CJCE, 2e ch., 15 mars 2007, n° C-54/05
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Commission des Communautés européennes
Défendeur :
République de Finlande
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Timmermans
Avocat général :
M. Mengozzi
Juges :
M. Kuris, M. Makarczyk, M Bay Larsen, M. Bonichot
LA COUR (deuxième chambre),
1. Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en exigeant un permis de transfert pour les véhicules légalement immatriculés et utilisés dans un autre État membre, la République de Finlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE.
Le cadre juridique
2. L'article 1er de la loi n° 1482-1994 relative à la taxe sur les automobiles [autoverolaki (1482-1994)], du 29 décembre 1994, prévoit que cette taxe ("autovero" ci-après la "taxe unique") est due à l'État avant l'immatriculation ou la mise en service en Finlande des voitures de tourisme.
3. Aux termes de l'article 2 de ladite loi, "on entend par mise en service en Finlande la mise en circulation du véhicule sur le territoire finlandais, même lorsqu'il n'a pas été immatriculé dans le pays".
4. L'article 35 de cette même loi prévoit des exceptions à l'assujettissement à la taxe unique, en particulier pour les véhicules utilisés sous couvert d'un permis de transfert.
5. Selon l'article 8 de la loi n° 1090-2002 relative aux véhicules [ajoneuvolaki (1090-2002)], du 11 décembre 2002, "tous les véhicules à moteur et leurs remorques [...] doivent être immatriculés et soumis au contrôle technique sauf exceptions prévues par ou en vertu de la présente loi. Les véhicules à moteur et leurs remorques [...] qui n'ont pas été régulièrement immatriculés ou soumis au contrôle technique ne peuvent être mis en circulation".
6. Selon l'article 64 du même texte, des exceptions à l'immatriculation peuvent être prévues par décret. Ainsi, l'article 8 du décret n° 1598-1995 sur l'immatriculation des véhicules [asetus ajoneuvojen rekisteröinnistä (1598-1995)], du 18 décembre 1995 (ci-après le "décret sur l'immatriculation"), traite desdites exceptions.
7. Aux termes de l'article 8, paragraphe 2, de ce décret :
"Un véhicule immatriculé à l'étranger ou un véhicule muni d'une plaque minéralogique provisoire peut être mis en circulation en Finlande sans déclaration d'immatriculation sous les conditions prévues aux articles 46 à 48, 48 bis, 49 à 51, 51 bis, 51 ter et 52 à 56. Il en va de même pour la circulation d'un véhicule pour lequel a été délivré un permis de transfert."
8. L'article 48 du même décret dispose :
"1. L'instance chargée de l'immatriculation et l'administration des douanes peuvent, pour amener un véhicule au contrôle technique, aux fins de transfert, de l'exposition, de la mise en compétition ou de la démonstration en Finlande d'un véhicule qui n'est pas immatriculé dans ce pays, ou pour une autre raison particulière aux fins de transfert d'un véhicule, délivrer sur demande un permis de transfert écrit en vue de la mise en circulation de ce véhicule. Les numéros (autocollants) de transfert sont fournis lors de la délivrance du permis de transfert.
2. Ce permis de transfert est délivré pour autant que le véhicule est couvert par une assurance responsabilité civile automobile en cours de validité et que les taxes annuelles sur les véhicules à moteur Diesel [" moottoriajoneuvovero "] ou à essence [" ajoneuvovero "] ont été acquittées.
3. Le permis de transfert est délivré pour le temps nécessaire à la circulation du véhicule. Il ne peut, sans raison particulièrement sérieuse, être délivré de permis pour une durée supérieure à sept jours. La participation à une compétition ne peut être considérée comme une telle raison.
4. Un véhicule ne peut être utilisé avec un permis de transfert s'il n'est pas apte à circuler en raison de son état, de ses dimensions ou de son poids."
9. Les taxes annuelles mentionnées à l'article 48, paragraphe 2, du décret sur l'immatriculation ont été remplacées par une nouvelle taxe annuelle (" ajoneuvovero ") introduite par la loi n° 1281-2003 relative à la taxe annuelle sur les véhicules [ajoneuvoverolaki (1281-2003)], du 30 décembre 2003. Les véhicules pour lesquels un permis de transfert a été délivré sont exonérés de cette taxe annuelle en application de l'article 12, paragraphe 10, de cette loi.
