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Décisions

Conseil Conc., 24 janvier 2007, n° 07-D-04

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

Décision

Relative à des pratiques mises en œuvre par le réseau de franchise Jeff de Bruges

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Délibéré sur le rapport oral de Mme de Mallmann, par Mme Perrot, vice-présidente, présidant la séance, Mmes Renard-Payen, Xueref, M. Flichy, membres.

Conseil Conc. n° 07-D-04

24 janvier 2007

Le Conseil de la concurrence (Section II),

Vu la lettre enregistrée le 6 avril 2005, sous le numéro 05/0028 F, par laquelle le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en œuvre par le réseau de franchise Jeff de Bruges ; Vu les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence et le décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 modifié ; Vu les observations présentées par les sociétés Jeff de Bruges Diffusion, Jeff de Bruges Exploitation, Jeff de Bruges SAS et le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier ; Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et le représentant des sociétés Jeff de Bruges Diffusion, Jeff de Bruges Exploitation, Jeff de Bruges SAS, entendus lors de la séance du 12 décembre 2006 ; Adopte la décision suivante :

I. Constatations

A. LE SECTEUR D'ACTIVITE CONCERNE

1. La confiserie de chocolat englobe tous les produits fabriqués avec du chocolat comme élément principal ou secondaire, associé à d'autres préparations à base de sucre et différents ingrédients, comme les bouchées, rochers, pastilles et autres billes de chocolat.

2. En juin 2003, le marché de la confiserie de chocolat se répartissait comme suit en pourcentage de chiffre d'affaires : barres 50,9 %, boîtes permanentes 20,7 %, billes 12,6 %, rochers 8,3 %, oeufs 7,5 %.

3. La revue "Chocolat et Confiserie Magazine" de novembre-décembre 2005 précise que "l'anatomie de la chocolaterie" s'exprime en production, à la fois en produits finis (cacao sucré, tablettes, confiserie de chocolat et pâtes à tartiner) prêts pour la consommation, et en produits semi-finis (masse de cacao sucrée, couverture, produits de laboratoire et autres tels que le beurre de cacao et les poudres). Chez les fabricants français, les performances en chiffre d'affaires de ces deux secteurs ont été, en 2004, de 2 032 millions d'euro pour les produits finis et de 655 millions d'euro pour les produits semi-finis. Par ailleurs, les produits finis français représentaient, en 2004, 398 000 tonnes.

1. LA DEMANDE DE CONFISERIES DE CHOCOLAT

4. Les ventes en grandes et moyennes surfaces représentent 44 % des débouchés, contre 24 % pour les spécialistes, comme la franchise Jeff de Bruges ou encore les petits chocolatiers qui s'approvisionnent auprès des artisans et grossistes.

5. Les grandes et moyennes surfaces alimentaires assurent la majorité des ventes de chocolat, en particulier sur le réseau des tablettes. Quant à la distribution spécialisée (chocolatiers-confiseurs ou enseignes spécialisées), elle trouve pour l'essentiel ses débouchés sur le créneau de la confiserie de chocolat.

2. L'OFFRE DE CONFISERIES DE CHOCOLAT

Données générales

6. Plusieurs circuits de distribution peuvent être distingués : la grande distribution pour laquelle l'offre de confiseries de chocolat se positionne sur le marché bas de gamme (de 10 à 35 euro le kg) ; les commerces non spécialisés de boulangeries-pâtisseries (de 37 à 57 euro le kg) ; les artisans chocolatiers (50 à 100 euro le kg) ; les commerçants spécialisés du chocolat (de 27 à 37 euro le kg), qui se répartissent entre le marché de moyenne gamme (chocolats belges, types Jeff de Bruges), et le marché haut de gamme (grands chocolatiers).

7. Parmi les commerçants spécialisés, il convient de distinguer :

- les enseignes belges, qui présentent un large choix et un bon rapport qualité-prix : Jeff de Bruges (30,80 euro/kg brut), Léonidas (27,39 euro les 940g brut), Daskalidès et Godiva ;

- les enseignes françaises, qui proposent une offre plus ouverte en terme de prix - supérieurs à ceux des précédentes - et de qualité, relativement variable : Salavin (44 euro le kg brut), De Neuville (35,80 euro les 950g brut), Maison du Chocolat, Le Nôtre, Voisin (plus de 80 euro le kg brut) ;

- les indépendants, dont le choix est plus réduit, constitués par les artisans pâtissiers-chocolatiers qui fabriquent eux-mêmes leurs chocolats.

8. L'institut Xerfi donne la liste ci-après des enseignes de distribution spécialisées de chocolats :

<emplacement tableau>

9. Quant au représentant de la SAS Jeff de Bruges, il a indiqué le 31 mars 2006 que le nombre de magasins par enseigne spécialisée dans la vente de chocolat est le suivant. Léonidas : 350 magasins ; Jeff de Bruges : 164 franchisés et 49 succursales qui sont des magasins du franchiseur ; De Neuville : environ 130 magasins ; Daskalidés environ 50 magasins. Il a ajouté que l'enseigne Jeff de Bruges est peu implantée en Europe : un magasin en Italie et un autre en Espagne. Dans le reste du monde, le nombre de magasins est le suivant : Dubaï (1), Shanghai (3), Tunisie (3), Alger (1), Maroc (11), Libye (1), Australie (1), Roumanie (1), Kazakhstan (2).

La franchise Jeff de Bruges-Martial

10. Lors des investigations, la société Jeff de Bruges SAS, qui était détenue à hauteur de 66 % par la société Neuhaus Mondose et à hauteur de 34 % par la SARL de Cacao, franchisait, sous l'enseigne Jeff de Bruges Martial, un réseau de distribution de chocolats, dragées, confiseries et crèmes glacées. Le 30 avril 2004, une restructuration du groupe Jeff de Bruges a eu lieu. Le groupe comprend désormais trois sociétés : Jeff de Bruges Diffusion s'occupe de l'activité franchise, Jeff de Bruges Exploitation s'occupe des succursales, et Jeff de Bruges SAS a notamment pour activité les opérations se rapportant à la fabrication, la commercialisation et la distribution des produits.

11. La franchise Jeff de Bruges se caractérise par une zone de chalandise couvrant une population de 30 000 personnes minimum pour des magasins dont la surface varie entre 50 et 100 m².

12. Le chiffre d'affaires moyen indicatif par magasin pour le chocolat et la crème glacée en centre ville est de 207 996 euro, et de 346 946 euro en centre commercial. Sur une telle zone géographique, la franchise est accordée en exclusivité au franchisé. Les conditions d'accès au réseau sont les suivantes : une durée de contrat de 5 ans ; un droit d'entrée de 10 700 euro HT ; une participation aux frais d'ingénierie et de formation de 4 000 euro ; une location d'enseigne comprise entre 1 300 euro et 3 500 euro ; une participation annuelle à la publicité nationale de 3 280 euro HT, ou 2 % du chiffre d'affaires hors taxes ; une participation annuelle à la publicité locale de 0,5 % du chiffre d'affaires hors taxes.

