Conseil Conc., 16 juillet 2007, n° 07-A-06
CONSEIL DE LA CONCURRENCE
Avis
Relatif à l'acquisition par la société Cafom du pôle distribution de la société Fincar dans le secteur de la vente d'équipements de la maison
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur le rapport oral de M. Mouzon, Mme Bourguignon par Mme Perrot, Vice-Présidente présidant la séance, M. Nasse, Vice-Président, Mme Behar-Touchais, membre remplaçant un Vice-Président.
Le Conseil de la concurrence (commission permanente),
Vu la lettre du 16 avril 2007 enregistrée sous le numéro 07/0033 A, par laquelle le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie a saisi le Conseil de la concurrence, en application des, dispositions des articles L. 430-1 à L. 430-7 du Code de commerce, d'une demande d'avis relative à l'acquisition par la société Cafom de la société Fincar ; Vu les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne ; Vu le livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les observations présentées par les représentants de la société Cafom et le commissaire du Gouvernement ; Vu les autres pièces du dossier, notamment les rapports d'enquête des Directions Départementales de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique, transmis le 22 mai 2007 ; Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement, les représentants des sociétés Cafom et Fincar entendus au cours de la séance du 4 juillet 2007 ; Les représentants des sociétés Darjani, Soprigefi et Ikea entendus sur le fondement des dispositions de l'article L. 430-6, alinéa 3 du Code de commerce ; Adopte l'avis fondé sur les constatations et les motifs ci-après exposés :
I. Les entreprises parties à l'opération
A. LE GROUPE CAFOM
1. La société Cafom est une société anonyme au capital de 32 351 166,60 euro, dont le siège social est situé au 9-11, rue Jacquard au Pré-Saint-Gervais (93310). Cafom est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Bobigny sous le numéro 422 323 303.
2. Le Président Directeur Général de la société Cafom est M. Hervé Giaoui.
3. Les actions de Cafom sont admises aux négociations sur l'Eurolist Compartiment C d'Euronext Paris depuis le 27 janvier 2005. Avant l'opération, les actionnaires signataires du protocole d'accord cadre détenaient ensemble, directement ou indirectement, [...]% du capital social, les autres actionnaires et le public possédant ensemble le reste du capital, soit [...]%.
4. Cafom est un groupe indépendant du secteur de la distribution d'équipement de la maison et exploite des magasins dans les départements d'outre-mer (DOM) notamment sous l'enseigne But.
5. La SA Cafom, société mère du groupe, détient par ailleurs des participations dans diverses autres sociétés :
- en métropole, la SAS Cafom distribution et la SAS vente-unique.com,
- en Martinique, la SAS Comadi, la SAS Musique et Son et la SARL Martinique Service Plus,
- en Guadeloupe, la SAS Guadeloupéenne de distribution, la SAS Gourbeyre distribution et la SARL Caraïbe Service Plus,
- en Guyane, la SAS La Cayennaise de distribution, la SAS Katoury distribution et la SARL Guyane Service Plus,
- à la Réunion : la SAS Bourbonnaise de distribution (filiale de Cafom distribution),
- au Brésil : la SA commercial Europea Do Brasil LTDA,
- à Saint Martin : la SAS distribution des îles du nord et la SAS services des îles du nord.
B. LA SOCIETE FINCAR
6. La société Fincar est une société par actions simplifiée au capital de 3 048 980,35 euro, dont le siège social est situé Village de Bellevue, boulevard de la Marne, Corniche 2, à Fort-de-France (97200). Fincar est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Fort-de-France sous le numéro 352 070 544.
7. Les dirigeants, M. Manuel Baudouin et M. Guy-Alain Germon, sont actionnaires à 100 % du groupe.
8. Fincar, franchisé du groupe Conforama, intervient dans le secteur de la distribution d'équipement de la maison au travers de la société Caribéenne du mobilier (Socamo), de Guyane Mobilier SARL, d'Inversiones Delpha SA et de Guadeloupe mobilier SAS.
9. Le périmètre opérationnel du groupe se résume aux sociétés d'exploitation du pôle Conforama. Fincar détient 8 magasins implantés dans la zone Caraïbe dont 6 sur le territoire national, (en Guadeloupe, Guyane et Martinique) et 2 en République Dominicaine.
10. Fincar possède par ailleurs des participations dans les secteurs de l'audiovisuel (Canal Antilles SA, Canal Guyane SAS et SNC La Guyanaise), de l'immobilier (SA MOB SARL et SCI Botaiogo), des transports-défiscalisation (SNC Ipanema) et de l'équipement de la personne (Tijuca SARL et Tijuma SARL).
II. L'opération
11. Aux termes d'un contrat d'apport en nature et d'un contrat de cession d'actions, les actionnaires de Fincar, M. Manuel Baudouin et M. Guy-Alain Germon, font apport à la société Cafom des actions représentant 100 % du capital des sociétés Société Caribéenne du mobilier, Guyane Mobilier, Inversiones Delpha et Guadeloupe Mobilier, sociétés représentant le pôle de distribution de Fincar.
12. Ces deux associés de Fincar ne disposeront pas de minorité de blocage dans la nouvelle entité résultant de l'opération. En rémunération des apports consentis par Fincar, il sera attribué à celle-ci [...] actions de la société Cafom (d'une valeur nominale de [...] euro chacune). A l'issue de l'opération, Fincar détiendra donc [...]% du capital de Cafom. Cette quotité ne constitue pas une minorité de blocage.
III. Contrôlabilité
13. La contrôlabilité d'une opération de concentration relève de la combinaison des articles L. 430- 1 et L. 430-2 du Code de commerce, qui posent une condition qualitative relative à la nature de l'opération de concentration et des conditions quantitatives.
A. NATURE DE L'OPERATION
14. Aux termes de l'article L. 430-1 du Code de commerce :
"I.- Une opération de concentration est réalisée :
1º Lorsque deux ou plusieurs entreprises antérieurement indépendantes fusionnent ;
2º Lorsqu'une ou plusieurs personnes, détenant déjà le contrôle d'une entreprise au moins ou lorsqu'une ou plusieurs entreprises acquièrent, directement ou indirectement, que ce soit par prise de participation au capital ou achat d'éléments d'actifs, contrat ou tout autre moyen, le contrôle de l'ensemble ou de parties d'une ou plusieurs autres entreprises.
II. - La création d'une entreprise commune accomplissant de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome constitue une concentration au sens du présent article.
III. - Aux fins de l'application du présent titre, le contrôle découle des droits, contrats ou autres moyens qui confèrent, seuls ou conjointement et compte tenu des circonstances de fait ou de droit, la possibilité d'exercer une influence déterminante sur l'activité d'une entreprise, et notamment :
- des droits de propriété ou de jouissance sur tout ou partie des biens d'une entreprise ;
- des droits ou des contrats qui confèrent une influence déterminante sur la composition, les délibérations ou les décisions des organes d'une entreprise ".
15. Au cas d'espèce, la société Cafom acquiert le contrôle exclusif des sociétés Société Caribéenne du mobilier, Guyane mobilier, Inversiones Delpha et Guadeloupe mobilier. Il s'agit donc d'une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.
B. SEUILS RELATIFS AUX CHIFFRES D'AFFAIRES
16. Aux termes de l'article L. 430-2 du Code de commerce :
" Est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du présent titre toute opération de concentration, au sens de l'article L. 430-1, lorsque sont réunies les trois conditions suivantes :
- le chiffre d'affaires total mondial hors taxes de l'ensemble des entreprises ou groupes des personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur à 150 millions d'euro ;
- le chiffre d'affaires total hors taxes réalisé en France par deux au moins des entreprises ou groupes des personnes physiques ou morales concernées est supérieur à 50 millions d'euro ;
- l'opération n'entre pas dans le champ d'application du règlement (CEE) nº 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises.
Toutefois, une opération de concentration entrant dans le champ du règlement précité qui a fait l'objet d'un renvoi total ou partiel à l'autorité nationale est soumise, dans la limite de ce renvoi, aux dispositions du présent titre.(...) "
17. En l'espèce, les entreprises concernées ont réalisé un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euro au dernier exercice clos et chacune d'entre elles a réalisé un chiffre d'affaires en France de plus de 50 millions d'euro (Cafom [...] millions d'euro au 31 mars 2006 et Fincar [...] millions d'euro au 31 décembre 2006). Enfin, les chiffres d'affaires des entreprises concernées n'atteignent pas les seuils fixés par le règlement communautaire n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 modifié.
18. En conséquence, l'opération notifiée constitue une opération contrôlable au regard des articles L. 430-1 et L. 430-2 du Code de commerce.
IV. Délimitation des marchés concernés par l'opération
19. Les activités de Cafom et Fincar se chevauchent principalement dans le domaine de la distribution d'équipements de la maison, à savoir les produits d'ameublement et de décoration ainsi que les produits électrodomestiques.
20. En matière de distribution, la pratique tant nationale (voir notamment les avis du Conseil de la concurrence n° 97-A-04 du 21 janvier 1997 et n° 00-A-06 du 3 mai 2000) que communautaire retient généralement deux catégories de marchés : ceux qui mettent en présence les entreprises du commerce de détail et les consommateurs pour la vente des biens de consommation (les marchés en aval) et ceux de l'approvisionnement en ces mêmes biens (les marchés en amont). Ces deux marchés sont liés, le comportement des intervenants sur le marché de l'approvisionnement étant dépendant de la demande finale des consommateurs.
21. Les marchés concernés par l'opération et étudiés ci-après sont donc les marchés amont de l'approvisionnement en produits d'ameublement et produits électrodomestiques ainsi que les marchés aval liés à la vente au détail de ces mêmes produits.
A. LES MARCHES DE L'APPROVISIONNEMENT
1. MARCHE DE PRODUIT
22. La délimitation des marchés de l'approvisionnement s'opère généralement du point de vue du fournisseur. A ce titre, le degré de flexibilité dans la modification de l'offre des fournisseurs est un des éléments importants de l'analyse. D'une manière générale, les producteurs fabriquent des groupes de produits particuliers et ne sont pas en mesure de se reconvertir facilement dans la fabrication d'autres produits. Un fabricant de télévisions, par exemple, ne pourra entrer sur le marché des appareils de gros électroménager sans des investissements considérables. Il ne peut ainsi être envisagé qu'il existe un seul marché de l'approvisionnement en produits d'ameublement et de décoration et un seul marché de l'approvisionnement en produits électrodomestiques.
23. Le Conseil de la concurrence a déjà eu l'occasion de considérer qu'" au niveau des approvisionnements, on peut considérer qu'il existe autant de marchés que de familles de produits sur lesquels porte la négociation, chaque distributeur mettant en concurrence les divers fournisseurs sur chacun de ces marchés " (avis n° 97-A-04 du 21 janvier 1997).