10. L'article 21, paragraphe 2, du décret n° 1116-2003 sur les informations portées au registre des véhicules [valtioneuvoston asetus ajoneuvoliikennerekisterin tiedoista (1116-2003)], du 18 décembre 2003, énumère les informations portées sur le permis de transfert qui sont reproduites sur le registre des véhicules:
"Sont transcrits du permis de transfert sur le registre: le nom, l'adresse, le numéro personnel ou le numéro d'entreprise ou d'association du détenteur du permis, la marque du véhicule, le modèle, le numéro du constructeur, le numéro d'immatriculation, l'assurance responsabilité civile automobile, la date de délivrance et l'autorité émettrice du permis, sa durée de validité, sa finalité, les paiements afférents au permis et, le cas échéant, l'itinéraire."
La procédure précontentieuse
11. La Commission, après avoir reçu diverses plaintes portant sur la législation finlandaise et la pratique des autorités compétentes concernant la délivrance du permis de transfert exigé lors de l'importation d'un véhicule immatriculé dans un autre État membre, a adressé à la République de Finlande, le 17 mai 2002, une lettre demandant des éclaircissements sur la législation et la pratique en cause.
12. Eu égard aux réponses fournies par ledit État membre, qu'elle a jugées insatisfaisantes, la Commission a engagé la procédure précontentieuse par une lettre de mise en demeure du 9 avril 2003, dans laquelle elle relevait que l'obligation faite aux personnes résidant en Finlande de solliciter un permis de transfert dès le franchissement de la frontière finlandaise restreignait la libre circulation des marchandises et, partant, méconnaissait l'article 28 CE. La Commission indiquait également que la durée de validité de sept jours du permis de transfert était trop courte et, comme telle, contraire à cette disposition.
13. Par un avis motivé du 16 décembre 2003, la Commission a invité la République de Finlande à prendre les mesures nécessaires afin de se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de sa réception.
14. La République de Finlande ayant réitéré ses observations initiales et ne s'étant pas conformée audit avis dans le délai prescrit, la Commission a introduit, en vertu de l'article 226, deuxième alinéa, CE, le présent recours.
Sur le recours
Argumentation des parties
15. La Commission estime que les articles 28 CE et 30 CE s'opposent au régime du permis de transfert établi par le décret sur l'immatriculation. À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour ne retiendrait pas un tel manquement, elle fait valoir que la durée de validité dudit permis, à savoir sept jours, est, en elle-même, contraire auxdits articles compte tenu de sa brièveté.
16. La Commission analyse la procédure de permis de transfert comme étant une étape administrative réglementaire qui précède la procédure d'immatriculation proprement dite du véhicule lorsqu'une personne qui réside en Finlande veut importer un véhicule légalement immatriculé dans un autre État membre.
17. La Commission estime que l'instauration d'un tel permis présente les caractéristiques d'une restriction quantitative à l'importation ou d'une mesure d'effet équivalent au sens de l'article 28 CE, dans la mesure où une personne résidant en Finlande n'a aucune garantie légale de pouvoir mettre en circulation en Finlande un véhicule immatriculé légalement dans un autre État membre qu'elle y importe.
18. Selon la Commission, il résulte notamment de l'article 48 du décret sur l'immatriculation que la délivrance du permis de transfert est laissée à l'appréciation des autorités compétentes, sans qu'il y ait, en conséquence, pour le demandeur, de garantie quant à son obtention.
19. Elle souligne que le détenteur du véhicule doit s'arrêter, en général, à la frontière finlandaise afin de solliciter le permis de transfert et que, en tout état de cause, la demande de permis exige, même si elle est présentée de façon anticipée avant le franchissement de la frontière, des déplacements, jusqu'au bureau de douane, de la personne qui souhaite importer le véhicule. La délivrance du permis de transfert occasionnerait par ailleurs des frais.
20. La Commission considère, enfin, que la délivrance du permis de transfert n'est justifiée par aucune des raisons impératives d'intérêt général telles qu'entendues à l'article 30 CE. En particulier, elle ne répondrait ni aux exigences de l'efficacité du contrôle fiscal ni à l'objectif de sécurité routière.
21. La République de Finlande soutient, à titre principal, que le régime du permis de transfert, distinct de la procédure d'immatriculation proprement dite des véhicules, ne constitue pas une restriction aux importations au sens de l'article 28 CE.
