CA Versailles, 12e ch. sect. 1, 16 octobre 2007, n° 05-5484
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Avril
Défendeur :
Sacli (SAS), Renault (SAS), Réagroup (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mandel
Conseillers :
Mmes Valantin, Lonne
Avoués :
SCP Lefevre Tardy & Hongre Boyeldieu, SCP Jullien Lecharny Rol, Fertier, SCP Debray-Chemin
Avocats :
Mes Sanchez, Guillin, Bricogne
Monsieur Joseph Avril exerçant sous l'enseigne "Garage Avril" a conclu le 1er avril 1986 avec la société Sacli, concessionnaire Renault, un contrat d'agent.
Par lettre en date du 26 septembre 2002, la société Sacli a résilié le contrat d'agent à effet du 30 septembre 2003.
Par acte du 21 février 2003, "le Garage Avril" a fait assigner devant le Tribunal de commerce de Nanterre la société Sacli et la société "Renault France Automobiles" SA au capital de 515 557 454,34 euro dont le siège social est situé 13-15 quai Alphonse Le Gallo Boulogne Billancourt, immatriculée au registre du commerce sous le n° 780 129 987, en paiement de la somme de 431 569,46 euro à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat et concurrence déloyale. Il sollicitait par ailleurs leur condamnation solidaire, sur le fondement des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail, à lui payer à titre d'indemnités de rupture la somme de 200 000 euro sauf à parfaire ainsi que diverses mesures de publication et le paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du NCPC.
La société Sacli concluait au rejet des demandes et à titre reconventionnel réclamait la condamnation de Garage Avril à lui payer la somme de 12 048 euro à titre de dommages et intérêts pour avoir violé les obligations auxquelles était tenu le Garage Avril aux termes de son contrat d'agent service, la somme de 3 396,96 euro TTC au titre de factures impayées avec intérêts au taux légal à compter du 19 février 2004, la somme de 10 000 euro pour procédure abusive et une indemnité au titre de l'article 700 du NCPC.
La société Renault France Automobiles concluait à l'irrecevabilité des demandes au motif qu'elle était étrangère au litige, le constructeur auquel était lié la société Sacli étant la société Renault SAS.
Par jugement du 30 mars 2005, mentionnant comme défendeurs la société Sacli et "SAS Renault France Automobiles 13/15 quai Le Gallo Boulogne-Billancourt et encore 117/119 avenue Victor Hugo à Boulogne", le Tribunal de commerce de Nanterre a mis hors de cause Renault France Automobiles en relevant que cette société était étrangère au contrat qui liait le Garage Avril à la société Sacli, et qu'elle était distincte du constructeur la société Renault. Le tribunal estimant que Sacli avait fait usage à bon droit de la possibilité de résiliation ordinaire que lui offrait l'article 8.1 de l'avenant au contrat, que la rupture était régulière et que le Garage Avril ne possédait pas le statut d'agent commercial, a dit que la rupture du 26 septembre 2002 n'était pas abusive et a débouté en conséquence le Garage Avril de ses demandes de ce chef. Le tribunal a considéré qu'il n'était justifié d'aucun acte de concurrence déloyale de la part de Sacli et que cette dernière ne rapportait pas la preuve que le Garage Avril aurait exercé une activité parallèle illicite de vente de véhicules neufs ou aurait détourné la clientèle de Sacli. En revanche, le tribunal a condamné le Garage Avril à payer à la société Sacli la somme de 3 896,96 euro TTC majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2004 au titre de factures impayées, outre une indemnité au titre de l'article 700 du NCPC à chacun des défendeurs.
Le 8 juillet 2005, Monsieur Avril a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de la société Sacli et de la société Renault SAS ayant son siège social 13/15 quai Le Gallo à Boulogne-Billancourt.
Le conseil de la société Renault France Automobiles ayant fait savoir à l'avoué de Monsieur Avril que la nouvelle dénomination sociale de cette société était devenue Réagroup et que la seule société qui était partie au litige en première instance était la société Renault France Automobiles, Monsieur Avril a déposé le 14 février 2006 une seconde déclaration d'appel à l'encontre de la société Réagroup, suivie le 15 mars 2006 d'une assignation avec notification de conclusions en application de l'article 908 du NCPC.
Toutefois, Monsieur Avril a fait délivrer le 23 février 2006 à la société Renault SAS une assignation sur le fondement de l'article 908 du NCPC, cette société n'ayant pas comparu spontanément.