13. Le contrat de franchise Jeff de Bruges a été mis à jour en avril 2005. La secrétaire générale de Jeff de Bruges a indiqué le 1er juin 2006 "qu'aucune modification ou avenant n'est opéré pendant la durée du contrat par le franchiseur (...)".

14. La franchise Jeff de Bruges fonctionne avec un conseil consultatif qui comprend cinq membres ayant la qualité de franchisé depuis au moins deux ans. Les membres franchisés représentent cinq régions définies sur le territoire français. Le conseil consultatif a pour mission générale d'émettre des avis sur les questions de politique du réseau. Des éléments sur la stratégie de prix y sont aussi abordés, notamment le prix d'achat du chocolat pour le franchisé, les augmentations du prix chocolat CE, ainsi que le prix de vente au consommateur. Ces avis n'ont aucun caractère obligatoire à l'égard de Jeff de Bruges qui a la responsabilité du bon fonctionnement du réseau.

15. Jeff de Bruges a aussi institué un système de commissions qui sont des groupes de travail constitués sur des sujets spécifiques. Ces commissions sont internes au réseau et n'ont aucun pouvoir décisionnel. Ainsi, la commission "comités d'entreprises" gère les caractéristiques des ventes hors magasins.

16. Du 1er mars 2005 au 28 février 2006, la franchise Jeff de Bruges a vendu en quantités :

<emplacement tableau>

17. La société Jeff de Bruges fait observer que le chiffre de 1 643,9 tonnes de produits vendus est très faible comparé aux 398 800 tonnes de chocolats consommés en France et face à la domination du marché par les marques de grande distribution (Cadbury, Kraft foods, Lindt, Nestlé, Ferréro, Cémoi, Valrhona), outre tous les artisans chocolatiers et revendeurs de chocolat.

B. LE MARCHE EN CAUSE

18. Le document pré-contractuel, conforme à la loi Doubin, fourni à chaque franchisé situe l'activité du futur franchisé sur le segment de marché de la confiserie de chocolat. Plus précisément, la franchise Jeff de Bruges se place sur le segment de marché de la distribution spécialisée de confiseries de chocolat.

19. La position de Jeff de Bruges sur le marché français peut être estimée comme suit en part de chiffre d'affaires :

<emplacement tableau>

C. LES PRATIQUES RELEVEES

1. EN CE QUI CONCERNE L'ACHAT ET LA VENTE DES PRODUITS, LES ELEMENTS DISTINCTIFS JEFF DE BRUGES ET L'AMENAGEMENT DU POINT DE VENTE

21. L'article 6.2 du contrat de franchise mis à jour en octobre 2003 précise : "(...) le franchisé s'engage expressément à ne vendre dans son magasin que les produits fabriqués, distribués, référencés et/ou commercialisés par le franchiseur (...)". Il est prévu que le franchisé peut "s'il le désire, s'approvisionner (...) auprès d'un autre franchisé", mais sous sa propre responsabilité. Tout manquement peut être sanctionné par le paiement d'une indemnité forfaitaire de 155 euro par article présenté et par jour maintenu à la vente ou en stock. Le franchisé s'interdit, sauf accord exprès et écrit du franchiseur, de vendre tout produit qui ne serait pas distribué ou agréé par Jeff de Bruges. Les franchisés respectent cette clause.

22. Quant à l'article 1-2 du contrat, il indique que la franchise "(...) est accordée en exclusivité au franchisé : (...) En conséquence, à l'intérieur de ce territoire exclusif, le franchiseur ne pourra implanter d'autres points de vente Jeff de Bruges en franchise ou en succursale". Cette exclusivité territoriale est matérialisée par un plan de la zone de chalandise fourni au franchisé lors de la signature du contrat et joint à la présentation du marché local portée en annexe au document pré-contractuel loi Doubin. En revanche, les ventes hors magasins ne bénéficient d'aucune exclusivité territoriale.

23. S'agissant des éléments distinctifs Jeff de Bruges, l'article 3-8 du contrat de franchise indique : "Le franchiseur s'engage à vendre au franchisé ou garantit que ses fournisseurs agréés (...), vendront au franchisé les différents éléments distinctifs Jeff de Bruges. Le franchisé pourra néanmoins acquérir lesdits éléments auprès de tous fournisseurs de son choix, sous l'expresse réserve toutefois que les éléments qu'il aura ainsi acquis soient en permanence rigoureusement conformes aux normes concernant les graphismes, logos, qualités, coloris mis au point par le franchiseur (...)". En général, les franchisés privilégient le savoir-faire et la logistique du franchiseur. En outre, "la norme en matière de fidélité veut que les franchisés se fournissent exclusivement chez Jeff de Bruges (...)".

24. La partie "fidélité" du rapport de visite bilan vise l'approvisionnement en "produits vracs", les "produits vides", et le respect des animations. Par ailleurs, l'article 12-2 du contrat précise que " (...) en cas d'inexécution ou de manquement par le franchisé à l'une quelconque de ses obligations, ou en cas d'agissement du franchisé de nature à porter un préjudice au franchiseur", le franchiseur pourra (...), résilier de plein droit le présent contrat (...)".

25. Concernant l'aménagement du point de vente, l'article 4.5.1. du contrat de franchise précise que le franchiseur communiquera au franchisé "les standards d'installation d'un magasin Jeff de Bruges-Martial dans son agencement extérieur et intérieur". Si le franchiseur est propriétaire des modèles et mobiliers déposés à l'INPI, les franchisés sont libres d'acheter ailleurs. Néanmoins, l'achat du mobilier se fait en grande partie auprès du franchiseur. Le franchiseur impose un architecte conseil au franchisé. Toutefois, ce dernier est libre de choisir les entreprises de son choix dans le strict respect d'un cahier des charges. Dans les faits cependant, les franchisés privilégient les entreprises travaillant avec l'architecte conseil.

2. EN CE QUI CONCERNE LA POLITIQUE DE FIDELITE MISE EN PLACE PAR LE RESEAU JEFF DE BRUGES

• La formation

26. Le franchiseur met en place une formation et, à l'issue du stage qu'il organise, remet au franchisé un manuel qui matérialise le transfert de son savoir-faire (article 4-3 du contrat). Le savoir-faire Jeff de Bruges comprend notamment une "bible" constituée de fiches sur six grands thèmes : gestion et organisation, produits (chocolats, recettes...), mise en marché, techniques de présentation, ventes, crème glacée. Malgré le caractère systématique de la délivrance de cette bible, le franchiseur ne contrôle pas son application stricte.

• Les réunions régionales et nationales organisées par le franchiseur

27. Aux termes des dispositions de l'article 5-6-7 du contrat, le franchisé s'engage à participer aux réunions de vente organisées par le franchiseur au cours desquelles seront présentées les politiques commerciales, les campagnes publicitaires, les actions en termes de produits, magasins et communication. Il peut également participer à des réunions de proximité.

• Le suivi de l'activité des franchisés

- Les informations communiquées au franchiseur

28. L'article 5-6-10 du contrat de franchise précise : "(...) Le franchisé fournira au franchiseur mensuellement et automatiquement son chiffre d'affaires accompagné de sa déclaration de TVA (...)".

