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Décisions

Cass. crim., 12 janvier 2000, n° 99-81.057

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

M. Palisse

Avocat général :

M. Géronimi

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

Rennes, 3e ch., du 21 janv. 1999

21 janvier 1999

LA COUR : - Rejet du pourvoi formé par X Pierre, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes, 3e chambre, en date du 21 janvier 1999, qui, pour abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse d'une personne particulièrement vulnérable, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francs d'amende et a sursis à statuer sur les intérêts civils. - Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 313-4, 313-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit d'abus d'ignorance ou de faiblesse de personne vulnérable ;

" aux motifs que la vulnérabilité de René Raffin est avérée et ne pouvait être ignorée de Pierre X qui, en présence d'estimations contradictoires, n'a pas vérifié la justesse du prix fixé pour la vente du terrain, soit 185 000 francs ; que les circonstances de la vente et l'écart entre le prix et la valeur réelle du bien, soit entre 282 000 francs et 320 000 francs, finalement vendu à un tiers 322 000 francs, établissent que le prévenu a eu l'intention non seulement de réaliser une opération immobilière intéressante, mais aussi de profiter de la faiblesse de René Raffin, pour l'obliger à signer un compromis de vente à un prix sciemment minoré dans une forte proportion ; qu'il importe peu à cet égard que le contrat litigieux n'ait pas eu de suites et que sa validité ait été douteuse, sous le prétexte que le terrain litigieux appartenait à une succession non encore réglée, ces questions de droit civil étant indifférentes à la constitution du délit, alors que le compromis de vente ne pouvait être que définitif dans l'esprit de Pierre X au moment de sa conclusion ;

" alors que, d'une part, le délit d'abus de faiblesse n'est constitué que si l'abus gravement préjudiciable a été effectivement réalisé par l'intermédiaire de l'acte ou de l'abstention, faute de quoi il ne pourrait s'agir que d'une tentative d'abus de faiblesse, laquelle n'est pas punie par la loi ; qu'en l'état des constatations de l'arrêt, d'où il résulte que la promesse de vente litigieuse n'avait pas été suivie d'effet, sa validité étant douteuse, le bien cédé appartenant à une succession non encore réglée et qu'il avait été finalement vendu à un tiers à une valeur supérieure à sa valeur estimée, les éléments constitutifs de l'infraction poursuivie n'étant pas réunis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

" alors que, d'autre part, en se basant sur la valeur estimée du terrain pour en déduire que le prix proposé par l'acquéreur était intentionnellement minoré, tout en reprochant à ce dernier de n'avoir pas, en présence d'estimations contradictoires, vérifié la justesse de son prix, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, privant sa décision de base légale " ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse d'une personne particulièrement vulnérable, la cour d'appel relève que, médecin traitant de René Raffin, Pierre X savait que l'état général, physique et psychique, de son patient s'était dégradé, qu'il a obtenu de lui la signature d'un acte de vente, sous conditions suspensives, d'un terrain et que le prix prévu dans cet acte était anormalement bas ; qu'elle ajoute que Pierre X, qui s'était abstenu de rechercher si le prix fixé par lui était justifié, avait l'intention de réaliser une opération immobilière intéressante à son profit et qu'il n'importe que l'acte, qui lésait gravement les intérêts de René Raffin, ultérieurement placé sous tutelle, n'ait pas été réitéré par son représentant légal ;

Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel, qui a souverainement constaté l'existence de l'intention frauduleuse résultant de l'absence de toute vérification du prix fixé, a justifié sa décision ; qu'en effet, si l'article 313-4 du Code pénal prévoit que l'acte obtenu de la victime doit être de nature à lui causer un grave préjudice, il n'exige pas que cet acte soit valable, ni que le dommage se soit réalisé ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs, Rejette le pourvoi.