Les 15 mars et 25 avril 2006, la société Renault SAS a soulevé devant le conseiller de la mise en état, un incident tendant à voir constater qu'elle n'était pas partie en première instance, que la déclaration d'appel et l'assignation en appel de la société Renault SAS étaient nulles, subsidiairement de dire irrecevable l'action formée par Monsieur Avril à son encontre en cause d'appel et la mettre hors de cause. Elle formait par ailleurs une demande au titre de l'article 700 du NCPC.
Par ordonnance en date du 23 mai 2006 le conseiller de la mise en état a constaté que la société Renault SAS n'était pas partie en première instance devant le Tribunal de commerce de Nanterre, seule la société Renault France Automobiles ayant été assignée et il a en conséquence prononcé la nullité de la déclaration d'appel du 8 juillet 2005 et de l'assignation en appel délivrée le 28 février 2006 à l'encontre de la société Renault SAS par Monsieur Avril et mis hors de cause la société Renault SAS. Il a débouté la société Réagroup anciennement Renault France Automobiles de sa demande de mise hors de cause au motif que le conseiller de la mise en état n'ayant pas compétence pour statuer sur une fin de non-recevoir, il ne pouvait statuer sur la recevabilité de la demande de Monsieur Avril contre la société Renault France Automobiles pour défaut allégué d'intérêt à agir.
Le 7 juin 2006, Monsieur Avril a présenté une requête afin de déféré devant la cour.
Par arrêt en date du 25 janvier 2007 la cour de ce siège a infirmé l'ordonnance, dit que le conseiller de la mise en état était incompétent pour statuer sur l'exception de procédure soulevée par la SAS Renault et renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état du 1er février 2007 pour fixation de l'ordonnance de clôture et des plaidoiries,
Dans le dernier état de ses écritures (conclusions du 31 mai 2007), Monsieur Joseph Avril demande à la cour de débouter la SAS Renault de son moyen de nullité de la déclaration d'appel du 8 juillet 2005 et de l'assignation sur appel en date du 23 février 2006 et de la débouter également de son moyen d'irrecevabilité de l'action et des écritures de Monsieur Avril. Il fait valoir qu'il a toujours eu l'intention d'assigner la SAS Renault, constructeur, et que l'identité de la société assignée ne pouvait prêter à confusion dès lors que l'exploit introductif mentionnait expressément le lieu du siège social et le numéro d'immatriculation au RCS de la SAS Renault.
Sur le fond, il poursuit l'infirmation du jugement. Faisant valoir que la rupture du 26 septembre 2002 s'est traduite par une prorogation dans les faits du contrat entre les parties, que les objectifs ont été mis en place pour l'année 2002, que la lettre de rupture du contrat ne motive pas les causes de la rupture tant au regard du droit communautaire, qu'au regard des conditions contractuelles prévoyant un intérêt réciproque des parties, que Sacli a ouvert un atelier Renault à 500 mètres de son garage dans le but d'exercer une activité concurrente en violation de son engagement de loyauté, Monsieur Avril sollicite la condamnation solidaire de Sacli et Renault France Automobiles à lui payer la somme de 431 569,46 euro à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et la somme de 200 000 euro à titre d'indemnités de rupture sur le fondement des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail. Il réclame par ailleurs des mesures de publication, une indemnité au titre de l'article 700 du NCPC et la distraction des dépens au profit de Maître Sanchez (sic).
Réagroup venant aux droits de Renault France Automobiles demande à la cour de déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de Monsieur Avril, de confirmer le jugement et de lui allouer une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du NCPC.
Elle expose que Renault France Automobiles n'est pas liée par un contrat de concession avec la société Sacli, elle-même liée par un contrat d'agent service au Garage Avril, que les sociétés Renault France Automobiles et Renault SAS sont deux sociétés distinctes et que Monsieur Avril n'a aucun intérêt à agir contre Renault France Automobiles avec laquelle il n'a aucun lien.