24. Au cas présent, les groupes de produits qui suivent sont pertinents pour procéder à l'examen de l'impact de l'opération :
- Meubles,
- Bazar - décoration,
- Petit électroménager,
- Gros électroménager,
- Appareils photo-cinéma,
- Appareils Hi fi-son,
- Appareils TV-vidéo,
- Ordinateurs-périphériques.
25. Les divisions " achat " des distributeurs sont généralement aussi organisées en fonction des groupes de produits mentionnés ci-dessus. Les marchés possédant des structures comparables peuvent être regroupés (par exemple, certains groupes de produits du secteur de l'électroménager-photo-cinéma-son) ou, au contraire, certains de ces groupes de produits peuvent être encore segmentés.
26. La partie notifiante n'a pas contesté ces délimitations. En l'espèce, les marchés de l'approvisionnement doivent être définis en fonction des groupes de produits cités ci-dessus.
2. MARCHE GEOGRAPHIQUE
27. Les achats des parties à l'opération sont centralisés, soit par le biais d'une centrale d'achat (Cafom), soit au sein de la structure holding du groupe (Fincar). Leur politique d'approvisionnement est mondiale. Cafom s'approvisionne à hauteur de [> 50] % auprès de fournisseurs situés hors de l'Union européenne, principalement en Chine ([...] %), en Thaïlande ([...] %) et au Brésil ([...] %). Les achats auprès de fournisseurs situés dans l'Union européenne représentent près de [...] % de ses achats dont [< 50] % en provenance de France. Fincar, de son côté, s'approvisionne pour près des [> 50] % en Union européenne ([...] % en France) et à plus [< 50] % dans le reste du monde.
28. Pour la plupart des produits d'ameublement et des produits électrodomestiques, les marchés sont au moins de dimension européenne, voire mondiale, notamment en raison de l'émergence de l'offre des pays asiatiques. Ce point a été confirmé par la très grande majorité des concurrents. Dans le domaine de la fabrication de meubles, il existe une offre locale, mais dont les niveaux sont faibles, notamment en raison des prix élevés de ces produits par rapport aux produits importés.
29. Au cas présent, la part des achats de Cafom et Fincar dans l'offre mondiale, ou européenne ou française est, comme il sera montré ci-dessous, très faible. Aussi, la question de la délimitation géographique exacte des marchés de l'approvisionnement peut être laissée ouverte, l'opération ne risquant pas de porter atteinte à la concurrence, quelle que soit la délimitation considérée.
B. LES MARCHES DE LA VENTE AU DETAIL
1. LES MARCHES DE PRODUITS PERTINENTS
a) Les secteurs concernés : approche générale
30. Les sociétés concernées par l'opération offrent des produits d'équipement de la maison. Au sein de ce secteur, deux grandes familles de produits peuvent être distinguées :
- d'une part, les produits d'ameublement et de décoration qui rassemblent tous les produits destinés à meubler les pièces d'un logement (chaises, canapés, tables, éléments de cuisines, éléments de salles de bains, literie, buffets, rangements, bureaux, etc.) ainsi que tous les produits destinés à décorer ce logement (rideaux, tapis, luminaires, divers objets de décoration etc.) ;
- d'autre part, les produits électrodomestiques comprenant les produits dits " blancs " (tables de cuisson, fours, hottes, lave-linge, sèche-linge, lave-vaisselle, réfrigérateurs, congélateurs, petit électroménager de préparation culinaire, etc.), " bruns " (baladeurs CD/MP3/MD, caméscopes, lecteurs DVD/DIVX, enregistreurs DVD, téléviseurs LCD, chaînes hi-fi, ensembles home cinéma, radio réveils, accessoires) et " gris " (appareils photo numériques, PC, périphériques, consommables, téléphonie, etc.).
31. Le type de produits vendus est l'un des critères les plus importants pour délimiter les marchés dans le domaine du commerce de détail. Ainsi, d'une manière générale, lorsque plus d'un tiers du chiffre d'affaires d'un magasin provient de produits alimentaires, le commerce est réputé à dominante alimentaire. Cette distinction sur la base d'un seuil de chiffre d'affaires a déjà été retenue par le Conseil de la concurrence, notamment dans son avis n° 97-A-04 du 21 janvier 1997 relatif à diverses questions portant sur la concentration de la distribution. De même, au sein du commerce de détail non alimentaire, une distinction est généralement opérée entre le commerce non spécialisé et le commerce spécialisé, c'est-à-dire, selon l'avis précité, les commerces qui réalisent plus de la moitié de leur chiffre d'affaires sur une seule gamme de produits.
32. Le format et la taille du magasin sont également des critères importants de délimitation des marchés en ce que, notamment, ils déterminent l'aptitude du point de vente considéré à commercialiser un plus ou moins grand nombre de produits ou à offrir certains services annexes (parkings etc.). Les grandes surfaces spécialisées (GSS) se distinguent ainsi des grandes surfaces alimentaires (GSA) et du commerce de proximité. De telles grandes surfaces spécialisées proposent, en effet, des gammes de produits et des assortiments plus étendus ainsi que des services d'accueil et de conseils aux consommateurs. Le petit commerce ne représente généralement qu'une part marginale des achats, remplissant essentiellement une fonction de dépannage ou ne s'adressant qu'à une fraction de clientèle (personnes non motorisées etc.).
33. En se référant aux deux critères, type de produit vendu et taille des magasins, les autorités de concurrence ont délimité les marchés de produits pertinents dans les secteurs du bricolage, des jardineries, de l'habillement, des articles de sports, des articles de culture et loisirs, de l'automobile ou encore des stations-service.
34. Par exemple, un marché séparé a été défini pour la grande distribution spécialisée dans les articles de bricolage (GSB). Ce marché inclut les magasins d'une surface de vente dépassant 300 m2, qui disposent d'un nombre conséquent de références (supérieur à 10 000 unités) et s'adressent à une clientèle quasi exclusivement composée de particuliers. Les grandes surfaces spécialisées dans la jardinerie n'ont pas été considérées comme substituables aux GSB, le rayon bricolage des jardineries excédant rarement 1 500 références de produits. Par ailleurs, les commerces de proximité d'une surface inférieure à 300 m2 (quincailleries, drogueries, bazars, etc.) ont des gammes de produits beaucoup plus courtes, et n'offrent pas les mêmes services. Ils ne sont donc pas concurrents des GSB1.
35. Les marchés de l'équipement de la maison (commerces de détail de meubles et d'électroménager), objets de la présente opération, n'ont, à ce jour, jamais été délimités avec précision par les autorités françaises dans le cadre d'opérations de concentration. Ces secteurs n'ont pas non plus été abordés de manière détaillée par les autorités communautaires. Il est possible toutefois de s'inspirer des critères définis pour des secteurs proches et exposés ci-dessus.
b) Les produits d'ameublement et de décoration
36. La partie notifiante a indiqué que, en théorie, il conviendrait de définir autant de marchés de produits en cause que de fonctions relatives à chacun des objets vendus (lits, tables, tapis, lampes, etc.). Elle estime cependant que, du fait de l'absence de données désagrégées, ces définitions ne seraient pas opératoires car elles rendent impossible une évaluation des positionnements des acteurs dans le jeu de la concurrence. Elle considère nécessaire de regrouper sur un même marché de produits en cause les différentes familles de produits. La partie notifiante considère ainsi que, pour une zone de chalandise donnée, les marchés de produits en cause sur lesquels sont présentes les entreprises peuvent être définis comme l'ensemble des produits d'ameublement, comprenant les meubles et les articles de bazar-décoration, disponibles dans l'ensemble des circuits de distribution, exception faite de la vente par correspondance, dont les flux sont, au demeurant, très faibles en raison des spécificités géographiques des territoires concernés. Distinction entre le secteur des meubles, stricto sensu, et celui des articles de décoration
37. Selon la partie notifiante, les produits de décoration se trouveraient sur le même marché que les produits d'ameublement classiques. Elle se fonde tout d'abord sur l'hétérogénéité des produits disponibles dans les magasins d'ameublement comprenant principalement des meubles mais aussi des objets divers qui leur sont associés pour équiper la maison et la décorer (généralement dénommés articles de " bazar " ou de " décoration "), ces deux types de produits étant, pour elle, complémentaires dans l'usage qu'en font les consommateurs.
38. Toutefois, l'assortiment de produits proposé dans les grandes surfaces d'ameublement, du type Conforama, But, Ikea ou Habitat, comprend, généralement, d'une part, les meubles " meublant " pour la chambre, le salon, la salle à manger, la salle de bains, la cuisine, le bureau ainsi que les petits meubles d'appoint et le mobilier de jardin et, d'autre part, les objets de taille généralement plus réduite du type objets de décoration, tissus, arts de la table et luminaires. Cette classification est utilisée dans les études de marché et généralement acceptée par les professionnels. En revanche, les magasins spécialisés dans le bazar-décoration ne vendent que de petits articles d'ameublement.
39. De plus, les objets de décoration ou de bazar, sont également plus sujet aux achats d'impulsion que les meubles de plus grande importance, du type literie ou canapé, notamment du fait de leur différence de prix. Ainsi, selon une étude réalisée par l'IPEA sur les circuits spécialisés en France en 2003, le prix moyen d'un meuble acheté en circuits spécialisés était de 540 euro contre quelques dizaines d'euro pour les articles de décoration. Distinction entre les différentes catégories de produits à l'intérieur du secteur des produits d'ameublement
40. Du côté de la demande, il n'existe pas de substituabilité entre les différents produits d'ameublement.
41. Du côté de l'offre, les produits sont fortement complémentaires, aucun magasin n'étant spécialisé dans un seul type de meuble ou d'objet de décoration. De plus, la partie notifiante a souligné l'adaptabilité à très court terme de la part de magasins disposant déjà d'une surface commerciale installée et proposant déjà une partie de la gamme des produits d'ameublement. Elle a précisé que, particulièrement dans les DOM, la surface commerciale peut être utilisée pour vendre des produits très hétérogènes, et dont le rassemblement au sein d'un même magasin n'est pas observé en métropole. De plus, elle a relevé que les magasins ne respectent pas nécessairement les spécialisations connues en métropole et peuvent offrir une plus grande mixité de produits dès lors que la surface commerciale le permet.
