CA Riom, ch. com., 15 février 2006, n° 04-03223
RIOM
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Peintamelec Ingénierie (SA)
Défendeur :
Abicom (Sté), Hewlett Packard France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bressoulaly
Conseillers :
M. Despierres, Mme Gendre
Avoués :
Me Rahon, Gutton-Perrin, SCP Goutet-Arnaud
Avocats :
SCP Ambiehl-Kennouche-Treins, SCP Vignancour Dischamp, Selarl Bismuth
Faits, procédure et demandes des parties
La société Peintamelec Ingénierie, prestataire d'ingénierie informatique et de technique industrielle concluait avec la société Iveco de Bourbon Lancy (71) un marché portant sur la fourniture et l'installation d'un ensemble informatique devant s'insérer dans un réseau existant, destiné à améliorer la surveillance de la qualité et la garantie des véhicule livrés aux clients de cette entreprise.
Pour répondre aux besoins du marché, elle passait commande le 27.11.1996 auprès de la société Abicom, fournisseur de matériel avec lequel elle était en relation commerciale habituelle, de divers éléments informatiques composés d'un serveur, un système d'exploitation Windows NT et un logiciel d'application développé par la société Peintamelec Ingénierie sur une hase fournie par PC Soft.
L'élément principal, constitué du serveur Hewlett Packard de type LC 5/166, était remplacé au moment de la livraison par un serveur référencé HP NeftServer E 30 5/166 qui venait d'être mis sur le marché pour tenir compte d'un changement intervenu au catalogue fabricant sur une nouvelle série de serveurs.
La société Abicom livrait les équipements à la société Peintamelec le 17.12.1996 en assurant au cours de l'année 1997 le paramétrage nécessaire au bon fonctionnement du système d'exploitation Windows NT.
La société Abicom devait assurer la mise à jour de Windows NT pour la (sic) la société Peintamelec Ingénierie le 13.01.1998, assurer la maintenance en son état de fonctionnement du système Windows NT 4 sur le matériel, la maintenance du matériel proprement dit étant à la charge de société Hewlett Packard France (HP).
Après la mise en œuvre de l'ensemble du système chez Iveco fin février 1997, puis une montée en charge progressive permettant de gérer l'acquisition des données sur les vingt bancs d'essais concernés, des incidents graves se sont produits les 29.09.1997 et 6.10.1997 entraînant la perte de données sur le disque dur du serveur E 30. De longues et complexes recherches n'ayant pas permis de déceler l'origine des dysfonctionnements, la société Iveco décidait de changer le serveur E 30 le 12.03.1998 date à partir de laquelle disparaissaient les anomalies affectant le fonctionnement du système informatique.
Par acte du 17.09.1998, la société Peintamelec Ingénierie assignait en référé la société Abicom. Par ordonnance en date du 29.09.1998, le juge des référés confiait une mission d'expertise à M. Bazin. Les opérations d'expertise étaient étendues par ordonnance du 4.05.1999 à la société Hewlett Packard Compagny (HP). M. Bazin déposait son rapport le 30.04.2003 en mettant en cause un dysfonctionnement du matériel UP E 30 dans l'origine des pertes de données avant affecté le système informatique de la société Iveco.
Par actes en date du 9.09.2003, la société Peintamelec Ingénierie assignait en responsabilité et condamnation solidaire les sociétés Abicom et Hewlett Packard (HP) au visa des articles 1147 et 1382 du Code civil.
Par jugement en date du 4.11.2004 le Tribunal de commerce de Clermont Ferrand:
- déboutait la société Peintamelec Ingénierie de toutes ses demandes à l'encontre de la société Abicom et la condamnait à payer à cette société la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
- condamnait la société Hewlett Packard (HP) à payer à la société Peintamelec Ingénierie la somme de 60 000 euro et celle de 4 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
- disait n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Le 16.12.2004, la société Peintamelec Ingénierie interjetait appel du jugement.
Vu les dernières conclusions signifiées le 3.01.2006 aux ternies desquelles la société Peintamelec Ingénierie demande de:
- sous le visa de articles 1147 et 1382 du Code civil et à titre subsidiaire sous le visa des articles 1641 et suivants du Code civil.
- former le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses prétentions dirigées à l'encpntre de la société Abicom.