SAS Renault dans le dernier état de ses écritures (conclusions du 27 avril 2007) demande à la cour de dire et juger nulles la déclaration d'appel du 8 juillet 2005, l'assignation du 23 février 2006 et irrecevables les conclusions de Monsieur Avril à son encontre au motif que Monsieur Avril ne l'a pas assignée devant le tribunal de commerce et que contrairement à ce que celui-ci soutient, elle ne s'est jamais appelée Renault France Automobiles. Subsidiairement, elle demande à la cour de constater que Monsieur Avril ne forme aucune demande à son encontre et qu'il convient de la mettre hors de cause. Plus subsidiairement, elle conclut au rejet des demandes après avoir exposé que la rupture du contrat, prise dans le cadre de la restructuration du réseau de distribution Renault, n'est pas abusive, Monsieur Avril ayant notamment bénéficié d'un préavis double. Elle ajoute que Monsieur Avril qui exerce ses activités comme commerçant indépendant, ne peut prétendre au statut d'agent commercial, ce d'autant plus que la vente de véhicules neufs était pour lui purement accessoire. Elle poursuit en exposant que les dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail sont inapplicables dès lors qu'elle n'a pas repris les activités de Monsieur Avril ; Infiniment subsidiairement, elle conclut à l'absence de tout préjudice pour l'appelant qui prenait sa retraite. A titre reconventionnel, SAS Renault sollicite la condamnation de Monsieur Avril à lui payer la somme de 20 000 euro pour procédure abusive et celle de 6 000 euro sur le fondement de l'article 700 du NCPC (demande non reprise dans le dispositif).
Sacli poursuit la confirmation du jugement et réclame par ailleurs la condamnation du Garage Avril au paiement d'une somme de 12 048 euro à titre de dommages et intérêts pour violation de ses obligations contractuelles, de celle de 10 000 euro pour procédure abusive outre une somme de 7 000 euro au titre de l'article 700 du NCPC.
Elle fait valoir qu'en résiliant le contrat, elle a fait une stricte application de l'article 9.6 du contrat dès lors qu'elle avait reçu notification de la résiliation de son propre contrat de concession le 19 septembre 2002. Elle ajoute qu'elle n'avait jamais eu l'intention de rompre ses relations commerciales avec Garage Avril mais que c'est celui-ci qui a pris l'initiative de les rompre en refusant de signer l'avenant au contrat pour l'année 2003 et de se conformer aux nouveaux critères. Elle conteste s'être livrée à des actes de concurrence déloyale et soutient que Garage Avril ne souhaitait pas représenter la marque Renault au sein de sa nouvelle implantation à Lagny-le-Sec, qu'il ne remplissait pas les objectifs qui lui étaient fixés et qu'il s'est livré à des actes de concurrence déloyale à l'égard de Sacli en exerçant une activité de vente de véhicules neufs de toutes marques en violation de son contrat.
Sur ce, LA COUR,
I. Sur la procédure à l'égard de Renault SAS:
Considérant que devant la cour, Monsieur Avril a interjeté appel du jugement rendu le 30 mars 2005, à l'encontre de la société Sacli et de la société SAS Renault, ayant son siège social 13/15 Quai Alphonse le Gallo à Boulogne-Billancourt
Considérant que le conseil de la société Renault France Automobiles (RFA) a fait savoir à l'avoué de Monsieur Avril que la nouvelle dénomination sociale de la société Renault France Automobiles était devenue Réagroup et que seule la société RFA, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 312 212 301 sise au 117/119 avenue Victor Hugo à Boulogne-Billancourt, était partie au litige en première instance;
Que Monsieur Avril a alors déposé le 14 février 2006 une seconde déclaration d'appel à l'encontre de la société Réagroup, laquelle a fait l'objet, le 15 mars 2006, d'une assignation avec notification de conclusions en application de l'article 908 du NCPC, assignation délivrée à personne à l'adresse du 117-119 avenue Victor Hugo à Boulogne-Billancourt;
Considérant que par ailleurs, Monsieur Avril a fait délivrer le 23 février 2006 à Renault SAS une assignation avec notification de conclusions sur le fondement de l'article 908 du NCPC;
Considérant que Monsieur Avril ne peut valablement soutenir que Renault SAS était bien la société partie en première instance et qu'il a entendu assigner cette société dont le numéro d'immatriculation et l'adresse étaient mentionnés sur l'assignation et non ceux de la société Renault France Automobiles devenue Réagroup;
