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Décisions

TPICE, 4e ch., 18 septembre 2006, n° T-350/03

TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTES EUROPEENNES

Ordonnance

PARTIES

Demandeur :

Wirtschaftskammer Kärnten, Best connect Ampere Strompool GmbH, Ampere AG

Défendeur :

Commission des Communautés européennes, Österreichische Elektrizitätswirtschafts-AG, EVN AG, Wien Energie GmbH, Energie AG Oberösterreich, Burgenländische Elektrizitätswirtschafts-AG, Linz AG für Energie, Telekommunikation, Verkehr und Kommunale Dienste

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Legal

Juges :

Mme Lindh, M. Vadapalas

Avocats :

Mes Angerer, von Hammerstein, Schweer, Polster, Wollmann

TPICE n° T-350/03

18 septembre 2006

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

Antécédents du litige

1 Le 20 décembre 2002, Österreichische Elektrizitätswirtschafts-AG (ci-après " Verbund ") et EnergieAllianz, qui regroupe EVN AG, Wien Energie GmbH, Energie AG Oberösterreich, Burgenländische Elektrizitätswirtschafts-AG et Linz AG für Energie, Telekommunikation, Verkehr und Kommunale Dienste, cinq distributeurs régionaux d'énergie, ont notifié à la Commission, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises [JO L 395, p. 1, tel que rectifié (JO 1990, L 257, p. 13), et tel que modifié par le règlement (CE) n° 1310-97 du Conseil, du 30 juin 1997 (JO L 180, p. 1)], un projet de concentration établissant leur contrôle commun, au sens de l'article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 4064-89, sur deux nouvelles entreprises, Verbund Austrian Power Trading AG et E & S GmbH, auxquelles les deux entités se proposent de confier la distribution de leur production d'énergie électrique.

2 Le 4 février 2003, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure d'examen approfondi prévue à l'article 6, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 4064-89.

3 Au terme de cet examen, la Commission a conclu que le regroupement, induit par l'opération notifiée, des activités de production et de distribution existantes de Verbund et d'EnergieAllianz était de nature à leur conférer une position dominante et à renforcer leur position dominante actuelle sur plusieurs segments du marché autrichien de la fourniture d'électricité.

4 La Commission a toutefois considéré que les engagements pris par les parties notifiantes dissipaient totalement les doutes relatifs à la concurrence sur les marchés affectés.

5 Par la décision 2004-271-CE, du 11 juin 2003, relative à la compatibilité d'une concentration avec le Marché commun et l'accord EEE (Affaire COMP/M.2947 - Verbund/EnergieAllianz) (JO 2004, L 92, p. 91, ci-après la " décision "), la Commission a donc déclaré le projet notifié compatible avec le Marché commun, sous réserve du respect intégral de ces engagements par les parties notifiantes.

Procédure

6 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 octobre 2003, la Wirtschaftskammer Kärnten (chambre économique de Carinthie) et Best connect Ampere Strompool GmbH (ci-après " Best connect ") ont introduit le présent recours.

7 Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 2 août 2004, la société de droit allemand Ampere AG, d'une part, et Verbund ainsi que les cinq membres d'EnergieAllianz, d'autre part, ont été admis à intervenir au litige, au soutien, respectivement, des conclusions des requérantes et de celles de la Commission.

Conclusions des parties

8 Les requérantes, soutenues par Ampere, concluent à ce qu'il plaise au Tribunal :

- annuler la décision ;

- condamner la Commission aux dépens.

9 La Commission, soutenue par Verbund et les cinq membres d'EnergieAllianz, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :

- rejeter le recours comme irrecevable,

- subsidiairement, rejeter le recours comme non fondé ;

- condamner les requérantes solidairement aux dépens de l'instance.

En droit

10 En vertu de l'article 113 de son règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment statuer sur les fins de non-recevoir d'ordre public, la décision étant prise dans les conditions prévues, notamment, à l'article 114, paragraphe 3, du même règlement.

11 Conformément à cette dernière disposition, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

12 En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour se prononcer sur la recevabilité du présent recours, sans ouvrir la procédure orale.

13 Selon l'article 230, quatrième alinéa, CE, les personnes physiques ou morales, au nombre desquelles figurent les deux requérantes, ne peuvent former un recours en annulation contre les actes des institutions communautaires dont elles ne sont pas les destinataires qu'à la condition d'être à la fois directement et individuellement concernées par ces actes.

14 Les personnes physiques et morales ne sauraient prétendre être concernées individuellement par une décision dont elles ne sont pas les destinataires que si celle-ci les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d'une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d'une manière analogue à celle dont le serait le destinataire d'une décision (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25-62, Rec. p. 197, 223, et du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C-50-00 P, Rec. p. I-6677, point 36).

