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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 10 novembre 2004, n° 04-13547

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Infinitif (SA)

Défendeur :

Rayure (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Carre-Pierrat

Conseillers :

Mmes Magueur, Rosenthal-Rolland

Avoués :

SCP d'Auriac Guizard, SCP Baskal

Avocats :

Mes Fougère, Baruc, Hoffmann

T. com. Paris, du 11 juin 2004

11 juin 2004

Vu l'appel interjeté le 25 juin 2004, par la société Infinitif d'un jugement rendu le 11 juin 2004 par le Tribunal de commerce de Paris qui a:

* dit que la société Infinitif "Blanc Nature" n'a pas commis d'actes de contrefaçon à l'encontre de la société Rayure, anciennement dénommée Hedyna,

* dit que la société Infinitif a commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Rayure,

* condamné la société Infinitif à verser à la société Rayure la somme de 250 000 euro en réparation du préjudice né des actes de concurrence déloyale,

* ordonné la publication du jugement, aux frais de la société Infinitif, dans trois journaux, pour un montant de 3 500 euro HT par publication,

* condamné la société Infinitif à verser à la société Rayure la somme de 7 000 euro au titre des frais irrépétibles;

Vu les dernières écritures en date du 11 octobre 2004, par lesquelles la société Infinitif, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise sauf en ce qu'elle a dit qu'elle n'avait pas commis d'actes de contrefaçon, demande à la cour de:

* débouter la société Rayure de son action en concurrence déloyale,

* la déclarer fondée à agir en responsabilité contre la société Rayure pour rupture brutale de relations commerciales,

* condamner la société Rayure au paiement de la somme de 350 000 euro à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture brutale du contrat d'approvisionnement,

* condamner la société Rayure au paiement de la somme de 50 000 euro pour procédure abusive et de la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Vu les écritures en date du 6 octobre 2004, aux termes desquelles la société Rayure prie la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu des actes de concurrence déloyale et, la recevant en son appel incident, de statuer à nouveau et:

* dire qu'elle est recevable à agir au titre de la contrefaçon de ses modèles,

* dire que les modèles référencés Zelia, Liane, TS 123, Zazie, Elye 305, Joelle 305, Valery 751, Mercedes, Lucie, West et Gayle sont nouveaux et originaux et bénéficient de la protection des Livres I et III du Code de la propriété intellectuelle,

* dire que la société Infinitif en commercialisant des modèles identiques aux modèles originaux s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon,

* faire interdiction à la société Infinitif de poursuivre la fabrication, la mise en fabrication, la commercialisation des articles contrefaisants, sous astreinte de 150 euro par infraction constatée,

* condamner la société Infinitif au paiement de la somme de 360 000 euro en réparation du préjudice né de la contrefaçon,

* ordonner l'insertion de la décision à intervenir dans 10 journaux, aux frais avancés de la société Infinitif, sans que le coût total de ces insertions n'excède la somme de 40 000 euro HT,

* condamner la société Infinitif à lui verser la somme de 10 000 euro au titre des frais irrépétibles;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 11 octobre 2004;

Vu les conclusions de procédure en date du 12 octobre 2004 par lesquelles la société Rayure sollicite le rejet des débats des pièces 140, 141, 142 et 143 communiquées par la société Infinitif le jour du prononcé de l'ordonnance de clôture;

Sur ce, LA COUR,

Sur la procédure:

Considérant que la société Rayure est fondée à solliciter le rejet des pièces communiquées le 11 octobre 2004, jour de l'ordonnance de clôture;

Qu'en effet, il résulte de la combinaison des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile que le respect du principe de la contradiction impose que, pour assurer la loyauté des débats, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense;

Qu'en l'espèce, force est de constater que la société Infinitif a produit des pièces, le jour du prononcé de l'ordonnance de clôture, mettant ainsi ses contradicteurs dans l'impossibilité d'y répliquer, de sorte que cette société appelante ayant porté atteinte de façon flagrante au principe de la contradiction, les pièces 140, 141, 142 et 143 doivent être écartées des débats;

Sur les faits:

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il suffit de rappeler que:

* la société Rayure a pour activité la création, la fabrication et la commercialisation de chemisiers,

* constatant que la société Infinitif, proposait à la vente dans ses magasins à l'enseigne Blanc Nature des chemisiers reproduisant, selon elle, les caractéristiques de dix de ses modèles, la société Rayure a fait pratiquer une saisie contrefaçon le 30 septembre 2002,