Mais considérant que l'assignation délivrée le 21 février 2003 visait la société Renault France Automobiles ; que même si cette assignation indiquait comme siège social 13-15 quai Alphonse Le Gallo à Boulogne-Billancourt, adresse qui correspond au siège social de Renault SAS, et non à celui de Renault France Automobiles qui est 117-119 avenue Victor Hugo, Boulogne-Billancourt, il est constant que l'assignation a été délivrée à personne;
Que si Monsieur Avril a mentionné un numéro d'immatriculation qui correspondait à celui de Renault SAS, cette mention n'est pas requise par l'article 648 du NCPC et l'élément déterminant est l'indication de la dénomination sociale;
Considérant que contrairement à ce qu'il soutient, Renault France Automobiles aujourd'hui Réagroup n'est pas devenue SAS Renault; que les extraits Kbis communiqués établissent que Renault France Automobiles n'est pas un constructeur mais un concessionnaire alors que Renault SAS est le constructeur;
Considérant par ailleurs que devant le tribunal de commerce, Renault France Automobiles avait conclu à l'irrecevabilité des demandes formées à son encontre par Monsieur Avril et attiré son attention sur le fait qu'elle n'était pas le constructeur et qu'elle était sans lien avec la société Sacli et Monsieur Avril que ce dernier pleinement informé de ce que ses demandes étalent dirigées contre une mauvaise personne, avait donc la possibilité de régulariser la procédure en assignant en intervention forcée devant le tribunal Renault SAS ce qu'il s'est abstenu de faire;
Considérant que par voie de conséquence, la déclaration d'appel en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de Renault SAS, non partie en première instance, est nulle tout comme l'assignation délivrée le 23 février 2006 sur le fondement de l'article 908 du NCPC, Renault SAS n'ayant pas la qualité d'intimé;
Considérant qu'en toute hypothèse, il convient de relever que Monsieur Avril ne formule dans ses écritures d'appel, aucune demande à l'encontre de Renault SAS, toutes ses demandes tendant à obtenir la condamnation de la société Renault France Automobiles;
II Sur les demandes formées contre Renault France Automobiles devenue Réagroup :
Considérant que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont dit que Monsieur Avril n'avait aucun intérêt à agir à l'encontre de Renault France Automobiles dès lors que cette société est étrangère au contrat de concession conclu avec la société Sacli;
Qu'en effet le contrat d'agent de Monsieur Avril, dont il prétend qu'il a été rompu de façon abusive, a été conclu avec la société Avril, concessionnaire Renault, avec l'accord de la Régie Nationale des Usines Renault ; que la société Sacli était elle-même liée par un contrat de concession avec la Régie Nationale des Usines Renault, contrat visé dans le contrat d'agent;
Or considérant que la société Régie Nationale des Usines Renault immatriculée au RCS sous le n° 780 129 987 est devenue Renault SAS (même numéro d'immatriculation) suite à un changement de dénomination sociale ; que Renault France Automobiles immatriculée au RCS sous le n° 312212301 devenue Réagroup est donc sans lien de droit avec la société Sacli et est étrangère au contrat d'agent signé le 1er avril 1986 ; qu'elle doit donc être mise hors de cause;
III. Sur les demandes formées à l'encontre de la société Sacli:
A. Sur la dénonciation du contrat:
Considérant que Monsieur Avril fait grief à la société Sacli d'avoir dénoncé son contrat d'agent commercial en invoquant la nécessité de respecter le nouveau règlement n° 1400-2002 du 31 juillet 2002 alors que l'intérêt réciproque des parties ne justifiait pas de rompre le contrat et que le règlement prévoit une recherche d'adaptation des anciens contrats par des avenants ou une renégociation ; qu'il poursuit en soutenant que son contrat a été dénoncé dans le but de s'approprier la totalité de son fonds de commerce et de l'empêcher de présenter un nouveau successeur alors qu'il avait réalisé des investissements importants et envisager de prendre sa retraite au 30 septembre 2003, ce que la société Sacli savait parfaitement ; qu'enfin, il prétend que la société Sacli avait l'obligation de lui soumettre un nouveau contrat en application du nouveau règlement communautaire et de motiver cette rupture;
Qu'en dernière analyse, Monsieur Avril prétend que son contrat doit s'analyser comme un contrat d'agent commercial soumis à la loi de 1991 et qu'en toute hypothèse, s'il s'analyse comme un contrat d'agent, sa rupture est abusive;