Sur l'affectation individuelle de la Wirtschaftskammer Kärnten

Arguments des parties

15 La Commission, soutenue par Verbund et les cinq membres d'EnergieAllianz, fait observer que la Wirtschaftskammer Kärnten n'a pas établi être individuellement concernée par la décision. La requérante ne prétendrait même pas se trouver dans un rapport de concurrence avec les parties à la concentration et elle n'aurait pas participé à la procédure de contrôle de l'opération envisagée.

16 D'une part, la Wirtschaftskammer Kärnten se fonderait sur sa qualité de représentante d'entreprises individuellement concernées. Cette qualité indirecte pour agir impliquerait toutefois qu'au moins un de ses membres soit individuellement concerné au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE.

17 À cet égard, la requérante considérerait à tort qu'il suffit de faire valoir que toute entreprise sise en Autriche a besoin d'électricité. En effet, seules les entreprises directement affectées dans leur position sur les marchés concernés par la décision auraient éventuellement qualité pour demander l'annulation de la décision. Or, la requérante omettrait de préciser si elle compte de telles entreprises parmi ses membres.

18 D'autre part, seuls les tiers à même de démontrer qu'ils ont suffisamment participé à la procédure de contrôle de l'opération auraient qualité pour demander l'annulation de la décision finale. Toutefois, la requérante n'aurait pas participé à la procédure ayant abouti à la décision.

19 Tout en reconnaissant ne pas être une entreprise concurrente des parties à la concentration notifiée et n'avoir pas participé à la procédure de contrôle de l'opération, la Wirtschaftskammer Kärnten s'estime néanmoins individuellement concernée par la décision en raison de sa qualité de grand consommateur d'électricité, à l'instar de l'ensemble des entreprises qu'elle représente.

20 L'argument de la Commission selon lequel n'auraient qualité pour agir que les entreprises dont la position sur le marché est directement affectée ne tiendrait pas compte des caractéristiques du cas d'espèce. En effet, en raison des liens juridiques étroits qu'ils entretiennent, aucun des fournisseurs d'énergie autrichiens n'aurait intérêt à contester la décision.

21 La Commission ignorerait ainsi la position des consommateurs et leur intérêt évident à disposer d'un marché de l'électricité concurrentiel. Leur refuser toute qualité pour agir ou restreindre celle-ci serait incompatible avec les principes fondamentaux d'un marché libre et du contrôle du maintien d'un tel marché, dès lors qu'une telle approche emporterait l'immunité juridictionnelle de la décision.

22 En raison de la suppression de la concurrence par les prix entre fournisseurs d'électricité, consécutive aux modifications structurelles du marché autrichien induites par la décision, tous les consommateurs seraient confrontés à un relèvement des prix de l'énergie électrique, de sorte que la position sur le marché de la requérante et de l'ensemble des entreprises qu'elle représente serait sensiblement affectée par la décision.

23 Une association qui n'est pas destinataire d'un acte communautaire aurait qualité pour en demander l'annulation lorsqu'elle représente un ou plusieurs de ses membres disposant eux-mêmes du droit d'introduire un recours en annulation. En sa qualité de représentant légal des intérêts des entreprises du Land de Carinthie, la Wirtschaftskammer Kärnten aurait donc qualité pour former le présent recours.

Appréciation du Tribunal

24 Il est constant que la Wirtschaftskammer Kärnten est un organisme de droit public autrichien chargé de représenter dans les affaires de concurrence les intérêts des entités sises en Carinthie, qui lui sont affiliées et exploitent légalement ou sont habilitées à exercer une activité économique.

25 Un recours en annulation introduit par une association d'entreprises qui n'est pas la destinataire de l'acte attaqué est recevable dans deux hypothèses. La première situation se présente lorsque l'association a un intérêt propre à agir, notamment parce que sa position de négociatrice a été affectée par l'acte dont l'annulation est demandée. La seconde est celle où l'association, en introduisant son recours, s'est substituée à l'un ou à plusieurs de ses membres, qu'elle représente, à la condition que ses membres eux-mêmes aient été en situation d'introduire un recours recevable (arrêt du Tribunal du 12 décembre 1996, AIUFASS et AKT/Commission, T-380-94, Rec. p. II-2169, point 50).

26 Or, la requérante ne peut se prévaloir d'aucune de ces situations pour justifier de sa qualité de personne morale individuellement concernée par la décision.

