie de marché n'aurait pas poursuivi le financement de VAOP durant les années qui ont suivi, vu la mauvaise situation financière de l'entreprise. C'est la raison pour laquelle la Commission a examiné la manière dont la BNG a réagi à la dégradation de la position financière de VAOP.

(33) En 1999, lorsque la situation financière de VAOP Glas B.V. et REVA s'est détériorée, la BNG a élaboré un nouveau contrat, qui a été signé le 9 juillet 1999. Premièrement, les sûretés ont été étendues par un nantissement sur les stocks, les installations et les moyens d'exploitation restants. Deuxièmement, il a été convenu d'un examen scrupuleux de la liste mensuelle des créances sur lesquelles une hypothèque avait été constituée. Troisièmement, aucun crédit fixe ne pouvait plus être consenti pour des investissements dans des immobilisations. Le financement devait s'effectuer au moyen de prêts à court terme, appelés crédits de caisse. Quatrièmement, le prix de la facilité de crédit a été augmenté.

(34) Par la suite, après la faillite de REVA en octobre 2000, un nouveau contrat a été établi et signé le 19 janvier 2001. La facilité de crédit a été ramenée à 13,2 millions NLG (6 millions d'euro) (le montant effectif du prêt accordé à VAOP s'élevait à l'époque à 15,2 millions NLG (6,9 millions d'euro)) et devait continuer à être réduite selon un calendrier précis. Une pénalité de 3 % serait appliquée sur tout montant qui aurait dépassé la limite du crédit. Dans le même temps, l'extension des sûretés s'est poursuivie. Sur la base de la valeur de liquidation des actifs de VAOP, la BNG a calculé que sa perte pourrait atteindre près de 5,8 millions NLG (2,6 millions d'euro) sur les 15,2 millions NLG (6,9 millions d'euro) que sa créance comptait au total. En septembre 2002, un nouveau contrat a été conclu, qui modifiait le précédent calendrier de réduction du montant de la facilité de crédit.

(35) La description qui précède fait apparaître que la BNG ne pouvait tout simplement pas geler le financement de VAOP ni ne pouvait exiger le remboursement immédiat du montant prêté. En effet, cela aurait entraîné la faillite de VAOP et des pertes considérables pour la BNG. À l'époque, la BNG a évalué cette perte potentielle au regard des probabilités de rétablissement de VAOP. Compte tenu de la stabilité des activités centrales de VAOP (vieux papiers) et de la capacité de l'entreprise de générer du cash-flow, la BNG a décidé de ne pas laisser l'entreprise s'enliser dans une faillite et d'en poursuivre le financement. La Commission n'a pas constaté d'erreurs manifestes dans cette évaluation et la conclusion qui en découle. Le plaignant n'a pas avancé d'éléments convaincants expliquant la raison pour laquelle cette décision n'aurait pas été acceptable pour une banque privée.

(36) En conclusion, la Commission estime que le principe du créancier en économie de marché a été respecté lors de l'intervention de la BNG dans cette affaire et qu'il n'y a pas aide d'État en faveur de VAOP.

(37) La Commission ne se prononcera pas sur l'imputabilité à l'État du prêt octroyé par la BNG, étant donné que cette mesure, même si elle pouvait être imputée à l'État, ne serait pas constitutive d'une aide d'État, au vu des conclusions qui précèdent. En outre, la Commission ne peut déterminer si tous les prêts consentis par la BNG dans d'autres affaires sont compatibles avec le principe de l'investisseur privé en économie de marché et c'est la raison pour laquelle elle ne s'exprimera pas sur cette question.

La seconde mesure

(38) Début 2001, VAOP n'était pas en mesure de rembourser aux communes participantes les 3 millions NLG (1,3 million d'euro) qu'elle leur devait, en leur qualité de fournisseurs de vieux papiers. VAOP ne disposait pas de liquidités suffisantes. En outre, la BNG exigeait, comme condition de la poursuite du financement de VAOP, un patrimoine de garantie positif, défini comme des fonds propres auxquels viendraient s'ajouter des commissions et des prêts subordonnés à long terme. Par conséquent, le remboursement de ce montant aurait provoqué la faillite de l'entreprise. La Commission constate que la précarité de la situation financière était principalement due à un événement à caractère unique, à savoir la faillite de REVA en 2000. VAOP avait investi dans cette entreprise qui s'occupait du traitement du verre usagé.

