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Décisions

CA Pau, 2e ch. sect. 1, 28 août 2007, n° 06-00309

PAU

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Prim'Co (SAS)

Défendeur :

Madrouques (SCA), Cantegrit (SCEA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mettas

Conseiller :

M. Fouasse

Avoués :

SCP Marbot-Crepin, SCP Longin

Avocats :

Mes Lebault de la Morinière, Mesplede

Vice-président :

M. Darracq

TGI Mont-de-Marsan, du 24 nov. 2005

24 novembre 2005

Faits et procédure moyens et prétentions des parties

Le 3 mai 1999 la SAS Prim'Co a conclu avec le syndicat des producteurs de légumes de la Haute-Lande (organisation de producteurs de légumes) et les sociétés de conditionnement adhérentes du syndicat des producteurs de légumes de la Haute-Lande dont la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques, et la société coopérative agricole Maïsadour (organisation de producteurs de légumes) un contrat ayant pour objet de regrouper l'ensemble des fournisseurs de la SAS Prim'Co, numéro 1 de la commercialisation des carottes de frais auprès d'une clientèle de centrales, grossistes et industriels tant en France qu'à l'étranger autour d'une même convention afin d'asseoir (de conforter) sa présence sur le marché toute l'année.

La SAS Prim'Co rappelait commercialiser les carottes de frais venant d'Aquitaine depuis 1989; le but du contrat était de regrouper l'ensemble des sociétés fournisseurs de Prim'Co autour d'une même convention et l'objet du contrat était de définir l'ensemble des engagements entre les cosignataires afin d'organiser la mise en marché et la commercialisation de la carotte de frais (type nantaise) y compris avec destination industrie et spécifiait pour laquelle les organisations de producteurs sont reconnues.

Le contrat était conclu pour trois ans avec tacite reconduction sauf dénonciation par l'une des parties six mois avant la date d'échéance ; il concernait la totalité des carottes produites et conditionnées par les cosignataires, d'une qualité marchande et dans le respect des conditions déterminées plus avant.

Les conditionneurs et Maïsadour s'engageaient à effectuer en exclusivité toutes leurs livraisons à la SAS Prim'Co pour les produits concernés par la convention, devant donner un droit de préférence à la SAS Prim'Co dans le cas d'une diversification en légumes pour le marché du frais tandis que la SAS Prim'Co s'engageait à s'approvisionner en carottes d'Aquitaine exclusivement au travers du syndicat des producteurs de légumes de la Haute-Lande et de Maïsadour, tout achat ponctuel devant faire l'objet d'un accord préalable des OP signataires et qu'elle s'engageait, dans la mesure où elle chercherait à diversifier sa gamme de produits à donner la priorité au syndicat des producteurs de légumes de la Haute-Lande et à Maïsadour.

La SAS Prim'Co était rémunérée par une partie fixe par kilo et par une partie variable de la marge brute ; les actions de promotion spécifiques étaient financées à proportion de 50 % entre la SAS Prim'Co et les deux organisations de producteurs.

La convention, qui avait un caractère confidentiel, fixait les règles de mise en marché avec respect des règles de normalisation du comité de bassin du grand Sud-Ouest, des accords inter-professionnels et du cahier des charges de la SAS Prim'Co ; elle déterminait un planning de mise en marché (annuel, mensuel et hebdomadaire) et une réunion hebdomadaire pour faire le point de la semaine écoulée et prévoir la semaine à venir en quantités et prix objectifs.

La SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques ont dénoncé le contrat pour le 31 décembre 2001 en invoquant leur retrait du syndicat des producteurs de légumes de la Haute-Lande.

Après une expertise ordonnée en référé à la requête de la SAS Prim'Co pour que soit déterminé le préjudice résultant pour elle de la rupture anticipée de la convention par la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques, la SAS Prim'Co a assigné devant le Tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan ces sociétés pour faire évaluer son préjudice.

Par jugement du 24 novembre 2005 le tribunal de grande instance a annulé la convention en jugeant, sur la demande des sociétés défenderesses, qu'il n'était pas contesté que les dispositions du contrat constituaient des pratiques anticoncurrentielles au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce et que la SAS Prim'Co ne pouvait se prévaloir avec profit d'aucune des causes d'exemption qu'elle avait soulevées.