- condamner solidairement les sociétés Abicom et Hewlett Packard (HP) à lui payer la somme totale de 155 371,17 euro outre celle de 15 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 3.01.2006 aux termes desquelles la société Abicom demande de:
- déclarer irrecevable en application des articles 554 et 555 du nouveau Code de procédure civile la demande en garantie de la société Hewlett Packard (HP) fondée sur le contrat de distribution la liant à la société Abicom.
- confirmer le jugement attaqué.
- condamner la société Peintamelec Ingénierie à lui payer la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
- constater l'irrecevabilité de l'action rédhibitoire engagée par la société Peintamelec Ingénierie à son encontre pour non respect du bref délai prévu par l'article 1648 du Code civil et débouter on tout état de cause la société Peintamelec Ingénierie de ses demandes de ce chef.
- constater que la société Abicom a pour sa part respecté les exigences du bref délai en appelant la société Hewlett Packard (HP) en cause dès la découverte du vice.
- constater que la société Abicom n'a commis aucune faute dans l'exécution des obligations lui incombant et ne pourrait être tenue qu'en qualité de vendeur professionnel, sauf son recours contre son propre vendeur, la société Hewlett Packard (HT), les désordres étant imputables à un défaut de fabrication préexistant à toute revente.
- condamner la société Hewlett Packard (HP) constructeur et vendeur du bien à la société Abicom à la garantir de toutes les condamnations en principal intérêts et frais qui seraient prononcées contre elle.
- dire que les fautes commises par la société Peintamelec Ingénierie doivent diminuer en proportion la part indemnisable de son préjudice.
- réduire la demande de la société Peintamelec Ingénierie.
- débouter la société Hewlett Packard (HP) de sa demande en garantie fondée sur le contrat de distribution la liant à la société Abicom et de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
- condamner la société Hewlett Packard (HP) et la société Peintamelec Ingénierie in solidum à lui payer la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 9.01.2006 aux termes desquelles la société Hewlett Packard France (HP) demande de:
- constater que les actions de la société Peintamelec Ingénierie et de la société Abicom fondées sur la garantie des vices cachés sont irrecevables.
- débouter la société Peintamelec Ingénierie et la société Abicom de toutes leurs prétentions à son encontre.
à titre subsidiaire,
- constater que le fondement de l'action de la société Abicom constitué par (sic)
- constater l'absence de responsabilité de la société Hewlett Packard France (HP), l'absence de justification de son préjudice par la société Peintamelec Ingénierie et l'absence de lien de causalité entre le préjudice allégué et les faits imputés à la société Hewlett Packard France (HP).
- débouter la société Peintamelec Ingénierie et la société Abicom de leurs demandes dirigées contre la société Hewlett Packard France (HP)
- à titre infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement en ce qu'il a évalué à 60 000 euro le préjudice de la société Peintamelec Ingénierie
- en tout état de cause,
- condamner la société Peintamelec Ingénierie et la société Abicom au paiement de la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 12.01.2006.
Motifs et décision
Attendu que l'expertise de M. Bazin a clairement mis en évidence l'origine des dysfonctionnements du système informatique commandé par la société Iveco à la société Peintamelec Ingénierie et installé en février 1997; que la perte de données qui se produisait ponctuellement lorsque le système était en forte charge était liée à un dysfonctionnement du matériel société HP E 30;
Qu'il était dû à un mauvais fonctionnement du " Firmware ", logiciel stocké dans une mémoire programmable (EPROM) de la carte contrôleur du disque et a pu être totalement résolu par la mise à jour gratuite du "Firmeware" (version 301C) proposée par la société Hewlett Packard France (HP) par l'intermédiaire d'une information diffusée le 27.02.1997 sur le site internet officiel constructeur et envoyée à ses abonnés le 5.03.1998;
Attendu qu'en l'occurrence, la société Abicom a découvert cette information le 7.04.1998 et a procédé à la mise à jour du Firmeware le 10.04.1998; que toutefois la société Iveco avait préalablement pris l'initiative de changer le serveur pour un HP E 40, opération effectuée le 12.03.1998, sans intervention de la société Peintamelec Ingénierie;