29. "Dans les six mois suivant la fin de chacun de ses exercices, le franchisé fera établir à ses frais et communiquera au franchiseur des états financiers annuels, comprenant au moins un bilan et un compte de résultats en annexes détaillés et complets certifiés par un expert comptable ou un commissaire aux comptes". Ces informations sont portées dans le tableau récapitulatif des ventes de l'ensemble des franchisés du réseau qui sert de comparatif à ces derniers.

- La caisse enregistreuse

30. La politique de fidélité au réseau Jeff de Bruges implique l'achat d'une caisse enregistreuse pré-définie par le franchiseur qui assure une uniformité de l'équipement du réseau.

31. Sur ses relations avec le franchiseur, la gérante du magasin situé à Vincennes a déclaré le 9 janvier 2003 : "Nous transmettons notre chiffre d'affaires tous les mois, mais nous ne transmettons pas d'informations sur nos prix de vente. Notre caisse enregistreuse n'est pas reliée à la franchise mais c'est un projet".

32. Quant au représentant du magasin Jeff de Bruges situé à Strasbourg, il a indiqué le 25 novembre 2002 : "(...) en 1994, le franchiseur (...) nous a aidé à nous installer. Il nous a conseillé d'acheter une caisse enregistreuse de la marque Testut (...) cette marque nous a fait (...) une réduction de 15 % sur les prix catalogue. Dans cette caisse, il y a un programme Jeff de Bruges qui nous permet de faire les statistiques pour connaître les heures de pointe par exemple. Ces statistiques ne remontent pas au franchiseur (...)".

- Le contrôle de la fidélité réseau et la sanction des manquements

33. Jeff de Bruges a instauré un contrôle selon divers modes, comme le lancement d'un service consommateur ou la pratique d'achats mystères. Des clients anonymes font part au siège de la manière dont ils ont été accueillis, renseignés et conseillés. Au vu des achats effectués, le franchiseur peut contrôler si les produits sont bien fournis ou autorisés par Jeff de Bruges. La sanction des franchisés va de la lettre recommandée avec obligation de retirer le ou les produits concernés, à la sortie du réseau.

- Les visites bilans

34. L'article 4-7 du contrat de franchise prévoit que "le franchiseur (...) effectuera des visites-bilans afin d'aider le franchisé à adapter son magasin aux normes et méthodes Jeff de Bruges et à l'évolution de son savoir-faire". Ces visites-bilans sont effectuées par les commerciaux du siège Jeff de Bruges. Elles ont lieu au moment de l'ouverture du magasin. Les visites ultérieures visent à assurer l'harmonie des points de vente.

3. EN CE QUI CONCERNE LA POLITIQUE COMMERCIALE DE JEFF DE BRUGES

Les ventes au détail en magasin

• Les books des campagnes publicitaires

35. L'article 4-6-3 du contrat de franchise mis à jour en octobre 2003 indique : "A la demande du franchisé, le franchiseur communiquera régulièrement au franchisé un catalogue comportant des tarifs indicatifs de prix de vente publics. Il est expressément précisé que ces tarifs sont purement indicatifs et que le franchisé pourra déterminer librement ses prix de vente, dans le cadre de la réglementation tant française qu'européenne en vigueur, mais sera tenu de respecter les tarifs maximums qui lui seront communiqués".

36. S'agissant du contrat de franchise mis à jour en avril 2005, il indique (article 4-5-6) : "Le franchiseur communiquera au franchisé à la demande de ce dernier un catalogue tenu à jour comportant des tarifs de prix de vente publics maximum". Quant à son article 5-6-9, il précise : "Le franchisé, commerçant indépendant, pourra déterminer librement ses prix de vente (...) dans le respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur. Il s'engage toutefois à respecter les tarifs maximums qui lui auront été communiqués par le franchiseur (...) ".

37. Le catalogue prend la forme d'un ouvrage ("book") transmis aux franchisés, qui reprend les thématiques à venir ainsi que les tarifs maximums conseillés. Les "books" sont indissociables des vitrines thématiques proposées par le franchiseur tout au long de l'année.

• L'approvisionnement en publicité sur le lieu de vente (PLV) et le pré-étiquetage des prix

38. L'article 5-6-5 du contrat de franchise précise que "de manière à présenter à la clientèle un réseau homogène et spécifique (...), le franchisé ne devra apposer, ni afficher tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de son unité, aucune autre publicité ou PLV ou autres éléments promotionnels que ceux relatifs à la marque et à l'enseigne Jeff de Bruges (...). Le franchisé devra disposer la PLV mise au point par le franchiseur, utiliser et mettre en évidence les matériels publicitaires ainsi fournis". Les déclarations des franchisés confirment que l'approvisionnement en PLV se fait auprès du siège.

39. La gérante de la SARL Sucre d'Orge à Toulon (83000) a déclaré le 21 octobre 2002 : "(...) nous sommes tenus de nous fournir auprès du franchiseur pour les emballages et produits dérivés (...). En ce qui concerne les bonbons, Jeff de Bruges nous a imposé le mobilier, ainsi qu'un présentoir et les étiquettes de prix pré-imprimées. Pour les chocolats, Jeff de Bruges nous fournit également des étiquettes produits avec le prix pré-imprimé".

40. Une vendeuse du magasin sis à Douai, a indiqué le 13 novembre 2002 que le "book" "contient des indications quant aux produits concernés par l'opération, la disposition de la vitrine, et les prix maximums conseillés qui nous sont indiqués. Nous les suivons, d'ailleurs nous recevons des étiquettes pré-imprimées pour chaque opération".

41. La gérante du magasin situé à Montpellier (34000) a indiqué le 15 novembre 2002 : "Je pratique la politique de prix Jeff de Bruges, c'est-à-dire que je suis les prix maximums conseillés repris sur les PLV fournies par Jeff de Bruges et les étiquettes sur les spécialités".

42. La gérante du magasin sis à Poitiers (86000), a déclaré le 23 janvier 2003 : "En ce qui concerne la fixation de mes prix en magasin, ceux-ci nous arrivent sur des planches pré-imprimées avec le prix inscrit à l'avance (...)".

43. Le représentant du magasin situé à Semecourt (57280) a précisé le 9 janvier 2003 : "A chaque changement de prix, le franchiseur envoie systématiquement les publicités sur le lieu de vente dont le tableau de prix des ballotins (...). Il nous envoie les étiquettes de prix de vente à apposer sur les différents produits (...)".

44. D'après les déclarations recueillies auprès du franchiseur et des franchisés, l'achat de la PLV et des étiquettes pré-imprimées n'est pas imposé.

• Les catalogues et les éléments d'informations tarifaires destinés au public

45. Le "book communication Pâques 2002" rappelle que le catalogue est censé faire connaître la collection au public. Les franchisés sont incités à mettre les catalogues à la disposition des clients et à les leur donner lors du règlement de leurs achats. Par ailleurs, la diffusion de supports publics, sous la forme notamment de dépliants, comporte un panel des produits inspiré des catalogues magasin, et en reprend les tarifs, sans indication relative à leur caractère de prix maximum conseillés.