La SAS Prim'Co a relevé appel devant la Cour d'appel de Pau le 18 janvier 2006 et devant la Cour d'appel de Paris dont le conseiller de la mise en état, saisi d'une exception d'incompétence, a renvoyé la connaissance de l'affaire devant la cour de céans.

Dans ses dernières conclusions déposées le 8 janvier 2007 la SAS Prim'Co demande:

- de juger que le contrat commercial conclu le 3 mai 1999 entre la société Prim'Co, le SPLHL et les sociétés Cantegrit et la Madrouques est pleinement valide,

- de constater que les sociétés Cantegrit et la Madrouques ont résilié le contrat à durée déterminée de manière anticipée à compter du 1er janvier 2002 alors qu'il se terminait le 2 mai 2002,

- de condamner solidairement les sociétés Cantegrit et la Madrouques à réparer les préjudices qu'elles ont causés à la société Prim'Co,

- de les condamner en conséquence à lui payer solidairement:

217 146 euro au titre de la perte de rémunération du fait du défaut d'approvisionnement du 1er janvier au 2 mai 2002,

156 328 euro au titre de la baisse de rémunération subie par la société Prim'Co en raison d'agissements de concurrence déloyale du 1er janvier au 2 mai 2002 et de la baisse des commandes du 3 mai au 31 août 2002,

120 646 euro à titre de dommage et intérêts pour l'indemniser des frais supplémentaires qu'elle a dû engager au titre des actions de communication commerciale complémentaire,

63 143 euro correspondant à l'indemnisation du temps passé pour la préparation du dossier et faire face à l'arrêt de toutes les livraisons, décompte arrêté au 4 décembre 2003,

150 000 euro au titre du préjudice moral subi et notamment de l'atteinte à l'image et à la réputation du fait du comportement déloyal et agressif,

- de juger que ces sommes seront augmentées des intérêts au taux légal à compter de l'assignation devant le Tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan du 6 février 2004 jusqu'à leur paiement effectif,

- de capitaliser les intérêts dus en application de l'article 1154 du Code civil,

- de condamner solidairement les intimées à payer 30 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- de condamner solidairement les sociétés Cantegrit et la Madrouques aux entiers dépens comprenant les frais de constat d'huissier, les dépens des procédures engagées devant le Tribunal de grande instance et le Tribunal de commerce de Mont-de-Marsan et devant la cour d'appel, avec distraction au profit de la SCP Marbot-Crépin, avoués, qui sera autorisée à poursuivre le recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC.

Elle soutient:

- que le premier juge a fait une mauvaise interprétation de la nature du contrat qui est un contrat de commission, par lequel la SAS Prim'Co est chargée de vendre en son nom mais pour le compte des deux organisations de producteurs,

- que le juge doit, d'office, s'interroger sur l'applicabilité du droit communautaire,

- que dans ce cadre le marché pertinent est le marché de la carotte, marché de dimension européenne au stade du commerce de gros,

- que ce marché est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres au vu du chiffre d'affaires largement supérieur à 40 millions d'euro, la part de marché de la SAS Prim'Co étant de 3 % au niveau européen et de 28,22 % au niveau français,

- que s'applique le règlement 2790-99 car il s'agit d'un accord vertical et que sa part de marché est inférieure à 30 % et que les clauses contestées ne constituent pas des restrictions caractérisées.

Elle s'explique sur les clauses litigieuses en disant que:

- l'article 5.1.1 sur les règles de mise en marché se justifie par la norme de commercialisation des carottes fixée par le règlement 730-1999,

- l'article 5.1.2 sur le planning de mise en marché est justifié par la nécessité de faire des prévisions annuelles, affinées en cours de mois et de semaine en fonction des conditions atmosphériques et de déterminer six semaines avant chaque campagne les prévisions d'emballage aux conditionneurs et à Maïsadour, ce qui n'a aucun effet restrictif de concurrence,

- il n'y a pas d'entente sur les prix qui sont fixés chaque semaine par les organisations de producteurs sous la forme d'objectifs de prix à atteindre par la SAS Prim'Co en fonction de l'activité de la semaine écoulée et des prévisions de la semaine à venir,

- la clause d'exclusivité réciproque pendant trois ans s'explique par l'obligation d'assolement et n'est que le prolongement de l'obligation faite aux producteurs par le règlement 2790-99 de confier l'exclusivité de leur production à leur organisation de producteurs.