42. Une segmentation en fonction des différentes catégories de produits d'ameublement (chambres, salons, cuisines etc.) n'est pas pertinente. En effet, les principaux détaillants présents en Guadeloupe, Guyane et Martinique sont des revendeurs spécialisés en ameublement traitant l'ensemble des catégories de la maison, à quelques exceptions près pour la cuisine et la salle de bains, et, du côté de la demande, les acheteurs souhaitent pouvoir trouver en un lieu unique l'ensemble de l'ameublement de la maison correspondant à leur budget. Distinction entre produits de bas de gamme, moyen de gamme et haut de gamme
43. Les différences de prix et de services proposés militent pour une séparation, en terme de délimitation des marchés, entre la distribution de meubles bas-moyen de gamme et la distribution de meubles de haut de gamme. Selon une étude de 2006 de l'IPEA sur " le marché du meuble meublant en France ", le budget moyen annuel était de 333 euro pour les meubles achetés dans la grande distribution et 947 euro pour les meubles achetés auprès des distributeurs milieu-haut de gamme. En outre, le haut de gamme implique, dans la plupart des cas, la présence de vendeurs spécialisés et formés. En revanche, la moyenne gamme apparaît souvent comme la suite logique de l'entrée de gamme : un ménage moyen choisira le plus souvent de l'entrée de gamme comme premier équipement. Il se portera généralement ensuite sur du moyen de gamme lorsqu'il décidera de renouveler son ameublement.
44. Le marché du haut de gamme est toutefois très restreint dans les zones concernées par l'opération. Ainsi :
- en Guadeloupe, sur les 46 concurrents cités par les parties dans leur notification, seuls 5 sont actifs sur le segment haut de gamme et 6 sur le moyen-haut de gamme ;
- en Guyane, sur les 21 concurrents cités par les parties dans leur notification, aucun n'est actif sur le segment haut de gamme ou moyen-haut de gamme ;
- en Martinique, sur les 32 concurrents cités par les parties dans leur notification, seuls 4 sont actifs sur le segment haut de gamme et 2 sur le moyen-haut de gamme.
45. De plus, si les magasins sous enseignes But et Conforama sont la plupart du temps essentiellement actifs sur l'entrée-moyen de gamme, les magasins But de Cafom étendent leur gamme en direction des produits haut de gamme.
46. En tout état de cause, la question de la distinction entre produits d'entrée-moyen de gamme et produits de haut de gamme peut être laissée ouverte dans le cadre de l'examen de la présente affaire, les conclusions de l'analyse concurrentielle restant inchangées.
La place des grandes surfaces à dominante alimentaire
47. Selon la partie notifiante, il ressort notamment des typologies réalisées par les fédérations de l'ameublement (FNAEM et UNIFA) et d'une étude Xerfi de 2006 que les circuits non spécialisés, dont celui des hypermarchés, doivent être inclus dans l'analyse concurrentielle.
48. Les critères des analyses menées dans d'autres secteurs, qui distinguent les grandes surfaces à dominante alimentaire (GSA) et les grandes surfaces spécialisées en produits non alimentaires (GSS), ne peuvent toutefois être remis en cause par des caractéristiques propres ni au secteur de l'ameublement ni aux marchés géographiques concernés. Ainsi, une étude de l'IPEA, portant sur les circuits spécialisés en France en 2003, relève que les meubles vendus dans les hypermarchés se caractérisent généralement par des prix moyens très bas et consistent essentiellement en mobilier de jardin. La même étude souligne qu'il s'agit essentiellement d'offres promotionnelles soutenues par des campagnes publicitaires. Seuls quelques petits rayons permanents offrant des chaises, petites étagères, etc. sont présents dans les hypermarchés les plus vastes (plus de 15 000 m2). Or, de même que pour les grandes surfaces spécialisées dans d'autres produits, la largeur de l'assortiment dans le secteur de l'ameublement est un critère important pour le consommateur, de même que certains services, qui ne sont proposés que par ce type de magasins (livraison, montage, SAV, garantie, etc.).
49. De même, les hypermarchés des Antilles-Guyane ne proposent pas, à titre permanent, de produits d'ameublement. Il ressort en effet des positions développées dans leur rapport par les directions départementales de Guadeloupe, Guyane, et Martinique que les GSA peuvent vendre certains produits d'ameublement d'entrée de gamme à l'occasion d'opérations promotionnelles, en tant que produits d'appel, mais ne concurrencent les GSS comme But et Conforama que de manière marginale. Ainsi, la DDCCRF de Martinique précise à propos des hypermarchés : " La part du meuble est encore plus basse, ce n'est qu'à l'occasion d'évènements tels " opération anniversaire ", fête des mères, que le magasin organise une mise à disposition en allée centrale le temps d'écouler les produits mis en avant pour ces occasions ".
50. L'examen des photographies et catalogues publicitaires transmis par la partie notifiante à l'appui de ses observations confirme que les articles d'ameublement vendus par les GSA aux Antilles sont essentiellement des meubles de jardin.
51. Le Conseil est donc d'avis que les GSA ne sont pas des concurrents se positionnant sur le même marché que celui de la partie notifiante.
La place des grandes surfaces de bricolage et de jardinage
52. La partie notifiante s'appuie sur les lettres du ministre de l'Economie adressées le 29 août 2002 au conseil de la société Mr Bricolage, et le 10 février 2003 au conseil de la société Leroy Merlin, pour soutenir que les GSB et les grandes surfaces spécialisées dans les articles de jardinage, qui vendent des meubles de rangement, des luminaires et divers objets de décoration, doivent être inclus dans les marchés de produits pertinents.
53. Les grandes surfaces de bricolage commercialisent en effet des produits d'ameublement mais leur offre se positionne sur des catégories de meubles bien spécifiques. Ainsi, les GSB vendent des meubles de cuisine, de rangement en kit ou du mobilier de jardin. Elles offrent également des produits de décoration. La concurrence qui, le cas échéant, pourrait s'exercer entre les GSS But et Conforama et les GSB ne porte donc que sur une part limitée de la gamme d'articles proposés dans ces GSS. S'agissant des jardineries, leurs catalogues présentent essentiellement du mobilier de jardin.
54. Le Conseil est donc d'avis que, à moins de disposer d'une gamme large et permanente de produits d'ameublement, les GSB et les jardineries ne peuvent être considérées comme concurrentes des parties.
Conclusion
55. Le premier marché de produit concerné par l'opération est celui de la distribution de meubles via des points de vente proposant au consommateur final un large assortiment de produits, hors objets de décoration, tout au long de l'année.
c) Les produits électrodomestiques
56. Les produits électrodomestiques sont définis dans la décision du Conseil de la concurrence n° 04-D-64 du 30 novembre 2004, comme l'ensemble des " produits de petit et gros électroménagers (PEM et GEM, dits " blancs " (lave-linge, cuisinières, réfrigérateurs, fours, robots, cafetières, fers, aspirateurs,...)), les produits " bruns " (téléviseurs, magnétoscopes, chaînes hi-fi, caméscopes), les produits de télécommunications (téléphones, fax, alarmes) et le matériel informatique (bureautique, jeux vidéo) ".
57. Par ailleurs, dans l'affaire n° COMP/M. 1248 - Kingfisher/BUT du 21 août 1998, les parties notifiantes avaient proposé à la Commission européenne de diviser les appareils électrodomestiques en quatre principaux segments : les produits bruns, les produits de gros électroménager, les produits de petit électroménager et les ordinateurs et appareils de communication. Si la Commission ne s'était alors pas prononcée précisément sur cette distinction, l'impact de la concentration étant négligeable, elle s'est cependant référée à celle-ci dans son étude des parts de marché des parties.
58. La partie notifiante considère qu'il est nécessaire de regrouper les produits électrodomestiques par familles de produits homogènes ou présentant une certaine substituabilité, du moins du côté de l'offre. Elle se réfère à la décision du Conseil de la concurrence n° 04-D-64 précitée, qui décrit, selon elle, précisément les familles de produits disponibles dans les magasins concernés par l'opération, hormis les appareils de climatisation et de chauffage de l'eau dont elle intègre les ventes dans celle des produits blancs. Enfin, elle souligne l'inopérance des critères suivants : taille des magasins, technique de vente, nature des prestations offertes aux consommateurs, aux fins de délimitation des marchés de produits. En effet, selon elle, il est constant que, quel que soit le circuit de distribution, pour toute taille de magasin et toute enseigne, même si le positionnement peut varier sur un continuum de qualités et de prix, les produits sont clairement standardisés, les conditionnements identiques, un conseil est assuré par des vendeurs et un service après vente est disponible. La partie notifiante estime ainsi que la distribution des trois grandes familles de produits blancs, bruns et gris, constituent les trois marchés pertinents dans le secteur de l'électrodomestique, sans qu'il soit besoin d'opérer des distinctions plus fines. Distinction entre les différents produits blancs, bruns et gris
59. Même si certains éléments de convergence entre les produits bruns et gris peuvent être constatés (usage client, technologie, fournisseurs, ...), le métier de distributeur est encore structuré autour de cette distinction et tous les spécialistes ne proposent pas tous ces produits (la FNAC par exemple est absente du segment des produits blancs). Les services et conseils offerts militent également pour une distinction entre ces trois catégories de produits. Un acteur a ainsi indiqué que la notion de " conseil " était " un critère très important aux yeux du consommateur - même s'il dispose de plus en plus de moyens de s'informer avant l'achat, presse spécialisée, internet, ...- qui justifie, entre autres choses, l'existence des enseignes spécialisées. Cette notion se retrouve aussi bien en brun/gris qu'en blanc ".
Distinction entre petit et gros électroménager à l'intérieur de la catégorie des produits blancs
60. La partie notifiante relève que, du côté de l'offre, les magasins vendant des produits blancs commercialisent à la fois du petit électroménager (PEM) et du gros électroménager (GEM). Seules se distinguent les grandes surfaces de bricolage, dont l'offre se concentre sur les appareils de climatisation et de chauffage de l'eau.
61. La distinction entre le PEM et le GEM, si elle est généralement opérée par les professionnels, semble de moins en moins perceptible pour le consommateur : par exemple, ainsi qu'un acteur l'a indiqué lors de l'instruction, regrouper des produits dans un univers d'usage " cuisson " en magasin reviendrait à regrouper des produits de petit électroménager (cuiseur, micro onde, ...) et de gros électroménager (ex : cuisinière, plaque de cuisson, ...). Une étude sectorielle rendue disponible par le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie met ainsi l'accent sur la fonction commune des produits du PEM et du GEM et indique que " derrière l'hétérogénéité de façade, un lien fort unit l'ensemble de ces produits : ils offrent tous un service soulageant ou simplifiant l'activité domestique ".
62. Au cas présent, les deux produits sont offerts par les magasins But et Conforama et leur part de marché cumulée diffère peut que l'on prenne en compte un type de produits ou les deux, de sorte que la distinction entre PEM et GEM peut être laissée ouverte, l'analyse concurrentielle de l'opération demeurant inchangée.
Distinction entre produits de bas de gamme et haut de gamme
63. Du côté de la demande, comme dans le secteur de l'ameublement, la substituabilité peut être limitée entre l'entrée de gamme et le haut de gamme.