• L'application des tarifs fixés par le franchiseur

46. Le représentant du magasin situé à Semecourt (57280) a déclaré le 9 janvier 2003 : "(...) en tant que membre du conseil consultatif élu par les franchisés de la zone 3, (...) tous me disent respecter les tarifs définis par le franchiseur (...). La définition des prix de vente au consommateur est décidée par le franchiseur Jeff de Bruges et soumis à consultation au conseil consultatif (...). A ma connaissance, tous les franchisés et succursales pratiquent les mêmes prix. ( ...) . Il est évident que lorsque le franchiseur annonce une augmentation des prix de vente consommateur, celle-ci peut faire l'objet d'une discussion lors d'une réunion régionale par exemple. En effet, toute augmentation du prix de vente au consommateur signifie une augmentation du prix d'achat du chocolat, les discussions portant sur la modification de marge pour le franchisé (...)".

47. L'intéressé a ajouté : "(...) A chaque changement de prix, le franchiseur envoie systématiquement les publicités sur le lieu de vente dont le tableau de prix des ballotins (...). Il nous envoie également les étiquettes de prix de vente (...). La seule possibilité pour le franchisé de modifier un prix de vente au consommateur concerne (...) les compositions si nous modifions le contenu (...). La seule modification du prix a trait à la modification du poids de produits vendus. C'est dans ce cas qu'il est prévu par le franchiseur une possibilité d'acheter des étiquettes de prix vierges".

48. Le prix au kilogramme du chocolat est invariable. Le gérant de magasin de Nogent sur Marne (94130) a déclaré le 19 novembre 2002 : "Tous les prix au kilo des produits relevés sont ceux préconisés par le franchiseur (...). Il n'y a pas de surveillance particulière du prix des produits dès lors que le prix au kilo du chocolat est celui préconisé (...)".

49. La gérante du magasin Jeff de Bruges à Vincennes a indiqué le 9 janvier 2003 : "Les chocolats au kg sont vendus au prix de 30,80 euro le kg (...). Nous n'avons pas de marge de manœuvre sur ces prix. En revanche, pour toutes les compositions nous avons toute liberté pour les élaborer selon la demande du client (...). Dans ce cas, nous établissons notre prix en fonction de la garniture (...). Pour les autres produits vendus au kg (orangettes, liqueurs, calissons, mendiants...etc), j'applique les prix conseillés par l'enseigne (...). Notre prix d'achat du chocolat est de (...). Sur ce produit, notre marge est correcte. En revanche, sur d'autres produits notre marge est moindre et il ne nous serait pas possible de pratiquer des prix inférieurs aux prix conseillés (...)".

50. Un salarié du magasin de Strasbourg a déclaré le 25 novembre 2002 : "En ce qui concerne les prix de vente au public, nous nous appuyons sur les prix conseillés du franchiseur (...) pour 95 % des produits vendus car la marge proposée est de 2,4 %, et elle nous convient (...).

51. Selon la secrétaire générale de Jeff de Bruges, "Une opération "folies" permet éventuellement d'écouler les invendus de franchisés qui ont donc la possibilité de pratiquer des promotions".

52. Un représentant du magasin situé à Coquelles (62231) a précisé le 14 janvier 2003 : "En ce qui concerne les prix de vente au détail, le franchiseur communique des prix maximums conseillés que j'applique : néanmoins, nous avons la possibilité de mettre en place des offres promotionnelles au moment où nous le désirons".

• La publicité Jeff de Bruges

- La publicité nationale

53. L'article 7-2 contrat de franchise indique : "Le franchiseur assurera sous sa seule responsabilité et à sa seule initiative la publicité nationale".

54. Un franchisé situé à Nogent Sur Marne (94130) a indiqué le 19 novembre 2002 : "Je ne reçois pas d'affiches pour le magasin mentionnant les prix de vente. De la même façon, Jeff de Bruges ne communique pas sur les prix à l'occasion des publicités nationales (...)".

- Le site Internet www.jeff-de-bruges.com

55. Lors de l'enquête, le prix des classiques (chocolats constituant la gamme de base de la vente au détail des magasins Jeff de Bruges et de la constitution des ballotins) figurait sur le site sans mention du caractère conseillé des tarifs. Ultérieurement, en juin 2006, ces prix portaient la mention prix maximum TTC conseillés.

- La publicité locale

56. L'article 7-1 du contrat de franchise indique ; "Le franchisé devra consacrer chaque année à des actions de publicité locale, un budget égal à 0,50 % HT de son chiffre d'affaires hors taxes (...)". Dans la pratique, peu de franchisés réalisent de véritables campagnes publicitaires locales.

Les ventes hors magasins

• Aux comités d'entreprises et collectivités

57. La vente extérieure (article 5-6-4 du contrat) est un axe de développement privilégié par la franchise. La secrétaire générale de Jeff de Bruges a déclaré le 14 mai 2004 : "(...) 50 % des franchisés ont étendu leur activité aux collectivités".

58. Le gérant de la SARL Altia à Versailles a indiqué le 21 septembre 2004 : "l'activité de prospection CE varie fortement suivant les franchisés, qui ne sont pas nécessairement intéressés par la difficulté de cette activité, d'autant que la rentabilité de ce segment est faible. (...) 137 franchisés la pratiquent désormais (...)".

59. Sur la période 1994-2002, les tonnages des ventes CE ont été de :

<emplacement tableau>

60. Le segment des ventes comités d'entreprises fait l'objet de gammes et de lignes spécifiques adaptées au marché des collectivités (Droopy, les Triplés...), limitées à Noël et Pâques.

• Les "books CE"

61. Le franchiseur réalise des "books CE" et diffuse des modèles de lettres aux clients, que les franchisés sont libres de suivre ou non. Sont annexés à ces "books" une présentation des supports saisonniers des produits, les modèles de bons de commande à utiliser par les responsables CE, les exemplaires-types de coupons-découverte, de lettres mailing, et un Code de bonne conduite. La commande de kits de vente CE s'effectue auprès du siège. Le franchiseur fixe aussi la tarification des ballotins CE.

• Les prix et offres CE

62. Un membre de la commission CE Jeff de Bruges a précisé le 21 septembre 2004 : "La commission CE réunit en groupe de travail des franchisés qui décident de la gamme de produits destinés à la vente CE, des prix au kilo ou au ballotin,- même si cette compétence revient en dernier ressort au conseil consultatif -, des modèles (...)".

63. Le catalogue est un "support de prospection et de vente privilégié". Une centaine de catalogues est fournie au franchisé avant chaque campagne CE. Sur les catalogues de présentation des ballotins de 250g, 500g, 750g et 1kg, les tarifs TTC apparaissent pré-imprimés, après déduction des remises accordées par le franchiseur. A côté du prix "comités", est mentionné le prix de vente magasin rayé. Les tarifs indiqués sont dépourvus de toute mention relative à leur caractère maximum conseillé.

64. Un franchisé à Semecourt (57 280) a déclaré le 9 janvier 2003 : "Le franchisé commande auprès du franchiseur les bons de commande avec prix de vente pré-imprimé à transmettre aux différents CE intéressés (...)". Toutefois, les franchisés sont libres d'adapter ces bons de commande à leur campagne.