Elle en conclut, en précisant que les deux organisations de producteurs ne produisent que 26,18 % des consommations des carottes en France que le contrat n'a ni un objet ni un effet anticoncurrentiel.

Dans leurs dernières conclusions en date du 8 septembre 2006 la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques, intimées, concluent à la confirmation du jugement et demandent subsidiairement de juger:

- que les sociétés Cantegrit et la Madrouques ont signé le contrat du 3 mai 1999 sous la condition résolutoire de leur adhésion au syndicat SPLHL,

- qu'en exerçant leur droit de retrait la condition s'est accomplie,

- que par conséquent, la survenance de la condition entraînait la résolution du contrat du 3 mai 1999,

- que la clause d'exclusivité contenue dans le contrat du 3 mai 1999 est contraire au principe de la libre association et de la liberté syndicale,

- que la clause de fourniture exclusive est nulle,

- que la société Prim'Co n'a subi aucun préjudice et sera par conséquent déboutée de l'ensemble de ses demandes le rapport d'expertise devant être homologué,

- qu'il n'y a pas de solidarité entre elles,

- que les sociétés Cantegrit et la Madrouques étaient en droit d'exciper de l'exception l'inexécution,

- que la société Prim'Co n'a pas exécuté ses obligations de bonne foi et qu'elle est à l'origine de son préjudice;

à titre d'appel d'incident, elles demandent:

- de condamner la société Prim'Co à payer 15 000 euro à titre de dommages et intérêts à chacune sur le fondement de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile,

- de condamner la société Prim'Co aux entiers dépens,

- de condamner la société Prim'Co à payer à chacune des sociétés défenderesses la somme de 15 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de Procédure civile.

Elles observent que la SAS Prim'Co a abandonné ses moyens tirés du droit français mais qu'elle ne précise pas les conséquences à tirer de sa reconnaissance du contrat de commission ni les fondements juridiques de ses demandes indemnitaires.

Elles invoquent la nullité absolue du contrat qu'elles déclarent de ce fait inexistant, par application de l'article L. 420-1 du Code de commerce, qui est distinct du droit communautaire et qui peut être appliqué seul ou ensemble avec le droit communautaire.

Se plaçant dans le cadre du droit français, elles disent que la définition du marché pertinent est secondaire en matière d'entente et qu'il faut considérer en l'espèce le marché spécifique de la carotte d'Aquitaine, produit frais livré dès le lendemain de la commande, et se placer au niveau de l'approvisionnement.

Elles ajoutent que la SAS Prim'Co commercialise près du tiers du marché national et 63 % de la production du Sud-Ouest; que le contrat met en place des quotas soumis à contrôle; fixe les marges avec prix de vente minimum ; crée par l'exclusivité croisée une limitation des concurrents indépendants sur le marché.

Elles prétendent que les reproches que la SAS Prim'Co leur a fait en première instance de mettre au point un autre système d'emballage et d'installer un système informatique montrent que le contrat avait pour objet de limiter ou contrôler les progrès techniques et investissements.

Elles reprennent les motifs pour lesquels, à leur sens, il n'y a pas de causes d'exemption et disent que les pratiques restrictives relevées sont horizontales et verticales et que la défense d'intérêts collectifs ne permet pas de s'affranchir des règles impératives en matière d'entente.

Sur le droit européen, elles font valoir que le règlement CE 2790-1999 n'est pas applicable car le contrat a un aspect horizontal et qu'il comporte des restrictions anticoncurrentielles graves qui ne sont pas indispensables pour atteindre les effets positifs attendus ; que le contrat institue des pratiques anticoncurrentielles au sens de l'article 81 du traité CE.