* la société Rayure a découvert également qu'un catalogue Blanc Nature diffusé par la société Infinitif, présentait deux autres chemisiers ressemblant à deux autres de ses modèles;

Sur la recevabilité à agir de la société Rayure:

Considérant que la société Infinitif prétend que la société Rayure ne serait pas recevable en son action en contrefaçon au motif que les modèles de chemisiers litigieux, créés entre 1996 et 2001, sont des œuvres communes aux deux sociétés qui ont au cours de cette période travaillé ensemble en étroite collaboration;

Mais considérant que contrairement à ce qu'affirme la société Infinitif, le fait que les sociétés en présence se soient approvisionnées auprès des mêmes fournisseurs pour l'acquisition de tissu, le fait que ces sociétés se soient rétrocédées des tissus, s'ils sont l'indication de relations commerciales entre elles, il n'en subsiste pas moins qu'ils ne démontrent aucunement que la société Infinitif aurait collaboré à la création des modèles litigieux;

Considérant qu'il n'est pas contesté qu'au cours des années 1996 à 2001, la société Infinitif, souhaitant vendre des chemisiers dans ses boutiques à l'enseigne Blanc Nature, s'est approvisionnée auprès de la société Rayure à hauteur de 53 %

Que de sorte force est de constater que la société Rayure fait justement observer que si la société Infinitif avait eu la qualité de coauteur sur les modèles de chemisiers revendiqués, elle n'aurait eu nul besoin de les acquérir auprès d'elle durant ces années;

Considérant que cette société verse aux débats l'attestation de Lila Benhamida, sa styliste, aux termes de laquelle celle-ci rappelle que de 1993 à 2002, elle a fait tous les croquis des modèles, Geneviève Goubert faisant les patronages et n'a jamais eu d'instruction du dirigeant de la société Infinitif;

Que Geneviève Goubert atteste également, que réalisant les patronages, toutes les directives lui ont été données par Lila Benhamida;

Que ces attestations sont corroborées par celles rédigées par des membres du personnel de l'usine de confection de la société Rayure;

Considérant qu'il s'ensuit que la société Rayure démontre être titulaire des droits sur les modèles de chemisiers opposés;

Que la décision entreprise sera dès lors infirmée en ce qu'elle a déclaré la société Rayure irrecevable à agir en contrefaçon;

Sur la protection des modèles:

Considérant que la société Infinitif soutient que la société Rayure ne dispose d'aucun droit sur les tissus utilisés pour la confection de ses modèles et ne justifie pas d'un droit exclusif à l'utilisation des tissus;

Mais considérant que la société Rayure fait pertinemment valoir qu'elle n'entend pas revendiquer un quelconque droit sur les tissus utilisés et n'invoque de droits d'auteur que sur la combinaison d'éléments caractérisant ses modèles parmi lesquels l'aspect visuel opaque ou transparent, extensible ou non du matériau;

Considérant que la société Rayure caractérise ses modèles par les combinaisons suivantes:

1 - Le modèle Zelia:

- un col pointu, une natte et des poignets en tissu non-extensible, opaque et uni,

- un corps (buste et manches) en tissu extensible et transparent sur lequel sont apposées une multitude de bandes en tissu extensible opaque, apposées à la verticale et espacées de manière régulière les unes des autres,

- une natte d'une largeur de 1,8 cm,

- des boutons en nacre apposés tout le long de la natte,

2- Le modèle Liane:

- un col pointu et des poignets mousquetaires en tissu non-extensible, opaque et uni,

- un corps en tissu extensible, opaque et orné de fines rayures contrastantes,

- une absence de natte,

3- Le modèle TS123

- un décolleté arrondi,

- de fines bretelles formées par petits bourrelets surpiqués et cousus le long des aisselles,

- une forme près du corps,

- une succession de bandes opaques et transparentes apposées à l'horizontale,

4- Le modèle Zazie:

- un col large et pointu, une natte et des poignets mousquetaires en tissu non-extensible, opaque et uni,

- un décolleté en V formé par la natte,

- un corps en tissu extensible, transparent et uni sur lequel sont apposées une succession de bandes de tissu extensible et opaque qui sont apposées à la verticale et espacées les unes des autres de manière régulière,

5- Le modèle Elyse 305:

- la face avant du chemisier, le col et les poignets en tissu uni et plissé,

- le dos du chemisier et les manches sont en tissu uni et non-plissé,

6- Le modèle Joëlle 305:

