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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 9 mai 2006, n° 06-00867

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Conseillers :

Mmes Sem, Geraud-Charvet

TGI Paris, 31e ch. corr., du 4 oct. 2005

4 octobre 2005

Rappel de la procédure:

La prévention:

X Eric et la SARL Y sont poursuivis pour avoir à Paris, le 11 avril 2003 :

- effectué une publicité comportant sous quelque forme que ce soit, des allégations indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant sur la nature, les qualités substantielles, l'origine de biens, en l'espèce en laissant croire à tort que les produits alimentaires bénéficient d'une appellation contrôlée et d'un label de qualité délivré par une autorité administrative danoise, en alléguant que le saumon sauvage danois est en provenance directe de l'île de Bornholm, en omettant de préciser que le flétan provient de l'océan Atlantique, en qualifiant une truite comme étant de rivière sans préciser qu'elle est d'élevage,

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré X Eric et la SARL Y :

coupables de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis le 11 avril 2003 à Paris, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

et, en application de ces articles,

a condamné Eric X à une amende délictuelle de 1 500 euro

a condamné la SARL Y à une amende délictuelle de 3 000 euro

a ordonné à l'égard de X Eric et de la SARL Y la publication du jugement dans Le Monde

a rejeté les demandes de non-inscription de cette décision au bulletin n° 2 du casier judiciaire

a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 90 euro dont est redevable chaque condamné

Les appels:

Appel a été interjeté par:

- Monsieur X Eric, le 6 octobre 2005

- SARL Y, le 6 octobre 2005

- M. le Procureur de la République, le 6 octobre 2005 contre Monsieur X Eric, SARL Y

Décision:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels relevés par les prévenus et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il est fait référence.

Monsieur l'Avocat général requiert la confirmation du jugement déféré.

Bien que régulièrement cités, respectivement à personne et au domicile déclaré dans l'acte d'appel, Eric X et la société Y ne comparaissent pas, il sera statué contradictoirement par application de l'article 410 alinéa 2 du Code de procédure pénale à l'encontre de Eric X et contradictoirement par application de l'article 503-1 du Code de procédure pénale à l'encontre de la société Y.

Rappel des faits

Les circonstances de la cause ont été exactement et complètement rapportées par les premiers juges dans un exposé des faits auquel la cour se réfère expressément.

Il suffit de rappeler que lors d'un contrôle effectué le 11 avril 2003 dans les locaux de la SARL Y, sise <adresse> à 75008 Paris, et dont Eric X est le gérant, des agents habilités de la DGCCRF faisaient les constations suivantes:

- le saumon fumé sauvage danois, et même la totalité des poissons sauvages commercialisés par la société Y étaient présentés comme bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée et d'un label de qualité délivré par une autorité administrative danoise ("Bornholm Kvalitet") alors que d'une part le Danemark n'avait, à l'époque de l'établissement du procès-verbal, pas fait de demande d'enregistrement auprès de la Commission européenne se rapportant à une appellation d'origine relative au saumon sauvage de l'île de Bornholm ni à aucun autre poisson de même provenance et d'autre part que l'estampille "Bornholm Kvalitet" n'était qu'un label commercial de la société Y,

- le saumon fumé danois était toujours présenté comme provenant en direct de l'île de Bornholm alors que la société Y se fournissait en saumon fumé sauvage danois auprès de deux fournisseurs dont un seul était installé dans cette île, l'autre étant situé sur la côte Ouest du Danemark,

- le tarif "professionnels" de la société proposait un produit dénommé "truite de rivière fumée. Origine France. En filet" avec une étiquette indiquant "Filets de truite fumée. Ingrédients : Oncorhyncus mykiss élevé en France", correspondant à une truite d'élevage,

- dans le tarif réservé aux particuliers le flétan sauvage était présenté sous la cartouche "Poissons fumés/marinés sauvages en provenance directe de l'île de Bornholm Mer Baltique" alors que ce poisson provenait de l'océan Atlantique.

Sur ce, LA COUR

Considérant que le fait de présenter dans divers supports publicitaires des produits alimentaires comme bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée, accompagnés d'une estampille dont les termes font penser à un label de qualité délivré par une autorité administrative danoise, alors que ces denrées n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement officiel en tant qu'appellation d'origine contrôlée auprès des instances administratives européennes et que l'estampille apposée s'est révélée être une marque commerciale privée créée par l'entreprise constitue une publicité fausse ou de nature en erreur;

Considérant qu'alléguer que le saumon sauvage danois est en provenance directe de l'île de Bornholm, alors que la société Y importe deux saumons sauvages danois dont l'un provient de la côte Ouest du Danemark et non directement de l'île de Bornholm constitue pareillement une publicité fausse ou de nature à induire en erreur;

Que le fait d'omettre [sic], dans le tarif réservé aux particuliers, que le flétan provient de l'océan Atlantique alors qu'il figure parmi d'autres poissons présentés comme provenant directement de l'île de Bornholm et de la mer Baltique ne peut que laisser croire au consommateur que le flétan provient également de la Baltique;

Considérant enfin que qualifier une truite comme étant "de rivière" sans préciser davantage qu'elle est d'élevage est aussi constitutif du délit prévu à l'article L. 121-1 du Code de la consommation;

Considérant qu'il apparaît que la société Y n'a mis en place aucune procédure d'autocontrôle permettant de vérifier la pertinence de ses allégations publicitaires;

Qu'il appartenait à Eric X, en sa qualité d'annonceur et de gérant de la société Y, de s'assurer personnellement de l'absence dans la publicité critiquée de tout élément susceptible d'induire le consommateur en erreur, ce qu'il s'est, à tout le moins, abstenu de faire;

Considérant que ce professionnel averti ne saurait arguer d'une quelconque bonne foi;

Considérant que les faits visés à la prévention sont caractérisés en tous leurs éléments à l'encontre des prévenus;

Considérant que la cour confirmera le jugement attaqué sur les déclarations de culpabilité mais l'infirmera pour le surplus en majorant les amendes infligées ainsi que précisées au dispositif;

Que la cour par ailleurs dispensera les prévenus de la publication de la décision prévue à l'article L. 121-4 du Code de la consommation;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à signifier à l'encontre des prévenus, Reçoit les prévenus et le Ministère public en leurs appels, Confirme le jugement attaqué sur les déclarations de culpabilité. L'infirme en répression, Condamne Eric X à 3 000 euro d'amende, Condamne la société Y à 6 000 euro d'amende, Dispense les prévenus de la publication du présent arrêt.