65. Le représentant du magasin situé à Versailles (78000) a précisé le 21 septembre 2004 : "Je reçois un spécimen de bon de commande du franchiseur ainsi qu'un catalogue des produits qui comporte les prix TTC pour un poids net de chocolats, qui tiennent déjà compte des remises effectuées par le franchiseur. Les tarifs tels qu'ils apparaissent sur ce catalogue sont reportés tels quels et de manière non négociable sur les bons de commande spécifiques que je crée pour chaque saison de prospection CE".

66. La gérante du magasin situé à Vincennes (94300) a déclaré le 9 janvier 2003 : "Pour les comités d'entreprises, il existe un tarif édité par l'enseigne. Sur ces produits, nous sommes tenus aux prix du tarif Jeff de Bruges (...)".

67. Le tableau ci-dessous reprend les tarifications, remises et marges portées sur les "books" CE en 2001, 2002 et 2003 :

Produits

<emplacement tableau>

• Le Code de bonne conduite comités et collectivités

68. Ce Code, annexé au contrat de franchise, ce qui n'a pas été démenti en séance, et aux différents "books" prévoit :

- l'exclusivité de la destination des ballotins CE et l'interdiction de leur commercialisation en magasin ;

- l'obligation de retrait d'une entreprise déjà démarchée par un autre franchisé ;

- l'interdiction de surenchère-remise entre deux ou plusieurs franchisés afin d'obtenir un marché ;

- l'obligation de vente au prix CE, représentant une remise allant jusqu'à 30 % sur le prix magasin ;

- l'interdiction de prospection des commerçants détaillants et particuliers ;

- l'interdiction de la prospection au moyen d'étudiants, sans limite ni déontologie.

69. Un franchisé a déclaré le 22 octobre 2002 : "(...) Nous recevons un tarif destiné à la vente aux comités d'entreprises tous les ans. Les conditions de vente sont prédéfinies par Jeff de Bruges dans le Code de déontologie (...)".

70. Les représentants du magasin Jeff de Bruges à Vernon (27200) ont précisé le 6 janvier 2003 : "Contrairement à ce qui est spécifié dans l'article 5-6-4", qui mentionne que le franchisé ne bénéficie pas de l'exclusivité territoriale pour son activité de ventes extérieures "pour ce qui concerne les ventes extérieures (en fait les comités d'entreprises), l'exclusivité territoriale est maintenue en pratique pour des raisons déontologiques. Toutefois, nous pouvons prospecter au-delà (...)".

71. En revanche, le gérant de la SARL Altia à Versailles a indiqué le 21 septembre 2004 : "Le Code de déontologie existe, mais l'absence d'exclusivité territoriale, notamment en région parisienne provoque de fait des prospections croisées (...)". L'intéressé a poursuivi : "L'obligation de non-surenchère n'a également pas de réalité de terrain dans mon cas, puisque les tarifs CE sont non négociables à réception du spécimen de bon de commande (...)".

D. LE GRIEF NOTIFIE

72. Sur la base des éléments qui précèdent, a été notifié à l'encontre de la société Jeff de Bruges SAS, qui depuis a fait l'objet d'une restructuration, mais subsiste en tant qu'opérateur sur le marché et doit donc se voir imputer les pratiques, le grief "d'avoir fourni aux franchisés des prix maximums indicatifs conseillés qui sont des prix imposés, pratique qui a pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence et tombe sous le coup des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et de l'article 81 du traité de Rome".

II. Discussion

1. SUR L'ACHAT ET LA VENTE DES PRODUITS, LES ELEMENTS DISTINCTIFS JEFF DE BRUGES ET L'AMENAGEMENT DU POINT DE VENTE

73. En vertu des dispositions de l'article 6.2. du contrat de franchise, le franchisé s'engage à ne vendre que "les produits fabriqués, distribués, référencés et/ou commercialisés par le franchiseur ...". Toutefois, il peut s'approvisionner auprès d'un autre franchisé.

74. Quant aux éléments distinctifs Jeff de Bruges, le franchisé peut les acquérir auprès de tous les fournisseurs de son choix, sous réserve de la conformité des éléments acquis aux normes et à l'image de marque de la franchise.

75. Pour ce qui concerne l'aménagement du point de vente, l'article 4.5.1. du contrat de franchise précise que le franchiseur communiquera au franchisé "les standards d'installation d'un magasin Jeff de Bruges-Martial dans son agencement extérieur et intérieur". Les franchisés sont libres cependant d'acheter ailleurs, même si l'achat du mobilier s'effectue en général auprès du franchiseur. De plus, le franchiseur impose un architecte conseil au franchisé. Mais ce dernier est libre de s'adresser aux entreprises de son choix dans le strict respect d'un cahier des charges, et les franchisés sont eux-mêmes libres de choisir d'autres entreprises.

76. L'ensemble des obligations ainsi imposées aux franchisés sont nécessaires pour assurer l'identité, l'unité et la réputation du réseau et de la marque. En outre, les clauses du contrat de franchise relatives à l'aménagement du point de vente n'excèdent pas ce qui est nécessaire à la protection des droits de propriété du franchiseur (décision du Conseil de la concurrence n° 97-D-51 du 24 juin 1997, relative à des pratiques relevées dans le réseau de franchise de lavage de véhicules par haute pression de la société Hypromat France).

77. En conséquence, il n'est pas établi que la société Jeff de Bruges SAS, en imposant aux franchisés les obligations mentionnées ci-dessus, ait mis en œuvre une pratique anticoncurrentielle.

2. SUR LA POLITIQUE DE FIDELITE DU RESEAU JEFF DE BRUGES

78. Dans le cadre de la formation qu'il met en place et à l'issue du stage qu'il organise, le franchiseur remet au franchisé un manuel qui matérialise le transfert de son savoir-faire. Cette "bible" est délivrée systématiquement, mais son respect strict par le franchisé n'est pas contrôlé par le franchiseur.

79. Par ailleurs, s'agissant notamment de la caisse enregistreuse, si son achat est un élément de conformité au réseau, il n'est pas démontré que cette caisse constitue un élément de contrôle des ventes du franchisé.

80. Il n'est donc pas établi que la société Jeff de Bruges SAS ait mis en œuvre une pratique anticoncurrentielle en délivrant un tel ensemble de recommandations à ses franchisés.

3. SUR LA POLITIQUE COMMERCIALE DE JEFF DE BRUGES

• La preuve des ententes verticales de prix imposés

81. Ainsi que l'a indiqué le Conseil dans la décision n° 06-D-04 bis relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la parfumerie de luxe, l'ingérence du fournisseur dans la politique de prix du distributeur contrevient à l'article L. 410-2 du Code de commerce qui énonce : "Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence". L'alignement volontaire des prix au détail s'oppose donc à la libre détermination de ces prix par la concurrence. L'article L. 442-5 du Code de commerce fait d'ailleurs de la pratique de prix imposés une infraction pénale, définie indépendamment du pouvoir de marché détenu par le producteur, réprimant "le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale".

82. L'article L. 420-1 du même Code tire la conséquence du principe de la libre fixation des prix en prohibant de manière expresse, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché les ententes qui tendent "à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse".

