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Décisions

CA Riom, ch. corr., 2 mars 2006, n° 05-00257

RIOM

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Poughon

Conseillers :

Mmes Javion, Constant

Avocat :

Me Coin

TGI Moulins, JLD, du 9 févr. 2005

9 février 2005

Rappel de la procédure:

Le jugement:

LE TRIBUNAL, par jugement, a déclaré

La société X, en la personne de M. Y Michel, président directeur général coupable d'infraction en matière de coopération commerciale, courant 2001/2002 jusqu'au 31/12/2002, à Yzeure, infraction prévue et réprimée par L. 441-3, L. 441-4, L. 441-6, L. 441-5 du Code de commerce et les articles 121-2, 131-38, 131-39 du Code pénal

Et par application de ces articles, a condamné la société X, en la personne de M. Y Michel, président directeur général à 100 000 euro d'amende.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

La société X, en la personne de M. Y Michel, président directeur, le 10 février 2005

M. le Procureur de la République, le 11 février 2005 contre la société X, en la personne de M. Y Michel, président directeur

Décision:

Par jugement du 9 février 2005 le Tribunal correctionnel de Moulins (Allier) a:

- rejeté les exceptions de nullité,

- déclaré la société X coupable d'infraction aux dispositions des articles L. 441-3 et L. 441-6 du Code de commerce;

et, en répression l'a condamnée à la peine d'amende de 100 000 euro;

Par déclaration du 10 février 2005 le conseil de la société X a interjeté appel des dispositions pénales du jugement;

Le Ministère public en a relevé appel incident le 11 février 2005;

La société X, citée par acte d'huissier du 13 juin 2005 est assistée de son conseil Me Jean-Philippe Coin;

Par conclusions déposées au greffe de la Cour d'appel de Riom le 31 octobre 2005 la société X demande à la cour :

1- A titre préalable in linime litis:

- de saisir la Cour de justice des Communautés européennes pour avis à titre de question préjudicielle;

- de surseoir à statuer dans l'attente de l'avis de la Cour de justice des Communautés européennes,

- de constater la nullité et l'irrecevabilité des procédures de contrôle et de saisie diligentées par la DGCCRF à l'origine des poursuites engagées à son encontre;

2- A titre principal sur le fond :

- de dire que les contrats de coopération commerciale incriminés sont réguliers, conformes au droit, à la jurisprudence et à la loi;

- d'entrer en voie de relaxe à son bénéfice,

Le Ministère public a conclu au rejet des questions préjudicielles;

La défense ayant eu la parole en dernier, la cour a joint l'incident au fond pour être statué par un même arrêt;

Le Ministère public a requis confirmation de la décision querellée;

Sur quoi, LA COUR,

1- Sur la recevabilité

Attendu que les appels réguliers en la forme et relevés dans les délais de la loi sont recevables;

2- Sur la procédure et les faits:

Attendu que les 21 janvier, 21 mars 2003 et 7 avril 2003 un inspecteur de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de l'Allier (DDCCRF) régulièrement habilité, a procédé au contrôle de la société X dont le président directeur général est Michel Y et qui regroupe sous l'enseigne Z les hypermarchés et supermarchés établis dans la région Centre.

Attendu que la société X a la forme d'une société anonyme coopérative dont le siège est à Yzeure (Allier) et dont l'activité consiste selon elle à prendre le relais du[groupement d'achat A] en négociant les achats au niveau régional, en assurant entre autre le stockage, la répartition et le transport des marchandises dans les magasins en affinant la politique d'achat compte tenu des particularités et des attentes des clients ; qu'ainsi les 16 SCA qui font office de centrale d'achat régionale, assurent, à elles seules, 60 % des approvisionnements des magasins à l'enseigne Z;

Attendu que les vérifications portaient sur les contrats de coopération commerciale intitulés "contrats de coopération et de dynamique commerciale et promotionnelle régionale" dont 512 exemplaires ont été souscrits au cours de l'année 2002 entre X et ses fournisseurs ; qu'elles portaient également sur les factures afférentes à ces contrats;

Attendu que l'enquête avait pour origine des informations adressées par la DDCCRF de la Seine-Maritime concernant un contrat de coopération commerciale souscrit le 2 mai 2002 avec la société Lunor relatif à la" présence des produits dans l'assortiment régional adapté à la consommation locale et recommandé à l'ensemble des magasins Z dépendant de la société X".