22. Au soutien de son analyse, elle fait valoir que ledit régime trouve à s'appliquer tant pour l'utilisation temporaire en Finlande de véhicules non immatriculés et non imposés que pour le cas où une personne, ayant sa résidence habituelle en Finlande, importe de l'étranger un véhicule qui n'a pas été immatriculé dans cet État membre. Elle précise que la délivrance dudit permis est sans rapport direct avec le franchissement de la frontière, dans la mesure où elle est exclusivement liée à la mise en circulation du véhicule, l'exigence du permis de transfert s'appliquant ainsi indistinctement à tous les véhicules non encore immatriculés en Finlande.
23. La République de Finlande souligne, outre le coût peu élevé du permis de transfert, la rapidité et la simplicité de la procédure d'obtention dudit permis, celui-ci étant délivré sans contrôle technique préalable du véhicule, le demandeur n'étant, au demeurant, pas tenu d'être en possession du véhicule lorsqu'il fait la demande de permis de transfert.
24. Par ailleurs, elle indique que des conditions sont fixées pour l'octroi du permis de transfert et que, partant, la décision des autorités compétentes ne saurait reposer sur une appréciation arbitraire.
25. À titre subsidiaire, la République de Finlande considère que la procédure du permis de transfert est, en tout état de cause, justifiée, s'agissant du moyen le plus simple de garantir la réalisation des objectifs d'efficacité du contrôle fiscal ainsi que de sécurité routière.
26. À cet égard, elle fait valoir, d'une part, que, lorsqu'un véhicule non immatriculé en Finlande circule sur le territoire finlandais, il convient de pouvoir vérifier, sans risque d'erreur, s'il s'agit d'un véhicule exempté de la taxe unique ou d'un véhicule pour lequel cette taxe doit être payée. L'existence du permis de transfert permettrait d'établir de manière fiable, pour les véhicules appartenant à des personnes qui résident normalement en Finlande, la date de mise en circulation du véhicule, point de départ du calcul de la durée d'utilisation en franchise et éviterait le recours à des contrôles routiers massifs, visant les véhicules munis de plaques minéralogiques étrangères, qui seraient nécessaires en l'absence dudit permis.
27. La République de Finlande affirme, d'autre part, que le régime du permis de transfert garantit que les informations relatives au véhicule utilisé et au détenteur dudit permis sont portées sur le registre des véhicules. L'actualisation de ce registre serait nécessaire pour contrôler la perception de la taxe annuelle. En outre, lesdites informations seraient indispensables au regard de l'objectif de sécurité routière, notamment en cas d'infraction au code de la route ou d'accident.
28. S'agissant de la durée de validité du permis de transfert, cet État membre estime que celle-ci est conforme au principe de proportionnalité et n'est donc pas contraire aux articles 28 CE et 30 CE. Il précise que la durée de validité peut être prolongée sur demande.
Appréciation de la Cour
29. La Commission reproche à la République de Finlande d'avoir manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE, en exigeant qu'une personne, ayant sa résidence en Finlande, qui souhaite importer un véhicule légalement immatriculé dans un autre État membre, sollicite la délivrance d'un permis de transfert aux fins de la mise en circulation de ce véhicule avant son immatriculation en Finlande et avant le paiement des taxes sur les véhicules.
30. Selon une jurisprudence constante, l'interdiction des mesures d'effet équivalent à des restrictions édictée à l'article 28 CE vise toute réglementation des États membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire (voir, notamment, arrêts du 19 juin 2003, Commission/Italie, C-420-01, Rec. p. I-6445, point 25 ; du 23 septembre 2003, Commission/Danemark, C-192-01, Rec. p. I-9693, point 39 ; du 2 décembre 2004, Commission/Pays-Bas, C-41-02, Rec. p. I-11375, point 39 et jurisprudence citée, ainsi que du 10 janvier 2006, De Groot en Slot Allium et Bejo Zaden, C-147-04, Rec. p. I-245, point 71).
