CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 3 mai 2007, n° 05-09223
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Galec (SA)
Défendeur :
Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Laporte
Conseillers :
MM. Fedou, Coupin
Avoué :
Me Treynet
Avocats :
SCP Uettwiller Grelon Gout Canat & Associés, Me Parleani
Faits et procédure
En septembre 2001, la société Coopérative groupements d'achats des centres Leclerc SA - Galec- ayant obtenu, de la part de ses 23 fournisseurs en produits frais, des contrats de coopération commerciale moins favorables que ceux consentis à la société Carrefour, leur a réclamé réparation par la voie de protocoles d'accords transactionnels à hauteur d'un montant total de 23 313 681,51 euro.
Le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie estimant ces conventions contraires aux dispositions de l'article L. 442-6 I-2 a et II a du Code de commerce, comme portant sur des prestations rétroactives et ne reposant sur aucun préjudice en l'absence de service commercial effectivement rendu, a assigné le Galec devant le Tribunal de commerce de Nanterre en constatation de leurs nullités, en restitution par le Galec des sommes perçues, et en paiement d'une amende civile de 2 millions d'euro.
Par jugement rendu le 15 novembre 2005, cette juridiction a déclaré le ministre de l'Economie recevable en ses prétentions, bien fondé en ses demandes de nullité des accords transactionnels conclus entre le Galec et ses fournisseurs et de restitution au Trésor Public pour le compte des fournisseurs des sommes versées au Galec à concurrence de 23 313 681,51 euro en lui donnant acte de son engagement à restituer au Galec celles qui ne pourraient être remises à ces derniers, condamné le Galec à lui verser une amende civile de 500 000 euro et le défendeur aux dépens.
Appelant de cette décision, le Galec soulève cinq fins de non-recevoir.
Il soutient que si l'article L. 442-6 du Code du commerce a institué l'action judiciaire du ministre de l'Economie pour faire valoir des droits qu'un opérateur économique répugnerait à mettre en œuvre, cela n'implique pas que le titulaire de ses droits en perde la maîtrise, mais impose qu'il en soit informé et ait donné son assentiment sauf à confisquer au profit d'autrui le droit fondamental d'accès à la juridiction reconnu à chacun par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme.
Il en déduit l'irrecevabilité du ministre de l'Economie qui utilise les droits des fournisseurs de manière secrète, sans leur accord et en dépit de la dénonciation de cette action par ceux qui en ont eu connaissance.
Il effectue, en second lieu, un parallèle avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel en matière d'actions de substitution des syndicats, exigeant que le titulaire des droits puisse s'assurer à tout moment de leur mise en œuvre en justice, pour relever que le ministre de l'Economie s'est affranchi de cette garantie, en négligeant de prendre en considération la volonté de ceux qu'il prétend défendre.
Il allègue ensuite que le ministre de l'Economie ne peut agir qu'à l'encontre des contrats que la loi désigne, l'article L. 442-6 du Code du commerce, exorbitant du droit commun, étant nécessairement d'interprétation restrictive et relève que tel n'est pas le cas, des conventions litigieuses qui ne sont nullement des contrats de coopération commerciale, mais des transactions.
Il invoque aussi l'absence d'intérêt à agir du ministre de l'Economie pour le compte des 17 fournisseurs énoncés dans ses écritures ayant désavoué l'action de celui-ci en refusant toute restitution.
Le cinquième moyen d'irrecevabilité invoqué par le Galec porte sur l'exécution d'une décision de justice qui rétablit autrui dans ses droits, à son profit, par le ministre de l'Economie qui n'est pas autorisé par l'article L. 442-6 du Code du commerce.
Il soutient que le texte n'a pas prévu que l'Etat procède à la conservation et à la restitution des sommes perçues selon des modalités ignorées.
Il fait état de la compétence exclusive de l'agent judiciaire du Trésor pour demander aux juridictions judiciaires de reconnaître l'existence d'une créance de l'Etat, étrangère à l'impôt et au domaine.