Attendu qu'à titre d'illustration la DDCCRF s'est fait communiquer les copies de 24 contrats soit 21 pour l'année 2002 sur 512 et 3 pour l'année 2001 concernant les fournisseurs suivants : Bacardi - Martini - Kriter - Eugène Perma - Dipa - Cantalou - Maître Prunille - Tropicana - Vignerons du Sud-Est - Masterfoods - Bledina - Lor - Cedilac - Quinson - Président - Danone - Cie Fromages SAS - Laurencin Traiteur - Ferrier - Pétroles Schell - DPF;

Attendu qu'ainsi, sur 20 contrats souscrits en 2001 et 2002 pris à titre d'exemple, une somme totale de 593 310, 94 euro TTC a été facturée à divers fournisseurs;

Attendu qu'au terme de son contrôle la DDCCRF de l'Allier a relevé à l'encontre de la société X deux séries d'infractions pénalement sanctionnées;

- La première pour violation des dispositions de l'article L. 441-6 al. 5° du Code de commerce en ce que les contrats incriminés ne caractérisent aucun service spécifique ou obligation particulière justifiant la rémunération demandée au tire de la coopération commerciale;

- La seconde pour violation des dispositions de l'article L. 441-3 du même Code en ce que les factures émises en exécution des contrats litigieux ne comportent pas la dénomination exacte des services rendus.

Attendu que dans son jugement du 9 février 2005 le Tribunal correctionnel de Moulins a retenu la personne morale X dans les liens de ces préventions et en répression l'a condamnée à la peine d'amende de 100 000 euro.

3- Sur les incidents de procédures

3-1. Sur les sursis à statuer et la saisine de la Cour de justice des Communautés européennes

Attendu que pour la première fois en cause d'appel la société X demande à la cour de surseoir à statuer et de saisir préalablement pour avis la Cour de justice des Communautés européennes pour connaître de la validité des règles de saisie et de contrôle de documents dans les locaux des entreprises instituées par le droit français, au regard de la Convention européenne des Droits de l'Homme en ses articles 6 et 8 ainsi qu'à celui du traité C.E.

Mais attendu que les juridictions nationales sont compétentes pour trancher des difficultés d'application des règles communautaires ou qui résultent de la Convention européenne des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales dans la législation nationale ; que le sursis à statuer dans l'attente d'une réponse à une question préjudicielle est une faculté que les éléments de l'espèce ne justifient pas;

3-2. Sur la régularité du contrôle et des procédures diligentées par la DDCCRF

Attendu que devant la cour le prévenu soulève à nouveau in limine litis la nullité de la procédure diligentée par la DDCCRF de l'Allier, laquelle résulterait essentiellement de la non-régularité des contrôles effectués au regard des règles issues de l'article 6 et de l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ainsi que du traité de Rome (dispositions non précisées);

Qu'elle résulterait également du non-respect de la directive communautaire de 2002 transcrite par décret du 4 novembre 2004;

- du caractère trop vaste et non circonstancié du contrôle,

- du non-respect du contradictoire,

- du renversement de la charge de la preuve,

- et enfin sur l'application de la loi d'amnistie du 6 août 2002;

3-2-1. Sur l'application des règles issues des dispositions de l'article 6 et de l'article 8 de la CEDH et du traité de Rome

Attendu qu'à ce titre le prévenu estime que les enquêteurs ont pénétré sans autorisation judiciaire au siège de l'entreprise et qu'ils n'ont pas respecté le principe de loyauté dans la recherche de la preuve lequel garantit le droit de toute personne de ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable;

Attendu que les dispositions de l'article 8 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales garanti[ssen]t le respect de la vie privée qui comprend le droit au respect du domicile, et pour une société le droit au respect de son siège social, de ses agences et plus généralement de ses locaux professionnels;

Que toutefois il peut y avoir ingérence d'une autorité publique, lorsque cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui dans une société démocratique est nécessaire entre autre au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre, à la prévention des infractions pénales;

Attendu qu'en droit national français, les pouvoirs d'enquête des agents de la DGCCRF sont définis par les dispositions des articles L. 450-1 et suivants du Code de commerce dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

Attendu que l'article L. 450-3 alinéa I du Code de commerce reconnaît aux enquêteurs "le droit d'accéder à tous locaux, terrains ou moyens de transports à usage professionnel";

Attendu que ce droit d'accès ne permet pas aux enquêteurs de procéder à la visite ou à la fouille des lieux qui nécessite l'autorisation du juge des libertés et de la détention dans le cadre des enquêtes conduites sous contrôle judiciaire par application des dispositions de l'article L. 450-4 al. 3 du Code de commerce;

Attendu que les enquêteurs peuvent, dans le cadre des enquêtes simples, demander aux personnes sans autorisation judiciaire, la communication de documents professionnels tels les livres et factures, en obtenir ou en prendre copie;

