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Décisions

CA Caen, 1re ch. sect. civ., 31 octobre 2006, n° 06-02037

CAEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Simon, Hue

Défendeur :

Debrey (Epoux), Duval Immobilier (Sté), Cholet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Beuve

Conseillers :

Mmes Cherbonnel, Ody

Avoués :

SCP Dupas-Trautvetter Ygouf Balavoine Levasseur, SCP Mosquet Mialon d'Oliveira Leconte, SCP Parrot Lechevallier Rousseau

Avocats :

SCP Hellot-Rousselot, Mes Marguerie, Fleury-Rebert, Trillat

TGI Caen, du 21 juin 2006

21 juin 2006

Suivant acte sous-seing privé du 7 mai 2005, un compromis de vente portant sur un immeuble situé à Sallenelles a été conclu, par l'intermédiaire de la société Duval Immobilier, entre les époux Daniel Simon, vendeurs, et Monsieur Sébastien Debrey et Madame Garoline Ollitrault, acquéreurs, pour un prix de 230 000 euro.

Monsieur Jean-Louis Cholet, mandaté par les acquéreurs, a établi le 25 juillet 2005 un état parasitaire dont les conclusions étaient les suivantes "à ce jour, pas d'observation visuelle de trace de champignons lignivores. Présence limitée de traces de vrillettes. Une zone de faible surface abîmée (infiltration ou dégât des eaux ?)".

L'acte authentique de vente a été signé le 28 juillet 2005.

Monsieur Sébastien Debrey et Madame Caroline Ollitrault épouse Debrey, faisant état de la découverte, en décembre 2005, de traces de mérules dans l'immeuble, ont, par acte du 13 février 2006, fait assigner, sur le fondement des articles 1109 et 1110 du Code civil, Monsieur Simon et Madame Michèle Hue divorcée Simon, en annulation de la vente et restitution du prix.

Ils ont également appelé sur l'instance la société Duval immobilier et Monsieur Jean-Louis Cholet, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, aux fins qu'ils soient condamnés à les garantir de la restitution du prix et à leur payer une somme globale de 57 029,54 euro en remboursement des frais engagés et à titre de dommages-intérêts.

Monsieur Simon et Madame Hue ont conclu à l'irrecevabilité de la demande fondée sur l'erreur et, subsidiairement, à la garantie in solidum de Monsieur Jean-Louis Cholet et la société Duval Immobilier.

Vu le jugement rendu le 21 juin 2006 par le Tribunal de grande instance de Caen prononçant l'annulation de la vente et rejetant les appels en garantie.

Vu les conclusions déposées au greffe pour le compte de:

- Monsieur Daniel Simon et Madame Michèle Hue, appelants, le 18 septembre 2006.

- les époux Sébastien Debrey, intimés, le 4 septembre 2006.

- la société Duval Immobilier, intimée, le 18 septembre 2006

- Monsieur Jean-Louis Cholet, intimé, le 18 septembre 2006

Un rapport oral de l'affaire a été effectué à l'audience, avant les plaidoiries.

Motifs

- Sur la demande d'annulation de la vente

Les demandeurs justifiant de la publication de l'assignation introductive d'instance à la Conservation des hypothèques de Caen, c'est à tort que la société Duval immobilier et Monsieur Jean-Louis Cholet excipent de l'irrecevabilité de la demande aux fins d'annulation de la vente sur le fondement de l'article 30-5 du décret du 4 janvier 1955.

Monsieur Simon et Madame Hue contestent les dispositions ayant annulé la vente pour erreur sur les qualités substantielles an faisant valoir que l'action, eu égard à son objet, ne pouvait être fondée que sur la garantie des vices cachés.

Les époux Debrey répliquent que l'existence d'un vice caché n'exclut pas la possibilité d'invoquer une erreur sur la substance.

Ils ajoutent qu'à titre subsidiaire, ils sont fondés à agir sur le fondement de l'absence de délivrance pour non-conformité.

La révélation, postérieurement à la vente, de la présence de mérule constitue un défaut rendant l'immeuble impropre à sa destination normale ou au moins diminue tellement son usage que les acquéreurs ne l'auraient pas acquis s'ils l'avaient connue.

Dès lors que l'immeuble acquis par les époux Debrey serait donc, à supposer que la mérule préexiste à la vente, affecté d'un vice caché au sens de l'article 1641 du Code civil, les acquéreurs étaient irrecevables à agir en annulation de la vente sur le fondement de l'erreur sur les qualités substantielles de l'immeuble même si, en faisant réaliser avant la vente, un diagnostic aux fins de détecter la présence éventuelle de mérule, ils avaient démontré que l'absence de mérule était pour eux une qualité substantielle,

La garantie des vices cachés constituait l'unique fondement possible à leur action en annulation de la vente.

