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Décisions

CA Riom, ch. com., 28 février 2007, n° 06-00679

RIOM

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Médiatis (SA)

Défendeur :

Bret

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bressoulaly

Conseillers :

M. Despierres, Mme Javion

Avoués :

Gutton-Perrin, Me Mottet

Avocats :

SCP Casanova & Roudillon, Me Southon

TI Montluçon, du 4 janv. 2006

4 janvier 2006

Après avoir entendu en application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, à l'audience publique du 25 janvier 2007, sans opposition de leur part, les représentantes des parties, Mme Bressoulaly Présidente Magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la cour dans son délibéré et à l'audience publique de ce jour, indiquée par le magistrat rapporteur, l'arrêt suivant a été prononcé publiquement conformément aux dispositions de l'article 452 du nouveau Code de procédure civile:

Faits, procédure et demandes des parties

Suivant acte sous seing privé en date du 24.07.2002 la SA Médiatis a consenti à Mme Geneviève Bret une ouverture de crédit sous forme de découvert en compte en l'autorisant à faire des tirages financiers dans la limite d'un montant maximum autorisé de 12 500 euro remboursable par fractions, la fraction disponible étant fixée initialement à un montant de 5 000 euro.

Mme Bret n'assurant plus le paiement régulier des échéances, la SA Médiatis a prononcé le déchéance du terme par courrier en date du 14.08.2004.

La mise en demeure de payer étant restée infructueuse, la SA Médiatis a assigné Mme Bret en paiement par acte en date du 23.12.2004.

Par jugement en date du 04.01.2006 le Tribunal d'instance de Montluçon a:

- dit que la SA Médiatis n'avait pas satisfait aux exigences de l'article L. 311-30 du Code de la consommation et qu'en conséquence, Mme Bret devait bénéficier des dispositions de l'article L. 311-33 du Code de la consommation

- condamné Mme Bret à payer à la SA Médiatis au titre du prêt en 24 mensualités sans intérêts la différence entre le montant total des sommes prêtées et tous les règlements effectuées par elle à un titre quelconque, notamment les primes d'assurances incluses dans les mensualités déjà payées, à charge pour le prêteur de justifier préalablement auprès du débiteur des éléments de calcul ainsi effectués

- dit que les sommes perçues au titre des intérêts qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû

- dit que les mensualités ainsi déterminées seront payables chacune au plus tard le 10 de chaque mois et qu'à défaut du respect d'une seule échéance, Mme Bret perdra le bénéfice du présent échéancier et que la totalité de la dette redeviendra immédiatement exigible

- déboute chacune des parties du surplus de ses demandes

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement.

- débouté chacune des parties de ses demandes au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Le 17.03.2006, le SA Médiatis a interjeté appel du jugement.

Vu les dernières conclusions signifiées le 09.01.2007 aux termes desquelles Mine Bret demande de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter la SA Médiatis de son appel et ajoutant au jugement, de dire que conformément aux dispositions de l'article 1244-1 et 2 du Code civil, les paiements effectués s'imputeront d'abord sur le capital et non pas sur les intérêts, fussent-ils au taux légal.

Vu les dernières conclusions signifiées le 19.12.2006 aux termes desquelles la SA Médiatis demande de:

- infirmer le jugement entrepris

- débouter Mme Bret de ses prétentions

- condamner Mme Bret à lui payer la somme de 9 685,71 euro en règlement de la créance selon décompte arrêté au 24.11.2004 outre les intérêts de retard au taux contractuels de 15,37 % calculés sur la somme de 9 057,33 euro à compter du 13.09.2004 jusqu'à parfait règlement.

- subsidiairement, s'il était fait droit à la demande de d émis de paiement présentée par Mme Bret, dire qu'au premier impayé elle sera tenue de payer l'intégralité de la créance de la SA Médiatis sans autre formalité préalable

- condamner Mme Bret au paiement de la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 18.01.2007.

