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Décisions

Cass. 1re civ., 18 février 1997, n° 94-18.017

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Pérétie-Fauriaux (Epoux)

Défendeur :

BNP (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Bouscharain

Avocat général :

M. Sainte-Rose

Avocats :

MM. Bertrand, Vincent

Versailles, du 20 mai 1994

20 mai 1994

LA COUR : - Attendu que, par acte du 12 juin 1986, la Banque nationale de Paris a consenti aux époux Pérétie-Fauriaux un prêt remboursable par prélèvements mensuels sur le compte joint par elle tenu au nom de ces derniers ; que, par acte du 30 juin 1989, la même banque a mis à la disposition des mêmes emprunteurs une somme d'argent remboursable par prélèvements mensuels sur le compte par elle tenu au nom de M. Pérétie ;

Que chacun des deux comptes ayant durablement présenté un solde débiteur, la banque a, au mois de mai 1991, cessé d'opérer les prélèvements et, par actes des 9 et 11 décembre 1991, assigné les époux Pérétie-Fauriaux en paiement des sommes restant dues, en capital et intérêts, au titre de chacun de ces prêts ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et le deuxième moyen qui sont identiques : - Attendu que Mme Pérétie fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la banque diverses sommes d'argent au titre de ces deux prêts, alors, selon le moyen, que l'article L. 311-37 du Code de la consommation a pour but la protection des consommateurs ; qu'en l'état de prélèvements effectués fictivement, deux années et demie durant, sur un compte perpétuellement débiteur, la cour d'appel qui, pour estimer que ces prélèvements avaient valablement opéré paiement et pour déclarer recevable l'action du prêteur, a retenu l'existence d'une convention tacite de découvert dont ni le terme ni le montant ne pouvaient être connus, a ainsi concédé à la banque la maîtrise arbitraire du délai de forclusion, ce en quoi elle aurait violé le texte précité, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que les parties peuvent convenir du remboursement d'un crédit à la consommation par prélèvements sur un compte bancaire ou postal ; que ces prélèvements opèrent paiement lorsque le compte fonctionne à découvert conformément à une convention distincte, expresse ou tacite, entre le prêteur et l'emprunteur ; que l'arrêt qui a constaté que les comptes sur lesquels étaient opérés les prélèvements fonctionnaient habituellement à découvert, a pu déduire de cette circonstance l'existence d'une convention tacite de découvert ; qu'il a également relevé que les opérations portées au compte et transformées en simples articles de débit et de crédit pour aboutir à un solde unique, ont été réalisées avec l'accord de la banque et des titulaires des comptes ; que l'arrêt indique qu'aucune fraude n'a été alléguée ; que par ces constatations et énonciations, d'où il résultait qu'il était loisible à chaque partie de mettre fin à cette convention, en sorte que n'était pas conférée à la banque la maîtrise arbitraire du délai de forclusion, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur la seconde branche du premier moyen : (sans intérêt) ;

Mais, sur le troisième moyen : - Vu l'article L. 311-33 du Code de la consommation ; - Attendu que, selon ce texte, le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre satisfaisant aux prescriptions des articles L. 311-8 et L. 311-9 dudit Code est déchu du droit aux intérêts, les sommes perçues à ce titre, augmentées des intérêts au taux légal à compter de leur versement, étant restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû ; que cette disposition d'ordre public doit recevoir application même dans le cas où un co-emprunteur a régulièrement payé les intérêts convenus ;

Attendu que pour refuser à Mme Pérétie, dont il avait constaté qu'elle n'avait pas signé l'acte de prêt du 12 juin 1986, la restitution des intérêts perçus par le prêteur au titre de ce prêt, l'arrêt, qui a relevé que les remboursements avaient été opérés par prélèvements sur le compte joint des époux Pérétie en exécution d'un contrat valablement conclu avec le seul M. Pérétie, a retenu que la " spécificité des comptes joints " faisait obstacle à la restitution demandée ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a refusé d'accueillir la demande en restitution d'intérêts présentée par Mme Pérétie, l'arrêt rendu le 20 mai 1994, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles, autrement composée.