Le Galec réfute la prétendue autonomie de l'action du ministre de l'Economie par rapport à la défense des intérêts individuels en faisant valoir que la logique du texte comme de son action repose sur la restauration de l'ordre économique par le rétablissement dans leurs droits des victimes supposées de pratiques illicites.
Il estime qu'on ne saurait admettre que le ministre de l'Economie, organe politique, s'empare des droits d'autrui, les confisque en fonction de sa finalité propre pour en faire un instrument de ses desseins.
Il observe que le ministre de l'Economie ne peut se prévaloir de précédents jurisprudentiels à cet égard.
Il remarque que le soutien apporté par le Ministère public à la thèse de l'autonomie de l'action du ministre de l'Economie n'évoque même pas les principes posés par le Conseil constitutionnel et élude l'invocation de l'article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme par un argument biaisé et inutilement péremptoire.
Il dénie la nullité alléguée des lettres de fournisseurs produites par ses soins en relevant qu'aucun texte n'interdit à ces derniers de désavouer l'action que le ministre de l'Economie entend engager en leur nom et que le doute nourri par ce dernier quant à leur volonté réelle est dépourvu de consistance.
Il considère que le soutien apporté par Ministère public au processus d'exécution du jugement par le ministre de l'Economie à son profit pour en distribuer ensuite le fruit, apparaît assez étonnant puisqu'il impliquerait que le pouvoir politique vienne prêter la main au pouvoir judiciaire alors même que cette logique inquiétante n'est pas inscrite dans la loi.
Le Galec indique, à titre subsidiaire, avoir estimé être traité par les fournisseurs de manière discriminatoire par rapport à la société Carrefour et avoir subi un désavantage dans la concurrence au sens de l'article L. 442-6-I-1° du Code du commerce en raison des conditions commerciales défavorables pratiquées par ceux-ci à son égard.
Il évoque en exergue, la mutation de la négociation commerciale au cours de la période s'étant écoulée depuis la loi Galland du 1er juillet 1996 et s'achevant avec la loi 2 août 2005 qui a été marquée par la disparition des marges avant et le transfert de la négociation commerciale sur les marges arrières.
Il fait valoir qu'au terme de cette évolution, la substance-même du service de coopération commerciale s'efface derrière son financement et que la marge arrière essentiellement composée par la coopération commerciale est devenue la marge commerciale du distributeur, le moyen de la concurrence entre les distributeurs et un élément essentiel des conditions d'achat des produits aux fournisseurs ainsi que des conditions de leur revente par les distributeurs.
Il en déduit que la marge arrière considérablement plus importante accordée par certains fournisseurs à la société Carrefour à son détriment tombait donc bien sous le coup de l'article L. 442-6-I-1° du Code du commerce.
Il précise que les fournisseurs ont adopté dans l'ensemble, non pas comme lui, une analyse reposant sur le droit de la concurrence, mais sur celle du droit du contrat.
Il explique que c'est afin de mettre un terme amiable à ce différend que les parties se sont rapprochées pour conclure des protocoles d'accord transactionnels aux termes desquels la réparation de son préjudice donnerait lieu au versement par les fournisseurs d'une indemnité transactionnelle forfaitaire et définitive, le Galec renonçant tant pour lui-même que pour toutes les entités du mouvement E. Leclerc à toute demande d'indemnisation complémentaire au titre des relations commerciales ayant existé entre les années 1999 à 2001 inclus.
Il fait grief au tribunal, pour disqualifier les transactions, d'avoir retenu l'argumentation du ministre de l'Economie selon laquelle il ne peut y en avoir, en l'absence de faute des fournisseurs et donc de responsabilité de ces derniers.
Il considère infondée cette motivation, décalée par rapport à la réalité de la négociation commerciale où le fournisseur propose des budgets de coopération commerciale, négociés avec le distributeur et affectés ensuite à des services définis en commun par les partenaires économiques, et excluant la possibilité de discrimination en matière de coopération commerciale.
Il ajoute que cette position ne pouvait, en aucun cas, permettre de remettre en cause les transactions eu égard à l'autorité de chose jugée qui leur est inhérente ainsi qu'à l'impossibilité de les attaquer pour erreur de droit ou lésion.