83. Selon une jurisprudence constante, rappelée dans les décisions n° 04-D-33 et n° 05-D-06, le Conseil considère que s'il n'est pas l'issue du jeu concurrentiel normal, un alignement des prix peut résulter d'une entente horizontale directe sur les prix entre distributeurs ou encore d'une série d'ententes verticales entre chaque fournisseur et chacun de ses distributeurs autour d'un prix de revente déterminé par ce fournisseur. Elle peut aussi résulter de la mise en œuvre d'une entente horizontale qui a conduit les distributeurs à décider de faire pression sur un fournisseur pour que celui-ci refuse de livrer ou agisse pour rendre plus onéreuses les conditions d'achat d'un réseau de distribution concurrent.

84. Pour faire la distinction entre ces différentes situations - entente illicite ou parallélisme admissible de comportement - le Conseil considère, en dehors des hypothèses simples où l'accord de volonté résulte de la signature par les parties d'un contrat comportant une clause aux termes de laquelle le distributeur s'engage à respecter les prix imposés par le fournisseur, que la preuve de l'entente verticale, qui suppose un accord de volonté entre les entreprises, est rapportée lorsqu'un faisceau d'indices "graves, précis et concordants" converge pour établir les trois points suivants :

- en premier lieu, les prix de vente au détail souhaités par le fournisseur sont connus des distributeurs ;

- en deuxième lieu, une police des prix a été mise en place pour éviter que des distributeurs déviants ne compromettent le fonctionnement durable de l'entente ;

- en troisième lieu, ces prix, souhaités par le fournisseur et connus des distributeurs, sont significativement appliqués par ces derniers.

• L'appréciation des ententes verticales

85. Le règlement n° 2790-1999 du 22 décembre 1999, concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité CE à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées constitue, dans le cadre de l'application du droit interne, un "guide d'analyse", depuis 2000 ; le Conseil considère en effet que les restrictions verticales doivent être analysées en tenant compte de ces principes, même lorsque l'analyse n'en est effectuée qu'au regard du droit national.

86. Ce règlement prévoit une exemption d'application du paragraphe 1 de l'article 81 aux accords de distribution, dits "accords verticaux", conclus entre des distributeurs et un fournisseur, lorsque, notamment, la part détenue par le fournisseur sur le marché pertinent sur lequel il vend ses biens et services ne dépasse pas 30 %, et ce, sous réserve que ces accords ne comportent pas de restrictions caractérisées, énumérées à l'article 4 : il s'agit de "la restriction de la capacité de l'acheteur de déterminer son prix de vente (...)" (a) ; de "la restriction concernant le territoire dans lequel, ou la clientèle à laquelle, l'acheteur peut vendre les biens ou services contractuels" (b) ; "de la restriction des ventes actives ou passives au sein d'un réseau de distribution sélective" (c) ; "et enfin de la restriction des livraisons croisées au sein d'un réseau de distribution sélective" (d).

87. Ce texte dispose donc que les pratiques qui imposent des prix de revente, limitent la production ou les ventes ont nécessairement un objet anticoncurrentiel, sans qu'il soit besoin de mesurer leurs effets concrets.

88. Ainsi qu'il résulte d'un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 8 juillet 1999 (Anic), les pratiques concertées, comme les accords entre entreprises ou les décisions d'associations d'entreprises, sont interdites "lorsqu'elles ont un objet anti-concurrentiel, indépendamment de tout effet". La Cour énonce à ce propos qu'"il est de jurisprudence constante que, aux fins de l'application de l'article 85§1 du traité, la prise en considération des effets concrets d'un accord est superflue, dès lors qu'il apparaît qu'il a pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence".

89. De même, le Conseil de la concurrence a, dans une décision n° 02-D-36 du 14 juin 2002, énoncé qu'"il résulte des termes de l'article L. 420-1 du Code de commerce qu'une pratique anti-concurrentielle est prohibée, même si elle n'a pas eu d'effet réel sur le jeu de la concurrence, dès lors que l'intention de ses auteurs était d'obtenir un tel effet".

90. Il résulte de ce qui précède que les effets d'un accord ayant pour objet de restreindre, d'empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence ne sont pas nécessaires à la caractérisation d'une entente : leur prise en compte est seulement utile pour évaluer le montant de la sanction.

• Les arguments de Jeff de Bruges

91. Les sociétés Jeff de Bruges Diffusion, Jeff de Bruges Exploitation et Jeff de Bruges SAS, font valoir que les dispositions de l'article 4.6.3 du contrat de franchise selon lesquelles "le franchiseur communiquera régulièrement au franchisé un catalogue comportant des tarifs indicatifs de prix de vente publics (...). Il est (...) précisé que ces tarifs sont purement indicatifs et que le franchisé pourra déterminer librement ces prix de vente (...) mais sera tenu de respecter les tarifs maximums qui lui seront communiqués", régissent toutes les relations franchiseur-franchisés au regard des prix, à savoir les ventes en boutiques et les ventes hors boutiques. Elles soutiennent que le contrat de franchise pose le principe de la liberté du commerçant indépendant dans la fixation de ses prix.

92. La pratique du réseau confirmerait, selon ces sociétés, la mise en œuvre de cette liberté. Jeff de Bruges a ouvert à la concurrence les ventes hors boutiques en limitant l'exclusivité territoriale aux seules ventes en boutiques. Les franchisés déterminent leurs prix dans la limite des maxima conseillés. De plus, les défenderesses prétendent que la mention "prix maxima conseillés", aujourd'hui apposée sur les supports de vente, n'était pas nécessaire, le contrat de franchise imposant, en ce qui concerne les prix, leur caractère de prix maxima conseillés, et le franchisé étant libre d'acheter ou non les étiquettes et les bons de commandes pour les ventes en boutiques et hors boutiques.

93. Les intéressées font encore observer qu'il n'existe au sein du réseau aucune sanction, ni aucun moyen de coercition à l'égard des franchisés, afin de leur imposer les prix de vente à appliquer pour les ventes aux CE. Elles produisent plusieurs attestations de franchisés qui déclarent avoir toujours pratiqué les prix maxima conseillés, sans distinction entre les ventes en boutiques ou hors boutiques.

• Les ventes au détail en magasins Jeff de Bruges

94. Aux termes de l'article 4 du règlement (CE) n° 2790-99 de la Commission européenne du 22 décembre 1999, cité au paragraphe 85, l'imposition d'un prix de vente maximum indicatif conseillé n'est pas interdite à la condition qu'il ne s'agisse pas en réalité d'un prix imposé.

95. En l'espèce, s'il ressort de l'enquête et de l'instruction que les franchisés appliquent en général les prix conseillés par le franchiseur, aucun élément ne permet d'établir qu'il s'agisse en réalité de prix imposés par le franchiseur. En effet, si les franchisés appliquent, dans leur grande majorité, les tarifs proposés dans les "books" ou portés sur les dépliants, publicités et étiquettes édités par le franchiseur (dont l'achat n'est pas obligatoire), sans mention de leur caractère maximum conseillé, et si les prix des chocolats constituant la gamme de base de la vente en magasin figurant sur le site Internet Jeff de Bruges ne comportent pas la mention "tarifs maximums conseillés" (du moins, pas avant 2006), aucune police des prix n'a été mise en place par le franchiseur.