Attendu que la société Peintamelec Ingénierie recherche les responsabilités des sociétés Abicom et Hewlett Packard France (HP) aux fins d'obtenir la condamnation de ces sociétés à l'indemniser des préjudices générés par le coût des vérifications longues et complexes effectuées pour déterminer l'origine des dysfonctionnements signalés par su cliente à partir de septembre 1997 jusqu'à mars 1998 et par les répercussions commerciales et économiques de cette affaire résultant de la perte de confiance de la société Iveco, client important;
1- Sur les demandes dirigées par la société Peintamelec Ingénierie à l'encontre de là société Abicom
Attendu que la société Peintamelec Ingénierie précise qu'elle n'entend pas reprocher à la société Abicom des fautes de conseil quant au choix du matériel ou des fautes dans l'installation du serveur HPE30 ; qu'elle considère néanmoins que la société Abicom est responsable du matériel vendu vis-à-vis de son client au sens de l'article 1147 du Code civil, une obligation de renseignements, de conseils et d'assistance accessoire étant nécessairement incorporée à la prestation principale ; qu'elle soutient que la société Abicom était un professionnel de très haut niveau, choisi pour ses compétences que compte tenu de la gravité des conséquences des dysfonctionnements elle aurait dû insister auprès du service de maintenance de la société Hewlett Packard France (HP); que cette dernière, avant connaissance des problèmes du E 30 depuis décembre 1997 au minimum aurait dû être en mesure de résoudre le problème ; qu'elle reproche à la société Abicom d 'avoir tardé à découvrir l'information et par voie de conséquence à faire la mise à jour du Firmeware défaillant alors que c'est durant ce laps de temps que la société Peintamelec Ingénierie a perdu le marché Iveco; qu'en bref elle considère que, dans le cadre de l'obligation de résultat qui lui incombait, la société Abicom a commis une faute en n'envisageant pas un défaut du matériel et en ne saisissant pas le service de maintenance de la société Hewlett Packard France (HP) afin de permettre une résolution plus rapide des problèmes ;
Attendu qu'à titre subsidiaire, la société Peintamelec Ingénierie entend fonder son action à l'encontre de la société Abicom sur la garantie des vices cachés en soulignant que cette société qu'elle a assignée en référé ou 1998, ne revendique pas le moyen tiré de la prescription de l'action;
Attendu que l'obligation de renseignements, de conseil et d'assistance du fournisseur d'un bien de haute technicité à l'égard de l'acheteur ne s'analyse pas un une obligation de résultat comme le soutient la société Peintamelec Ingénierie mais en une obligation de moyens qu'il faut apprécier en tenant compte des éléments de la cause, tout d'abord de la spécificité du bien vendu, en l'occurrence un produit nouveau, fabriqué par une entreprise de notoriété mondialement reconnue, ayant fait l'objet d'un choix adapté, utilisé dans des conditions normales, mais aussi du rôle et de la compétence du vendeur comme des interventions et de la compétence technique de l'acheteur professionnel ;
Attendu que par des motifs pertinents en droit comme en fait que la cour fait siens, le tribunal a justement analysé les liens contractuels et les obligations de la société Abicom pour tirer des éléments du dossier, et notamment des constatations de l'expert judiciaire, les conséquences juridiques qui s'imposaient et conclure au déboute de toutes les prétentions formées par la société Peintamelec Ingénierie contre la société Abicom ; qu'il n'est pas établi que la société Abicom ait eu des compétences techniques plus performantes que la société Peintamelec Ingénierie pour lui (sic) informatique livré par la société Peintamelec Ingénierie à Iveco, que (sic) qu'elle n'était pas plus à même que la société Peintamelec Ingénierie de déceler les anomalies du serveur E 30, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir sollicité l'intervention de la société Hewlett Packard France (HP);
Que les informations diffusées le 27.02.1997 par cette société sur le site officiel internet étaient à la disposition de la société Peintamelec Ingénierie comme de la société Abicom ; que toutefois leur intérêt pour la résolution des problèmes rencontrés en l'espèce supposait d'avoir défini l'origine de ceux-ci ; qu'or la société Peintamelec Ingénierie qui avait conçu, réalisé et installé l'ensemble informatique, était davantage en mesure de découvrir la cause des dysfonctionnements que la société Abicom; qu'elle ne peut donc pas se prétendre créancière à son égard d'une obligation d'information et de conseils:
