Cass. com., 6 mars 2007, n° 05-13.991
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Garage de Bretagne (SA)
Défendeur :
Daimler Chrysler France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Tric
Avocat général :
M. Casorla
Avocats :
SCP Ghestin, SCP Peignot, Garreau
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 24 février 2005), que par lettre recommandée avec avis de réception du 16 septembre 2002, la SA Daimler Chrysler France (société DCF) a notifié à tous ses concessionnaires exclusifs, titulaires de contrats encore en cours, la résiliation de leur contrat moyennant une préavis abrégé d'un an; que la SA Garage de Bretagne l'a assignée en paiement de dommages-intérêts correspondant à une année de marge brute au titre de la résiliation abusive du contrat de concession ;
Attendu que la société Garage de Bretagne reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen : 1°) que le contrat de concession exclusive automobile à durée indéterminée ne pouvait être résilié que moyennant un préavis d'au moins deux ans, sauf le droit du fournisseur de résilier l'accord moyennant un préavis d'un an en cas de nécessité de réorganiser l'ensemble ou une partie substantielle de son réseau; que la cour d'appel a justement rappelé que l'on doit se placer au jour de la notification du préavis de résiliation pour apprécier l'existence d'une réorganisation du réseau; qu'il résulte des constatations de l'arrêt qu'à la date de la notification au Garage de Bretagne du préavis de résiliation abrégé à un an, seuls trois concessionnaires sur l'ensemble du réseau de distribution Mercedes en France (104 concessionnaires) devaient être évincés du réseau; qu'en estimant que la SA DCF aurait pu, à la date du 16 septembre 2002, procéder à la résiliation du contrat de la SA Garage de Bretagne moyennant un préavis abrégé d'un an, motif pris de la nécessité de réorganiser son réseau, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant l'article 5-3, alinéa 1er du règlement CE 1475-95 de la Commission du 28 juin 1995, ensemble l'article 1134 du Code civil; 2°) que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs; qu'en énonçant, d'une part, qu'il convenait de se placer au jour de la notification du préavis de résiliation pour apprécier l'existence d'une réorganisation du réseau et, d'autre part, qu'il convenait d'apprécier cette réorganisation du réseau depuis son commencement en 2000, la cour d'appel a entaché sa décision d'une irréductible contradiction de motifs, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 3°) qu'une restructuration du réseau achevée à trois exceptions près à la date du préavis de résiliation, ne saurait justifier l'utilisation a posteriori de la procédure extraordinaire de résiliation moyennant un préavis abrégé pour des cas isolés; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article 5-3, alinéa 1er du règlement CE 1475-95 de la Commission du 28 juin 1995, ensemble l'article 1134 du Code civil; 4°) que la seule modification du cadre réglementaire du système de distribution de véhicules automobiles neufs n'implique pas, en soi, une réorganisation du réseau ou d'une partie substantielle de celui-ci ; qu'en estimant que la nécessité pour la SA DCF de mettre tous les contrats en conformité avec le règlement CE 1400-2002 avant le 30 septembre 2003, fin de la période transitoire, justifiait l'utilisation par ce distributeur d'un préavis de résiliation abrégé d'un an, la cour d'appel a violé le texte susvisé et l'article 5-3, alinéa 1er du règlement CE 1475-95 de la Commission du 28 juin 1995;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que la SA DCF a trouvé nécessaire de procéder à une concentration de son réseau articulé autour de plaques plus étendues que les territoires des concessionnaires et confiées à des distributeurs ainsi renforcés pour faire face à une concurrence accrue, réduisant le nombre des membres de son réseau d'environ un tiers au cours des années 2000, 2001 et au cours des trois premiers trimestres de l'année 2002; qu'il retient que la mise en conformité des contrats avec le nouveau règlement fait partie, en l'espèce de la réorganisation du réseau et ne constitue pas une simple modification du système de distribution ; qu'ainsi la cour d'appel a fait ressortir l'existence d'une réorganisation de l'ensemble du réseau du fournisseur, qui impliquait une modification significative de l'organisation de ses structures de distribution, portant sur leur nature et leur forme et le nombre de leurs participants, ainsi que leur couverture géographique, et la nécessité de cette réorganisation, justifiée par des motifs d'efficacité économique et par la fin de la période transitoire le 30 septembre 2003;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt constate que le processus de réorganisation commencé en 2000 et dont le concessionnaire avait été informé dès le début de l'année 2001 en ce qui le concerne, son territoire devant être englobé dans celui de la société Saga, était toujours en cours lorsque la résiliation a été notifiée le 16 septembre 2002 à tous les concessionnaires dont les contrats étaient encore en cours; qu'il constate encore que la réorganisation avait d'abord été exécutée par la voie négociée et ensuite, pour les cas où elle s'était avérée impossible, par la résiliation ; qu'il retient que le fournisseur a le choix du moment de la résiliation au cours du processus de réorganisation du réseau dès lors qu'il s'agit d'un processus qui se poursuit sans solution de continuité et qui n'est pas achevé ; qu'ainsi, sans se contredire, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes invoqués ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.