64. Cependant, ainsi que l'a indiqué un opérateur, si certaines enseignes ont une image de marque ou positionnement " bas de gamme " ou " haut de gamme ", au-delà de ce positionnement " marketing ", la réalité de l'assortiment fait qu'il est rare qu'une enseigne dispose dans son offre uniquement de produits " bas de gamme " ou " haut de gamme ", hors certaines " niches du marché " : la plupart du temps, les enseignes manifestent leur volonté d'explorer les divers segments de la demande. Un découpage plus fin du marché entre les produits de bas de gamme et haut de gamme n'est donc pas pertinente.
La place des grandes surfaces à dominante alimentaire, des grandes surfaces de bricolage et des bazars
65. Les rapports d'enquête des directions départementales de la DGCCRF de Guyane, Guadeloupe et Martinique précisent que certains hypermarchés consacrent environ 10 % de leur surface de vente au secteur de la maison et plus particulièrement en électrodomestique (blanc, brun, gris). La DDCCRF de Guyane précise ainsi, à propos d'un hypermarché Cora, pour l'électrodomestique : " son positionnement le place sans conteste comme concurrent direct des magasins But et Conforama tant sur les produits (marques, prix, étendue de gamme) que sur les services ". La DDCCRF de Martinique insiste sur le caractère permanent de la présence de produits électrodomestiques dans les hypermarchés du département. Cette analyse est confirmée par l'examen des catalogues publicitaires fournis par les parties à la DGCCRF lors de la première phase.
66. En revanche, les supermarchés, les magasins de bricolage ou les bazars ne représentent globalement qu'une part très négligeable des achats. Ils peuvent certes proposer ponctuellement des produits électrodomestiques mais la qualité est en assez basse, l'approvisionnement erratique et, au total, l'importance économique faible.
La vente à distance
67. Le Conseil considère, tout comme la partie notifiante, que les produits vendus par correspondance ne peuvent être pris en compte dans l'analyse du marché pertinent, pour des raisons propres à la géographie des départements d'outre-mer (coûts de transport majorés), mais aussi en raison de l'absence de données sur les flux concernés.
68. Cette analyse est confirmée par la direction départementale de la DGCCRF de Martinique qui précise : " S'agissant du commerce à distance des électrodomestiques (vente par correspondance ou électronique) pour des raisons structurelles liées au marché caribéen, où les frais d'approches, surtout pour des produits volumineux sont dissuasifs, cette pratique est peu usitée. De plus la question de la garantie est un frein à ce choix ".
Conclusion
69. Sont donc concernés par l'opération les marchés de la distribution de produits blancs, bruns et gris via des points de vente proposant au consommateur final un assortiment de produits tout au long de l'année. Ces points de vente incluent les magasins spécialisés dans l'électrodomestique ainsi que les grandes surfaces spécialisées et les hypermarchés disposant d'un rayon permanent.
2. MARCHES GEOGRAPHIQUES
70. De pratique constante, tant de la part des autorités de concurrence françaises que communautaire, les marchés géographiques pertinents dans le secteur du commerce de détail sont de dimension locale, correspondant à une zone de chalandise associée à chaque magasin.
71. D'une manière générale, la zone de chalandise est d'autant plus étendue que le format du magasin est grand. Les commerces dotés de petites surfaces, ou commerce de proximité, ont ainsi des zones de chalandise réduites. A l'opposé, la force d'attraction des grandes surfaces spécialisées, du type de celles exploitées par Cafom et Fincar, qui sont dotées d'une surface de vente étendue implique des zones de chalandise dont le rayon peut atteindre plus de trente minutes de trajet en voiture.
72. De plus, la nature des produits a également un impact sur la zone de chalandise. La principale distinction s'opère entre les biens de consommation courante de faible montant unitaire achetés fréquemment (dits produits de grande consommation) et les produits d'un prix plus élevé et d'achat peu fréquent (dits biens durables). Pour ces derniers, les consommateurs sont susceptibles de consentir à des déplacements relativement longs. Les parties ont souligné le caractère " durable " des biens concernés. Cette caractéristique est confirmée par le nombre limité d'éléments achetés par transaction et la valeur élevée des produits, que l'on observe au travers des relevés effectués par les parties. Ainsi, le panier moyen dans un magasin But est de 2 produits pour un montant de près de [100-200] euro et de 3,5 produits pour un montant de [100-200] euro pour les magasins Conforama. Par ailleurs, ainsi qu'un concurrent l'a précisé lors de l'instruction, les achats de produits d'ameublement et électrodomestiques sont des actes importants pour les consommateurs, qui sont prêts à consentir, pour ce type d'achat, divers coûts de recherche (information, comparaison des produits) et à aller loin pour trouver le produit qui leur convient.
73. Trois espaces sont concernés par la présente opération, à savoir la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique. La Réunion et l'île de Saint-Martin sont exclues de l'analyse de la délimitation des marchés géographiques pertinents en raison de l'absence de chevauchement d'activités des parties.
Guadeloupe
74. La partie notifiante indique qu'en Guadeloupe, les quatre magasins concernés par l'opération sont situés en deux lieux distincts et éloignés.
75. Ces zones sont :
- d'une part, celle où se situe un magasin But (2712 m2), excentré sur la commune de Gourbeyre (zone d'activité de Valkanaers, sud-ouest de Basse-Terre).
- d'autre part, celle où sont situés trois magasins, à savoir le But La Jaille (3181 m2), le Conforama La Jaille (2933 m2) et le Conforama Petit Pérou (1500 m2).
76. La partie notifiante estime que le marché géographique impacté par l'opération est celui de la zone de chalandise commune aux trois magasins de la périphérie de Pointe-à-Pitre.
77. D'une manière générale, le consommateur est prêt à parcourir entre 20 et 45 minutes pour rejoindre un point de vente et il est facile de comparer les prix d'une enseigne à l'autre. Un acteur a souligné ainsi que, de toutes les façons, " sur la conurbation principale, aucun point de vente n'est à plus de 10 minutes l'un de l'autre; publicité pléthorique (presse, radio, boîte aux lettres) orientée principalement sur les prix ".
78. Certains éléments militent pour la délimitation d'une zone de chalandise élargie à l'ensemble de l'île, s'agissant des magasins des parties situés au centre du département, près de Pointe-à-Pitre. En effet, ainsi que la DDCCRF de Guadeloupe le souligne, les magasins But et Conforama exploités par les parties dans cette zone sont dotés d'une surface de vente étendue impliquant des zones de chalandise dont le rayon peut atteindre plus de trente minutes de trajet en voiture, notamment pour les deux magasins de Baie-Mahault dont la surface de vente avoisine les 4 000 m², et qui se trouvent à proximité de zones commerciales particulièrement attractives (Destreland et Jarry). De plus, compte tenu de l'attractivité commerciale de la région Pointoise, (comprenant les communes de Baie-Mahault et Abymes), cette zone rayonne sur l'ensemble de la Guadeloupe : ainsi, la zone de chalandise des trois magasins de Baie-Mahault et des Abymes serait l'ensemble de la Guadeloupe continentale. De plus, la mobilité serait vécue plus comme une nécessité, voire un plaisir, que comme une contrainte et, compte tenu des prix relativement élevés et de l'achat peu fréquent des biens durables offerts par les enseignes concernées par l'opération, les consommateurs guadeloupéens sont susceptibles de consentir à des déplacements relativement longs pour faire ce type d'acquisition.
79. En revanche, le magasin But de la commune de Gourbeyre, excentré au Sud-Ouest de l'île, dispose d'une influence beaucoup plus réduite que les trois autres magasins concernés malgré le bénéfice d'une bonne desserte routière et d'une localisation en bordure de l'axe principal de circulation de la Guadeloupe.
80. Quoiqu'il en soit, la question de la délimitation précise de la zone de chalandise de Baie-Mahault-Abymes, peut être laissée ouverte. La zone excentrée de Gourbeyre mise à part, l'équipement commercial en matière de meubles et d'électroménagers est marginal en dehors de ce territoire. L'analyse concurrentielle n'en serait donc pas modifiée.
Guyane
81. En Guyane, la partie notifiante considère que les magasins But de Cayenne, ainsi que les magasins Conforama de Cayenne et de Kourou se trouvent tous sur le même marché géographique économiquement pertinent, à la différence du magasin Conforama de Saint-Laurent-du-Maroni. Les six magasins contrôlés par les parties sur le territoire Guyanais sont répartis en trois lieux différents : proche du littoral à Cayenne et à Kourou, et à l'extrême nord-ouest du territoire à Saint-Laurent-du-Maroni, distante d'environ 300 km de Cayenne. La partie notifiante souligne que seul un magasin Conforama est présent à Saint-Laurent-du- Maroni (500 m2). Les deux autres magasins Conforama sont situés à Kourou (870 m2, zone industrielle de Pariacabo) et à Cayenne (2 450 m2, zone industrielle Collery Ouest).
82. Les trois magasins contrôlés par Cafom sont situés dans les environs de Cayenne. Le plus petit (476 m2), à l'enseigne YxorBut, est implanté dans le centre commercial Katoury, très proche du centre-ville, au nord-est de l'île. Ce magasin ne distribue que des produits électrodomestiques. Un autre magasin (2465 m2), à l'enseigne But, est situé sur la zone industrielle Collery Ouest. Ce dernier sera fermé en 2007 quand s'ouvrira un nouveau magasin But (5 990 m2) à Matoury dans la zone d'activités Terca Est. Ce dernier a fait l'objet d'une demande d'autorisation d'ouverture en décembre 2005.
83. Le test de marché confirme les délimitations proposées par les parties. Les consommateurs seraient prêts à parcourir entre 20 et 45 minutes pour rejoindre un point de vente et pourraient facilement comparer les prix d'une enseigne à l'autre. Les facilités de circulation autour d'axes routiers nettement identifiés permettent en effet un déplacement aisé vers les différents points de vente et un arbitrage entre eux de la part du consommateur. Les facilités de circulation entre les zones de Kourou et Cayenne amènent donc à retenir Kourou dans la zone de chalandise. 84. En revanche, la zone de Saint-Laurent-du-Maroni, située à près de 260 kilomètres de Cayenne et dotée d'un équipement commercial restreint, doit être exclue de la zone de chalandise Cayenne- Kourou.
Martinique
85. La partie notifiante considère que, dans l'île de la Martinique, les magasins concernés par l'opération se trouvent sur un même marché géographique économiquement pertinent. En effet, elle explique que sur ce territoire, les trois magasins concernés par l'opération sont situés en périphérie de la commune du Lamentin, où se concentre une grande partie des zones industrielles et commerciales de l'agglomération de Fort-de-France. Le magasin But (4 128 m2 de surface commerciale) se trouve dans le pôle commercial des Mangles, entre Fort-de-France et le centre-ville du Lamentin. A proximité, le long de la RN 1, se trouve le magasin Conforama (3 791 m2) du pôle commercial Acajou Californie. Ce dernier magasin, ouvert depuis décembre 2006, est amené à se substituer au Conforama (1 700 m2) située rue des Arawaks à Fort-de-France. La partie notifiante souligne la faible durée de trajet est nécessaire pour se rendre en véhicule motorisé d'une enseigne à l'autre.