31. Par ailleurs, la Cour a déjà eu l'occasion de juger que l'article 28 CE fait obstacle à l'application, dans les rapports intracommunautaires, d'une législation nationale qui maintiendrait l'exigence, fût-elle purement formelle, de licences d'importation ou tout autre procédé similaire (voir, en ce sens, arrêts du 8 février 1983, Commission/Royaume-Uni, dit "Lait UHT", 124-81, Rec. p. 203, point 9 ; du 5 juillet 1990, Commission/Belgique, C-304-88, Rec. p. I-2801, point 9, et du 28 septembre 2006, Ahokainen et Leppik, C-434-04, non encore publié au Recueil, point 20).
32. Il est constant que le régime du permis de transfert, qui impose des formalités pour la mise en circulation en Finlande d'un véhicule légalement immatriculé dans un autre État membre et importé par un résident finlandais, est susceptible d'entraver le commerce intracommunautaire des véhicules automobiles et de gêner l'accès au marché de marchandises qui sont légalement fabriquées et/ou commercialisées dans d'autres États membres.
33. L'entrave est caractérisée en particulier par les démarches que doit entreprendre le détenteur du véhicule automobile en provenance d'un autre État membre avant que ledit véhicule puisse être légalement utilisé sur le territoire finlandais, démarches qui peuvent, le cas échéant, obliger l'intéressé à s'arrêter au poste frontière en vue d'obtenir le permis de transfert et qui, en toute hypothèse, induisent un coût en raison du défaut de gratuité dudit permis. Au surplus, en l'absence d'un tel permis lors du franchissement de la frontière, le véhicule ne doit pas, en principe, être mis en circulation.
34. En outre, la délivrance du permis de transfert, qui n'est soumise à aucun délai à compter du dépôt de la demande présentée aux fins de l'obtention dudit permis, ne constitue pas, aux termes mêmes de l'article 48, paragraphe 1, du décret sur l'immatriculation, une obligation pour les administrations concernées, ce que la République de Finlande a, au demeurant, confirmé lors de l'audience.
35. Eu égard au pouvoir dont disposent les autorités compétentes, le demandeur n'est donc pas assuré d'obtenir, dans un délai raisonnable, le permis de transfert, lequel est pourtant indispensable à une mise en circulation du véhicule conforme aux exigences légales. La possibilité de former un recours contre la décision administrative rejetant la demande présentée en vue de la délivrance dudit permis est à cet égard indifférente.
36. Or, la libre circulation est un droit dont l'exercice ne peut dépendre d'un pouvoir discrétionnaire ou d'une tolérance de l'administration nationale (voir arrêt Lait UHT, précité, point 10).
37. Enfin, il n'est pas contestable que le document en cause n'est valable que pendant une courte durée et que le risque d'immobilisation du véhicule, à l'expiration du délai de sept jours prévu par la réglementation finlandaise, avant même que l'immatriculation définitive ait pu être réalisée et la taxe payée, existe.
38. Si le permis de transfert en cause entre dans le champ d'application de l'article 28 CE, il ressort d'une jurisprudence constante qu'une réglementation nationale qui constitue une mesure d'effet équivalent à des restrictions quantitatives peut être justifiée par l'une des raisons d'intérêt général énumérées à l'article 30 CE ou par des exigences impératives (voir, en ce sens, arrêts Commission/Italie, précité, point 29, et du 5 février 2004, Commission/Italie, C-270-02, Rec. p. I-1559, point 21). Dans l'un et l'autre cas, la disposition nationale doit être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint (voir, notamment, arrêts du 20 juin 2002, Radiosistemi, C-388-00 et C-429-00, Rec. p. I-5845, points 40 à 42, et du 8 mai 2003, ATRAL, C-14-02, Rec. p. I-4431, point 64).
39. À cet égard, il appartient aux autorités nationales compétentes de démontrer, d'une part, que leur réglementation est nécessaire pour réaliser un ou plusieurs objectifs mentionnés à l'article 30 CE ou des exigences impératives et, d'autre part, que ladite réglementation est conforme au principe de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêts précités ATRAL, point 67; du 19 juin 2003, Commission/Italie, points 30 et 31, ainsi que du 5 février 2004, Commission/Italie, point 22).
