Ministre de l’Économie, 22 juin 2007, n° ECEC0759256S
MINISTRE DE L’ÉCONOMIE
Lettre
PARTIES
Demandeur :
MINISTRE DE L'ECONOMIE
Défendeur :
Conseils de la société Intesa SanPaolo SpA
MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI
Maîtres,
Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 1er juin 2007, vous avez notifié le projet d'acquisition par la société de droit italien Intesa SanPaolo SpA (ci-après " Intesa ") du contrôle conjoint de la société Pirelli&C. Real Estate Facility Management SpA (ci-après " Pirelli REFM "), avec la société Pirelli&C. Real Estate SpA (ci-après " Pirelli RE "), qui en détenait jusqu'alors le contrôle exclusif et qui est elle-même détenue par le groupe Pirelli. Cette opération a été formalisée par une lettre d'intention signée le 25 mai 2007. Il ressort de l'instruction du dossier que les éléments transmis constituent un projet suffisamment abouti au sens de l'article L. 430-3 du Code de commerce. Par ailleurs, cette opération a fait l'objet d'une notification auprès d'autres autorités de concurrence européennes, en Italie, en Irlande, en Slovénie, en Slovaquie et en Hongrie.
Conformément à la communication de la Commission européenne sur la notion d'entreprises concernées et notamment son paragraphe 23, " lorsqu'une société préexistante se trouve sous le contrôle exclusif d'une société et que un ou plusieurs nouveaux actionnaires en prennent le contrôle en commun alors que la société mère initiale reste, les entreprises concernées sont chacune des sociétés exerçant le contrôle en commun (y compris donc l'actionnaire initial). En ce cas, la société cible n'est pas une entreprise concernée et son chiffre d'affaires fait partie de celui de la société mère initiale ".
Les entreprises concernées sont donc au cas d'espèce :
- le groupe Pirelli, qui est spécialisé dans quatre domaines d'activités : les pneumatiques, l'immobilier, les solutions d'accès large bande et l'environnement. En 2006, le groupe Pirelli a réalisé un chiffre d'affaires mondial hors taxe de 4,841 milliards d'euro, dont [> 50] millions réalisés en France.
- Intesa, qui est active dans le secteur de la banque et de la finance aux entreprises et aux particuliers, ainsi que dans le domaine de l'immobilier. En 2006, Intesa a réalisé un chiffre d'affaires mondial hors taxe de [...] milliards d'euro dont [> 50] millions réalisés en France.
Pour les besoins de l'opération, un véhicule d'acquisition ad hoc a été créé, dont Pirelli RE détiendra la majorité du capital et des droits de vote. Bien que ne détenant qu'une participation minoritaire, Intesa disposera de droits spécifiques lui permettant d'exercer sur l'entité cible une influence déterminante. Les règles de gouvernance, décrites dans la lettre d'intention du 25 mai 2007, prévoient notamment que l'adoption des décisions stratégiques afférentes à Pirelli REFM devront être approuvées par les deux parties (1). Par ailleurs, Intesa disposera d'un droit de véto sur les décisions relatives à la nomination et à la révocation des administrateurs.
En ce qu'elle traduit le passage d'un contrôle exclusif à un contrôle conjoint, l'opération constitue une concentration économique au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises concernées, elle n'est pas de dimension communautaire mais reste soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce, relatifs à la concentration économique.
En Italie, la cible, Pirelli REFM est exclusivement active sur le marché de la gestion d'immeubles, que la Commission a déjà eu l'occasion de considérer comme dimension nationale (2). En l'espèce, le marché concerné serait donc circonscrit au territoire italien.
En revanche, dans la mesure où le groupe Pirelli et Intesa sont simultanément présents en France sur d'autres marchés, il appartient au ministre, conformément à sa pratique décisionnelle (3), d'examiner le risque théorique de coordination des comportements des sociétés mères sur les marchés voisins (amont, aval, connexes) sur lesquels ces dernières sont simultanément actives, alors que l'entreprise commune en est absente. Or le groupe Pirelli n'est actif en France que dans le secteur des pneumatiques alors qu'Intesa n'y fournit que des services bancaires. Aussi, un tel risque peut-il être écarté au cas d'espèce.
En conclusion, il ressort de l'instruction du dossier que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.
Je vous prie d'agréer, Maîtres, l'expression de ma considération distinguée.
NOTA : Des informations relatives au secret des affaires ont été occultées à la demande des parties notifiantes. Ces informations relèvent du " secret des affaires ", en application de l'article R. 430-7 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.
Notes
1 Point 23 de la Communication de la Commission concernant la notion de concentration au sens du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises, Journal officiel n° C 066 du 02/03/1998 p. 0005 - 0013.
2 Voir notamment les décisions de la Commission européenne M.3653-Siemens/VA Tech du 13 juillet 2005, M.3172-Ferrovial/Amey du 27 mai 2003,
3 Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 10 août 2006, aux conseils de la Caisse Nationale des Caisses d'Épargne et de la Banque Fédérale des Banques Populaires, relative à une concentration dans le secteur des services bancaires (C2006-45), BOCCRF N° 7 bis du 15 septembre 2006.