27 Elle reconnaît elle-même ne pas avoir participé à la procédure de contrôle de l'opération projetée. Il importe peu qu'une telle abstention ait été motivée, comme la requérante le soutient, par l'impossibilité escomptée de l'adoption d'une décision autorisant un projet dont l'incompatibilité avec le Marché commun n'aurait fait aucun doute. Il s'ensuit qu'aucune atteinte à sa position éventuelle de négociatrice susceptible d'affecter ses intérêts spécifiques n'a pu être commise.

28 Est également dépourvue de pertinence la capacité dont dispose la Wirtschaftskammer Kärnten d'ester en justice devant les juridictions nationales pour y défendre les intérêts de ses membres dans les affaires de concurrence. Une telle capacité, conférée par le droit national, ne saurait en effet remettre en cause les conditions de recevabilité posées par l'article 230, quatrième alinéa CE.

29 Comme il ressort de ses allégations mêmes, les membres de la Wirtschaftskammer Kärnten ne sont affectés par la décision qu'en raison de leur qualité objective et abstraite de consommateurs d'électricité, en ce que les prix des fournitures seraient susceptibles d'augmenter en raison de la concentration de l'offre induite par la décision, de sorte que tous les consommateurs d'électricité résidant ou établis dans le marché géographique en cause seraient touchés au même titre par la décision.

30 Celle-ci n'atteint donc pas les membres de la requérante en raison de certaines qualités particulières ou d'une situation de fait qui les individualiserait d'une manière analogue à celle dont le serait le destinataire d'une décision.

31 Dès lors que ses membres ne sont pas individuellement concernés par la décision, une telle qualité ne peut être reconnue à la requérante. En effet, une association constituée pour promouvoir les intérêts collectifs d'une catégorie de justiciables ne saurait être considérée comme individuellement concernée, au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE, par un acte affectant les intérêts généraux de cette catégorie et, par conséquent, n'est pas recevable à introduire un recours en annulation lorsque ses membres ne sauraient le faire à titre individuel (arrêt de la Cour du 14 décembre 1962, Fédération nationale de la boucherie en gros et du commerce en gros des viandes e.a./Conseil, 19-62 à 22-62, Rec. p. 943, 960, et ordonnance du Tribunal du 9 août 1995, Greenpeace e.a./Commission, T-585-93, Rec. p. II-2205, point 59).

32 Enfin, considérée elle-même dans sa position propre de consommateur d'électricité, la Wirtschaftskammer Kärnten ne saurait, pas plus que ses membres, être regardée comme individuellement concernée par la décision.

33 Il s'en déduit que la requérante n'est pas individuellement concernée par la décision et qu'elle n'a donc pas qualité pour en demander l'annulation.

Sur l'affectation individuelle de Best connect

Arguments des parties

34 La Commission ainsi que Verbund et les cinq membres d'EnergieAllianz estiment que Best connect n'a pas davantage démontré ce qui pouvait, par rapport à toute autre personne, l'individualiser d'une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de la décision.

35 La requérante se bornerait à regrouper des services au profit de ses membres, sans préciser si elle achète elle-même de l'électricité, ni, le cas échéant, sur quel segment du marché elle procède à ces achats. Ses réponses à la demande de renseignements de la Commission confirmeraient qu'elle n'est pas individuellement concernée par la décision, puisqu'elle aurait déclaré qu'elle ne se porte pas elle-même acquéreur d'électricité et qu'elle n'en distribue pas, ni n'en fait le négoce.

36 Le groupe d'opérateurs concernés, à savoir les clients de Best connect, ne constituerait pas une catégorie fermée et clairement délimitée d'opérateurs économiques mais se composerait de plusieurs milliers de personnes physiques et morales dont le seul intérêt commun serait d'obtenir une réduction des tarifs d'électricité. En outre, Best connect défendrait majoritairement les intérêts de petits clients dont la consommation annuelle globale ne représente que quelque 0,2 % du volume total annuel des ventes d'électricité en Autriche.

37 Best connect objecte que son activité d'intermédiaire ne peut être sérieusement mise en doute. Elle aurait été le premier courtier en électricité autrichien à faire bénéficier ses clients des avantages de la libéralisation du marché en négociant pour eux les meilleurs prix, en résiliant des contrats de fourniture existants et en concluant de nouvelles conventions avec les fournisseurs présentant les meilleures offres. Les contrats qu'elle aurait obtenus représenteraient une demande groupée d'électricité de plus de 120 GWh par an, soit la consommation moyenne d'une ville d'environ 100 000 habitants et des entreprises y exerçant leurs activités.