- un décolleté large, géométrique et stylisé,

- un col évasé et pointu sans boutons,

- l'apposition de boutons sur la natte à partir de la poitrine et jusqu'à la taille,

- la face avant du corps du chemisier, le col et les poignets en tissu uni et plissé,

- le dos, les manches et le revers des poignets en tissu uni et non-plissé,

- des poignets mousquetaires,

- deux coutures partant de la poitrine jusqu'à la taille donnant une forme cintrée au chemisier à l'avant et dans le dos,

7- Le modèle Valery 751

- un décolleté en V,

- un col "tailleur",

- des poignets mousquetaires,

- le col et les poignets sont en satin uni contrastant avec la matière dite "maille cote" du corps du chemisier,

- une coupe près du corps,

8- Le modèle Magnolia:

- un col pointu, une natte et des poignets en tissu non-extensible uni,

- un corps en tissu extensible transparent sur lequel sont apposées, à la verticale, une multitude de bandes "bourrelets" fines, opaques et extensibles, espacées les unes des autres de manière régulière,

- des boutons en nacre disposés le long de la natte, du col à la base du chemisier,

9- Le modèle Mercedes:

- un décolleté "losange",

- un col pointu et des poignets en tissu non-extensible et uni,

- un corps en tissu extensible dit "maille floquée",

- une natte sans boutons, ceux-ci ayant été remplacés par un lien en tissu formant des croisillons du fait de sa disposition au travers des passants et se nouant au niveau du décolleté,

- une forme près du corps,

10- Le modèle Lucie:

- des manches longueur 3/4, mousquetaires et fendues sur le côté,

- un col pointu,

- deux pinces sur le devant et deux pinces dans le dos,

- une bande pression sous natte caractérisée par un système de fermeture par agrafes,

11- Le modèle West:

- des manches longues,

- un col pointu ouvert profondément en forme de V,

- le col et la bordure du décolleté étant réalisés dans une matière brillante contrastant avec l'aspect mat du corps du chemisier,

- des liens croisés apposés le long du décolleté en V,

12- Le modèle Gayle:

- des manches longues,

- un col pointu ouvert profondément en forme de V se prolongeant en natte,

- le col, la bordure du décolleté et la natte étant réalisés dans une matière brillante contrastant avec l'aspect mat du corps du chemisier,

- une fermeture à glissière le long de la natte,

Considérant que pour s'opposer à l'action en contrefaçon, la société Infinitif soutient que les douze modèles de chemisiers revendiqués ne sont d'une part, pas originaux, et d'autre part, pas nouveaux pour être antériorisés par ses propres créations;

Que cependant, sur le premier point, elle ne démontre aucunement, comme elle le prétend, que les combinaisons opposées et ci-dessus décrites appartiendraient au domaine public;

Que sur le second point, est inopérante la production aux débats des cahiers de créations de la société Infinitif dont de nombreux extraits n'ont pas date certaine;

Considérant qu'il s'ensuit que les caractéristiques des modèles de la société Rayure, dont la banalité n'est pas établie, dans les combinaisons qui en sont faites, et qui ne sont pas antériorisés par des modèles de la société Infinitif, procèdent d'un parti-pris esthétique qui traduit une démarche créative portant l'empreinte de la personnalité de l'auteur; que de sorte la société Rayure peut prétendre à la protection du droit d'auteur sur ces modèles originaux;

Sur la contrefaçon:

Considérant qu'il résulte de l'examen des photographies des chemisiers en présence auquel la cour a procédé que la société Infinitif a reproduit les caractéristiques originales des modèles de la société Rayure;

1- Le modèle Zelia:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend à l'identique:

- le même col,

- la même natte,

- le même boutonnage,

- les mêmes bandes de tissus,

- et la même opposition de matériaux extensible opaque et extensible transparent du modèle original Rayure,

2- Le modèle Liane:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit:

- le même col pointu et les mêmes poignets mousquetaires en tissu non extensible, opaque et uni,

- la même absence de natte,

- le corps du chemisier en tissu extensible, opaque et orné de fines rayures contrastantes,

- et la même opposition rayures/uni et matériaux extensible/non-extensible du modèle original Rayure,

3- Le modèle T5123

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend à l'identique:

- le même décolleté arrondi,

- les mêmes fines bretelles formées par petits bourrelets surpiqués et cousus le long des aisselles,