(39) La Commission indique que les communes avaient, à l'égard de VAOP, des créances nettes d'un montant de 5,7 millions NLG (2,6 millions d'euro) (10). Ces créances n'étaient pas couvertes par des sûretés, parce qu'un autre créancier important (la BNG) avait pris une hypothèque de premier rang sur des actifs importants. Dès lors, les autorités locales n'auraient pas pu encaisser une grande partie de ces créances si VAOP avait fait faillite et si ses actifs avaient été liquidés. La Commission a étudié le calcul remis par les autorités néerlandaises: celui-ci était plutôt optimiste pour les créanciers. (11). C'est également la raison pour laquelle la Commission estime que les communes auraient pu récupérer tout au plus 1,2 million NLG (0,5 million d'euro) sur le montant total précité de 5,7 millions NLG (2,6 millions d'euro). De surcroît, ce montant aurait été encaissé avec le retard important inhérent à toute procédure de liquidation. Au lieu d'accepter cette perte de 4,5 millions NLG (2 millions d'euro), les membres ont préféré convertir un montant de 3 millions NLG (1,3 million d'euro) en un prêt porteur d'intérêts et réclamer le solde. Cette seconde option constituait donc une solution plus favorable. Dans sa décision d'ouvrir la procédure, la Commission doutait également qu'un investisseur en économie de marché qui aurait accepté cette conversion, n'eût pas exigé un intérêt plus élevé. Ces doutes ont été levés. La Commission constate en effet que la position de négociation des communes à l'égard de la BNG n'était pas de nature à les autoriser à réclamer un intérêt plus élevé. En effet, un intérêt plus élevé aurait fini par affecter la capacité de VAOP de rembourser son emprunt à la BNG. C'est pourquoi la BNG aurait pu s'opposer à cette demande des communes en menaçant de provoquer la faillite de VAOP, ce qui, comme déjà observé, aurait constitué une issue moins favorable pour les communes. En, outre, même si les communes avaient disposé du pouvoir de négociation nécessaire, il n'aurait pas été à leur avantage d'augmenter le taux d'intérêt, puisque cela n'aurait fait qu'alourdir les charges financières de VAOP durant les cinq années qui suivaient. Les membres indemnisant VAOP des coûts des services fournis, le taux d'intérêt plus généreux qu'elles auraient perçu aurait été totalement compensé par la hausse des redevances qu'elles auraient dû payer à VAOP durant cette période. (40) Il peut être conclu que la conversion des montants dus en un prêt subordonné ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité que les autorités locales auraient accordée à VAOP.

7. CONCLUSION

(41) Eu égard aux considérations qui précèdent, la Commission conclut que les deux mesures ne constituent pas une aide d'État.

Notes :

(1) JO C 240 du 30.09.2005, p. 36.

(2) Voir note en bas de page 1.

(3) VAOP n'a participé qu'une seule fois avec fruit à un tel appel d'offres. Au cours des dernières années, VAOP a décidé de ne plus participer à ces appels d'offres.

(4) Ces dernières présentent peut-être un intégration plus verticale que VAOP, mais cela ne signifie pas qu'elles n'entrent pas en concurrence avec VAOP.

(*) relève du secret professionnel

(5) En 2000, VAOP a versé au total 40,7 millions NLG (18,5 millions EUR) aux autorités locales.

(6) Arrêt du 8 mai 2003, affaires jointes C-328-99 et C-399-00, République italienne et SIM 2 Multimedia SpA/Commission, Recueil de jurisprudence, p. I-4035, points 37 et 38.

(*) Secret d'affaires

(7) Comme déjà indiqué, ceci peut s'expliquer entre autres par les sûretés dont l'emprunteur potentiel dispose et par le fait qu'à l'époque, l'entreprise était considérée comme une entreprise en croissance dont les activités centrales étaient stables et couvraient les coûts.

(8) Les deux facilités de crédit comportent différents types de crédits. La Commission a réalisé une comparaison des prêts assortis de durées et conditions similaires.

(9) Dans le secteur bancaire, le niveau des coûts d'exploitation est souvent évalué à l'aide du quotient d'efficacité, les coûts d'exploitation étant divisés par les recettes totales. En 1997, la division Pays-Bas de [...] présentait un quotient d'efficacité de 64,8 %. En 1998 et 1999, celui-ci s'élevait respectivement à 65,2 % et 62,9 % (source: [...]). Le quotient d'efficacité de la BNG correspond au tiers de ces chiffres, ce qui indique un niveau de coût très faible. Ceci peut s'expliquer en partie par le fait que la BNG ne dispose pas d'un réseau d'agences étendu.

(10) Situation financière fin 2000.

(11) Le calcul des autorités néerlandaises est optimiste pour les communes, entre autres du fait que les frais de règlement de la faillite ne sont pas déduits. Comme déjà indiqué plus haut, la Commission observe que la BNG qui, en sa qualité d'établissement financier, a une plus grande expérience de ce genre de calculs, aborde avec une plus grande prudence la question de la couverture offerte par la liquidation des actifs à l'égard des créances des créanciers.

A arrêté la présente décision:

Article premier

Les mesures que les Pays-Bas et la Bank Nederlandse Gemeenten ont mises en œuvre en faveur de la Vereniging van Aanbieders van Oud Papier, d'un montant de 3 millions NLG (1,3 million d'euro) et de 16,3 millions NLG (7,4 millions d'euro) respectivement, ne constituent pas des aides d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

Article 2

Le Royaume des Pays-Bas est destinataire de la présente décision.