En effet, ils ne pouvaient non plus agir sur le fondement du défaut de conformité de la chose vendue aux stipulations contractuelles bien qu'il soit mentionné à l'acte la déclaration du vendeur aux termes de laquelle l'immeuble n'est à sa connaissance "pas contaminé par des champignons de type mérule" dès lors que la non-infestation de l'immeuble ne constitue pas une caractéristique particulière et qu'en tout état de cause cette non-conformité diminue l'usage de l'immeuble.

S'agissant de l'action fondée sur les articles 1641 et suivants du Code civil qui doit être examinée par la cour, en application des dispositions de l'article 12 du nouveau code de procédure civile, il convient de relever que l'acte authentique de venta contient une clause d'exonération de la garantie pour vices cachés.

Dès lors qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que les vendeurs qui ne sont pas des professionnels avaient connaissance, antérieurement à la vente, de la présence de mérule, la clause de non-garantie doit recevoir application de sorte que l'action en annulation de la vente ne peut être accueillie sur le fondement de la garantie des vices cachés.

La décision déférée est donc réformée en ses dispositions annulant la vente et ordonnant la restitution du prix.

- Sur les autres demandes

- Sur la responsabilité de Monsieur Jean-Louis Cholet.

Les époux Debrey soutiennent que celui-ci qui, étant tenu d'une obligation de résultat, a établi un diagnostic erroné en ne relevant pas la présence de mérule, a engagé sa responsabilité contractuelle à leur égard.

Ils versent aux débats un rapport d'expertise non contradictoire établi par un technicien par eux mandaté, courant décembre 2005, qui indique avoir découvert la présence de mérule dans différents endroits de l'immeuble.

Les moyens des appelants sont les mêmes qu'en première instance.

Les premiers juges qui ont exactement relevé, d'une part, le caractère limité de la mission de Monsieur Jean-Louis Cholet, chargé d'une inspection visuelle et par sondages des parties accessibles de l'immeuble, et d'autre part, que la découverte de la mérule par les acquéreurs puis par le technicien faisait suite à des démontages et déposes d'éléments et notamment de faux plafonds, en ont exactement déduit que la preuve d'un manquement de Monsieur Jean-Louis Cholet, certes tenu d'une obligation de résultat mais ne portant que sur la découverte de mérule visuellement détectable dans les parties accessibles, à ses obligations contractuelles n'était pas rapportée.

Les dispositions ayant retenu que la responsabilité de Monsieur Jean-Louis Chalet n'était pas engagée sont donc confirmées.

- Sur la responsabilité de la société Duval Immobilier.

Les époux Debrey soutiennent qu'une présomption irréfragable de connaissance des vices de l'immeuble pesant sur l'agent immobilier, la société Duval Immobilier qui ne les a pas informés de la présence de la mérule, a manqué à leur égard à son obligation d'information.

Les moyens soulevés par les appelants incidents sont également sur ce point les mêmes qu'en première instance.

Les premiers juges ont à bon droit relevé que la responsabilité de l'agent immobilier vis-à-vis de l'acquéreur ne pouvait être engagée que sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

Dès lors qu'il n'est pas établi que la présence de mérule était apparente à la date de la vente ni que l'agent immobilier ait eu connaissance de ce vice caché, c'est à juste titre que la société Duval Immobilier qui n'est pas un professionnel du bâtiment soutient qu'elle n'a pas manqué à son devoir d'information.

Les dispositions qui ont rejeté les demandes formées à son encontre sont donc confirmées.

L'instance engagée par les époux Debrey n'étant pas fondée, ceux-ci supportent les dépens de première instance et d'appel et ne peuvent bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ils doivent régler sur ce fondement à Monsieur Daniel Simon et à Madame Michèle Hue, unis d'intérêt, qui ont exposé des frais irrépétibles, une indemnité qu'il est équitable de fixer à la somme de 2 000 euro.

Monsieur Jean-Louis Cholet et la société Duval Immobilier qui dirigent leurs demandes fondées sur ces mêmes dispositions contre les vendeurs, lesquels ne sont pas condamnés aux dépens et ne les ont pas appelés sur l'instance, en sont déboutés.

Par ces motifs, Réforme partiellement la décision déférée. Déclare recevable mais non fondée la demande en annulation de vente formée par les époux Sébastien Debrey à l'encontre de Monsieur Daniel Simon et Madame Michèle Hue. Les déboute de l'intégralité de leurs demandes. Confirme la décision déférée en ses autres dispositions non contraires à celles du présent arrêt. Y ajoutant, Condamne les époux Sébastien Debrey à régler Monsieur Daniel Simon et Madame Michèle Hue une indemnité de 2000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Déboute les parties du surplus de leurs demandes. Condamne les époux Sébastien Debrey aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.