Attendu que l'action dirigée par la société Peintamelec Ingénierie à l'encontre de la société Abicom pourrait prospérer sur le fondement juridique de la garantie des vices cachés, le bref délai de prescription prévu par l'article 1648 du Code civil avant été interrompu par l'assignation en référé ; que les conclusions du rapport d'expertise judiciaire ont prouvé l'existence d'un vice de la chose vendue empêchant l'usage auquel elle était destinée, vice caché au jour de la vente ; que toutefois la société Peintamelec Ingénierie ne sollicite ni la résolution de la vente, ni une diminution de prix, ni le coût de là remise en état ou du remplacement de la chose atteinte d'un vice caché, mais des dommages-intérêts en réparation des frais exposes pour la recherche de l'origine des dysfonctionnements et d'un préjudice commercial; qu'en application de l'article 1645 du Code civil, l'allocation de dommages-intérêts est conditionnée par la mauvaise foi du vendeur ou à la connaissance qu'il avait de l'existence du vice lors de la vente, situation à laquelle est assimilé le vendeur professionnel qui est censé ne pas pouvoir ignorer à l'égard de l'acquéreur profane les défauts dola chose vendue ; que toutefois, lorsque l'acquéreur a lui-même la qualité de professionnel, il importe de rechercher la compétence effective de ce dernier pour savoir s'il peut revendiquer à ce titre une créance de dommages-intérêts à l'encontre du vendeur;
Attendu qu'en l'espèce, les sociétés concernées ayant des spécialités équivalentes dans le domaine informatique, la société Peintamelec Ingénierie acquéreur et elle-même revendeur, doit être réputée connaître le vice de la chose au même titre que la société Abicom, vendeur non fabricant ; que la mauvaise foi de la société Abicom n'étant pas en cause et lofait qu'au jour de la vente cette société aurait ou effectivement connaissance du vice n'étant pas non plus allégué, l'action en responsabilité engagée contre elle par la société Peintamelec Ingénierie est dépourvue de fondement ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Peintamelec Ingénierie de toutes ses demandes formées à l'encontre de la société Abicom;
Qu'il y a lieu de constater que le recours en garantie formé par la société Abicom à l'encontre de la société Hewlett Packard France (HP) est sans (sic)
2- Sur les demandes dirigées par la société Peintamelec Ingénierie a l'encontre de la société Hewlett Packard France (HP)
Attendu qu'il sera observé en premier lieu que la société Peintamelec Ingénierie n'est pas recevable à agir sur le fondement de la garantie des vices cachés car l'action a été engagée tardivement pas la société Peintamelec Ingénierie, après l'expiration du bref délai prévu par l'article 1648 du Code civil ; qu'en effet, en vertu du principe découlant de l'article 2244 du Code civil selon lequel, pour être interruptive de prescription, une citation en justice doit être adressée à celui qu'on veut empêcher de prescrire, l'interruption de l'action par l'assignation en référé ne peut pas être invoquée par la société Peintamelec Ingénierie à l'encontre de la société Hewlett Packard France (HP), partie à la procédure de référé sur assignation de la société Abicom;
Attendu que quelque soit le point de départ retenu pour l'application du bref délai, découverte de l'origine du dysfonctionnement lors du changement du serveur en mars 1998 ou information obtenue au cours des opérations d'expertise ayant donné lieu au dépôt du rapport en avril 2003, l'assignation de la société Hewlett Packard France (HP) par la société Peintamelec Ingénierie suivant acte du 13.10.2003 est tardive; qu'au demeurant elle était délivrée sur le fondement des articles 1147 et 1382 du Code civil, l'action en garantie des vices cachés n'ayant été invoquée par la SA Peintamelec Ingénierie qu'à partir de l'instance d'appel;
Attendu qu'en second lieu, il importe de vérifier le bien fondé de l'action engagée par la société Peintamelec Ingénierie contre la société Hewlett Packard France (HP) sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuel prévue par l'article 1382 du Code civil, aucun lien contractuel n'existant entre les deux parties
Attendu que le fait pour un fabricant de mettre en circulation un produit nouveau qui s'avère défectueux, puis une fois la défectuosité découverte, l'abstention consistant à ne pas prendre les mesures qu'un professionnel normalement diligent se devait de mettre en œuvre pour prévenir en temps utile et efficacement les conséquences dommageables prévisibles des défauts de la chose vendue lors d'un usage pourtant adapté à sa destination, caractérise un manquement fautif engageant sa responsabilité à l'égard de tiers souffrant de préjudices en relation de causalité avec la faute ;