Motifs et décision

- sur la déchéance du droit au paiement d'intérêts

Attendu que c'est en méconnaissance de la portée juridique des dispositions contractuelles que le premier juge a sanctionné la SA Médiatis de la déchéance du droit au paiement d'intérêts pour ne pas avoir présenté une nouvelle offre de crédit lorsqu'elle a accordé à Mme Bret un découvert supérieur à la limite fixée dans le contrat, appréciée à un montant de 5 000 euro ;

qu'en effet la somme de 5 000 euro ne correspondait pas au maximum du découvert autorisé, défini dans le contrat du 24.07.2002 à un montant de 12 500 euro, lequel n'a pas été dépassé, mais à la fraction disponible au jour de l'ouverture de crédit;

Attendu que le jugement sera donc infirmé car le compte n'a pas été utilisé pour des montants excédant celui prévu dans l'offre initiale;

Attendu que Mme Bret ne peut pas non plus prétendre que la SA Médiatis aurait modifié le montant du taux fixé initialement car rien ne prouve que les évolutions du taux d'intérêts intervenues au cours de l'exécution du contrat ne soient pas restées conformes aux prévisions du contrat qui stipulait un taux révisable;

Attendu que s'agissant du renouvellement tacite de l'offre, il est intervenu régulièrement le 24.07.2003 après information donnée à la débitrice conformément aux exigences de la loi à l'occasion du relevé de compte du 12.03.2003 qui comportait les éléments d'information exigés;

Attendu que la SA Médiatis n'encourt donc pas la déchéance du droit au paiement d'intérêts;

- sur les indemnités de retard et de résiliation

Attendu que les articles L. 311-30 et s du Code de la consommation définissent strictement les sommes dues par l'emprunteur en cas de défaillance de sa part au nombre desquelles ne figure pas la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154 du Code civil;

Attendu qu'au vu de ces dispositions légales, le décompte établi par la SA Médiatis le 24.11.2004 doit être rectifié en ce sens que l'appelant ne peut exiger le paiement d'intérêts sur la partie des mensualités échues impayées correspondant à des intérêts, seule la partie du capital pouvant être productive d'intérêts, qu'après déchéance du terme la SA Crédipar ne peut pas non plus revendiquer le montant total des échéances impayées qui englobe intérêts et frais et appliquer sur ces sommes des intérêts; que seule la partie capital est due avec intérêts au taux conventionnel;

Qu'il résulte encore des articles D. 311-11 et D. 311-12 du Code de la consommation que le prêteur qui exige le remboursement immédiat du capital restant dû, en application de l'article L. 311-30 du même Code, ne peut réclamer qu'une indemnité de 8 % calculée sur le seul capital restant dû à la date de la défaillance;

Que compte tenu du préjudice réellement subi par la société de crédit et de l'avantage tiré par cette partie du taux d'intérêt élevé appliqué ainsi que de l'exécution partielle de l'engagement par la débitrice, la clause pénale revêt en l'espèce un caractère manifestement excessif qui commande sa réduction d'office à la somme de un euro, conformément aux dispositions des articles 1152 et 1231 du Code civil;

- sur les cotisations d'assurances

Attendu que par arrêt publié en date du 18.01.2000, la 1re Chambre civile de la Cour de cassation a clairement énoncé le principe d'autonomie des contrats de crédit et d'assurance en retenant que la déchéance du terme du prêt garanti par un contrat d'assurance n'emportait pas du seul fait de l'exigibilité immédiate de la créance de remboursement, l'extinction du contrat d'assurance; que les cotisations restent dues et la garantie est maintenue jusqu'au remboursement définitif du prêt; qu'une stipulation expresse du contrat est nécessaire pour établir le lien de connexité entre les deux contrats;

Qu'en l'occurrence en l'absence de clause prévoyant expressément la cessation de la garantie d'assurance du seul fait de l'exigibilité immédiate du solde du prêt, le contrat d'assurance doit continuer de produire ses effets, l'assurée restant tenue du paiement des cotisations;