Motifs

Attendu que la SAS Prim'Co invoque l'application du règlement CE 2790-1999 qui prévoit l'inapplicabilité de l'article 81-1 du traité aux accords verticaux et une qualification du contrat en tant que contrat de commission;

Mais attendu que le contrat qui met en relation contractuelle la SAS Prim'Co avec deux organisations de producteurs et des conditionneurs ne constitue pas seulement un accord vertical puisqu'il est conclu entre la SAS Prim'Co, intermédiaire chargé de commercialiser les productions de carottes et deux organisations de producteurs qui se situent au même niveau dans le processus économique et qui auraient pu ne pas s'adresser pour la commercialisation de leurs produits à la seule SAS Prim'Co;

Qu'il s'ensuit que ledit règlement ne peut régir les relations entre parties bien que les organisations de producteurs, prises isolément, n'existent que parce que les regroupements de producteurs sont voulus par la communauté européenne elle-même pour une meilleure adaptation à la demande en quantité et qualité et pour un écoulement de la totalité de leur production;

Attendu que l'article 81-1 du traité interdit tous accords susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun;

Attendu que la SAS Prim'Co se prévaut de ce qu'elle est susceptible d'affecter le marché commun, la carotte d'Aquitaine étant "substituable" à une carotte de même catégorie, en termes de mode de culture (sable) et de prix, provenant d'un autre pays de la Communauté européenne dans le cadre d'un commerce de gros;

Attendu que la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques soutiennent au contraire que le contrat a pour objet un marché spécifique, ce que renforce la différence de cours entre la carotte d'Aquitaine et celle des autres régions;

Attendu que la SAS Prim'Co précise, au vu de données émanant d'Eurostat, de SCEES, des Douanes françaises que la France était, en 2001, le deuxième producteur de carottes dans l'Union européenne de quinze membres avec une production annuelle de 649 milliers de tonnes, frais et industrie ; qu'elle exportait 96 372 T et importait 93 395 T;

Qu'elle s'accorde à retenir avec la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques que la France (en 2001) produit 214 717 T de frais dans le Sud-Ouest pour une production totale de frais de 436 758 T (49 %);

Attendu que la SAS Prim'Co explique, sans être démentie, avoir pour clientèle les six enseignes de la grande distribution (48 % de ses débouchés pour toutes ses activités), les grossistes nationaux et groupements de grossistes (28 %), l'export (20 %) et l'industrie (4 %);

Qu'elle indique que les carottes sont livrées à J+1 ; qu'il existe en Aquitaine quatre organisations de producteurs et neuf en France ; que les carottes des sables appartiennent à la catégorie des carottes de type nantais (type génétique);

Attendu que les intimées prétendent que la SAS Prim'Co est le leader européen de la distribution de carottes pour le marché de frais et de l'industrie avec 180 000 T vendues en se fondant sur les documents commerciaux de Maïsadour;

Attendu que la SAS Prim'Co, par le contrat, s'engage à s'approvisionner en carottes d'Aquitaine exclusivement au travers du SPLHL et de Maïsadour dans le cadre du développement de son activité de commercialisation des carottes de frais auprès d'une clientèle de grossistes, centrales et industriels tant en France qu'à l'étranger;

Attendu que la SAS Prim'Co soutient que SPLHL a produit 131 203 T en 2001 et Maïsadour 9 252 T sur un marché de la SAS Prim'Co de 122 942 T (déduction faite de 45 156 et 1 317 T à l'export des Landes et de la Manche);

Attendu qu'il n'existe pas, au vu des documents produits, de différence avérée de cours ou de commercialisation entre les carottes en provenance du Sud-Ouest et celles provenant des autres régions de France ou de l'étranger; que la pièce 6 de la SAS Prim'Co citée à ce propos par la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques ne porte que sur les productions;

Attendu que le fait que le marché porte sur la carotte d'Aquitaine ne suffit pas à considérer que le marché de référence doit être exclusivement celui de ce type de carottes, aucune indication n'étant apportée sur une caractéristique particulière déterminante de cette carotte par rapport à celles issues d'autres terroirs et qui feraient que les consommateurs n'achèteraient pas indifféremment l'un ou l'autre de ces produits;

Attendu que la carotte est un produit qui, aux dires de la SAS Prim'Co qui ne sont pas discutés, supporte aisément le transport;

Attendu que les parties ne disent pas quel délai d'acheminement est nécessaire pour que soit livré un pays de la communauté européenne;