Il soutient que le ministre de l'Economie est irrecevable à cet égard tandis que la requalification sur le fondement de l'article 12 du nouveau Code de procédure civile proposée par le Ministère public ne permet pas au juge de s'immiscer dans le débat factuel résolu dans la transaction sauf à méconnaître l'article 2052 du Code civil.
Il considère que la prétendue absence de concessions réciproques invoquée en dernier lieu par le ministre de l'Economie est factuellement erronée parce que rien ne permet d'affirmer que les fournisseurs n'auraient obtenu comme concession de sa part, que son seul désistement d'instance et d'action et juridiquement prohibée par la notion-même de transaction et l'autorité de chose jugée qui s'y attache.
Il réfute l'existence alléguée par le ministre de l'Economie et le Ministère public de contrats de coopération commerciale rétroactifs et correspondant à un service non effectivement rendu présentés sous la forme des protocoles transactionnels litigieux.
Le Galec remarque que le fondement même de l'amende civile fait défaut en raison de l'effet extinctif de la transaction ayant pour effet de rétablir le droit et les intérêts de chacun.
Il souligne que même à supposer nulles les transactions, il n'en résulterait pas pour autant que celles-ci auraient été préjudiciables aux intérêts des fournisseurs en sorte que l'amende civile n'est pas concevable à défaut de démonstration d'une atteinte à des intérêts privés d'une ampleur ou d'une nature telle qu'elle viendrait porter atteinte à l'intérêt général.
Le Galec soulève, en conséquence, l'irrecevabilité des demandes du ministre de l'Economie et sollicite subsidiairement, son entier débouté outre, dans tous les cas, une indemnité de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le ministre de l'Economie, des Finances et de l'industrie oppose que son action s'inscrit dans le cadre de sa mission de gardien de l'ordre public économique.
Il soutient que l'article L. 442-6 III du Code du commerce lui offre la possibilité d'agir directement sans obtenir l'accord des victimes puisqu'il n'intervient pas pour leur compte.
Il estime que les lettres des fournisseurs de renonciation au bénéfice de son action dont la moitié à une date antérieure au jugement et qui sont toutes libellées sur le même modèle, montrant selon lui, qu'elles répondent à une sollicitation très forte du Galec, doivent être frappées de nullité absolue dans la mesure où ces renonciations tendent à faire échec à l'application d'une loi d'ordre public et à l'exécution d'une décision de justice.
Il souligne que lors de l'exercice de l'action de substitution reconnue aux syndicats de salariés ces derniers font valoir en justice les intérêts individuels d'un salarié alors que la sienne a pour finalité première la défense de l'ordre public économique.
Il considère que la décision du Conseil constitutionnel du 25 juillet 1989, évoquée par l'appelant, n'est pas transposable au dispositif prévu par l'article L. 442-6 du Code du commerce puisque l'hypothèse visée n'est pas la même.
Sans contester l'applicabilité de l'article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, le ministre de l'Economie objecte que ce texte ne prévoit pas de droit exclusif d'agir en justice sur un fondement particulier pour chaque personne.
Il prétend que le moyen tiré, de son impossibilité d'obtenir d'exécution d'une décision de justice à son profit est contraire à la volonté du législateur.
Il remarque qu'il recherche à cet égard, le rétablissement de l'ordre public économique passant par une remise des fournisseurs dans la situation dans laquelle ceux-ci se trouveraient, s'ils n'avaient pas été victimes d'une obtention d'avantages sans contrepartie, commise par le Galec.
Le ministre de l'Economie soutient, au fond, que les protocoles d'accord transactionnels résultent, en réalité, de contrats de coopération commerciale rétroactifs ne correspondant à aucun service rendu, proscrits par l'article L. 442-6-I-2 a et II a du Code du commerce.
Il précise que les 25 contrats représentant la somme de 175 969 405 euro convenus entre le Galec et ses fournisseurs ont été conclus entre le 12 février 2002 et le 25 mars 2003, alors qu'ils portent sur des rémunérations correspondant à des prestations de coopération commerciale non réalisées au titre des années 1999 et 2001.