40. En ce qui concerne, en premier lieu, l'argument avancé par la République de Finlande selon lequel le permis de transfert est indispensable pour atteindre l'objectif de sécurité routière dans la mesure, notamment, où il permet une identification précise des véhicules en cause par la mise à jour des informations figurant sur le registre des véhicules, il est constant que la sécurité routière constitue une raison impérieuse d'intérêt général susceptible de justifier une entrave à la libre circulation des marchandises (voir, notamment, arrêts du 5 octobre 1994, Van Schaik, C-55-93, Rec. p. I-4837, point 19 ; du 12 octobre 2000, Snellers, C-314-98, Rec. p. I-8633, point 55, et du 21 mars 2002, Cura Anlagen, C-451-99, Rec. p. I-3193, point 59).
41. Toutefois, il n'est pas démontré que la délivrance du permis de transfert accompagnée de l'apposition, sur les véhicules, des vignettes autocollantes de transfert qui se substituent à l'immatriculation initiale ainsi que la reproduction sur le registre des véhicules des informations concernant ce permis visent effectivement à réaliser l'objectif de sécurité routière, d'autant que l'exigence dudit permis ne s'applique pas à l'ensemble des véhicules immatriculés dans un autre État membre mis en circulation sur le territoire finlandais.
42. En tout état de cause, il convient de souligner, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 72 de ses conclusions, que, dans l'attente de l'immatriculation définitive des véhicules en Finlande, les caractéristiques techniques de ces derniers peuvent être identifiées, quel que soit l'État membre dans lequel ils sont immatriculés, dans la mesure où tous les États membres disposent d'un système d'immatriculation des véhicules (voir, en ce sens, arrêt du 23 février 2006, Commission/Finlande, C-232-03, non publié au Recueil, point 51).
43. Il résulte de ce qui précède que la République de Finlande n'a pas démontré que l'objectif de sécurité routière est de nature à justifier la procédure du permis de transfert.
44. En ce qui concerne, en second lieu, l'argument tiré de la nécessité d'assurer, par le permis de transfert, un contrôle fiscal efficace, un tel objectif étant, selon une jurisprudence constante, une exigence impérative susceptible de justifier une mesure d'effet équivalent interdite par l'article 28 CE (voir, notamment, arrêt du 12 mars 1987, Commission/Grèce, 176-84, Rec. p. 1193, point 25), il est constant que la République de Finlande peut légitimement instaurer des procédures de contrôle permettant de vérifier quels sont les véhicules qui, bien que devant être immatriculés en Finlande, peuvent temporairement être exonérés des taxes sur les véhicules.
45. S'agissant toutefois de l'appréciation à porter sur la proportionnalité de la réglementation litigieuse et du point de savoir si l'objectif recherché peut être atteint par des restrictions affectant de manière moindre le commerce intracommunautaire, il y a lieu de constater que la République de Finlande ne démontre pas concrètement le caractère proportionné, par rapport à l'objectif poursuivi, de la restriction à la libre circulation des marchandises en cause.
46. Des mesures moins restrictives pourraient, en effet, assurer un résultat similaire, en permettant de déterminer la date à laquelle l'utilisation du véhicule, sans que les taxes sur les véhicules aient été prélevées, a commencé. À cet égard, il résulte en particulier des mémoires échangés et des débats auxquels l'audience a donné lieu, ainsi que du point 83 des conclusions de M. l'Avocat général, que figure au nombre de ces mesures l'instauration d'un régime de déclaration obligatoire de la mise en circulation à l'initiative du propriétaire ou du détenteur du véhicule, assorti de sanctions appropriées en cas de non-respect de l'accomplissement de cette formalité administrative. À une telle déclaration pourrait être adjointe la fixation d'un délai raisonnable à compter de la déclaration de mise en circulation, pendant lequel serait autorisée l'utilisation du véhicule sans pour autant que le redevable se soit acquitté du paiement des taxes sur les véhicules.
47. Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de constater que, en exigeant un permis de transfert pour la mise en circulation de véhicules légalement immatriculés et utilisés dans un autre État membre, tel que prévu par le décret sur l'immatriculation, la République de Finlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE.
Sur les dépens
48. En vertu de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Finlande et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs,
LA COUR (deuxième chambre),
déclare et arrête:
1) En exigeant un permis de transfert pour la mise en circulation de véhicules légalement immatriculés et utilisés dans un autre État membre, tel que prévu par le décret n° 1598-1995 sur l'immatriculation des véhicules [asetus ajoneuvojen rekisteröinnistä (1598-1995)], du 18 décembre 1995, la République de Finlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE.
2) La République de Finlande est condamnée aux dépens.