38 Best connect serait individuellement affectée en raison de la disparition de la concurrence par les prix entre fournisseurs d'électricité sur le marché autrichien et du nivellement de leurs prix induits par la décision. En l'absence de structure concurrentielle de l'offre d'électricité, il lui serait désormais très difficile d'obtenir, par le biais d'appels d'offres, des prix différents de ceux pratiqués par les parties à la concentration et par leurs entreprises communes. Best connect risquerait donc de voir son activité commerciale privée de son fondement même.

39 Pour souligner sa participation à la procédure de contrôle de l'opération notifiée, Best connect déclare avoir rempli, par télécopie du 15 janvier 2003, la demande de renseignements que la Commission lui avait transmise par lettre du 7 janvier 2003, en application des dispositions du règlement n° 4064-89.

40 À cet égard, la Commission rétorque que Best connect n'a pas suffisamment participé à la procédure administrative, car elle n'aurait pas demandé à être entendue, ni présenté d'observations, ni déposé une demande d'accès au dossier.

41 Verbund et EnergieAllianz ajoutent que les réponses laconiques, génériques et purement spéculatives de Best connect au questionnaire de la Commission ne permettent pas de satisfaire au critère de l'affectation individuelle tiré de la participation à la procédure de contrôle, sauf à accorder aux centaines de concurrents et d'acheteurs contactés par la Commission le droit de former un recours en annulation, en violation du texte et de la finalité de l'article 230, quatrième alinéa, CE.

42 Il ne ressortirait pas du texte de la décision, qui ne mentionne même pas Best connect, que la Commission ait apprécié la situation concurrentielle sur les marchés de référence en tenant surtout compte de la situation de la requérante.

Appréciation du Tribunal

43 Il y a lieu de rappeler qu'ont été considérés comme individuellement concernés par des décisions de la Commission statuant, comme en l'espèce, sur la compatibilité avec le Marché commun d'opérations de concentration les concurrents des parties notifiantes ayant pu prouver leur participation qualifiée aux procédures de contrôle et l'affectation substantielle ou spécifique par les décisions contestées de leur position concurrentielle par rapport à celle des parties notifiantes sur les marchés concernés ou voisins (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 31 mars 1998, France e.a./Commission, C-68-94 et C-30-95, Rec. p. I-1375, points 53 à 58, et arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, ARD/Commission, T-158-00, Rec. p. II-3825, point 95).

44 Il convient donc d'examiner si Best connect a utilement participé à la procédure de contrôle de l'opération proposée et si elle se trouve par rapport aux parties à l'opération envisagée dans une situation de concurrence nettement caractérisée et suffisamment affectée par la décision sur le marché concerné pour pouvoir être considérée comme individualisée au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE.

- Sur la participation de Best connect à la procédure de contrôle de l'opération de concentration notifiée

45 Le juge communautaire a admis qu'étaient individuellement concernées par des décisions statuant sur la compatibilité d'opérations de concentration notifiées des entreprises tierces ayant étroitement participé à la procédure de contrôle de ces opérations et dont l'intervention avait produit un impact effectif et spécifique sur le déroulement de cette procédure et sur le contenu de la décision finale (voir, en ce sens, arrêt France e.a./Commission, précité, point 54 ; arrêt du Tribunal du 19 mai 1994, Air France/Commission, T-2-93, Rec. p. II-323, points 44 et 45, et arrêt ARD/Commission, précité, points 64 à 76).

46 Une telle participation constitue un élément pour établir, en conjonction avec d'autres circonstances spécifiques, la recevabilité des recours (arrêt du Tribunal du 3 avril 2003, BaByliss/Commission, T-114-02, Rec. p. II-1279, point 95, et arrêt ARD/Commission, précité, point 76).

47 Or, en l'occurrence, Best connect n'a pas contesté l'allégation de la Commission selon laquelle elle se serait bornée à répondre au questionnaire et n'aurait pas demandé à présenter d'observations au cours de la procédure de contrôle de l'opération litigieuse.

48 En particulier, la requérante s'est abstenue de réagir spontanément, en prenant contact avec la Commission, postérieurement à la publication au Journal officiel des Communautés européennes, prévue à l'article 4, paragraphe 3, du règlement n° 4064-89, de l'avis relatif à l'opération de concentration projetée.

49 Il ne ressort pas davantage du dossier que Best connect ait figuré au nombre des tiers intéressés qui ont pris part à l'audition organisée le 29 avril 2003 à la demande des parties notifiantes.

50 Certes, Best connect a répondu au questionnaire que lui avait envoyé la Commission sur le fondement de l'article 11, paragraphe 1, du règlement n° 4064-89, qui habilite la Commission à recueillir tous les renseignements nécessaires auprès des parties à l'opération notifiée et des entreprises et associations d'entreprises.