86. Les résultats du test de marché viennent à l'appui de la délimitation proposée. L'offre est concentrée au centre de l'île, entre Fort-de-France et Lamentin et, en dehors de cette zone, il n'existe pas d'autres centres commerciaux susceptibles d'attirer le consommateur. A l'instar de la situation relevée en Guadeloupe, les produits proposés par les magasins But et Conforama sont des produits durables d'un prix relativement élevé et d'achat peu fréquent et les consommateurs sont prêts à consentir à des déplacements relativement longs. De plus, la DDCCRF de Martinique signale que le terrain sur lequel sont implantées les deux enseignes concernées par l'opération bénéficie d'une bonne desserte routière par cette situation en bordure de la RN 1, axe prioritaire de circulation de l'île. Cette zone est également particulièrement attractive car la grande majorité de l'équipement commercial moderne, et notamment de la grande distribution spécialisée, y est implantée.
87. Au cas présent, le Conseil considère que la zone de chalandise s'étend à l'ensemble de la Martinique. Quoiqu'il en soit, en dehors de la zone où sont implantées les enseignes concernées, l'équipement commercial en matière de meubles et d'électroménagers est marginal.
V. Analyse concurrentielle
88. Les " effets unilatéraux " consécutifs à une concentration mesurent les effets du déplacement de l'équilibre concurrentiel du fait du changement de la structure de marché. En particulier, ils englobent l'ensemble des pertes de bien-être résultant des mouvements de prix et de quantités de la part des entreprises parties prenantes à la fusion et de leurs concurrents.
89. De telles pertes de bien-être sont susceptibles de se produire en particulier lorsque la concentration crée ou renforce une position dominante, tout en ne laissant aux concurrents que peu de moyens ou d'incitations pour exercer une pression concurrentielle suffisante sur la nouvelle entité. Ce cas peut par exemple se produire si la hausse des prix de l'entité fusionnée accroît la demande pour les produits offerts par les autres acteurs, qui peuvent alors augmenter leurs propres prix de façon profitable. De telles réductions de concurrence se manifestent d'autant plus volontiers que la concentration élimine la rivalité entre des animateurs particulièrement actifs de la concurrence avant l'opération.
90. Les risques de manifestation d'effets unilatéraux défavorables résultent de la conjonction de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants. Parmi ces facteurs, on relève l'existence de parts de marché élevées, dont l'appréciation varie en fonction de la structure des marchés considérés. En outre, le rapport entre les parts de marché détenues par l'entité fusionnée et par ses concurrents, en particulier ceux qui la suivent immédiatement, est un facteur qui permet notamment d'évaluer la capacité concurrentielle résiduelle des concurrents des entreprises concernées.
91. L'analyse des effets unilatéraux peut être complétée, lorsque la structure de marché s'y prête, par celle des effets coordonnés, qui cherchent à évaluer les risques que la nouvelle structure de marché ne soit propice au développement d'une collusion tacite entre les entreprises.
92. Tous ces effets sont rendus moins plausibles si l'entrée sur le marché est particulièrement facile. L'estimation de la force des barrières à l'entrée est donc indispensable à l'analyse.
A. LES MARCHES EN AMONT
93. L'opération n'aurait qu'un impact très limité sur les marchés amont, mondiaux, européens ou nationaux, la part cumulée des parties sur les chiffres d'affaires de leurs fournisseurs, le plus souvent acteurs de dimension mondiale, ne dépassant pas [[0-10] % et étant dans la quasi-totalité des cas inférieure à [0-10] %.
94. Au niveau local, les achats des parties auprès de leurs fournisseurs après l'opération ne représenteraient une part supérieure à [20-30] % que pour un seul fournisseur. Cette dernière société, interrogée lors de l'instruction, a néanmoins indiqué que la possibilité pour Cafom et Fincar de se trouver en situation de position dominante et d'agir ainsi indépendamment de ses fournisseurs et clients sur les marchés en amont (par exemple la possibilité de ce groupe d'imposer des gammes de produits particulières, les prix d'achat, les conditions et termes de livraison, etc.), n'existait pas pour le moment et ne résulterait pas non plus de la concentration.
95. Selon le Conseil, l'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence vis-à-vis des fournisseurs de la nouvelle entité.
B. LES MARCHES EN AVAL
1. LES PARTS DE MARCHES DETENUES PAR LES PARTIES ET LEURS CONCURRENTS
a) En Guadeloupe
La distribution de produits d'ameublement
Guadeloupe - Ameublement - Chiffre d'affaires
<emplacement tableau>
Analyse
96. Sur les produits d'ameublement (hors décoration), les parts de marché des parties après l'opération seraient de [40-50] % et [30-40] % respectivement en termes de chiffre d'affaires et de surface.
97. Les enseignes Mobilia, Caraïbes Import, Premier rêve, Meubles Gautier et Gifi auraient des parts respectives de [<10 %], [0-10] %, [0-10] % et [0-10] % en valeur et de [5-15] %2, [0- 10] %, [0-10] % et [0-10] % en surface. Sur ce marché, la part du premier concurrent serait ainsi, en valeur, près de [quatre-six] fois inférieure à celle de la nouvelle entité. Un tel écart constitue un indice sérieux de position dominante. Il convient de noter que les second (Caraïbes Import) et quatrième (Gifi) concurrents sont essentiellement présents sur le petit meuble-bazar et ne proposent pas par conséquent des produits substituables à ceux des parties. Enfin, on constate un éparpillement du marché entre de nombreux petits concurrents.
98. Par ailleurs, il ressort des tableaux de parts de marché détaillées fournis par les parties que les parts cumulées des parties dépasseraient 30 % en termes de chiffre d'affaires sur certains segments : literie ([50-60] %), chambre ([50-60] %), cuisine ([40-50] %), salle à manger ([40- 50] %), bureau ([40-50] %) et salon ([40-50] %). En termes de surface, les parts cumulées des parties seraient également supérieures à 30 % sur les segments literie ([30-40] %), chambre ([30-40] %), salle à manger ([30-40] %), et salon ([30-40] %). Sur chacun de ces segments, les concurrents suivants auraient des parts très largement inférieures à celles de la nouvelle entité.
99. L'opération est donc susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guadeloupéen de la distribution de produits d'ameublement.
La distribution de produits électrodomestiques
Guadeloupe - Electrodomestique - Chiffre d'affaires
<emplacement tableau>
La distribution de produits blancs
100. Il ressort des tableaux ci-dessus qu'en terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits blancs serait de [30-40]% (But [10-20]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [10-20]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Electronautic (deux magasins représentant [20-30]% des parts de marché en chiffre d'affaires et [20-30]% en surface) et Connexion ([10-20]% en chiffre d'affaires et [0-10]% en surface).
101. Les parties obtiendraient leur part la plus élevée sur le segment du gros électroménager ([30- 40]% en chiffre d'affaires et [10-20]% en surface). Elles seraient néanmoins confrontées à la concurrence d'Electronautic ((30-40]% en valeur et [40-50]% en surface) et Connexion ([10- 20] % en valeur et [10-20]% en surface).
102. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité, en dépit de sa part de marché élevée, resterait confrontée à la concurrence d'acteurs de poids. Il n'existe pas non plus d'éléments suffisants pour démontrer que la concentration puisse conduire sur ce marché à des effets coordonnés. L'opération ne serait donc pas a priori susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guadeloupéen de la distribution de produits blancs.
La distribution de produits bruns
103. En terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits bruns serait de [20-30]% (But [10-20]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [0-10]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Electronautic (deux magasins représentant [20-30]% en valeur et [20-30]% en surface), Groupe Bernard Hayot ([20-30]% des parts de marché en valeur et [0-10]% en surface), et Connexion ([0-10]% en valeur et [10-20]% en surface).
104. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité, en dépit de sa part de marché relativement élevée, resterait confrontée à la concurrence d'acteurs de poids similaire. L'opération ne serait donc pas a priori susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guadeloupéen de la distribution de produits bruns.
La distribution de produits gris
105. En terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits gris serait de [20-30]% (But [0-10]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [20-30]% en termes de surface. La nouvelle entité serait confrontée au numéro un du marché, le groupe Bernard Hayot, qui, au travers du magasin Carrefour de Baie-Mahault, détiendrait à lui seul une part de marché de [50-60]% en valeur (mais seulement [10-20]% en surface). La part de marché de l'enseigne Connexion est de [0-10]% en valeur et [20-30]% en surface.
106. L'opération ne serait donc pas a priori susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guadeloupéen de la distribution de produits gris.
Conclusion
107. Compte tenu, notamment, de l'importance de l'écart entre les parts de marché de la nouvelle entité et celles de ses concurrents, l'opération soulève des problèmes sérieux de concurrence sur le marché guadeloupéen de la distribution de meubles.
108. En revanche, la nouvelle entité sera confrontée à des concurrents de poids sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques.
b) En Guyane
109. En Guyane, le groupe Fincar détient deux magasins à l'enseigne Conforama, à Cayenne et à Kourou. Le groupe Cafom est, quant à lui, représenté par deux magasins à l'enseigne But à Cayenne et par un magasin à l'enseigne Yxorbut à Cayenne.
110. Le rapport d'enquête de la DDCCRF de Guyane indique que les magasins But et Conforama sont les seules enseignes nationales de meubles et électrodomestique présentes en Guyane, avec Cora comme seul concurrent pour les seuls produits électrodomestiques.
La distribution de produits d'ameublement
Guyane - Ameublement - Chiffre d'affaires
111. Les parts de marché présentées ci-dessous ont été calculées en tenant compte du magasin But Matoury de Cayenne qui devrait ouvrir, selon les parties, en 2007. En revanche, elles n'incluent pas le magasin But Collery de Cayenne, les parties ayant déclaré dans leur notification que ce magasin serait fermé d'ici fin 2007 dans l'acte de saisine. Néanmoins, selon les concurrents, le magasin But Collery serait toujours en activité. Les parties, interrogées sur ce point lors de la séance du 4 juillet 2007, n'ont pas confirmé leur décision de fermeture et leurs déclarations sont demeurées imprécises à ce sujet. Si ce magasin était pris en compte dans le calcul des parts de marché, il renforcerait la position des parties de près de [0-10]% sur le marché du meuble.