Attendu qu'en procédant au contrôle des contrats et factures de coopération commerciale sans procéder à une visite domiciliaire mais en se faisant communiquer les seuls documents professionnels utiles à la manifestation de la vérité, l'agent de la DGCCRF de l'Allier a agi conformément aux règles de la loi dans le respect du domicile de la société en présence de son directeur qui a communiqué les contrats et factures demandés en lien direct avec l'objet de l'enquête;

Attendu que les mesures auxquelles l'agent a procédé sont tout à fait nécessaires au bien être économique du pays ; qu'elles sont également étroitement proportionnées au but légitime recherché et en tout point conforme à la législation nationale;

Attendu que les dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales consacrent le droit pour tout accusé de se taire et de ne pas contribuer à sa propre incrimination; que toutefois il s'agit d'une disposition qui n'a pas été enfreinte en l'espèce dans la mesure où l'Administration n'a procédé à aucune contrainte particulière et où le représentant de la personne morale poursuivi s'est librement exprimé à l'issue d'une enquête qui s'est déroulée sur une période de trois mois;

3-2- 2. Sur l'application du décret du 4 novembre 2004

Attendu qu'il est fait grief à l'enquête de ne pas avoir fait application des dispositions du décret du 4 novembre 2004 ; qu'il semblerait en réalité que le prévenu fasse reproche à l'enquêteur de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article 3 dudit décret lequel a modifié l'article L. 450-4 du Code de commerce en confiant au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance les attributions dévolues au président du tribunal de grande instance;

Attendu qu'à la date de l'enquête les dispositions du décret du 4 novembre 2004 n'avaient pas reçu application;

Qu'au demeurant l'enquête a été menée tout à fait légalement dans le cadre de la procédure simple et non de l'enquête sous contrôle judiciaire comme il a été dit plus haut et à laquelle le décret du 4 novembre 2004 est applicable;

3-2 3. Sur l'application du principe de loyauté

Attendu que peuvent être regroupés sous le moyen tiré d'une violation du principe de loyauté qui s'impose aux enquêteurs de la DGCCRF agissant dans le cadre d'une procédure anticoncurrentielle ou pénale comme en l'espèce, les griefs suivants :

- enquête trop vaste et non circonstanciée,

- non-respect des règles du contradictoire,

- renversement de la charge de la preuve,

Attendu que contrairement aux affirmations du prévenu l'enquêteur de la DGCCRF a circonscrit son enquête au cadre des relations commerciales avec la société Lunor et plus largement aux contrats de collaboration commerciale entre la société X et ses fournisseurs ; qu'il a limité strictement ses investigations à l'objet précis préalablement défini et n'a exercé ses pouvoirs d'enquête qu'à la communication de quelques contrats et factures afférents auxdites opérations, n'a interrogé le responsable que sur les seules relations commerciales dans le cadre de la coopération de dynamique commerciale et promotionnelle régionale alors que 512 contrats avaient été souscrits pour la seule année 2002 ;

Attendu qu'il ne saurait être sérieusement affirmé que la procédure a enfreint le principe de loyauté au motif que l'opération s'inscrivait dans le cadre d'une enquête plus large qui visait les enseignes Z et Carrefour sur les relations entretenues par ces structures avec un minima de 20 fournisseurs par enseigne;

Qu'en effet, de telles enquêtes systématiques ne détournent en rien les règles applicables à la procédure mais tirent leur légitimité des pouvoirs qu'ont reçu les autorités administratives de mener une politique économique dans le domaine du droit de la concurrence y compris par la voie pénale;

Attendu que le prévenu fait également reproche à l'enquêteur d'avoir refusé de procéder à la prise de pièces qu'il désirait lui remettre pour sa défense;

Mais attendu que ce refus ne résulte pas des pièces de la procédure, et qu'à le supposer établi le prévenu a pu, en toute liberté, verser devant la cour et le tribunal, l'ensemble des pièces qu'il estimait nécessaires à la manifestation de la vérité ;

Attendu enfin que les pouvoirs d'enquête exercés conformément à la loi et au principe de loyauté, ont précisément pour objet de permettre à l'Administration de rapporter la preuve de faits punissables à la charge du prévenu présumé innocent jusqu'à son éventuelle condamnation; que le fait que l'Administration les exerce ne saurait constituer un renversement de la charge de la preuve mais un moyen pour l'autorité de poursuite de la rapporter;

3-2 4. Sur l'application de la loi d'amnistie du 6 août 2002

Attendu qu'il convient de constater l'extinction de l'action publique par l'amnistie en application des dispositions de l'article 2 de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 pour les faits d'infractions aux dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce commis avant le 17 mai 2002 alors que l'infraction prévue par l'article L. 441-3 du Code de commerce est expressément exclue du bénéfice de l'amnistie par l'article 14-24° de la loi du 6 août 2002;

