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Décisions

Cass. com., 12 décembre 2006, n° 05-19.204

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Martin-Prével, Hidoux (ès qual.), Automobiles de Gap et des Alpes (SA)

Défendeur :

Automobiles Citroën (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Tric

Avocat général :

M. Lafortune

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Gatineau

T. com. Paris, du 16 juin 2003

16 juin 2003

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 15 juin 2005), que, par contrat à durée déterminée du 1er décembre 1984, suivi d'un contrat à durée indéterminée du 1er décembre 1988, la société Automobiles de Gap et des Alpes est devenue concessionnaire exclusif de la marque Citroën pour le secteur des Hautes-Alpes et une partie des Alpes de Haute-Provence ; qu'il a été demandé au concessionnaire de construire un nouveau garage et de constituer des effectifs ; qu'en 1990, l'objectif a été fixé à 978 véhicules et en 1991 à 876 véhicules ; que par jugement du 30 décembre 1992, le concessionnaire a été mis en liquidation judiciaire et que M. Hidoux a été désigné en qualité de liquidateur ; que le dirigeant de la société, M. Martin-Prével, et son liquidateur ont assigné le concédant en réparation du préjudice causé selon eux par la fixation d'objectifs artificiellement hauts pour les années 1990 et 1991 ayant entraîné la procédure collective ;

Attendu que M. Martin-Prével et M. Hidoux, ès qualités, reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le moyen : 1°) qu'aux termes des dispositions de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, le concessionnaire et le liquidateur exposaient dans leurs conclusions d'appel leur souhait de voir jugé le comportement fautif du constructeur qu'ils stigmatisaient non seulement par une pression commerciale abusive mais également par le refus réitéré d'un dépôt de bilan malgré une parfaite connaissance des indicateurs économiques de l'entreprise, ainsi que par une absence de soutien pendant la phase de redressement amorcée trop tardivement ; qu'ils produisaient aux débats des documents au soutien de leur prétention ; qu'en décidant néanmoins que les appelants reprochaient à la société Citroën la seule fixation d'objectifs de vente trop élevés, lesquels seraient à l'origine directe du dépôt de bilan de la société concessionnaire et des préjudices multiples en résultant pour chacun d'eux, la cour d'appel a méconnu les termes du litige ; 2°) qu'en tout état de cause, il résultait des nombreux courriers produits aux débats que M. Martin-Prével avait régulièrement informé le constructeur du caractère irréalisable des objectifs imposés ; qu'en affirmant néanmoins que le concessionnaire n'établissait ni même n'alléguait s'être jamais opposé pendant toute la durée de la concession aux exigences du concédant et en se fondant sur les seuls documents produits par le constructeur, sans examiner les documents qui lui étaient soumis par le concessionnaire, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 3°) que les intéressés justifiaient d'un préjudice résultant de la détermination de l'objectif surestimé de 34 % pour l'année 1990, invitant logiquement la cour d'appel à examiner ce quota par rapport au pourcentage de pénétration de la marque sur le territoire national au cours de la même année ainsi que par rapport au quota de l'année antérieure ; que pour réfuter l'existence du préjudice allégué, la cour d'appel a affirmé que l'année suivante avait été marquée par une diminution du quota de 10,5 % ; que, partant, elle s'est prononcée par des motifs inopérants, en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 4°) que la bonne foi du constructeur dans l'exécution du contrat de concession était remise en cause par les conclusions du concessionnaire et du liquidateur, qui soulignaient combien, dans cette affaire, la société Automobiles Citroën avait en réalité oeuvré dans son seul intérêt et en méconnaissance totale de celui de son partenaire et cocontractant, en particulier lorsqu'il s'était agi de retarder le dépôt de bilan puis de redresser l'entreprise ; que dès lors, en ne recherchant pas si la société Automobiles Citroën avait manqué au principe de bonne foi régissant l'exécution des contrats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt, par motifs adoptés, écarte, d'un côté, l'existence d'une pression commerciale en l'absence de preuve de ce que le concessionnaire avait informé le concédant de son manque de fonds propres et des risques encourus, et avait manifesté son désaccord, et de l'autre, la gestion de fait par le concédant faute de preuve ; qu'ainsi, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument délaissées sans méconnaître les termes du litige ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que pour les années 1989 et 1990, la formule de calcul des objectifs se fondait de façon concrète et objective tant sur les performances de la marque au niveau national et au niveau régional que sur les résultats antérieurs du concessionnaire, permettant ainsi d'arrêter, à l'issue d'un calcul, exclusif de tout caractère discriminatoire ou subjectif, les objectifs assignés pour chaque année à la société Automobiles de Gap et des Alpes ; qu'ainsi, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de faire une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.