51 Néanmoins, le simple renvoi par Best connect à la Commission du questionnaire rempli par ses soins ne saurait être regardé comme un élément suffisant à l'individualiser au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE.

52 Par ailleurs, il n'apparaît nullement à la lecture de la décision que la Commission ait pris spécifiquement en considération les réponses données par Best connect au questionnaire. La Commission aurait été, d'ailleurs, dans l'impossibilité de le faire, en raison du caractère générique et lapidaire des réponses de Best connect.

53 Il s'en déduit que Best connect n'a pas démontré avoir participé à la procédure de contrôle de l'opération litigieuse de manière à pouvoir être considérée comme individuellement concernée par la décision.

- Sur l'affectation de la position concurrentielle de Best connect sur les marchés concernés par l'opération de concentration notifiée

54 Le juge communautaire a reconnu qu'étaient individuellement concernées par des décisions statuant sur la compatibilité d'opérations de concentration notifiées des entreprises tierces dont la position en tant que concurrentes, à tout le moins potentielles, des parties à l'opération notifiée sur les marchés concernés ou voisins avait été affectée de manière caractérisée par la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt France e.a./Commission, précité, points 55 et 56 ; arrêts du Tribunal du 24 mars 1994, Air France/Commission, T-3-93, Rec. p. II-121, point 82 ; du 19 mai 1994, Air France/Commission, précité, points 45 et 46 ; Babyliss/Commission, précité, point 106, et ARD/Commission, précité, point 78).

55 Or, comme la Commission l'a relevé, sans avoir été contestée sur ce point, il ressort de ses réponses au questionnaire que Best connect ne distribue pas d'électricité ni n'en fait le négoce, c'est-à-dire n'achète ni ne revend l'électricité à but lucratif à ses risques et périls.

56 Best connect n'apparaît donc affectée par la décision qu'en sa qualité d'intermédiaire chargé de négocier au nom et pour le compte de ses mandants petits consommateurs d'électricité les tarifs réservés aux grands consommateurs.

57 Dans ses réponses, Best connect a même déclaré qu'elle devait être considérée comme un seul grand acheteur, dans la mesure où elle assure l'exécution autonome de toutes les formalités administratives induites par les changements des modalités d'approvisionnement de ses clients.

58 À l'instar de tout autre intermédiaire, Best connect n'apparaît, en définitive, concernée par la décision que de manière générale et abstraite en raison des conséquences factuelles que cet acte produit sur le marché concerné.

59 Dans cette mesure, Best connect n'établit pas que sa situation de fait l'individualise par rapport à toute autre personne physique ou morale actuellement ou potentiellement mandataire de consommateurs d'électricité.

60 Best connect n'a nullement contesté l'allégation selon laquelle les contrats de fourniture d'énergie qu'elle aurait conclus en 2001 représentent une demande groupée d'électricité de quelque 120 GWh par an, soit environ 0,2 % du volume total annuel des ventes d'électricité réalisé en Autriche au cours de cet exercice.

61 La circonstance que la requérante aurait été le premier courtier en électricité autrichien à faire bénéficier ses clients des avantages de la libéralisation du marché de l'électricité ne saurait l'individualiser au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE.

62 Dans ces conditions, Best connect n'a pas démontré qu'elle bénéficiait d'un statut particulier au sens de la jurisprudence citée au point 14 ci-dessus.

63 Il s'en déduit que Best connect n'est pas individuellement concernée par la décision et qu'elle n'a donc pas qualité pour en demander l'annulation.

64 Il découle de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours introduit par les deux requérantes doit être rejeté comme irrecevable.

Sur les dépens

65 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.

66 Les requérantes ayant succombé en leur recours, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens, ainsi que, solidairement, ceux exposés par la Commission et les parties intervenantes Österreichische Elektrizitätswirtschafts-AG, EVN AG, Wien Energie GmbH, Energie AG Oberösterreich, Burgenländische Elektrizitätswirtschafts-AG et Linz AG für Energie, Telekommunikation, Verkehr und Kommunale Dienste, conformément aux conclusions présentées en ce sens par ces parties au litige.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

ordonne :

1) Le recours est rejeté comme irrecevable.

2) Les requérantes sont condamnées à supporter leurs propres dépens et, solidairement, ceux exposés par la Commission et par les parties intervenantes Österreichische Elektrizitätswirtschafts-AG, EVN AG, Wien Energie GmbH, Energie AG Oberösterreich, Burgenländische Elektrizitätswirtschafts-AG et Linz AG für Energie, Telekommunikation, Verkehr und Kommunale Dienste.

3) La partie intervenante Ampere AG supportera ses propres dépens.