Attendu que le marché de référence est donc le marché de la carotte de frais qui est "substituable" et susceptible comme tel d'avoir une influence sur le marché entre Etats membres compte tenu de la position de la France au sein du marché de la carotte qui est non la deuxième mais la troisième en CE en 2001 avec 649 milliers de tonnes sur 5 362 000 T venant après la Pologne (922 T) et le Royaume-Uni (760 T);

Attendu que la qualification du contrat au regard du droit de la concurrence n'a que peu d'intérêt, l'examen de son économie devant se faire dans le but de déterminer s'il a ou non pour objet d'instaurer une discipline de comportement sur le marché et pour effet effectif ou simplement possible de fausser la libre concurrence;

Attendu que, ceci étant, le contrat constitue un contrat de commissionnement ainsi que le soutient la SAS Prim'Co qui intervient comme intermédiaire entre des producteurs et des distributeurs;

Attendu que l'article 81-1 déclare incompatibles avec le Marché commun les accords qui ont pour objet ou pour effet de fausser le jeu de la concurrence et notamment ceux qui consistent à fixer de manière directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction;

Attendu que le contrat en ce qu'il prévoit chaque semaine des objectifs de prix et un ajustement en fonction des prix moyens obtenus la semaine précédente a une influence directe sur les prix du marché de la carotte, au regard du nombre limité des organisations de producteurs (neuf en France et quatre en Sud-Ouest) ; de l'importance quantitative des produits venant du SPLHL et de Maïsadour dans le Sud-Ouest; de la clientèle de la SAS Prim'Co qui s'adresse essentiellement à la grande distribution et aux grossistes et qui se décrit comme le n° 1 de la commercialisation de la carotte de frais ;

Attendu que l'article 81-2 qui déclare nul de plein droit les accords interdits en application de l'article 81-1 est écarté lorsque l'accord contribue à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique tout en réservant une part équitable du profit aux utilisateurs et sans imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs et sans donner à ces entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence;

Attendu que si l'accord s'inscrit pour une partie de ses clauses dans les objectifs assignés aux organisations de producteurs en termes de qualité et d'écoulement des produits, il demeure que ces objectifs s'inscrivent dans une obligation d'exclusivité réciproque renforcée par l'obligation de faire part aux parties au contrat des extensions d'activité projetées, de telle sorte qu'il est clair que la volonté des parties a été, sous couvert pour les uns d'être assurés de débouchés pour leurs produits, et pour la SAS Prim'Co de développer son potentiel de distribution de produits répondant à des normes de qualité, d'interdire le marché de la carotte de frais dans la région du Sud-Ouest qui est la plus grande productrice française, à d'autres opérateurs sur le marché que la SAS Prim'Co;

Attendu que la nullité du contrat est absolue et doit être confirmée;

Attendu que la SAS Prim'Co qui succombe doit les dépens;

Attendu que la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques qui prétendent obtenir au vu de l'article 32-1 du nouveau Code de procédure civile qui traite de l'amende civile que seule la juridiction a le pouvoir de décider, à titre de dommages intérêts la somme de 15 000 euro chacune ne démontrent pas en quoi la procédure faite par la SAS Prim'Co est constitutive d'un abus, surtout qu'elles ne s'étaient pas prévalues de la nullité du contrat lorsque la SAS Prim'Co a demandé en référé une expertise;

Attendu qu'il sera versé par la SAS Prim'Co en application de l'article 700 du NCPC la somme complémentaire de 1 200 euro à chaque partie;

Attendu que le présent arrêt sera notifié aux instances visées au dispositif par application de l'article 48-1 du décret du 30 avril 2002.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, Annulant le contrat en application de la législation entre Etats membres de la Communauté européenne, Confirme le jugement, Y ajoutant, Déboute la SCEA Cantegrit et la SCA Madrouques de leurs demandes à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ; Condamne la SAS Prim'Co à payer à la SCEA Cantegrit et à la SCA Madrouques chacune la somme complémentaire de 1 200 euro en application de l'article 700 du NCPC, Ordonne la transmission par le greffe de la cour de l'arrêt à : La Commission européenne, DG Concurrence B-1049 Bruxelles - Belgique ; Au Conseil de la concurrence 11 rue de l'échelle 75001 Paris ; la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes Bureau B 1, Teledoc 031, 59 boulevard Vincent Auriol 75 703 Paris cedex 13.