<emplacement tableau>
Analyse
112. Sur les produits d'ameublement, les parts de marché des parties après l'opération seraient de [60-70]% et [70-80]% respectivement en termes de chiffre d'affaires et de surface. Les sociétés Mégabriel, Nature Habitat (deux magasins) et Meublor seraient les premiers - et quasiment les seuls - concurrents de la nouvelle entité avec des parts respectives de [10-20]%, [0-10] % et [0- 10] % en valeur et de [0-10] %, [0-10] % et [0-10] % en surface. Sur ce marché, la part du premier concurrent serait ainsi plus de quatre fois inférieure, en valeur, à celle de la nouvelle entité et de huit fois en surface.
113. Il est à noter par ailleurs que Gifi et Foir'Fouille sont à dominante " bazar-décoration ". A ce titre, le rapport d'enquête confirme que ce type de magasin ne propose que très marginalement des petits meubles, accessoires de décoration ou d'aménagement du foyer, mais davantage des produits complémentaires à l'ameublement, type tissus et voilages, décoration, lampes, articles ménagers. Ces deux magasins ne constituent donc pas des substituts aux magasins des parties en ce qui concerne le secteur de l'ameublement.
114. Enfin, il ressort des tableaux de parts de marché détaillées fournis par les parties que les parts cumulées des parties dépasseraient 30 % en termes de chiffre d'affaires sur certains segments : bureau ([50-60]%), cuisine ([50-60]%), salon ([40-50]%), salle à manger ([40-50]%), literie ([40-50]%), chambre ([40-50]%), et salle de bain ([40-50]%). En termes de surface, les parts cumulées des parties seraient également supérieures à 30 % pour les segments suivants : bureau ([70-80]%), salon ([60-70] %), salle à manger ([60-70]%), chambre ([60-70]%), literie ([60- 70]%), cuisine ([60-70]%) et salle de bain ([40-50]%). Sur chacun de ces segments, les concurrents suivants auraient des parts minimes par rapport à celles de la nouvelle entité.
115. L'opération est donc susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guyanais de la distribution de produits d'ameublement.
La distribution de produits électrodomestiques
Guyane - Electrodomestique - Chiffre d'affaires
<emplacement tableau>
La distribution de produits blancs
116. Il ressort du tableau ci-dessus qu'en terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits blancs serait de [60-70]% (But [40-50]% et Conforama [10-20]%) après l'opération. Cette part serait de [20-30]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Carrefour ([0-10]% des parts de marché en chiffre d'affaires et [0-10]% en surface), Cora ([0-10]% en chiffre d'affaires et[10-20]% en surface) et Megabriel ([0-10] % en chiffre d'affaires et [0-10]% en surface).
117. Les parties obtiendraient leur part de marché la plus élevée sur le segment du gros électroménager ([60-70]% en chiffre d'affaires et [30-40]% en surface). Les concurrents suivants, sur ce segment, seraient les magasins Carrefour ([0-10]% en chiffre d'affaires et [0- 10]% en surface), Cora ([0-10]% en valeur et [20-30]% en surface) et Megabriel ([0-10]% en chiffre d'affaires et [10-20]% en surface).
118. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité aurait ainsi une part de marché près de sept fois supérieure à celle de son premier concurrent, la société Carrefour.
119. L'opération est donc susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guyanais de la distribution de produits blancs.
La distribution de produits bruns
120. En terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits bruns serait de [60-70]% (But [40-50]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [30-40]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Carrefour ([0-10]% des parts de marché en valeur et [0-10]% en surface), Cora ([0- 10]% en valeur et [10-20]% en surface) et Mégabriel ([0-10]% en valeur et [0-10]% en surface).
121. Le rapport d'enquête indique que les magasins de " bazar-décoration " peuvent également proposer des produits d'électrodomestiques. Ainsi, Gifi et la Foir'Fouille offrent, ponctuellement, des appareils électriques type radios, réveils, magnétoscopes etc. Le rapport souligne cependant que la qualité paraît basse, l'approvisionnement erratique et que la concurrence qui pourrait, éventuellement, s'exercer entre les magasins But et Conforama et ces types de commerce ne concernent qu'une très faible part de la gamme d'articles.
122. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité aurait une part de marché plus de sept fois supérieure à celle de son premier concurrent. L'opération est donc susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guyanais de la distribution de produits bruns.
La distribution de produits gris
123. En terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits gris serait de [40-50]% (But [30-40]% et Conforama [0-10]%) après l'opération et de [20-30]% en terme de surface. Le principal concurrent des parties serait la société IS2M ([40-50]% des parts de marché en valeur), suivi de Carrefour ([0-10]% en valeur et [0-10]% en surface).
124. La position de IS2M est cependant très largement surévaluée. Le rapport d'enquête indique notamment qu'une grand partie de son chiffre d'affaires est réalisé sous forme de marchés publics. Or, de pratique décisionnelle constante, le canal de distribution vers les entreprises ou collectivités publiques constitue un marché pertinent distinct de celui de la distribution aux consommateurs individuels.
125. L'opération est donc susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché guyanais de la distribution de produits gris.
Conclusion
126. Compte tenu de l'importance de l'écart entre les parts de marché de la nouvelle entité et celles de ses concurrents, l'opération soulève des problèmes sérieux de concurrence sur le marché guyanais de la distribution de meubles ainsi que sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques.
c) En Martinique
127. Selon les services de la DDCCRF de Martinique, les enseignes But et Conforama détiennent à elles seules près de [40-50]% du marché global de l'équipement de la maison.
La distribution de produits d'ameublement
Martinique - Ameublement - Chiffre d'affaires
128. Les parts de marché présentées ci-dessous ont été calculées en ne tenant pas compte du magasin Conforama de Fort-de-France (1 700 m2), les parties ayant déclaré que ce magasin serait fermé d'ici fin 2007.
<emplacement tableau>
Analyse
129. Les parts de marché des parties après l'opération seraient de [30-40]% et [20-30]% respectivement en termes de chiffre d'affaires et de surface. Les magasins Star Confort, Antilles Bureautique et Venutolo auraient des parts respectives de [0-10]% et [0-10]% en valeur. Sur ce marché, la part du premier concurrent serait ainsi, en valeur, plus de [six-huit] fois inférieure à celle de la nouvelle entité. Un tel écart constitue un indice sérieux de position dominante. Par ailleurs il convient de noter que le deuxième concurrent est spécialisé dans la vente de bureaux et que le troisième concurrent est un magasin de petite taille.
130. Enfin, il ressort des tableaux de parts de marché détaillées fournies par les parties que les parts cumulées des parties dépasseraient 30 % en terme de chiffre d'affaires sur les catégories salle à manger ([30-40]%), chambre ([30-40]%) et salon ([30-40]%) (literie à [20-30]%). Sur chacun de ces segments, les concurrents suivants auraient des parts très largement inférieures à celles de la nouvelle entité.
131. L'opération est susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché martiniquais de la distribution de produits d'ameublement.
La distribution de produits électrodomestiques
Martinique - Electrodomestiques - Chiffre d'affaires
<emplacement tableau>
La distribution de produits blancs
132. Il ressort du tableau ci-dessus qu'en terme de chiffre d'affaires, la part de marché cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits blancs serait de [30-40]% (But [20-30]% et Conforama [10-20]%) après l'opération. Cette part serait de [10-20]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Guy Vieules (deux magasins représentant [20-30]% des parts de marché en chiffre d'affaires et [20-30]% en surface) et Connexion ([0-10]% en chiffre d'affaires et [10-20]% en surface).
133. Les parties obtiendraient leur part la plus élevée sur le segment du gros électroménager ([30- 40]% en chiffre d'affaires et [10-20]% en surface). Elles seraient néanmoins confrontées à la concurrence de Guy Vieules ([20-30]% en valeur et [20-30]% en surface) et Connexion ([10- 20]% en valeur et [10-20]% en surface).
134. Par ailleurs, le rapport d'enquête de la DDCCRF de Martinique indique qu'au niveau des produits électroménagers, il existe une concurrence forte de la part des spécialistes mais aussi des hypermarchés, notamment ceux des groupes de Bernard Hayot (Carrefour et Monsieur Bricolage) et de Robert Parfait (Hyper U).
135. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité, en dépit de sa part de marché élevée, resterait confrontée à la concurrence d'acteurs de poids. L'opération ne serait donc pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché martiniquais de la distribution de produits blancs.
La distribution de produits bruns
136. En terme de chiffre d'affaires, la part cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits bruns serait de [30-40]% (But [20-30]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [10-20]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties seraient les sociétés Guy Vieules ([10-20]% des parts de marché en valeur et [10-20]% en surface), le groupe Ho Hio Hen ([10-20]% en valeur et [20-30]% en surface) et Hyper U ([0-10]% en valeur et [0-10]% en surface).
137. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité, en dépit de sa part de marché élevée, resterait confrontée à la concurrence d'acteurs de poids. L'opération ne serait donc pas a priori susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché martiniquais de la distribution de produits bruns.
La distribution de produits gris
138. En terme de chiffre d'affaires, la part cumulée des parties sur le marché de la distribution des produits gris serait de [20-30]% (But [10-20]% et Conforama [10-20]%) après l'opération et de [10-20]% en terme de surface. Les principaux concurrents des parties sont les sociétés Guy Vieules ([10-20]% des parts de marché en valeur et [20-30]% en surface) et le groupe Ho Hio Hen ([10-20] % en valeur et [20-30]% en surface), avec notamment son enseigne CyberH.
139. A l'issue de l'opération, la nouvelle entité, en dépit de sa part de marché élevée, resterait confrontée à la concurrence d'acteurs de poids. L'opération ne serait donc pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur le marché martiniquais de la distribution de produits bruns.
Conclusion
140. Compte tenu de l'écart des parts de la nouvelle entité avec ses concurrents, l'opération soulève des doutes sérieux de concurrence sur le marché martiniquais de la distribution de meubles.
141. En revanche, la nouvelle entité sera confrontée à des concurrents de poids sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques.
d) Résumé concernant l'analyse des parts de marchés
142. A ce stade, le Conseil estime, au vu des parts détenues par les parties sur les différents marchés, que l'opération soulève des problèmes sérieux quant au maintien d'une concurrence suffisante :
- en Guadeloupe, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ;
- en Guyane, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ainsi que sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques ;
- en Martinique, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement.
2. L'UTILISATION DE L'INDICE HERFINDHAL HIRCHMAN
143. Sur les marchés concernés, le calcul de l'indice d'Herfindahl (HHI) avant et après l'opération confirme l'appréciation portée au vu de l'impact de l'opération sur les parts de marché cumulée des deux parties et l'écart qui les séparent de leurs concurrents. Rappelons que cet indice permet de présenter, sous la forme synthétique d'un nombre variant entre 0 (dans une situation de concurrence parfaite) et 10 000 (dans le cas polaire du monopole) la concentration du marché en tenant compte de la fragmentation des parts de marché de tous les acteurs présents. Il renseigne donc plus sur l'état de la concurrence que la simple prise en considération de la part de marché de l'entité candidate à la fusion.