Considérant que le contrat signé le 1er avril 1986 entre Sacli et GGE Avril puis en dernier lieu le 28 décembre 1992 entre la SARL ADT représentée par Monsieur Avril (à laquelle s'est manifestement substitué Monsieur Joseph Avril) et la société Sacli stipule en son article 1 :
"à titre principal, l'agent service est un commerçant indépendant qui agit en son nom propre et pour son compte afin d'assurer :
- la prestation de l'ensemble des services après-vente nécessaires à la garantie, à l'entretien et à la réparation des véhicules des marques distribuées par Renault, quel que soit le lieu d'achat du véhicule en question;
- la commercialisation des pièces de rechange et accessoires fournis et distribués par Renault achetés auprès de son concessionnaire;
- la réalisation des prestations de services liées à l'une des garanties offertes dans le réseau commercial du constructeur lors de la vente de véhicules d'occasion,
- le développement de l'image de marque du constructeur;
A titre accessoire, l'agent service est habilité en qualité soit d'indicateur, soit de mandataire du concessionnaire en vue de la vente de l'ensemble des véhicules neufs des marques distribuées par Renault;
b) si l'agent service intervient en qualité de mandataire accessoire, pour négocier à titre exclusif et pour le compte de son concessionnaire la vente de véhicules neufs des marques distribuées par Renault - ce qu'il ne pourra faire de façon active que dans la limite du territoire du concessionnaire, les parties conviennent conformément à l'article 15 de la loi n° 91-593 du 25 juin 1991 que les dispositions de ladite loi ne sont pas applicables à cette activité.
Si toutefois l'exécution du contrat faisait apparaître que l'activité de véhicules neufs est exercée, à titre principal ou déterminant, les dispositions de la loi du 25 juin 1991 seraient applicables à cette activité à l'exclusion de son activité de prestations de service, de revente de pièces de rechange et d'accessoires, de vente de véhicules d'occasion ou autres, dans le cadre de laquelle l'agent service agit toujours en son propre nom et pour son propre compte";
Considérant qu'en l'espèce Monsieur Avril sur qui pèse la charge de la preuve, ne justifie pas que son activité principale était la vente de véhicules neufs des marques distribuées par Renault; que les pièces communiquées par Sacli établissent qu'il a vendu 20 véhicules en 1998, 26 en 1999, 17 en 2000, 20 en 2001 et 4 en 2002 ; que s'il affirme réaliser 100 % de son chiffre d'affaires sous la marque Renault, il n'établit pas que la part de son activité de vente de véhicules neufs de marques Renault représentait 100 % de son chiffre d'affaires;
Que selon une attestation de son expert comptable pour les années 1999, 2000 et 2001, l'activité garage Atelier représentait 40 % du chiffre d'affaires TTC ; qu'un examen plus détaillé des bilans démontre ainsi, que pour l'exercice clos le 31 décembre 2000, le chiffre d'affaires réalisé s'est élevé avec la vente de marchandises (lubrifiants, pièces détachées, véhicules d'occasion, peinture, pneus, ingrédients) à 2 925 472 F, avec les prestations de services main-d'œuvre à 676 322 F, avec les remorquages à 250 000 F environ, les commissions sur les ventes de véhicules d'occasion à la somme de 155 602 F alors que les commissions sur les ventes de véhicules neufs n'ont été que de 27 567 F sur un chiffre d'affaire total de 4 221 129 F ; que la même constatation peut être faite pour l'exercice clos au 31 décembre 2001 : commissions sur vente de véhicules neufs de 4 250 euro sur un chiffre d'affaires total de 732 576 euro;
Que l'activité principale de Monsieur Avril était donc une activité de prestations de services après-vente, de vente de pièces détachées et de véhicules d'occasion et non celle de vente de véhicules neufs;
Qu'il fait lui-même valoir dans ses écritures (page 29) que l'achat d'un véhicule de démonstration pour chaque nouvelle gamme sortie constituait pour lui une exigence nouvelle, ce qui démontre à l'évidence que son activité principale n'était pas celle de vente de véhicules neufs mais d'après-vente comme le fait valoir Sacli;
Considérant en conséquence que l'activité d'agent commercial de Monsieur Avril n'étant pas exercée à titre principal, sa renonciation à se prévaloir du statut des agents commerciaux ne peut être remise en cause;
Considérant qu'il convient dès lors de rechercher si le contrat d'agent service a été résilié de manière abusive;