Que l'action engagée par la société Peintamelec Ingénierie sur ce fondement doit toutefois être examinée en tenant compte de sa propre compétence professionnelle pour vérifier si elle n'a pas elle-même commis de faute ayant généré tout ou partie des préjudices allégués;
Attendu que sans contester le principe de l'obligation lui incombant, la société Hewlett Packard France (HP) prétend qu'en l'espèce elle n'a commis aucune faute dont puisse se prévaloir la société Peintamelec Ingénierie, société également spécialisée dans le domaine de l'informatique pour empêcher sa responsabilité ;
Attendu que reprenant les griefs invoqués en cours d'expertise à l'encontre de la société Peintamelec Ingénierie la société Hewlett Packard France (HP) soutient que ni la société Abicom, ni la société Peintamelec Ingénierie ne l'ont avisée du problème apparu sur le système informatique d'Iveco;
Attendu que l'expertise révèle que la société Abicom avait signalé à l'expert qu'elle avait interpellé plusieurs fois le service commercial de la société Hewlett Packard France (HP) à ce sujet sans alerter néanmoins le service de maintenance; que des techniciens du service "maintenance" de la société Hewlett Packard France (HP) étaient venus en novembre 1997 chez Iveco, mais pour une autre raison, sans qu'il ne soit clairement démontré que leur attention aurait été spécialement attirée sur le problème des pertes de données ; qu'en conséquence l'argumentation de la société Hewlett Packard France (HP) ne peut être écartée sur ce point ;
Que cependant il faut aussi retenir la remarque pertinente de l'expert quant à l'état d'esprit tant de la société Abicom que de la société Peintamelec Ingénierie qui n'envisageaient pas lors de la recherche de l'origine des pertes de données de remettre en cause le bon fonctionnement du disque, s'agissant d'un matériel fourni par le constructeur de renommée mondiale qu'était la société Hewlett Packard France (HP) ; qu'il est en effet indéniable qu'eu égard à la confiance des professionnels de l'informatique en la qualité et la fiabilité des produits de la société Hewlett Packard France (HP), il ne peut être reproché à la société Peintamelec Ingénierie d'avoir d'abord recherché l'origine des dysfonctionnements dans son travail, puis dans les composants environnementaux ;
Attendu qu'au demeurant, la société Peintamelec Ingénierie n'ayant pas la compétence de la société Hewlett Packard France (HP) pour identifier le dysfonctionnement du serveur, matériel faisant appel à des techniques très pointues soulignées par l'expert judiciaire. les résultats de sa recherche risquaient de rester très aléatoires ;
Attendu que la société Hewlett Packard France (HP) reproche encore à la société Peintamelec Ingénierie de ne pas avoir suffisamment testé le serveur en pleine charge lors de l'installation du nouveau système informatique chez Iveco;
Que l'expert a estimé qu'il ne lui semblait pas que ce soit une démarche économiquement raisonnable pour un produit courant du marché censé fonctionner: que cette appréciation est d'autant plus pertinente que le produit présenté sur catalogue apparemment sans la moindre réserve était certes nouveau, mais ne constituait pas un prototype ; qu'en outre, s'agissant d'un produit d'une très haute technicité c'était évidemment au fabricant, doté de la compétence très spécialisée nécessaire à la création et à la vérification du produit, et non pas à la société Peintamelec Ingénierie de s'assurer de la fiabilité de son fonctionnement;
Attendu que le dossier prouve en fait que l'attention de la société Hewlett Packard France (HP) avait été attirée sur des risques de dysfonctionnement du nouveau serveur : qu'elle admet (page 46 de ses dernières conclusions) qu'elle était en mesure de proposer une solution de contournement aux problèmes des pertes de données dès décembre 1997; qu'ainsi à cette date elle avait non seulement eu connaissance des anomalies mais elle avait aussi ou le temps de mettre au point le procédé permettant d'y remédier ; qu'elle utilisera su vote habituelle de diffusion d'informations par le biais de son site internet officiel constructeur seulement le 27 février 1998 et enverra l'information à ses abonnés le 5.03.1998 ; qu'il n'est pas évoqué le fait que la société Peintamelec Ingénierie aurait fait partie de ses abonnés;