- la même forme près du corps,

- ainsi que la même succession de bandes opaques et transparentes apposées à l'horizontale du modèle original Rayure,

4- Le modèle Zazie:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit:

- le même col large et pointu, la même natte,

- les mêmes poignets mousquetaires en tissu non-extensible, opaque et uni,

- le même décolleté en V formé par la natte,

- ainsi qu'un corps en tissu extensible, transparent et uni sur lequel sont apposées une succession de bandes de tissu extensible et opaque qui sont apposées à la verticale et espacées les unes des autres de manière régulière caractérisant le modèle original Rayure,

5- Le modèle Elyse 305:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend à l'identique:

- la même face avant du chemisier,

- le col et les poignets en tissu uni et plissé ainsi que le même dos du chemisier et les manches en tissu uni et non-plissé,

6- Le modèle Joëlle 305:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit:

- le même décolleté large, géométrique et stylisé,

- le même col évasé et pointu sans boutons,

- la même apposition de boutons sur la natte à partir de la poitrine et jusqu'à la taille,

- la même face avant du corps du chemisier, le col et les poignets en tissu uni et plissé,

- le même dos, les manches et le revers des poignets en tissu uni et non plissé,

- les mêmes poignets mousquetaires,

- et les deux mêmes coutures partant de la poitrine jusqu'à la taille donnant une forme cintrée au chemisier à l'avant et dans le dos qui caractérisent le modèle original Rayure,

7- Le modèle Valery 751:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend identiquement:

- le même décolleté en y, le même col "tailleur",

- les mêmes poignets mousquetaires,

- les mêmes cols et poignets en satin uni contrastant avec la matière dite "maille cote" du corps du chemisier,

- ainsi que la même coupe près du corps caractérisant le modèle original Rayure,

8- Le modèle Magnolia:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit:

- les mêmes col pointu, natte et poignets en tissu non-extensible uni,

- le même corps en tissu extensible transparent sur lequel sont apposées, à la verticale, une multitude de bandes "bourrelets" fines, opaques et extensibles, espacées les unes des autres de manière régulière,

- ainsi que les boutons en nacre disposés le long de la natte, du col à la base du chemisier,

9- Le modèle Mercedes:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit identiquement:

- un décolleté "losange",

- un col pointu et des poignets en tissu non-extensible et uni,

- un corps en tissu extensible dit "maille floquée",

- une natte sans boutons, ceux-ci ayant été remplacés par un lien en tissu formant des croisillons du fait de sa disposition au travers des passants et se nouant au niveau du décolleté,

- une forme près du corps,

10- Le modèle Lucie:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend à l'identique:

- les mêmes manches longueur 3/4, mousquetaires et fendues sur le côté,

- le même col pointu,

- deux pinces sur le devant et deux pinces dans le dos,

- la même bande pression sous natte caractérisée par un système de fermeture par agrafes,

11- Le modèle West:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reproduit:

- des manches longues,

- un col pointu ouvert profondément en forme de V,

- le col et la bordure du décolleté étant réalisés dans une matière brillante contrastant avec l'aspect mat du corps du chemisier,

- des liens croisés apposés le long du décolleté en V.

12- Le modèle Gayle:

Considérant que le chemisier de la société Infinitif reprend:

- des manches longues,

- un col pointu ouvert profondément en forme de V se prolongeant en natte,

- le col, la bordure du décolleté et la natte étant réalisés dans une matière brillante contrastant avec l'aspect mat du corps du chemisier,

- une fermeture à glissière le long de la natte,

Considérant que force est ainsi de constater que la société Infinitif a contrefait douze modèles dont la société Rayure est titulaire de droits d'auteur;

Sur la concurrence déloyale:

Considérant qu'il n'est pas contesté que la société Infinitif connaissait les produits de la société Rayure pour avoir entretenu avec elle des relations commerciales dès 1995, date à laquelle elle lui a commandé de façon régulière des lignes entières de chemisiers, représentant 53 % de l'approvisionnement de ses boutiques;

Considérant que la société Infinitif a reproduit douze modèles de la collection de la société Rayure;

Que par ailleurs, il résulte d'un procès verbal de constat d'huissier établi les 10 et 11 septembre 2002, que cette société a imité l'aménagement des magasins de la société Rayure, en présentant la gamme des produits contrefaisants dans des boutiques meublées de présentoirs, en verre et inox, identiques à ceux présents dans les magasins de la société Rayure;