Il fait valoir que les 28 protocoles ont permis au Galec de percevoir rétroactivement des rémunérations de services de coopération commerciale, par lui non rendus, à hauteur de 23 313 680,51 euro, détaillées dans un tableau dressé dans ses écritures.
Le ministre de l'Economie considère que le raisonnement du Galec est fondé sur un postulat entièrement erroné dont la transaction qui en est la construction ultime est "un habillage juridique" destiné à écarter son action.
Il observe que l'assimilation effectuée par le Galec entre les marges "avant" et "arrière" est contraire aux textes constituant le livre IV du Code du commerce, à la circulaire du 16 mai 2003, à la doctrine et à la jurisprudence.
Il souligne que l'existence ou l'absence de conditions discriminatoires obtenue par les distributeurs concurrents n'a aucun sens relativement à la coopération commerciale seule en cause dès lors que c'est le distributeur et non le fournisseur qui en prend l'initiative.
Il en déduit qu'aucune faute ne peut être reprochée aux fournisseurs qui n'ont donc pas engagé leur responsabilité civile en sorte que le Galec n'est pas fondé à réclamer une quelconque réparation dans le cadre d'une transaction, laquelle n'est qu'un montage pour contourner les dispositions de l'article L. 442-6 du Code du commerce.
Il remarque que les transactions ne stipulent pas des concessions réciproques par rapport aux prétentions légitimes des parties puisque selon lui, le Galec n'en a accordé aucune en renonçant à exercer une action en justice sur le fondement d'une discrimination dont il ne pouvait légitimement se plaindre.
Il précise que l'article L. 442-6 du Code du commerce vise toutes les pratiques figurant non seulement dans le paragraphe II mais aussi celles énoncées dans le paragraphe I.
Il affirme que la gravité des faits justifie une amende du montant revendiqué.
Le ministre de l'Economie demande à la cour de constater la nullité des contrats en cause, de déclarer nulles les renonciations des fournisseurs à un droit, de condamner le Galec à verser au Trésor Public les sommes indûment perçues, celui-ci s'engageant à les reverser aux fournisseurs concernés et subsidiairement à les restituer directement à ces derniers à concurrence de 23 313 680,51 euro et à lui justifier du paiement effectif.
Il réclame le prononcé d'une amende civile de deux millions d'euro à l'encontre du Galec.
Il sollicite que soit "ordonné l'exécution de la décision à intervenir sous astreinte" et une indemnité de 3 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le Ministère public fait valoir que l'article L 442-6 du Code du commerce ne subordonne l'action du ministre de l'Economie à aucune autorisation, accord ou assentiment de quiconque, ce droit conféré par la loi étant autonome.
Il estime que l'invocation par le Galec de l'article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme sur le droit à un tribunal indépendant et impartial est inopérante et déplacée.
Il prétend que le ministre de l'Economie et le tribunal ont, à très juste titre, requalifié les accords signés entre fournisseurs et distributeur dès lors qu'en l'absence de contestation au sens de l'article 2044 du Code civil, le Galec ne pouvait prétendre que son concurrent a bénéficié d'avantages de manière discriminatoire.
Il considère que la nullité des contrats litigieux, non constitutifs de transactions, et prohibés par l'article L. 442-6-II a et I-2° doit être constatée.
Il affirme que le ministre de l'Economie peut obtenir le versement effectif des condamnations afin de procéder à leur répartition entre les bénéficiaires.
Il soutient que c'est à cette seule condition que la décision de la cour produira ses effets.
Le Ministère public conclut, en conséquence, à la confirmation du jugement déféré.
