Cass. 1re civ., 6 février 1996, n° 94-13.360
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Jacky
Défendeur :
Vinsot
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Savatier
Avocat général :
M. Gaunet
Avocat :
M. Vincent
LA COUR : - Attendu que M. Vinsot a souscrit, le 18 juillet 1992, un contrat de courtage matrimonial auprès d'une agence exploitée par Mme Jacky moyennant versement de la somme de 6 900 francs, outre celle de 1 500 francs pour frais de dossier ; que le contrat était assorti d'une offre de crédit d'un montant de 7 400 francs, remboursable en 12 mensualités de 691,40 francs, consentie par l'agence le même jour ; que, le 25 juillet 1992, celle-ci a fait signer à M. Vinsot deux lettres de change de 4 200 francs, dont l'une a été remise à l'encaissement le 29 juillet 1992 ;
Sur le premier moyen, pris en ses sept branches : - Attendu que Mme Jacky reproche au jugement attaqué (Tribunal d'instance de Strasbourg, 24 janvier 1994) d'avoir prononcé la nullité des contrats conclus le 18 juillet 1992, alors, selon le moyen, qu'en premier lieu le tribunal a violé l'article 1341 du Code civil en estimant qu'il n'était pas établi qu'un double de l'offre préalable de crédit eût été remis à l'emprunteur, sans tenir compte des termes du contrat signé par l'emprunteur ; alors qu'en deuxième lieu le tribunal a violé l'article 5 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 en relevant que l'offre de crédit ne précisait pas les modalités concrètes de paiement, tout en constatant qu'elle prévoyait le remboursement d'un crédit de 7 400 francs en douze échéances de 691,40 francs ; alors qu'en troisième lieu la présentation d'une offre de crédit non conforme aux exigences est sanctionnée par la perte du droit aux intérêts, de sorte qu'en prononçant la nullité le tribunal a violé les articles 5 et 23 de la loi précitée ; alors qu'en quatrième lieu le tribunal a violé l'article 6 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 en retenant que les modalités concrètes de paiement n'étaient pas précisées dans le contrat de courtage matrimonial bien que celui-ci précisât le montant des frais de dossier, du droit d'adhésion et renvoyait à l'offre préalable de crédit ; alors qu'en cinquième lieu le prêteur peut, dès l'acceptation de l'offre préalable de prêt, recevoir des paiements ou dépôts, de sorte que le tribunal, qui a jugé illicite la remise en garantie d'un titre de paiement 7 jours après la signature et l'acceptation de l'offre de prêt, a violé l'article 11 de la loi du 10 janvier 1978 ; alors qu'en sixième lieu, après l'expiration du délai de rétractation, lequel n'est pas soumis aux dispositions régissant les délais de procédure, le professionnel, partie à un contrat de courtage matrimonial financé au moyen d'un prêt, peut recevoir des paiements ou dépôts ; qu'en jugeant illicite le fait pour l'agence d'avoir reçu un moyen de paiement en garantie à la suite d'un contrat de courtage et d'une offre de prêt acceptée le même jour, le tribunal a violé les articles 6 de la loi du 23 juin 1989, 7, 11 et 15, de la loi du 10 janvier 1978 ; alors qu'en dernier lieu, en sanctionnant par la nullité des contrats le fait d'avoir fait signer des lettres de change, le tribunal a violé les articles 1108 du Code civil, 5 et 23 de la loi du 10 janvier 1978, 6 de la loi du 23 juin 1989 ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 6, II, de la loi du 23 juin 1989, qu'il ne peut être reçu de paiement ou de dépôt sous quelque forme que ce soit avant l'expiration du délai de 7 jours, à compter de la signature du contrat de courtage matrimonial, dans lequel le cocontractant du professionnel peut rétracter son accord ; qu'en l'espèce le tribunal a constaté que l'agence s'était fait remettre par M. Vinsot deux lettres de change le 25 juillet 1992, alors que le contrat avait été signé le 18 juillet 1992 ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a retenu que cette remise, intervenue dans le délai de 7 jours, le jour de la signature de l'acte n'entrant pas dans la computation de ce délai, contrevenait aux dispositions d'ordre public du texte précité ; que, par ce seul motif, le jugement attaqué, qui a prononcé la résolution du contrat principal et, en conséquence, celle du contrat de crédit conclu pour le financer, est légalement justifié, l'inexactitude de la terminologie employée, dénoncée par la dernière branche du moyen, étant sans conséquence ; que, dès lors, les cinq premières branches du moyen s'attaquent à des motifs surabondants, que la sixième n'est pas fondée et que la dernière est sans portée ; qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second moyen : (sans intérêt) ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.