Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 2 octobre 2002, n° 00-10.664

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Crédit Lyonnais (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Charruault

Avocat général :

Mme Petit

Avocats :

SCP Vier, Barthélemy

Bordeaux, du 11 janv. 1999

11 janvier 1999

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Vu l'article L. 311-37, alinéa 1er, du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 11 décembre 2001 ; - Attendu qu'il résulte de ce texte que le point de départ du délai biennal de forclusion opposable à l'emprunteur qui conteste la régularité de l'offre préalable, par voie d'action ou d'exception, est la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé ;

Attendu que, suivant une offre préalable acceptée le 14 décembre 1990, le Crédit Lyonnais a consenti à M. X une ouverture permanente de crédit d'un montant maximum de 50 000 francs, élevé à 80 000 francs par avenant du 13 mai 1993, ouvrant droit à la perception d'intérêts au taux effectif global de 16,15 % sur les sommes réellement empruntées ; qu'en novembre 1994, M. X a interrompu le remboursement de celles-ci ;que, le 6 mars 1996, le Crédit Lyonnais a assigné M. X en paiement desdites sommes ; que, par jugement du 12 avril 1996, le tribunal a ordonné la réouverture des débats afin de recueillir les observations des parties sur le moyen soulevé d'office tiré de l'inobservation de l'article L. 311-10 du Code de la consommation et du décret n° 78-509 du 24 mars 1978 et sur les conséquences susceptibles d'en découler notamment en application de l'article L. 311-33 du Code de la consommation ;

Attendu que pour confirmer le jugement qui, après avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion opposée par le Crédit Lyonnais au relevé d'office de ce moyen, avait, sur le fondement de celui-ci, constaté la non-conformité de l'offre préalable de crédit et prononcé la déchéance du Crédit Lyonnais du droit aux intérêts, l'arrêt attaqué retient qu'il se déduit des énonciations de l'article L. 311-33 du Code de la consommation, texte d'ordre public, que la sanction qu'il édicte s'applique à l'instant même où le contrat a été formé dès lors que l'offre préalable n'est pas rédigée selon les conditions de forme posées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 du Code de la consommation, que, dès cet instant, et sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur le point de savoir si le prêteur a commis une fraude quelconque, la stipulation d'intérêts convenue est réputée non écrite, que le caractère d'ordre public des conditions formelles dont dépend la validité de la stipulation contractuelle d'intérêts fait au juge saisi le devoir de vérifier, au besoin d'office, la preuve de l'existence de l'obligation de l'emprunteur au paiement des intérêts du crédit, donc de vérifier la conformité de l'offre préalable écrite aux conditions légales et, en cas d'irrégularité constatée, de refuser le bénéfice de la stipulation d'intérêts en relevant que le vice affectant la forme du contrat a déchu le prêteur du droit aux intérêts, que, dès lors, la vérification de la preuve de l'existence de ce droit, s'inscrivant dans le cadre légal de la protection d'ordre public du consommateur de crédit, ne saurait être affectée par le délai biennal de forclusion fixé par l'article L. 311-37 du Code de la consommation, puisqu'un vice de forme affectant l'instrumentum du contrat de crédit à la consommation et privant la stipulation d'intérêts de toute valeur contractuelle ainsi que la déchéance de plein droit qui anéantit cette dernière ne peuvent s'entendre comme des événements donnant naissance à une action au sens de ce texte, qu'en conséquence l'examen de la régularité formelle de l'offre préalable de crédit ne saurait se voir imposer pour être recevable d'être opéré en application dudit article dans les deux ans qui suivent la date à laquelle le contrat a été formé et qu'il s'en déduit que la date de l'acceptation de l'offre de crédit, soit la 14 décembre 1990, est sans incidence sur la recevabilité du moyen soulevé d'office par le juge et portant sur la preuve de l'obligation de l'emprunteur de payer les intérêts du crédit réclamés par la banque dans le cadre de son action en paiement, que ladite offre ne rappelle pas les dispositions des articles L. 311-15 à L. 311-17, L. 311-32 et L. 311-37 du Code de la consommation, de sorte qu'en application de l'article L. 311-33 du même Code la déchéance de plein droit de la stipulation d'intérêts est acquise ;

Attendu qu'en fondant ainsi sa décision sur l'irrégularité de l'offre préalable de crédit litigieuse alors qu'à la date du 12 avril 1996, à laquelle le premier juge avait relevé d'office ce moyen, le contrat de crédit était définitivement formé depuis plus de deux ans, de sorte que le délai de forclusion était expiré, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse mais seulement en sa disposition constatant le non-conformité de l'offre préalable de crédit et prononçant la déchéance du Crédit Lyonnais du droit aux intérêts, l'arrêt rendu le 11 janvier 1999, entre les parties, par la Cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Toulouse.