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Décisions

CA Paris, 14e ch. A, 8 décembre 2004, n° 04-13336

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Six Continents Hotels Inc (Sté), Holiday Inns of Belgium (SA)

Défendeur :

Clam (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Foulon

Conseillers :

M. Beaufrère, Mme Percheron

Avoués :

SCP Hardouin, Me Melun

Avocats :

Mes Farmine, Weil

T. com. Paris, prés., du 11 mai 2004

11 mai 2004

Vu l'appel interjeté par la société Six Continents Hotels Inc et la société Holiday Inns of Belgium de l'ordonnance rendue le 11 mai 2004 par le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris, qui saisi par la société Clam d'une demande tendant à voir enjoindre à la société Holiday Inns de suspendre la résiliation du contrat de franchise liant les parties jusqu'à ce que le tribunal, saisi au fond, ait statué sur son bien-fondé, a constaté "qu'à ce jour n'est pas démontrée la validité de cette résiliation prononcée le 30 mars 2004, résiliation qui, en l'état, ne peut produire d'effet",

Vu les conclusions du 8 septembre 2004 par lesquelles les sociétés appelantes prient la cour, réformant cette décision, de débouter la société Clam de ses demandes, subsidiairement de fixer au 16 février 2005 au plus tard le terme de la suspension des effets de la résiliation, et de condamner la société Clam à payer à la société Six Continents Hotels, par provision, la somme de 168 041,69 euro correspondant aux factures de redevances impayées majorée des intérêts conventionnels de retard arrêtés à la somme de 23 532,76 euro au 1er septembre 2004 et celle de 111 636 euro à titre de clause pénale, et à chacune d'elles la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées le 1er octobre 2004 par la SARL Clam qui demande à la cour d'enjoindre à la société Holiday Inns de ne pas mettre en application la résiliation du contrat de franchise, la durée de la mesure étant limitée au 16 février 2005, terme du contrat, ainsi que de rejeter les demandes reconventionnelles, et sollicite la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Considérant que par acte sous seing privé des 7 et 31 août 1992 à effet au 17 février 1993 la société Bass International Holdings aux droits de laquelle se trouve la société Six Continents Hotels, qui a pour mandataire la société Holiday Inns of Belgium - a consenti à la société Clam (alors dénommée Alma) un contrat de franchise de la marque Holiday Inn Garden Court pour une durée de douze années expirant le 16 février 2005, pour l'exploitation d'un hôtel à Aix-en-Provence;

Que la société Clam ayant cessé de régler les redevances la société Six Continents lui a le 6 novembre 2003 notifié la résiliation du contrat avec effet au 15 décembre 2003, tout en cherchant à obtenir le règlement de ses factures; que n'y parvenant pas - la société Clam invoquant un trop perçu depuis l'origine du contrat - elle a, par l'intermédiaire de la société Holiday Inns, notifié le 30 mars 2004 à la société Clam sa décision de résilier, de manière définitive, le contrat avec effet au 7 mai 2004;

Que c'est dans ces conditions que la société Clam, invoquant à la fois l'irrégularité de la résiliation à elle notifiée et son mal-fondé, ainsi que la saisine du tribunal au fond, a sollicité la suspension de ses effets jusqu'au prononcé d'une décision sur le fond devant le juge des référés commercial, lequel a statué par la décision déférée au motif que les défendeurs n'apportaient pas la preuve qu'ils venaient aux droits des cocontractants de la société Clam;

Considérant que si la qualité des appelants n'est plus contestée en cause d'appel, la société Clam maintient sa prétention initiale en faisant valoir qu'il appartient au juge des référés d'ordonner le maintien de la situation actuelle pour prévenir le dommage imminent que lui ferait subir le retrait de l'enseigne Holiday Inn et son exclusion du système de réservation mondiale, par l'effet d'une décision unilatérale et injustifiée, à la veille de la saison d'été et en pleine saison touristique;

Mais considérant que le dommage invoqué par la société Clam n'est pas différent de celui que lui occasionnera le retrait des éléments de la franchise à l'issue du contrat, le 16 février 2005, le franchiseur lui ayant notifié dès le mois de mai 2004 son intention de ne pas renouveler le contrat ; qu'à supposer qu'elle ait pu être surprise par la résiliation notifiée le 30 mars 2004 pour le 7 mai 2004, bien que la précédente notification du 6 novembre 2003 ait constitué un avertissement sérieux qu'elle aurait dû prendre en compte, la cour ne peut que constater qu'à la date où elle statue le motif invoqué (perte de la saison estivale) est dépassé et que le contrat expirera à son terme normal, dans deux mois et huit jours ; qu'il est faux d'affirmer que le dommage serait irréparable puisque la société Clam pourra solliciter du juge du fond la réparation du dommage, très limité dans le temps, éventuellement subi s'il est jugé que la résiliation est intervenue dans des conditions fautives de la part du franchiseur;

Considérant, s'agissant des conditions de la résiliation, notifiée pour non-paiement de redevances, et de la demande de condamnation provisionnelle au paiement desdites redevances formée par la société Six Continents, que la société Clam invoque une contestation sérieuse tenant au fait qu'elles ont été calculées sur le revenu brut de l'ensemble des chambres alors que, selon la version française du contrat, le revenu brut des chambres n'inclut pas les revenus provenant de la location de chambres à l'occasion d'une réunion ou d'un banquet, et conteste au juge des référés le pouvoir d'interpréter le contrat;

Mais considérant qu'il résulte d'une simple lecture du contrat, exclusive de toute interprétation, qui "en cas de difficulté d'interprétation seule la langue anglaise fera foi" ; que le contrat tranche donc lui-même la difficulté tenant à la différence de rédaction entre sa version française, dont se prévaut la société Clam, et sa version anglaise selon laquelle ne font pas partie du revenu brut de la location des chambres les recettes provenant de la location des salles de conférence ou de réception, cette disposition ayant d'ailleurs été appliquée dès le début des relations contractuelles, et pendant plus de dix ans, sans aucune contestation;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence de condamner la société Clam au paiement, par provision, de la somme de 168 041,69 euro en principal suivant décompte arrêté au 1er septembre 2004, en deniers ou quittances pour tenir compte des règlements éventuellement effectués postérieurement à cette date, et de celle de 23 532,76 euro au titre des intérêts conventionnels de retard, arrêtés à la même date;

Que l'obligation de la société Clam au titre de la clause pénale n'apparaissant pas non sérieusement contestable, il n'y a pas lieu à référé sur ce chef de demande;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des sociétés appelantes les frais irrépétibles par elles exposés ;

Par ces motifs, LA COUR, Réforme la décision entreprise et, statuant à nouveau, Déboute la société Clam de sa demande ; La condamne à payer à la société Six Continents Hotels Inc, à titre de provision en deniers ou quittances, les sommes de 168 041,69 euro et 23 532,76 euro arrêtées au 1er septembre 2004 ; Dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus de la demande ; Condamne la SARL Clam à payer à chacune des sociétés intimées la somme de 2 000 euro en application des dispositions des l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel. Dit que ces derniers pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.