Que cette dernière a également fait constater le 3 octobre 2002 que la société Infinitif a exposé dans ses boutiques ses propres panneaux publicitaires en prenant soin de dissimuler à l'aide d'un crayon feutre la dénomination Infinitif;

Qu'il n'est enfin pas contesté que la société Rayure a régulièrement utilisé des bustes-présentoirs, recouverts de tissus gris à effets métalliques, sur un pied tubulaire reposant sur un socle carré;

Que les photographies produites aux débats révèlent que la société Infinitif a adopté les mêmes bustes-présentoirs;

Considérant que ces agissements, qui traduisent une volonté délibérée de s'inscrire dans le sillage de la société Rayure et sont de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle amenée à se détourner des modèles de cette société, caractérisent des actes de concurrence déloyale;

Que par voie de conséquence la décision entreprise, qui a condamné la société Infinitif pour actes de concurrence déloyale, sera confirmée;

Sur la réparation du préjudice:

Considérant qu'il sera fait droit aux mesures d'interdiction ainsi qu'il est précisé au dispositif de cette décision;

Considérant que la commercialisation de chemisiers contrefaisants porte nécessairement atteinte aux droits que détient la société Rayure sur ses créations en les banalisant et en incitant la clientèle à se détourner des modèles originaux;

Considérant que les opérations de saisie contrefaçon ont permis de dénombrer 4 920 chemisiers contrefaisants concernant la saison hiver 2002/2003, vendus au prix de 80 euro pièce;

Que cependant cette masse contrefaisante est nécessairement plus importante puisque préalablement aux opérations de saisie, la société Rayure avait procédé à des acquisitions de chemisiers contrefaisants, à l'origine de la procédure, correspondant à la saison été 2002;

Que de sorte, il sera alloué à la société Rayure la somme de 50 000 euro en réparation de l'atteinte portée aux droits qu'elle détient sur ses modèles;

Qu'en allouant à la société Rayure la somme de 250 000 euro à titre de dommages et intérêts, le tribunal a justement réparé le préjudice que cette société a subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaires commis par la société Infinitif;

Que les mesures de publication ordonnées par le tribunal seront confirmées sauf à faire mention du présent arrêt;

Sur la demande en dommages et intérêts formée par la société Infinitif:

Considérant que la société Infinitif reproche à la société Rayure d'avoir abusivement rompu leurs relations commerciales;

Mais considérant d'une part, que la société Infinitif ne rapporte pas la preuve de la prétendue brutalité de la rupture de ces rapports commerciaux;

Que d'autre part, elle est mal fondée à alléguer un quelconque préjudice, alors que dès 1988, elle n'a cessé de diminuer le montant de ses commandes auprès de la société Rayure pour parallèlement faire fabriquer des chemisiers contrefaisants;

Que de sorte, la décision déférée qui a débouté la société Infinitif de cette demande sera confirmée;

Sur les autres demandes:

Considérant que la solution du litige commande de rejeter la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société Infinitif;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à la société Rayure ; qu'il lui sera alloué à ce titre la somme complémentaire de 10 000 euro ; que la société Infinitif qui succombe en ses prétentions doit être déboutée de sa demande formée sur ce même fondement;

Par ces motifs, Ecarte des débats les pièces communiquées par la société Infinitif sous les n° 140, 141, 142 et 143, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a: - dit que la société Infinitif a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Rayure, - condamné la société Infinitif à payer à la société Rayure la somme de 250 000 euro en réparation d'actes de concurrence déloyale et parasitaires, - débouté la société Infinitif de sa demande en dommages et intérêts, - ordonné des mesures de publication, Y ajoutant : Dit que la mesure de publication ordonnée par le tribunal devra faire mention du présent arrêt, Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau : Déclare recevable l'action en contrefaçon formée par la société Rayure, Dit qu'en commercialisant des chemisiers reproduisant les caractéristiques des modèles créés par la société Rayure, la société Infinitif a commis des actes de contrefaçon, Fait interdiction à la société Infinitif de poursuivre ces agissements illicites sous astreinte de 150 euro par infraction constatée, à compter de la signification du présent arrêt, Condamne la société Infinitif à payer, au titre de la contrefaçon des modèles, à la société Rayure la somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts, Condamne la société Infinitif à payer à la société Rayure la somme complémentaire de 10 000 euro au titre des frais irrépétibles d'appel, Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Infinitif aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.