CA Paris, 25e ch. B, 9 février 1990, n° 10576-87
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Blanc
Défendeur :
Battistel (Epoux), Cognet (ès qual.), Elf Antargaz (Sté), Rosières
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Conseillers :
M. Fouillade, Mme Pinot
Avoués :
SCP Fisselier Chiloux Boulat, SCP Bollet Baskal, SCP Varin Petit, SCP Parmentier Hardouin
Avocats :
Mes Maynard, Saliget-Charrier, JL Lachaud, Tanton
LA COUR statue sur l'appel relevé par Monsieur Pierre Blanc exerçant son activité sous l'enseigne " Confort 77 " du jugement rendu le 25 février 1987 par le Tribunal de grande instance de Melun, qui dans un litige portant sur la vente d'un ensemble de meubles de cuisine et d'appareils électroménager, l'opposant à titre principal aux époux Battistel et par voie d'appel en garantie aux sociétés Elf Antargaz et Rosières a :
- entériné les conclusions du rapport d'expertise déposé par Monsieur Berthe
- dit résolue la vente susvisée en raison des défauts cachés de la chose vendues
- condamné Monsieur Blanc à restituer aux époux Battistel le somme de 43 376 F augmentée des intérêts au taux légal à compter dudit jugement ;
- donné acte aux époux Battistel de leur engagement de restituer les biens vendus,
- condamné Monsieur Blanc à verser aux époux Battistel la somme de 3 000 F à titre de dommages-intérêts pour trouble de jouissance outre celle de 2 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- condamné la société Elf Antargaz et la société Rosières à garantir Monsieur Blanc des condamnations prononcées à son encontre exclusivement en ce qui concerne les appareils défectueux,
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal a essentiellement retenu que :
- l'ensemble vendu (meubles et appareils électroménagers) constituent un tout indivisible,
- les défectuosités relevées par l'Expert démontraient que la chose vendue était impropre à l'usage auquel elle était destinée,
Monsieur Blanc, appelant, qui poursuit l'infirmation de la décision entreprise, demande à la cour de :
- le décharger de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,
- condamner les époux Battistel à lui payer la somme de 4 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- subsidiairement, pour le cas où la vente serait résolue pour vice caché, dire que les sociétés Elf Antargaz et Rosières seront tenues de le garantir.
Il soutient principalement que :
- les défauts relevés par l'expert ne présentent pas un caractère de gravité suffisant pour être considéré comme constituant un vice caché, lui-même ayant fait toutes diligences pour qu'il soit remédié aux défectuosités des appareils électroménagers,
- le garantie contractuelle du fabricant qui porte sur lesdits appareils électroménagers n'étant pas expirée, les époux Battistel ne peuvent invoquer le bénéfice de la garantie légale édictée par l'article 1641 du Code civil,
- les offres de remplacement desdits éléments défectueux ont été refusées par les acquéreurs,
- la vente, ayant porté sur des éléments divisibles, ne peut entrer dans le champ d'application de l'article 1644 du Code civil,
- aucune faute ni négligence ne pouvant lui être imputée, les sociétés Elf Antargaz et Rosières doivent le garantir pour le tout dans la mesure où l'indivisibilité de la chose vendue serait retenue.
Monsieur Battistel, puis Maitre Cognet, agissant en qualité d'administrateur au règlement judiciaire de celui-ci procédure qui a été ouverte par jugement du 26 novembre 1987, et Madame Battistel, intimés et appelants incidents concluent à la confirmation du jugement déféré ainsi qu'à la condamnation de Monsieur Blanc à leur payer une indemnité de 10 000 F pour trouble de jouissance outre la somme de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Ils demandent par ailleurs que soit ordonnée la reprise du matériel livré par la société Antargaz sans leur accord.
Ils font valoir que :
- les dispositions de l'article 1641 du Code civil, d'ordre public ne sauraient être tenues en échec pour la garantie conventionnelle offerte par le vendeur :
- l'offre de remplacement formulée par le vendeur peut être refusée par l'acquéreur qui exerce l'action rédhibitoire.
La société Elf Antargaz, intimée, demande à la cour de :
- donner acte de son offre de remplacer les matériels défectueux en nature ou en deniers,
- modérer toutes demandes de dommages et intérêts en raison de la valeur des matériels et des offres formulées,
- dire qu'il n'y a pas de préjudice postérieurement au 20 mai 1986 date de livraison du matériel offert en remplacement.
La société Rosières, Intimée, conclut :
- au débouté de l'appel en garantie dirigé contre elle
- à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle persiste à offrir la remise en état gratuite du four,
- à voir dire cette offre satisfactoire.
Cela étant exposé, LA COUR,
Considérant qu'il est constant que les époux Battistel ont acquis le 12 novembre 1983 une cuisine en "kit" composée à la fois d'éléments mobiliers et d'appareils électroménagers qui ont fait l'objet d'une facturation unique par Monsieur Blanc ;
Considérant que le tribunal a justement relevé que l'acquisition avait porté sur la vente d'une cuisine dans son ensemble en retenant plus particulièrement que chaque élément, meuble ou appareil électroménager n'avait de valeur et d'utilité que par rapport à l'ensemble et non pas isolément ; qu'il convient par suite de rechercher si les défauts affectant tel ou tel élément mis en évidence par l'expert Berthe ont pu rendre la chose vendue inutilisable pour l'emploi auquel on la destinait ; qu'en l'espèce les causes des désordres tenant, à la mauvaise qualité du matériel rendant les appareils électroménagers d'usage courant, tels que le frigidaire et le lave-vaisselle, inutilisable au manque d'information, au mauvais montage, lequel n'est pas imputable à l'acquéreur en l'absence de notice de montage suffisamment précise faute des fabricants, lenteur à remédier aux défaillances, nécessitaient pour que l'installation corresponde aux caractéristiques de bon fonctionnement, des réparations importantes et surtout rapides, ce qui n'a manifestement pas été le cas ;
Considérant dans ces conditions que le tribunal a justement fait application des articles 1641 et suivant du Code civil, le vice ayant affecté la cuisine dans son ensemble, étant observé que la garantie conventionnelle bénéficiant aux appareils électroménagers ne saurait priver l'acquéreur de l'action rédhibitoire;
Que la décision déférée doit par suite être confirmée en toutes ses dispositions tant en ce qui concerne la demande principale que les appels en garantie, étant précisé que l'étendue de la garantie des sociétés Rosières et Elf Antargaz se trouve limitée aux éléments par elles vendus à Monsieur Blanc ;
Considérant que l'indemnité pour trouble de jouissance ayant été justement arbitrée à la somme de 3 000 F, il n'y a pas lieu de l'augmenter en l'absence d'éléments justificatifs nouveaux
Considérant qu'il convient d'ordonner en tant que de besoin la reprise du matériel de remplacement livré par la société Elf Antargaz à ses frais ;
Considérant qu'aucune circonstance d'équité ne commande de faire bénéficier Monsieur et Madame Battistel et Maître Cogney ès qualité des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile!
Considérant que Monsieur Blanc qui succombe et devra supporter les dépens d'appel est irrecevable dans sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Et y ajoutant, Ordonne en tant que de besoin la reprise par la société Elf Antargaz du matériel par elle livré, à ses frais avances. Rejette toutes demandes autres plus amples ou contraires. Condamne Monsieur Blanc aux dépens d'appel et admet les SCP Bollet Baskal, SCP Varin Petit et SCP Parmentier Hardouin, avoués au bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.