Considérant que l'article 9-6 du contrat signé par Monsieur Avril énonce que "les droits de l'agent service ne pouvant excéder ceux consentis au concessionnaire par le constructeur, le contrat agent service sera résilié de plein droit sans formalité préalable à la date de la cessation du contrat de concession, quelle qu'en soit la cause" ;
Or considérant que par lettre en date du 19 septembre 2002, Renault a notifié à Sacli que son contrat de concession serait résilié à effet du 30 septembre 2003, en raison de la nouvelle réglementation communautaire, qui l'obligeait de procéder à une nouvelle réorganisation commerciale et juridique pour pouvoir bénéficier du bénéfice de l'exemption ; que cette lettre précisait à Sacli qu'un nouveau contrat lui serait proposé au plus tard le 30 septembre 2003 suivant les règles de la distribution sélective qualitative et quantitative pour la vente de véhicules neufs et en ce qui concerne l'après-vente et les services accessoires, il était indiqué que le contrat suivrait les règles de la distribution sélective qualitative ; que par lettre du 24 septembre 2002, Sacli était par ailleurs avisée de ce qu'elle devait informer sans délai l'ensemble de ses agents et VAR par LRAR de la résiliation des contrats ;
Considérant que c'est dans ce contexte que, par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 septembre 2002, Sacli a notifié à son tour à Garage Avril que son contrat serait résilié à effet du 30 septembre 2003 tout en lui indiquant qu'elle souhaitait poursuivre avec Avril sa coopération et qu'elle lui présenterait au plus tard le 30 septembre 2003 un nouveau contrat; que cette lettre précisait expressément que cette résiliation était motivée par l'entrée en vigueur du nouveau règlement communautaire qui avait pour effet de priver à compter du 1er octobre 2003, les contrats de concession, de VAR et d'agents services actuellement en vigueur du bénéfice de l'exemption;
Considérant que cette résiliation motivée, prise conformément à l'article 9.6 du contrat d'agent service et notifiée avec un préavis d'un an est parfaitement régulière ; que Renault SAS n'étant pas partie à l'instance, Monsieur Avril ne saurait se prévaloir du fait que Renault SAS n'aurait pas été obligée de rompre le contrat avec Sacli pour se mettre en conformité avec le nouveau règlement; qu'il appartient à Sacli seule de discuter de l'opportunité de cette mesure mais que dès lors que le contrat de Sacli était résilié, celle-ci se trouvait contrainte de résilier le contrat d'agent service, peu important que cela corresponde ou non à l'intérêt réciproque des parties ; que par ailleurs, les accords de distribution devant être mis en conformité avec le nouveau règlement communautaire avant le 1er octobre 2003 pour bénéficier de l'exemption par catégorie (article 10 du règlement n° 1400-2002) Renault était tenue de résilier son contrat avec Sacli avant le 31 septembre 2002, sauf à être en infraction avec les articles 5-2 et 5-3 du règlement communautaire n° 1475-95 modifié et avec l'article 14.2 du contrat de concession, articles permettant au concédant de réduire le délai de préavis contractuel de résiliation du contrat de concession de deux ans à un an, s'il justifie de la nécessité de réorganiser l'ensemble ou une partie substantielle de son réseau, motif précisément invoqué par Renault dans la lettre de résiliation adressée le 19 septembre 2002 à Sacli;
Considérant que l'absence de toute intention de nuire de la part de Sacli et sa volonté de poursuivre ses relations commerciales avec Monsieur Avril se trouvent établies par la transmission, courant mars 2003, d'un nouveau contrat à Monsieur Avril "contrat d'agent service indicateur d'affaire avenant 2003" avec un guide d'évaluation récapitulant les critères qui seront appliqués pour être en conformité avec les normes définies par Renault; qu'alors que les quatre autres agents de Sacli ont signé ce nouveau contrat, Monsieur Avril a refusé dès le 27 mars 2003 de le signer et a persisté dans son refus aux motifs qu'il avait engagé une procédure devant le tribunal (assignation 27 février 2003), qu'il devait prendre sa retraite en 2003 et que "les nouveaux critères avaient pour conséquence de supprimer la patrimonialité de son affaire";