96. Il n'existe pas de sanction contractuelle pour le cas où le franchisé appliquerait des prix différents de ceux fournis par le franchiseur. De même, les franchisés entendus lors de l'enquête ne font pas état de pressions exercées à leur encontre par le franchiseur afin de les obliger à appliquer les prix fixés par le franchiseur et les magasins ne sont pas équipés de caisses à prix pré-enregistrés ou reliées au siège du franchiseur. De plus, certains franchisés ont déclaré qu'ils disposent de la liberté de fixer leurs prix ou qu'ils n'appliquent pas totalement les prix fournis par le franchiseur, d'autres, qu'ils ont la possibilité de mettre en place des offres promotionnelles.

97. Le président de la SAS Jeff de Bruges, a déclaré le 31 mars 2006 : "il existe un prix maximum conseillé. Le commerçant franchisé est libre de fixer son prix dans cette limite (...). Lors de la baisse de la TVA sur les bonbons de chocolat en début d'année 2006, le franchiseur a baissé dans ses succursales le prix de vente au kilogramme au consommateur pour le faire bénéficier d'une partie de cette baisse. Certains franchisés, en raison de ce qu'ils sont libres de leurs prix, ont continué de pratiquer le prix antérieur à la baisse de TVA (...)".

98. Il résulte encore de l'instruction que le franchiseur ne communique pas sur les prix à l'occasion des publicités nationales. En outre, si au sein du conseil consultatif Jeff de Bruges des éléments sur la stratégie prix sont abordés, les avis donnés par ce conseil n'ont pas de caractère obligatoire.

99. En conséquence, il n'est pas établi que les tarifs appliqués par les franchisés pour les ventes au détail en magasins soient des prix imposés constitutifs d'une pratique anticoncurrentielle répréhensible au regard des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

100. S'agissant de l'exclusivité territoriale géographique octroyée à chaque franchisé pour les ventes au détail qui les empêcherait de se faire concurrence, ce moyen de défense, surabondant en l'absence de pratiques de prix imposés par le franchisé, a été écarté. En effet, un doute, qui n'a pas pu être levé en séance, subsiste sur l'étanchéité des zones de chalandise fixées contractuellement pour chaque franchisé.

101. Il convient enfin de signaler que sur le site Internet Jeff de Bruges, consulté en juin 2006, le prix des "classiques" apparaît avec la mention "prix maximum TTC conseillé" qui dorénavant serait également apposée sur tous les supports de vente, d'après les observations produites par Jeff de Bruges.

• Les ventes aux comités d'entreprises

102. Les ventes aux comités d'entreprises font l'objet de la création de gammes spécifiques. Le franchiseur diffuse des "books CE" qui contiennent notamment les prix CE, les marges et les remises. Des bons de commandes avec les prix de vente pré-imprimés sont annexés à ces books. Les franchisés les commandent auprès du franchiseur afin de les transmettre aux comités intéressés. Les prix portés sur ces documents ne comportent aucune mention sur leur caractère maximum conseillé.

103. Le 31 mars 2006, le président de la SAS Jeff de Bruges a indiqué : "Pour les ventes aux collectivités et CE, le franchisé peut ou non se procurer le support de vente franchiseur qui contient des prix qui ne portent pas la mention prix maximums conseillés, mais qui n'en sont pas moins pour le franchiseur des prix maximums conseillés. Toutefois, et bien qu'il n'y ait pas la moindre ambiguïté à cet égard, nous allons modifier les supports de vente pour préciser que les prix sont des maxima conseillés. De plus, le franchiseur réitère que les franchisés sont totalement libres de leurs offres de prix et de leurs remises, lorsqu'ils démarchent les CE, parfois à plusieurs. La concurrence joue donc pleinement (au point d'avoir parfois indisposé les comités d'entreprises (...). S'agissant des formulaires ou bons de commande qui ne comportent pas la mention prix maximums conseillés, ils seront aussi modifiés afin que les choses soient claires. Enfin, les franchisés qui démarchent auprès des CE sont totalement libres d'avoir leur propre documentation".

104. Un Code de bonne conduite comités et collectivités décrit au paragraphe 69 est aussi annexé au contrat de franchise et aux différents books. Il prévoit : "(...)

- l'obligation de retrait d'une entreprise déjà démarchée par un autre franchisé ;

- l'interdiction de surenchère-remise entre deux ou plusieurs franchisés afin d'obtenir un marché ;

- l'obligation de vente au prix CE, représentant une remise allant jusqu'à 30 % sur le prix magasin (...)".

105. Le président de la SAS Jeff de Bruges, a indiqué qu'actuellement ce Code " n'est pas formalisé par un document écrit, même s'il l'a été par le passé. La formule ["il faut éviter la concurrence et le surenchérissement entre franchisés, même si cela demeure une règle morale non contractuelle"], signifie que Jeff de Bruges veut éviter de donner une mauvaise image aux entreprises, lorsque les professionnels (franchisés notamment) se présentent ou les démarchent à plusieurs, pour tenter d'obtenir une commande (ventes aux collectivités et aux CE). Jeff de Bruges a eu, en effet, des retours de CE et collectivités mécontents du harcèlement opéré par les professionnels franchisés qui les démarchaient même à partir de zones territoriales éloignées. La recommandation de ne pas harceler les responsables des comités d'entreprise, d'ailleurs sans valeur juridique ou coercitive, n'avait donc nullement pour but d'éviter la concurrence, puisqu'au contraire nous l'avons favorisée au détriment de l'exclusivité des secteurs, mais d'éviter de donner une image négative du réseau.

Il est rappelé, en effet, que l'exclusivité territoriale des franchisés ne s'applique pas dans les ventes externes dont les CE, ce qui permet à la concurrence de s'exercer entre les franchisés dans le démarchage des CE, d'où la multiplicité des offres et le harcèlement de ces derniers. La formule susvisée se justifie et s'explique au travers de la prise de conscience de ce harcèlement".

106. Ce Code en vigueur lors des investigations, de 2001 à 2004, est joint au contrat de franchise, ce qui n'a pas été démenti en séance par Jeff de Bruges. Il a donc la même valeur contractuelle, la même force obligatoire que le contrat lui-même. Dès lors, l'obligation qu'il impose aux franchisés de vendre au prix CE conduit ces derniers à appliquer un prix consigné dans un contrat qui s'avère être un prix imposé par le franchiseur. L'interdiction de "surenchère-remise" participe de la même volonté de limiter la liberté commerciale des franchisés. De tels agissements, qui trouvent leur source dans le contrat lui-même, sont constitutifs d'une entente sur les prix entre franchiseur et franchisés, pratique qui, par sa nature même, a pour objet de porter atteinte à la concurrence, sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'une police de prix du franchiseur.

107. Le représentant de la SAS Jeff de Bruges a déclaré, au cours de l'instruction, que les supports de vente CE allaient être modifiés afin qu'y figure désormais la mention "prix maxima conseillés", changement qui, d'après les observations produites, serait effectif, mais qui n'enlève pas aux pratiques mises en œuvre antérieurement révélées par l'enquête, leur caractère anticoncurrentiel.