144. La typologie suivante, communément admise, permet de délimiter les risques d'atteinte à la concurrence, selon la valeur prise par cet indice HHI ex post et les variations de cet indice avant et après l'opération.
i. Si l'indice HHI ex post est inférieur à 1000, il n'existe pas de risque d'atteinte à la concurrence.
ii. Si l'indice HHI est compris entre 1000 et 1800, alors l'opération comporte des risques si la variation de l'indice (?HHI) est supérieure à 100.
iii. Enfin si l'indice HHI est supérieur à 1800, les risques concurrentiels apparaissent dès que la variation de cet indice est supérieure à 50.
Les seuils indiqués ci-dessus sont rapidement atteints ou dépassés sur tout marché comportant un nombre relativement limité d'agents parmi lesquels un ou plusieurs détiennent une part de marché relativement élevée.
145. Au cas présent, pour les marchés sur lesquels des doutes ont été soulevés au vu de la part de l'entité fusionnée ex post les indices HHI s'établissent comme suit :
a) Guadeloupe - distribution de produits d'ameublement
Meubles
<emplacement tableau>
146. La prise en compte d'une frange concurrentielle constituée de nombreux petits magasins explique que l'indice HHI, sensible au nombre d'enseignes concurrentes et à leur importance relative, n'est pas très élevé sur ce marché (775 en surface et 1 103 en CA avant l'opération mais 1 275 en surface et 1 884 en CA après l'opération) malgré la part de marché des parties. L'opération se traduit néanmoins par un accroissement important de l'indice HHI (le *HHI est, en chiffre d'affaires, de 781 pour les produits d'ameublement).
b) Guyane - distribution de produits d'ameublement
<emplacement tableau>
147. L'opération se traduit sur ce marché guyanais par un accroissement très important de l'indice HHI ( + 1 630).
c) Guyane - distribution de produits électrodomestiques
Indices HHI en chiffre d'affaires
<emplacement tableau>
148. L'opération se traduit par un accroissement très important de l'indice HHI en chiffre d'affaires (+ 1 211 pour l'ensemble des produits électrodomestiques et + 1 529 lorsqu'on considère les produits blancs).
Indices HHI en surface
<emplacement tableau>
d) Martinique - distribution de produits d'ameublement
<emplacement tableau>
149. Il existe en Martinique une frange concurrentielle constituée de nombreux petits magasins. Ainsi l'indice HHI est relativement faible sur le marché de l'ameublement en Martinique (424 en surface et 880 en CA avant l'opération et 632 en surface mais 1 599 en CA après l'opération) ce qui, compte tenu de la part des parties, confirme que le marché est très fragmenté.
150. L'opération se traduit néanmoins sur le marché martiniquais par un accroissement important de l'indice HHI (le *HHI est, en chiffre d'affaires, de 719 pour les produits d'ameublement).
e) Conclusion sur les indices HHI
151. Les niveaux d'indices HHI après concentration sont tous très largement supérieurs à 1 000, exception faite de celui calculé sur les surfaces et concernant la distribution de meubles en Martinique (en valeur, l'indice concernant ce marché approche cependant les 1 500 points). Par ailleurs, les variations des indices dues à l'opération sont toutes de grande ampleur, allant jusqu'à 2 261 en Guyane (surface) pour la distribution de produits d'ameublement. L'utilisation de l'indice HHI confirme donc les problèmes identifiés au titre de l'analyse des parts de marché : l'opération conduit à des valeurs de l'indice HHI, en niveau ex post et en variation, largement supérieures aux seuils signalant la présence de risques concurrentiels.
3. LES MAGASINS BUT ET CONFORAMA SONT LES PLUS PROCHES SUBSTITUTS SUR LES MARCHES CONCERNES, CE QUI EST DE NATURE A CONFERER A L'OPERATION DES EFFETS RESTRICTIFS DE CONCURRENCE
152. Le format des magasins But et Conforama, les gammes de produits proposés, les services offerts comme le positionnement en prix font des parties à l'opération les plus proches substituts sur les marchés concernés, tandis que les magasins concurrents offrent des gammes de produits plus limitées ou ont des positionnements différents en matière de prix.
153. Ainsi, les magasins But et Conforama sont les seuls magasins multi-spécialistes présents en Martinique, vendant à la fois une large gamme de produits d'ameublement et de décoration et une large gamme de produits d'électrodomestique. En Guyane, un seul autre opérateur se situe sur les mêmes marchés que But et Conforama, à savoir la société Darjani qui exploite les magasins Megabriel et Mega 3. La DDCCRF de Guyane précise que " son positionnement commercial est identique à celui des parties prenantes au projet de concentration en terme de qualité et de services. L'ensemble de son fonctionnement l'assimile aux précédents, en dimension seulement plus réduite ". Il convient également de souligner que les magasins But et Conforama de Collery ont quasiment la même superficie et proposent la même étendue de gamme, des produits très comparables, des prix extrêmement proches et des services de qualité similaire.
154. Les dossiers soumis par les parties en vue d'obtenir des autorisations de la commission départementale d'équipement commerciale (CDEC) confirment ces observations. Ainsi, dans sa demande d'extension du magasin Conforama de La Jaille à Baie-Mahault, Guadeloupe, Fincar indique dans son étude de l'offre commerciale existante : " au total, les surfaces [de plus de 300 m2] correspondant à l'offre spécialisée sur la zone de chalandise atteignent 17 094 m2. Elles rassemblent toutefois des surfaces dont l'offre peut considérablement varier. En effet, 8 distribuent exclusivement des meubles, 5 de l'électroménager, hi fi et vidéo alors que seules 2 enseignes proposent une offre mixte (Conforama et But). De plus il faut noter que ces enseignes détiennent très souvent des positionnements commerciaux différents. En effet, les magasins Meubles Levitan, Casa ou encore Mobilier de France présentent une offre de meubles dont les niveaux de prix sont largement supérieurs à ceux pratiqués par Conforama " et précise : " il est évident que la seule enseigne véritablement concernée par le projet [d'extension] est But ". Dans sa demande d'ouverture du magasin Conforama Acajou, au Lamentin, Martinique, Fincar indique : " il existe aujourd'hui une distorsion évidente entre la surface de vente sur laquelle est exploitée le magasin Conforama actuel (1 700 m2) [Conforama Arawaks] et celle de But (4 100 m2), le seul concurrent ayant exactement la même activité que le projet " et s'intéressant à l'impact de l'ouverture sur le petit commerce et l'artisanat : " le commerce traditionnel [...] pourrait être concerné par l'ouverture du magasin Conforama. Or, spécialisé dans une vente " personnalisée ", accompagnée de services, et à contribution élevée, il n'est que marginalement concurrencé par la distribution de masse. En réalité, la concurrence s'exercera essentiellement sur le compétiteur " naturel " de Conforama, l'enseigne But ". Dans sa demande d'autorisation déposée en octobre 2003, Conforama lui-même écrit que, " [I]l existe aujourd'hui une distorsion évidente entre la surface de vente sur laquelle est exploitée le magasin Conforama actuel (1 700 m2) et celle de But (4 100 m2), le seul concurrent ayant exactement la même activité que le projet "
155. En outre, il ressort de ces études que les autres magasins présents sur le marché sont perçus différemment par les consommateurs. Ainsi, en ce qui concerne, par exemple la Guadeloupe, alors que les consommateurs accordent globalement les mêmes points forts et points faibles aux enseignes But et Conforama (prix compétitifs, bon service de livraison, choix moyen de meubles, meubles de qualité moyenne mais jeunes et modernes, etc.), les autres concurrents cités, présentent, selon les consommateurs, des profils différents. Les prix de Mobilia sont jugés peu compétitifs, le choix de meubles est moins vaste que celui trouvé chez But et Conforama, les caractéristiques des meubles étant également différentes : meubles plus originaux que ceux de But et Conforama mais nettement moins jeunes et modernes. Le service de livraison est jugé moyen et les conditions de crédit mauvaises. Les autres magasins d'ameublement sont aussi perçus par les consommateurs comme proposant des prix beaucoup moins compétitifs que ceux de But et Conforama en Guadeloupe et moins compétitifs, mais avec un écart plus faible, en Martinique. En ce qui concerne la Guyane, seuls les points de vente Mégabriel et Méga 3 sont perçus comme des substituts proches.
156. But et Conforama se distinguent également de leurs concurrents par leur forte notoriété, notamment parce qu'il s'agit d'enseignes nationales. Les enseignes But et Conforama ont en effet une image forte et bénéficient d'importants moyens de communication publicitaire. Le rapport d'enquête de la DDCCRF de Guadeloupe relève notamment que dans les pages publicitaires du journal local France-Antilles Guadeloupe, seul journal d'information quotidienne sur l'île, sur le total des publicités effectuées dans le domaine de l'équipement de la maison en quatre mois de parution (février à mai 2007), 23 relevaient de l'enseigne But (page entière), 15 d'Electronautic (actif seulement dans le domaine de la distribution de produits électrodomestiques), 5 de Géant du meuble, 4 d'André Haan et 3 de Meubles Lévitan (1/3 page pour ces autres enseignes). De la même manière, le rapport note que pour l'année 2006, toujours d'après la consultation du France-Antilles, il a été relevé que sur la période d'avril à octobre 2006, 31 publicités sont parues au profit de But, 17 au profit de Conforama (page entière) et 10 pour d'autres enseignes, majoritairement au profit d'Electronautic en format 1/3 page. Le rapport d'enquête de la DGCCRF de Martinique relève, par ailleurs, des publicités fréquentes des enseignes But et Conforama sur les années 2006 et 2007 au moyen de pages publicitaires du journal local France-Antilles, d'affichages 4 par 3 et de distribution de catalogues.
157. Cette proximité est aussi attestée par la vive concurrence que se livrent les deux parties avant l'opération comme l'ont souligné les rapports d'enquête des DDCCRF. La DDCCRF de Guadeloupe précise : " En conclusion, on peut penser que le niveau actuel de concurrence sur le marché de l'équipement de la maison est vif et alimenté précisément par la concurrence actuelle qui s'exerce entre But et Conforama. Sur les dernières années, son impact a fait chuter les prix au profit du consommateur ". La DGCCRF de Guyane indique pour sa part : " La concurrence est régulière depuis 20 ans entre les deux principaux magasins But (créé en 1986) et Conforama (1987) de la zone Collery à Cayenne [...] Cette concurrence s'est traduite pour le consommateur par un niveau de prix relativement bas; le secteur de l'équipement du foyer est un de ceux pour lesquels les niveaux de prix sont sans aucun doute les plus favorables au consommateur de Guyane. Ces deux magasins [...]ont créé en fait une forte dynamique dans leur secteur qui a rendu très difficile le maintien de concurrents ".