Que Monsieur Avril n'a pas exprimé sa volonté de conclure un nouveau contrat mais bien davantage a dès l'origine manifesté son refus de signer ce nouveau contrat alors que les critères exigés (détenir un véhicule de démonstration de moins de six mois, fournir des bilans et disposer de personnel après-vente, posséder un appareil de recharge de climatisation, un analyseur de gaz essence, un local de préparation de peinture) n'avaient pas pour conséquence la perte de patrimonialité de son entreprise, comme il le prétend, mais s'inscrivaient dans le cadre normal des activités d'un agent proposant des services après-vente et cherchant dans le même temps à développer une activité de vente de véhicules neufs, activité que Monsieur Avril exerçait auparavant et qu'il revendique ; que son contrat lui faisait déjà obligation de disposer en permanence des installations, du matériel et de l'outillage spécifique pour l'entretien et la réparation des véhicules des marques du constructeur et de les conserver en bon état de fonctionnement ; que la communication des bilans ne constituait pas une charge supplémentaire dès lors qu'il faisait déjà établir des bilans ;
Considérant que Monsieur Avril ne peut pas soutenir que Sacli a dénoncé le contrat alors qu'il avait décidé de faire valoir ses droits à la retraite dès lors qu'il ne démontre pas en avoir informé Sacli et se contente de produire une demande adressée à la caisse de retraite; que de plus, Sacli ne s'est jamais opposée à ce qu'il transmette son fonds de commerce et son panneau à un successeur, Monsieur Avril n'ayant au demeurant jamais présenté de candidat à sa succession;
Considérant que dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la résiliation du contrat n'était pas abusive;
Que par voie de conséquence, Monsieur Avril ne peut prétendre au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'il aurait subi du fait de cette rupture;
Qu'il ne peut pas davantage réclamer une indemnisation pour non-respect des dispositions de l'article L. 122-12 du Code du travail dès lors que Sacli n'est ni cessionnaire, ni successeur, ni la société absorbante de Garage Avril et qu'il n'est pas démontré qu'il y a eu transfert au bénéfice de Sacli des activités exercées par Monsieur Avril en tant qu'agent service Renault, avec la totalité ou partie des moyens de production ou d'exploitation; que bien davantage la demande formulée par Monsieur Avril de ce chef est en contradiction avec son argumentation selon laquelle Sacli a installé un nouvel agent à Lagny-le-Sec;
B. Sur la concurrence déloyale :
Considérant que Monsieur Avril fait valoir que Sacli a, dès avant l'envoi du courrier du 16 septembre 2002 résiliant le contrat d'agent, décidé de capter sa clientèle et de la détourner au profit d'un atelier Renault ouvert à quelques centaines de mètres de la nouvelle implantation projetée du Garage Avril à Lagny-le-Sec, et à quelques centaines de mètres de l'ancienne implantation au Plessis Belleville ; qu'il ajoute que sa clientèle a été démarchée par l'envoi d'une invitation pour des pré-contrôles gratuits;
Mais considérant que si dès 1999, Monsieur Avril a entrepris des travaux pour ouvrir un nouvel établissement à l'enseigne Renault à Lagny-le-Sec rue de la Liberté, il résulte d'une lettre en date du 14 janvier 2000 que Sacli lui a fait savoir qu'elle ne pouvait agréer cette nouvelle construction qui ne correspondait pas aux normes et tendances que le constructeur développait et lui a précisé en conclusion que les enseignes Renault ne pourraient être apposées que si, après l'achèvement des travaux, elle constatait que la nouvelle entreprise correspondait bien à une agence Renault selon les normes commerciales et après-vente;
Considérant que Monsieur Avril ne justifie pas avoir réagi à réception de cette lettre, ni avoir invité Sacli à visiter ses nouveaux locaux après leur achèvement ; que bien au contraire, les extraits de presse mis aux débats établissent que dès mai 2001 (extrait du magazine Val Magazine Crépy) s'est ouvert à l'adresse de la rue de la Liberté un établissement à l'enseigne A. Auto (Avril Automobile) dont le gérant n'est autre que son fils, ayant pour seule activité la vente de véhicules neufs et d'occasion de toutes marques ce qui démontre que Monsieur Avril dès avant la résiliation de son contrat d'agent en septembre 2002 avait pris la décision de ne pas s'installer à cette nouvelle adresse en tant qu'agent Renault et n'avait pas davantage l'intention de transmettre à son fils le bénéfice de son contrat d'agent; qu'en particulier aucune activité de services après-vente n'est exercée dans ces nouveaux locaux ; qu'en conséquence, Monsieur Avril ne peut valablement soutenir que la signature par Sacli le 27 septembre 2002 d'un contrat d'agent avec la société "la Carrosserie de la Folle emprise" est destinée à détourner sa clientèle et révèle la volonté de Sacli de le priver du bénéfice de la qualité d'agent dans le cadre de sa nouvelle implantation;