108. En conséquence, il est établi que la société Jeff de Bruges SAS, qui depuis la restructuration du groupe décrite au paragraphe 10, ne gère plus l'activité de franchise, transférée à la société Jeff de Bruges Diffusion, mais subsiste en tant qu'opérateur sur le marché, a imposé des prix de détail à ses franchisés pour les ventes destinées aux comités d'entreprise, pratique qui a pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence, et contraire aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

4. SUR L'AFFECTATION DU COMMERCE INTRA COMMUNAUTAIRE

109. Trois éléments doivent être démontrés pour établir que les pratiques sont susceptibles d'avoir sensiblement affecté le commerce intracommunautaire : l'existence d'échanges entre États membres portant sur les produits faisant l'objet de la pratique (premier point), l'existence de pratiques susceptibles d'affecter ces échanges (deuxième point) et le caractère sensible de cette possible affectation (troisième point).

110. S'agissant des deux premiers points, les pratiques en cause ayant eu pour objet d'imposer des prix sur tout le territoire national sont susceptibles d'affecter le courant des échanges intracommunautaires.

111. S'agissant du troisième point, les lignes directrices de la Commission européenne relatives à la notion d'affectation du commerce (2004-C 101-07) citent au paragraphe 52 les deux seuils cumulatifs de minimis en deçà desquels un accord est présumé ne pas affecter sensiblement le commerce entre Etats membres :

* la part de marché totale des parties sur le marché communautaire en cause affecté par l'accord n'excède pas 5 % ;

* et, dans le cas d'accords verticaux, le chiffre d'affaires annuel total réalisé dans la communauté par le fournisseur avec les produits concernés par l'accord n'excède pas 40 millions d'euro.

112. Ce seuil de 40 millions d'euro est calculé, selon le paragraphe 54 des lignes directrices, sur la base des ventes totales hors taxes réalisées dans la Communauté, durant l'exercice écoulé, par les entreprises en cause avec les produits concernés par l'accord.

113. Or, en l'espèce, le grief notifié sur la base de l'article 81 du traité concerne les chocolats vendus aux comités d'entreprises et il n'est pas démontré et d'ailleurs fort improbable, compte tenu du chiffre d'affaires global de cette société et des volumes en cause, que la société Jeff de Bruges réalise dans la communauté plus de 40 millions d'euro avec ces produits.

114. Dès lors, l'affectation sensible du commerce intra communautaire n'est pas démontrée.

5. SUR LES SANCTIONS

115. Aux termes de l'article L. 464-2 du Code de commerce, dans sa rédaction résultant de la loi du 15 mai 2001 : "Le Conseil de la concurrence peut (...) infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit (...). Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'entreprise ou de l'organisme sanctionné (...) et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction (...).

Le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des derniers exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante".

116. La présente affaire relevant de la procédure simplifiée, il y a lieu de faire application de l'article L. 464-5 du Code de commerce qui dispose : "Le Conseil, lorsqu'il statue selon la procédure simplifiée prévue à l'article L. 463-3, peut prononcer les mesures prévues au I de l'article L. 464-2. Toutefois, la sanction pécuniaire ne peut excéder 750 000 euro pour chacun des auteurs de pratiques prohibées".

En ce qui concerne la gravité des faits

117. En l'affaire, la diffusion aux franchisés par la société Jeff de Bruges SAS de prix maximums indicatifs conseillés qui sont en réalité des prix imposés, est par nature une restriction flagrante de concurrence. Jeff de Bruges est la deuxième enseigne présente en nombre de points de vente sur le segment de marché de la distribution spécialisée de confiseries de chocolat, avec au mois de mars 2006, 164 franchisés et 49 succursales, derrière Léonidas (350 magasins), et avant De Neuville (130 magasins).

118. Toutefois, si le démarchage des collectivités et CE est fortement encouragé par le franchiseur, la moitié des franchisés seulement diversifient leur activité à Noël et Pâques.

En ce qui concerne l'importance du dommage à l'économie

119. La pratique de prix imposés par le franchiseur a nécessairement eu des effets sur les prix pratiqués par les franchisés pour les chocolats vendus aux comités d'entreprises. L'importance du dommage à l'économie a toutefois été limitée par la concurrence des autres marques de chocolat, énumérées au paragraphe 19 de la décision. Cette concurrence inter-marque s'est avérée relativement vive, comme en témoigne le chiffre d'affaires réalisés par Léonidas en 2003 qui s'est élevé à 56 000 000 euro, alors que la même année, le société Jeff de Bruges SAS réalisait un chiffre d'affaires de 26 845 134 euro. Toujours pour le même exercice, la part des ventes CE dans les ventes totales de la franchise a été de 17,3 % pour un chiffre d'affaires HT de 4,641 millions d'euro avec une marge brute de 1,530 K euro.

120. Enfin, lors de l'enquête, sur un total de 202,3 tonnes de chocolat vendues aux CE et collectivités, le franchisé qui avait réalisé la vente la plus importante atteignait 9,1 tonnes. De plus, sur 114 franchisés actifs sur le segment CE, 55 d'entre eux avaient réalisé un volume de ventes supérieur à 1 tonne, et 59 d'entre eux un volume compris entre 47 kgs et 990 kgs.

En ce qui concerne les suites à donner

121. La société Jeff de Bruges SAS a pris une part active, directe et prépondérante aux pratiques relatives à la fixation et la fourniture aux franchisés de prix imposés, qui tombent sous le coup des dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce. Le montant du chiffre d'affaires hors taxe le plus élevé réalisé depuis 2002 par la société s'élève à 26,8 millions d'euro.

122. En fonction des éléments généraux et individuels exposés ci-dessus, il y a lieu de lui appliquer une sanction pécuniaire de 50 000 euro.

123. Il est également enjoint à la société Jeff de Bruges SAS, même si ses représentants ont affirmé en séance que le Code de bonne conduite avait été retiré :

- d'une part, d'envoyer aux franchisés une lettre indiquant que le Code de bonne conduite est entièrement caduc ;

- d'autre part, de rappeler dans le contrat de franchise, ses annexes, et dans les documents édités par le franchiseur, que les prix sont des prix maximums TTC conseillés, et que le franchisé est totalement libre de fixer ses prix de vente au détail et ses prix de vente aux CE et collectivités, sous réserve de respecter les prix de vente maximums conseillés.

Decision

Article 1er : Il est établi que la société Jeff de Bruges SAS a enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce.

Article 2 : Une sanction pécuniaire de 50 000 euro est infligée à la société Jeff de Bruges SAS.

Article 3 : Il est enjoint à la société Jeff de Bruges SAS, dans les trois mois suivant la notification de la présente décision :

- d'une part, d'envoyer aux franchisés une lettre indiquant que le Code de bonne conduite est entièrement caduc ;

- d'autre part, de rappeler dans le contrat de franchise, ses annexes, et dans les documents édités par le franchiseur, que les prix sont des prix maximums TTC conseillés, et que le franchisé est totalement libre de fixer ses prix de vente au détail et ses prix de vente aux CE et collectivités, sous réserve de respecter les prix de vente maximums conseillés.