Motifs de la décision
Considérant que selon l'article L. 442-6 du Code du commerce dans sa rédaction originelle résultant de l'article 36 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, l'action du ministre de l'Economie ne pouvait tendre qu'à la cessation des pratiques restrictives de concurrence;
Considérant que lors de l'élaboration de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001, le législateur a constaté que ce dispositif ne permettait pas au ministre de l'Economie "de se substituer" aux victimes de telles pratiques pour demander réparation de leur préjudice, ni de "solliciter la restitution des prix et valeurs des biens en cause, en leur lieu et place" ;
Qu'afin d'y remédier et observant que certaines victimes n'oseraient pas elles-mêmes introduire l'action, le législateur a entendu élargir les prérogatives du ministre de l'Economie, outre du Ministère public, en leur "donnant le droit d'agir à la place des victimes" en ce domaine ;
Considérant ainsi que le nouvel article L. 442-6 III du Code du commerce, issu de la loi précitée du 15 mai 2001 permet au ministre de l'Economie ou au Ministère public de demander, outre la cessation des agissements visés aux paragraphes I et II, la constatation de la nullité des clauses et contrats illicites, la répétition de l'indû et la réparation du préjudice, au nom et pour le compte du partenaire économique lésé;
Considérant donc que ministre de l'Economie, grâce à cette habilitation législative, dispose d'un pouvoir et d'une qualité propres à agir à ces fins;
Que néanmoins, il exerce alors cette action par substitution à la victime des pratiques en cause dont il met en œuvre les droits privés et non de manière autonome;
Que précisément en la cause, le ministre de l'Economie recherche le rétablissement des fournisseurs dans leurs droits patrimoniaux individuels afin de défendre et de restaurer l'ordre public économique prétendument troublé par les transactions intervenues entre eux et le Galec.
Considérant, en outre, que le rôle incontesté de gardien de l'ordre public économique reconnu au ministre de l'Economie ne le dispense pas pour autant du respect de l'ordre juridique auquel il ressortit, ni spécialement des règles légales ou jurisprudentielles en vigueur devant les juridictions commerciales compétentes en matière de pratiques restrictives de concurrence ayant pour objet des litiges nés de l'application de contrats commerciaux;
Considérant que le texte de l'article L. 442-6 III du Code du commerce, fondement de l'action du ministre de l'Economie, ne comporte aucune disposition concernant les relations entre l'opérateur économique réputé faible ou hésitant à agir pour le respect de ses droits et l'autorité publique agissant, avant, pendant et après l'engagement de l'action ;
Considérant que nonobstant le silence de la loi à cet égard, l'exercice de cette action de substitution par le ministre doit naturellement et nécessairement se conformer aux principes fondamentaux protecteurs de la liberté des personnes au nombre desquels figurent ceux énoncés par la Convention européenne des Droits de l'Homme;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 § 1 de cette convention, dont l'applicabilité et le caractère d'ordre public ne sont pas contestés par le ministre de l'Economie, "toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement devant un tribunal indépendant et impartial ... qui décidera... des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil" ;
Considérant que l'accès consacré par ce texte à une justice présentant ces caractéristiques et accomplissant cette mission constitue non seulement un droit mais une liberté fondamentale à vocation universelle à laquelle il ne doit pas être porté atteinte ;
Or, considérant qu'en l'espèce, le ministre de l'Economie a introduit l'action de substitution sans en informer les fournisseurs titulaires des droits et qu'il a poursuivi la procédure sans les y associer alors que, de surcroît, dix-sept d'entre eux avaient expressément exprimé leur volonté contraire ;
Considérant qu'il suit de là que l'action ainsi exercée par le ministre de l'Economie, en violation de l'article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, doit être déclarée irrecevable.
Considérant que la demande accessoire d'amende civile formée par le ministre de l'Economie est dès lors devenue sans objet.
Considérant que le jugement déféré sera donc entièrement infirmé.
Considérant que l'équité commande d'accorder au Galec une indemnité de 5 000 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
Considérant que le ministre de l'Economie qui succombe intégralement en ses prétentions et supportera les dépens des deux instances, n'est pas fondé en sa demande au même titre.
Par ces motifs, Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, Et statuant à nouveau Déclare le ministre de l'Economie des Finances et de l'Industrie irrecevable en son action en nullité et en restitution ; Dit sans objet sa demande d'amende civile; Le condamne à verser à la SA Coopérative des groupements d'achats des centres Leclerc -Galec- une indemnité de 5 000 euro en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Le déboute de sa demande sur le même fondement, Le condamne aux dépens des deux instances et Autorise Maître Treynet, avoué, à recouvrer ceux d'appel conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.