Attendu qu'ainsi sont prescrites les poursuites exercées sur le fondement des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce concernant les contrats Maître Prunille du 2 mai 2002; Cedilac du 1er janvier 2002, Perma du 2 janvier 2002, Pepsico du 27 mars 2002, DPF du 17 janvier 2002, Laurencin Traiteur du 1er avril 2002, Lunor du 2 mai 2002, Blédina du 2 janvier 2002, Danone du 1er janvier 2002, Lactalis du 1er mai 2002 et 1er mai 2002, Vigneron du Sud-Est du 26 mars 2002, Quinson du 31 janvier 2001, Masterfoods du 2 janvier 2002, du 2 janvier 2002, Ferrier du 1er janvier 2002, Kriter du 27 août 2001 et du 27 août 2001 ;

Que tombent sous le coup des poursuites les contrats Cie des Fromages SAS du 1er juin 2002, Lor du 24 mai 2002 et société des Pétroles Schell du 3 juin 2002;

Attendu qu'il importe peu que le contrat de coopération commerciale passé avec la société Lunor soit prescrit dans la mesure où les investigations concernaient d'autres contrats et factures relatifs à la période en cause;

4- Sur le fond

4-1. Sur l'infraction aux dispositions de l'article L. 441-6 al. 5 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 2 août 2005 ;

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce dans son ancienne rédaction, les conditions dans lesquelles un distributeur ou un prestataire de service se fait rémunérer par ses fournisseurs en contrepartie de services spécifiques doivent faire l'objet d'un contrat écrit en double exemplaire détenu par chacune des parties ; que toute infraction aux dispositions visées est puni d'une amende de 15 000 euro et pour les personnes morales l'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du Code pénal;

Attendu que par suite des effets de la loi d'amnistie du 6 août 2002, n'est pas éteinte, l'action publique concernant les contrats de coopération et de dynamique commerciale et promotionnelle régionale souscrits le 1er juin 2002 avec la société Cie des Fromages SAS, le 24 mai 2002 avec la société Biscuiterie Lor et le 3 juin 2002 avec la société des Pétroles Schell (annexes 13, 25 et 29);

Attendu toutefois que les autres contrats qui ne peuvent faire l'objet de sanctions pénales sur le fondement des dispositions de l'article 441-6 al. 5 ne peuvent être écartés des débats dans la mesure où il s'agit de contrats-type du même modèle que ceux incriminés et qui ont servi de fondement aux factures objets des poursuites par application des dispositions de l'article L. 441-3 du Code de commerce;

Attendu que les contrats en cause rappellent:

- que le contrat a pour objet de définir entre les parties les modalités d'exécution de leur coopération commerciale et notamment les différents services spécifiques offerts par le Distributeur et dont le Fournisseur a besoin pour promouvoir ses produits sur les lieux de vente;

- que plus précisément : la Centrale tend par son action, à favoriser l'augmentation des parts de marchés ainsi que la promotion ou la valorisation des produits et de l'image du fournisseur auprès des consommateurs par des actions spécifiques développées dans le cadre régional ; que pour la gamme Cie des Fromages SAS cette action est définie comme étant la présence des produits dans l'assortiment régional ; qu'il en est de même pour la société Biscuiterie Lor et la société des Pétroles Schell;

Attendu que le prévenu estime qu'il a satisfait aux prescriptions de l'article 441-6 al. 5 du Code de commerce dans la mesure où:

- il a bien établi un contrat de coopération commerciale en double exemplaire,

- la prestation prévue au contrat permet au fournisseur de bénéficier du travail régional et local de la centrale sur un marché spécifique et à titre d'exemple verse aux débats pour information le tableau d'analyse et de préconisation en matière de jus de fruits;

Attendu qu'il fait valoir qu'il a signé essentiellement des contrats avec des sociétés telles que Danone, Nestlé ou Schell à l'issue des négociations et pour des prestations bien réelles alors qu'il n'était pas en situation d'imposer sa seule volonté;

Mais attendu que l'article L. 441-6 du Code de commerce n'impose nullement l'écrit en tant que condition de validité du contrat mais comme moyen de contrôle de la réalité du service facturé aux fournisseurs et ce afin de clarifier le calcul du seuil de revente à perte et à ce titre la loi du 2 août 2005 n'a pas mis fin à cet objectif même si le seuil de revente à perte a reçu une nouvelle définition, ou encore d'éviter toute discrimination ou avantage sans contrepartie et à ce titre faciliter la transparence tarifaire et garantir l'équilibre et la loyauté entre les compétiteurs;

