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Décisions

Cass. 1re civ., 17 juillet 1996, n° 94-13.296

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Société centrale de banque

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Aubert

Avocat général :

Mme Le Foyer de Costil

Avocats :

Me Hémery, SCP Le Bret, Laugier

Rennes, du 2 mars 1993

2 mars 1993

LA COUR : - Attendu que, par un acte sous-seing privé du 6 février 1984, M. Y et son épouse, aujourd'hui divorcée, Mme X, ont passé avec la Société centrale de banque une convention d'ouverture d'un compte joint ; que ce compte, constamment débiteur, a été clôturé le 18 avril 1988 ; que, le 19 septembre 1990, la Société centrale de banque a assigné M. Y et Mme X en paiement d'une somme de 391 472,52 francs, représentant le débit du compte et les intérêts ; que l'arrêt attaqué a accueilli cette demande, à l'exclusion des intérêts ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, formé par la Société centrale de banque, qui est préalable : - Attendu que la Société centrale de banque fait grief à l'arrêt d'avoir fait application de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978, alors que, en prenant comme date de référence, pour appliquer cette loi, les premiers mois de fonctionnement du compte, date restant étrangère à l'exercice de l'action en paiement du solde débiteur dégagé lors de la clôture et le rendant exigible, la cour d'appel aurait violé les articles 3, alinéa 2, de cette loi, 1er du décret n° 88-293 du 25 mars 1988, et 1134 du Code civil ;

Mais attendu que, lorsqu'un établissement de crédit consent une ouverture de crédit indéterminée à l'un de ses clients, le montant du crédit qu'il convient d'apprécier au regard du plafond fixé réglementairement en exécution de l'article L. 311-3.2 du Code de la consommation est celui du découvert atteint à l'issue des trois premiers mois d'utilisation de la faculté ainsi ouverte au client ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel, ayant constaté que les avances consenties à M. Y et à Mme X en 1984 et 1985 étaient demeurées dans la limite du plafond réglementaire, énonce qu'il n'importe que le montant du découvert ait, à la date de clôture du compte joint, excédé le maximum réglementaire, dès lors que depuis l'ouverture et pendant une durée de trois mois au moins, le découvert a persisté pour un montant inférieur ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, formé par Mme X : - Vu l'article 27 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 (devenu l'article L. 311-37 du Code de la consommation) tel qu'il a été interprété par l'article 2-XII de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 et par les articles 19-IX et 19-X de la loi n° 89-1010 du 31 décembre 1989 ; - Attendu qu'aux termes de ce texte, les actions doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion, y compris lorsqu'elles sont nées de contrats conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 1989 ;

Attendu que, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée par Mme X de la forclusion édictée par le texte susvisé, la cour d'appel énonce que ce délai n'a pu courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de cette disposition législative modifiée ; qu'en fixant ainsi le point de départ du délai de forclusion à une date sans relation avec l'événement ayant donné naissance à l'action, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 1993, entre les parties, par la Cour d'appel de Rennes ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Dit que l'action en paiement de la Société centrale de banque est atteinte par la forclusion.