Que compte tenu d'une part des conséquences graves des défauts constatés même s'ils étaient rares et d'autre part du caractère de ce genre de problèmes décrits par l'expert judiciaire comme étant " assez exceptionnels " donc plutôt imprévisibles pour les utilisateurs habituels de matériel fabriqué par la société Hewlett Packard France (HP) , il appartenait à cette société de prendre des mesures appropriées pour limiter l'incidence de Ces dysfonctionnements ; qu'elle a manqué à ses obligations en s'abstenant de recourir en temps utile à une information spécifique, mieux ciblée et plus efficace, adaptée à la particularité de la situation, peu commune pour une société d'une telle notoriété, tant pour faire connaître les risques de dysfonctionnement que la solution pour y remédier; qu'en l'espèce si la société Hewlett Packard France (HP) avait correctement rempli ses obligations, la société Peintamelec Ingénierie aurait ou une chance certaine de résoudre beaucoup plus rapidement les problèmes survenus chez sa cliente Iveco et par la même de réduire, voire supprimer les répercussions économiques et commerciales qu'elle a subies ;
Attendu qu'il ressort donc suffisamment du dossier que la société Hewlett Packard France (HP) a commis une faute engageant sa responsabilité quasi-délictuelle à l'égard de la société Peintamelec Ingénierie; que lui ayant certainement fait perdre la chance d'apporter dès le mois de décembre 1997 une solution aux problèmes posés par les pertes de données constatées chez Iveco, il lui appartient d'en réparer les conséquences dommageables en relation directe de causalité avec ce manquement;
Attendu que la société Peintamelec Ingénierie ne peut réclamer que l'indemnisation d'une perte de chance de réduire les frais exposés pour la recherche des défauts du système informatique durant une période ayant commencé à courir seulement à compter de décembre 1997 ; que s'agissant du préjudice commercial, l'expert sou ligne qu'il n'est pas certain que dans un autre contexte, la société Peintamelec Ingénierie aurait eu de façon certaine les commandes invoquées qu'il a cependant pu vérifier que durant une période, cette société n'avait pas bonne presse chez Iveco, répercussion liée au problème des portes de données qu'elle n'avait pas su résoudre; qu'elle justifie donc bien de la réalité d'un certain préjudice commercial même s'il ne s'est traduit que par la perte de chance de conclure plus sûrement des commandes et (sic) Peintamelec Ingénierie ;
Attendu que le tribunal de commerce n'avait pas retenu de préjudice commercial certain niais avait considéré fondée pour une large part la demande de la société Peintamelec Ingénierie au titre des frais exposés pour la recherche de l'origine de la disparation des données et pour la reconstitution des données perdues que la cour a une appréciation un peu différente de la nature des préjudices directement consécutifs aux manquements reprochés à la société Hewlett Packard France (HP) puisqu'elle retient l'indemnisation de perte de. chance concernant une période plus limitée pour les frais d'intervention chez Iveco mais admet l'existence d'un préjudice commercial également caractérisé par une perte de chance; qu'au vu de ces considérations et des éléments versés au dossier, la demande de la société Peintamelec Ingénierie chiffrée à la somme de 155 371,17 euro est très excessive et doit être ramenée à celle de 60 000 euro, ce qui revient à confirmer en définitive la décision de condamnation prononcée en première instance, même si les motifs sont pour partie divergents ;
Attendu que la société Hewlett Packard France (HP) qui succombe sera déboutée de ses demandes;
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et après en avoir délibéré, Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société Peintamelec Ingénierie de toutes ses demandes dirigées contre la société Abicom et en ce qu'il a condamné la société Peintamelec Ingénierie à lui payer et porter la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Constate que le recours en garantie formé par la société Abicom à l'encontre de la société Hewlett Packard France (HP) est sans objet. Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la société Hewlett Packard France (HP) à payer et porter à la société Peintamelec Ingénierie la somme de 60 000 euro de dommages-intérêts et la somme de 4 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Y ajoutant, Condamne la société Hewlett Packard France (HP) à payer et porter à la société Peintamelec Ingénierie la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et à la société Abicom la somme de 5 000 euro au même titre. Déboute la société Peintamelec Ingénierie du surplus de ses demandes. Déboute la société Hewlett Packard France (HP) de toutes ses demandes. Fait masse des dépens de référé, d'expertise, de première instance et d'appel, et condamne la société Hewlett Packard France (HP) à les supporter dans leur intégralité. Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.