- sur le décompte des sommes dues par Mme Bret à la SA Médiatis

Attendu que le décompte du 24.14.2004 tel que versé au débats par la SA Médiatis n'est accompagné d'aucune pièce justificative permettant de le comprendre; qu'il est en tout état de cause impossible de retenir une base de 9 574,29 euro sur laquelle s'appliquerait les intérêts contractuels,

Attendu qu'au vu du document intitulé "reconstitution de compte permanent" produit par la SA Médiatis, il peut être reconstitué les décomptes suivants à la date de la déchéance du terme soit août 2004 et ce, en écartant la notion "d'indemnités" non explicitée:

1- le montant des "achats" dont on peut penser qu'il correspond au capital emprunté ressort à la somme totale de 8.101,64 euro

2- les intérêts et cotisations d'assurances représentent la somme de 2 624,14 euro

3- les versements effectués par Mme Bret ont atteint la somme de 4 013,59 euro mais les impayés ont représenté la somme de 1 339,63 euro soit un montant de règlements effectifs de 2 673,96 euro ;

Qu'en conséquence en août 2004, après déduction des intérêts et cotisations d'assurance, le capital restant dû représente la somme de (8 101,64 euro + 2 624,14 euro = 10 725,78 euro) - 2 673,96 euro = 8 051,82 euro

Attendu que la créance de la SA Médiatis s'établit ainsi:

- capital restant dû en août 2004 : 8 051,82 euro

- indemnité de résiliation : 1 euro

- outre paiement des cotisations d'assurance à compter d'août 2004

et intérêts au taux contractuel appliqués à compter du 01.09.2004 sur la somme de 8.051,82 euro jusqu'au 24.11.2004, date à compter de laquelle s'appliqueront les intérêts de retard au taux contractuel;

- sur la demande de mesures de grâce présentées par Mme Bret

Attendu que Mme Bret. née en 1955, assurant la charge d'un fils âgé de 23 ans ne travaillant que de façon intermittente, indique avoir retrouvé un emploi lui procurant des ressources mensuelles de l'ordre de 950 euro; qu'elle propose un apurement de sa dette sur la base de 150 euro par mois en 24 mensualités, le solde étant versé à la dernière échéance; qu'elle demande en outre de dire que les paiements s'effectueront d'abord sur le capital, fussent-ils réduits au taux légal;

Attendu que compte tenu de la situation du créancier et de celle de Mme Bret susceptible d'évoluer favorablement si son fils, adulte de 23 ans, parvient à acquérir son autonomie financière; il est opportun d'accorder à Mme Bret les mesures de grâce sollicitées qui n'excluent pas qu'à la 24ème échéance elle puisse présenter une situation financière l'autorisant à solder sa dette; que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts au taux réduit à l'intérêt légal et les paiements s'imputeront par priorité sur le capital;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et après en avoir délibéré, Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau, Condamne Mme Bret à payer et porter à la SA Médiatis la somme de 8 052,82 euro outre les cotisations d'assurances dues jusqu'à apurement complet de la dette et les intérêts au taux contractuel appliqués à compter du 01.09.2004 sur la somme de 8 051,82 euro jusqu'au 24.11.2004 date à laquelle s'appliqueront les intérêts de retard au taux contractuel jusqu'à parfait paiement de la dette. Autorise Mme Bret à s'acquitter de sa dette moyennant le paiement de 23 mensualités de 150 euro qui s'imputeront par priorité sur les cotisations d'assurances et sur le capital outre une dernière mensualité soldant la dette. Dit que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts au taux réduit à l'intérêt légal. Dit que les mensualités seront payables au plus tard le 10 de chaque mois, sauf accord des parties sur un autre quantième, à compter du mois suivant la notification du présent arrêt. Dit que le défaut de paiement de deux mensualités au plus tard un mois après mise en demeure du créancier restée sans effet emportera la déchéance de Mme Bret du bénéfice des présentes dispositions de report ou de rééchelonnement de la dette et que le créancier pourra poursuivre le recouvrement de l'intégralité de sa créance. Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne Mme Bret aux entiers frais et dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle ou conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.