Considérant sur le grief tiré de l'envoi en mai 2001 d'une invitation à un pré-contrôle gratuit outre le fait qu'elle a été adressée par le constructeur et non par Sacli, Monsieur Avril ne rapporte pas la preuve qu'il disposait du matériel nécessaire pour effectuer cette opération;
Que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur Avril de sa demande en concurrence déloyale;
IV. Sur la demande pour actes de concurrence déloyale formée par Sacli à l'encontre de Monsieur Avril :
Considérant que Sacli fait grief à Monsieur Joseph Avril d'avoir exercé, dans sa nouvelle implantation, une activité de vente de véhicules neufs de toutes marques en violation de son contrat d'agent;
Considérant que si l'article 2.3 du contrat d'agent fait interdiction à Monsieur Joseph Avril de participer à la commercialisation de véhicules neufs d'une autre marque, il demeure que la vente de véhicules neufs de marques autres que Renault est le fait de A. Auto, 24 rue de la Liberté à Lagny-le-Sec, société distincte, dont le gérant est Stéphane Avril, fils de Monsieur Avril et qui n'a pas été appelée dans la cause;
Qu'aucune pièce du dossier ne démontre que Monsieur Joseph Avril, Garage Avril a vendu des véhicules neufs autres que ceux de la marque Renault;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Sacli de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour concurrence déloyale;
V. Sur les factures:
Considérant que Sacli sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné Monsieur Avril au paiement de la somme de 3 896,96 euro TTC majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2004 au titre de factures impayées;
Considérant que Monsieur Avril conteste devoir cette somme et expose qu'il s'agit non pas de factures liées à des commandes non payées par Garage Avril mais d'une annulation de remboursements garantis, payés par Sacli à Monsieur Avril et que Renault a refusé de payer à Sacli;
Mais considérant qu'il résulte de la lettre adressée le 19 février 2004 par Sacli à Monsieur Avril et des factures produites que Monsieur Avril était bien débiteur de la somme de 5 494,60 euro au titre de l'achat de diverses pièces et matériels, déduction faite des garanties pour un montant de 5 387,07 euro ; que de cette somme de 5 494,60 euro, Sacli a déduit une somme de 1 597,64 euro correspondant à un règlement effectué par Sacli pour lequel le chèque émis n'a jamais été encaissé par Monsieur Avril, soit un solde de 3 896,96 euro TTC ; qu'il sera fait droit au paiement des intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 1er juillet 2004, date à laquelle un décompte exact a été fourni à Monsieur Avril;
VI. Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive :
Considérant que Sacli ne justifiant d'aucun préjudice et ne démontrant pas que Monsieur Avril aurait violé ses obligations contractuelles ou engagé la présente procédure dans le but de nuire à ses intérêts, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive;
Considérant que Renault SAS qui ne justifie d'aucun préjudice, sera également déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive;
VII. Sur l'article 700 du NCPC :
Considérant que l'équité commande d'allouer à chacune des sociétés Renault une somme de I 000 euro pour les frais hors dépens par elles engagés en appel;
Considérant en revanche que Monsieur Avril et la société Sacli conserveront la charge des frais hors dépens par eux engagés en appel;
Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, - Annule la déclaration d'appel et l'assignation en appel à l'encontre de Renault SAS et dit irrecevables les conclusions prises par Monsieur Avril à son encontre. - Met hors de cause la société Réagroup anciennement dénommée Renault France Automobiles. - Pour le surplus, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions. - Dit toutefois que les intérêts au taux légal sur la somme de 3 896,96 euro (trois mille huit cent quatre-vingt seize euro et quatre-vingt seize centimes) ne seront dus qu'à compter du 1er juillet 2004, Condamne Monsieur Joseph Avril à payer à chacune des sociétés Réagroup et SAS Renault une somme de 1 000 euro (mille euro) au titre de l'article 700 du NCPC pour les frais hors dépens engagés en appel. - Condamne Monsieur Joseph Avril aux entiers dépens. - Admet la SCP Jullien Lecharny Rol Fertier, et la SCP Debray Chemin au bénéfice de l'article 699 du NCPC.