Attendu qu'il est manifeste que les contrats signés entre la centrale régionale d'achat et ses fournisseurs ne répondent pas à cette définition dans la mesure où ils sont rédigés en termes généraux au risque d'en faire des contrats d'adhésion pure et simple où seul varierait le montant de la rémunération de la centrale en fonction d'un pourcentage de chiffre d'affaires qui, au demeurant, à en croire les termes particulièrement vagues de l'objet du contrat ne constitue pas une base pertinente de rémunération;

Attendu que l'imprécision de la prestation mise à la charge du distributeur ne permet pas à l'Administration et au juge d'apprécier la réalité du service offert et pour lequel la centrale régionale d'achat s'est engagée ; que cette absence de précision qui contraste avec les engagements du fournisseur puisqu'il est dit "le fournisseur s'engage à tenir informée la centrale des évolutions du marché..." équivaut à l'absence d'engagement et tombe ainsi sous le coup des dispositions pénales sanctionnées par l'article L. 441-6 al. 5 et suivants du Code de commerce;

Que le prévenu sera ainsi maintenu dans les liens de la prévention pour les trois contrats ci-dessus énumérés;

4-2. Sur l'infraction aux dispositions de l'article L. 441-3 du Code de commerce

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article L. 441-3 du Code de commerce la facture doit mentionner entre autre la dénomination précise des services rendus;

Attendu en conséquence que les factures établies par un distributeur pour des prestations de coopération commerciale doivent permettre à l'Administration et au juge d'identifier avec précision la nature exacte des services rendus;

Attendu qu'en l'espèce la DGCCRF s'est fait communiquer 147 factures établies en exécution des vingt contrats litigieux, le tout pour un total général de 595 310 euro 94 TTC dont la liste figure en annexe 30 du procès-verbal de l'Administration;

Attendu que toutes ces factures sont aussi imprécises que le sont les contrats qui leur ser[ven]t de support étant précisé qu'elles sont toutes rédigées en termes généraux en ce qui concerne la nature de la prestation ainsi définie " Présence des produits dans l'assortiment régional adaptés à la consommation locale et recommandés à l'ensemble des magasins Z dépendant de la société X";

Attendu, en conséquence, que le prévenu sera maintenu dans les liens de la prévention de ce chef;

5- Sur les peines

Attendu que la puissance d'achat de la société X est importante dans la mesure où elle a réalisé un chiffre d'affaires pour 2004 de 369 365 K euro se classant première tous commerces confondus sur la région Auvergne;

Attendu qu'en raison de l'ampleur des faits constatés, érigés en politique commerciale de la société, de leur caractère délibéré dont l'objet manifeste est d'opacifier les relations fournisseurs-distributeurs faussant ainsi les règles d'une saine concurrence et vidant la facture de sa substance au risque de lui conférer un caractère fictif, une peine significative doit être prononcée; qu'il convient ainsi de prononcer une amende de 150 000 euro dans la mesure où la cour peut porter l'amende à 50 % de la somme facturée;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare les appels recevables, Dit n'y avoir lieu à saisir la Cour de justice des Communautés européennes; Rejette les exceptions de nullité soulevées par le prévenu; Constate l'extinction de l'action publique engagée sur le fondement des dispositions de l'article L. 441-6 du Code de commerce sauf en ce qui concerne les contrats Cie des Fromages SAS du 1er juin 2002, Lor du 24 mai 2002 et société des Pétroles Schell du 3 juin 2002; Déclare la société anonyme coopérative X, <adresse> à Yzeure, 03400, coupable. Sur le fondement des dispositions de l'article L. 441-6 al. 5 du Code de commerce, au titre des contrats Cie des Fromages SAS, Lor et société des Pétroles Schell, sur le fondement de l'article L. 441-3 du Code du commerce pour l'ensemble de la prévention (147 factures dont la liste figure à l'annexe 30 du procès-verbal de la DGCCRF); En répression condamne la société anonyme coopérative X à la peine de 150 000 euro d'amende. Dit que la présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de cent vingt euro dont est redevable le prévenu. Le condamné est informé de la possibilité d'obtenir une réduction de 20 % de l'amende et du droit fixe de procédure sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro en cas de paiement spontané dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt ou de sa signification s'il s'agit d'une décision contradictoire à signifier ou rendue par défaut, sans toutefois que le paiement de l'amende fasse obstacle à l'exercice d'un pourvoi en cassation. Le tout en application des articles susvisés, des articles 503-1, 707-2 et suivants du Code de procédure pénale, 1018 A du Code général des impôts.