158. Or, dans l'hypothèse d'une fusion entre les deux concurrents les plus proches, qui représentent pour les clients leurs deux premiers choix, il devient profitable pour les parties d'augmenter unilatéralement leurs prix, dès lors que cela ne se traduira pas par une perte de chiffres d'affaires au profit des concurrents, mais par un report depuis l'un des établissements de l'entreprise fusionnée. En effet, même si dans ce secteur la demande varie fortement en fonction du prix, l'augmentation des prix peut néanmoins rester profitable à l'une des parties à la concentration puisqu'elle récupère une fraction de la demande perdue du fait de la hausse des prix réalisée par l'autre partie. C'est par exemple, l'analyse qu'a fait le ministre de l'Economie et des Finances dans sa décision Mr Bricolage/Tabur en date du 29 août 2002. Une étude Ipsos DOM de 2007 (Guadeloupe, Guyane, Martinique) fournie par les parties souligne d'ailleurs que, dans l'hypothèse où une seule des deux enseignes devait relever ses prix, ce sont, selon le département, entre 50 et 66 % de leur clientèle qui se dirigeraient directement vers l'autre enseigne.
159. Les effets unilatéraux de l'opération doivent donc être qualifiés d'importants.
4. ANALYSE DES BARRIERES A L'ENTREE ET DE LA CONCURRENCE POTENTIELLE
160. Outre les barrières liées à la réglementation applicable à l'ouverture de grandes surfaces de distribution, d'autres barrières à l'entrée, telles les difficultés de mise en place d'une chaîne logistique ou encore l'étroitesse des marchés, sont mises en avant aussi bien dans le test de marché que dans les analyses menées par les DDCCRF.
Les barrières réglementaires
161. Comme pour l'ensemble du secteur de la distribution, la réglementation sur la création ou l'extension de l'équipement commercial doit être prise en compte. Les parties soulignent que les refus opposés aux demandes d'autorisation concernant l'équipement de la maison ont été rares au cours des dernières années. Toutefois, les analyses récentes en termes de saturation de la demande suggèrent que les autorisations risquent à l'avenir, et à réglementation inchangée, d'être plus difficiles à obtenir pour les régions centrales de Martinique et Guadeloupe.
162. En Guadeloupe, les travaux de l'ODEC (observatoire départemental d'équipement commercial), relatifs au SDC (schéma de développement commercial), font ressortir que globalement le marché de l'équipement arrive à saturation et que peu de possibilités de création existeraient à ce jour pour la région de Pointe-à-Pitre. Un concurrent a notamment soutenu " jusqu'à présent, nos demandes successives d'autorisation CDEC ont systématiquement échoué ". D'autres zones géographiques, le Sud Basse-Terre, le Nord, et l'Est de la Grande Terre pourraient toutefois faire l'objet d'une analyse plus favorable.
163. En Martinique, il ressort du projet de SDC que, si les capacités sont saturées pour la grande distribution alimentaire, il subsiste quelques marges de manœuvre pour des grandes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison, notamment en ce qui concerne la conurbation de Fort-de-France. Par ailleurs, quelques zones géographiques, du Sud, du Nord Atlantique, et Caraïbes et du centre Atlantique restent mal pourvues. Il s'agit toutefois de zones excentrées de la conurbation et ce, bien qu'elles représentent 80 % de la richesse des ménages et de la population.
164. Toutefois, l'ouverture de grandes surfaces spécialisées dans les zones excentrées des deux îles n'est susceptible de présenter un degré d'attractivité suffisant pour les consommateurs que si elle s'intègre dans des projets d'aménagement de zones commerciales plus larges. Comme les parties le précisent par ailleurs, leurs propres magasins sont situés dans les principaux centres d'activités de chacun des territoires, qui regroupent GSA et GSS et de fait, la quasi-totalité des grandes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison. Ainsi, en Martinique, la zone des Mangles regroupe, sur une zone de moins d'un kilomètre de long, la totalité des enseignes spécialistes et multi-spécialistes des secteurs concernés. Le même phénomène peut être constaté en Guadeloupe (dans la zone de Jarry) et en Guyane (dans la zone de Collery). Les parties ont souligné le rôle de locomotive que pouvait jouer l'installation de GSA dans de nouvelles zones même plus excentrées par rapport aux principaux centres d'activités, sans toutefois être en mesure de citer un projet précis. Il est donc probable que les zones pour lesquelles de nouvelles autorisations des CDEC pourraient être obtenues présentent une faible attractivité pour d'éventuels investisseurs.
165. En Guyane, le degré de saturation de la zone de chalandise où sont présentes les parties semble faible. Ainsi, le rapport d'instruction de la demande de création d'un magasin But de 5 990 m² en 2006 précise que la densité commerciale actuelle de la Guyane est de 43 m² pour 1 000 habitants contre 127 pour l'ensemble métropolitain3. De plus, les surfaces de proximité (moins de 300 m² de surface de vente) sont peu nombreuses et offrent essentiellement des produits " haut de gamme ". Des autorisations d'ouverture de grandes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison concurrentes des parties ne devraient donc pas être difficiles à obtenir. L'enseigne Mégabriel a d'ailleurs obtenu en 2005 une autorisation auprès de la CDEC pour l'ouverture d'une nouvelle surface de 2 500 m².
La taille des marchés et leur potentiel de croissance
166. Certains concurrents potentiels ont mentionné l'étroitesse des marchés comme constituant d'une des barrières à l'entrée sur les marchés géographiques concernés, notamment au regard du coût de la mise en place d'une logistique d'approvisionnement. Le rapport de la DDCCRF de Guyane attire également l'attention sur cet obstacle, le département comptant selon les dernières estimations de l'INSEE au 1er janvier 2007, 202 000 habitants. La population de la Guadeloupe s'élève à 422 496 habitants selon les résultats du dernier recensement officiel de 1999. Le recensement de 1999 comptabilise 381 427 habitants pour la Martinique.
167. En revanche, la partie notifiante met en avant la forte croissance démographique de ces départements, notamment en Guyane où la population a augmenté de près de 40 % entre 1990 et 1999. Selon elle, la jeunesse des populations confère à ces marchés un fort potentiel de croissance pour la demande de produits d'équipement de la maison.
* Perspectives démographiques
<emplacement tableau>
168. Au total, les variables pertinentes pour un investisseur potentiel mesurant le potentiel de la demande sur les marchés de l'équipement de la maison aux Antilles-Guyane sont les données démographiques et les dépenses moyennes par ménage pour les produits en cause. Le Conseil note qu'a priori, ce sont également les données qui sont prises en compte par les instances chargées de l'application de la législation sur l'équipement commercial dans les études mentionnées ci-dessus et que les conclusions tirées par ces instances, d'une part, et par les investisseurs potentiels, d'autre part, devraient donc se recouper.
Les autres barrières à l'entrée
169. D'autres barrières à l'entrée, spécifiques aux marchés géographiques concernés, ont été signalées par le test de marché et les rapports d'enquête. Ces barrières à l'entrée tiennent notamment à l'insularité et à l'éloignement des centres de production, qui accroît les coûts d'une chaîne logistique d'approvisionnement. Le caractère élevé des coûts de transport (octroi de mer, prix du transport maritime) et leur accroissement récent du fait de l'augmentation du prix du pétrole ont, en particulier, été soulignés.
170. Par ailleurs, l'attention du Conseil a été attirée sur la rareté du foncier, son coût et les difficultés d'accès à la propriété foncière. Les parties elles-mêmes ont indiqué que " le foncier est l'une des clefs de la distribution dans les Antilles. Certains acteurs ont des réserves foncières dues à des avantages historiques. En Guadeloupe et en Martinique, il est impossible d'acquérir du foncier de grande taille à un prix " normal " dans les zones d'implantation historique ". Selon les parties, il est toutefois possible pour les grandes enseignes d'accorder une franchise aux acteurs qui détiennent la propriété foncière. Par ailleurs, il existe de grands groupes d'origine locale qui possèderaient d'ores et déjà, selon les parties, des réserves foncières. Enfin, les parties ajoutent que l'acquisition de terrain peut se révéler plus facile en Martinique, dotée selon elles de ressources foncières abondantes.
171. En Guyane, la situation de l'un des concurrents suggère l'existence d'autres obstacles à l'installation de nouvelles surfaces commerciales. En effet, l'ouverture d'un magasin à l'enseigne Galadriel, autorisée par la CDEC en 2004, reste subordonnée à la délivrance du permis de construire, bloquée en raison des problèmes liés à l'aménagement global de la zone de Collery concernée, notamment en termes de mise à niveau des infrastructures routières.
172. Enfin, le faible niveau du revenu moyen observé dans les trois départements en réduit l'attractivité commerciale. Le revenu moyen est en effet sensiblement inférieur à celui de la population métropolitaine. Ainsi, selon une étude de l'INSEE de 2006, les PIB par habitant des DOM sont " bien en dessous de la moyenne nationale : en 2001, ils se situent entre 50 % et 63 % du PIB par habitant de métropole. " Selon l'INSEE, le revenu disponible brut par habitant se situe à 63,2 % du niveau national en Guadeloupe, 54,2 % en Guyane et 70,2 % en Martinique.
Conclusion sur les barrières à l'entrée et la concurrence potentielle
173. Au total, le Conseil constate que les barrières à l'entrée, sur les marchés concernés, d'une grande surface spécialisée dans les produits d'équipement de la maison, susceptible de concurrencer la nouvelle entité, sont relativement fortes.
174. Cette analyse est confirmée sur les marchés de l'ameublement par l'examen des entrées récentes sur ces marchés. Les parties notifiantes citent de nombreux magasins qui seraient entrés sur ces marchés récemment. Toutefois, la quasi-totalité des magasins en cause sont des magasins de petite taille, commercialisant essentiellement de la décoration et du petit meuble bazar. En ce qui concerne les produits électrodomestiques, de nouvelles GSA se sont effectivement installées. En revanche, aucune nouvelle enseigne de grande surface spécialisée en produits d'équipement de la maison n'est entrée sur les marchés géographiques concernés.
175. Les réponses apportées par les grandes enseignes nationales de l'ameublement ou, plus généralement, de produits d'équipement de la maison, dans le cadre du test de marché ne sont pas de nature à infirmer l'existence de fortes barrières à l'entrée puisqu'elles ont toutes déclaré qu'elles n'avaient aucun projet en vue en ce qui concerne une éventuelle installation aux Antilles-Guyane, y compris en accordant une franchise à un exploitant tiers. Elles ont justifié ces réponses par la taille trop limitée des marchés, les problèmes de logistique et les difficultés de suivi du concept des enseignes. Les parties ont fait valoir que des groupes britanniques investissaient massivement dans les Caraïbes. Ce comportement ne peut toutefois être extrapolé sur les Antilles-Guyane et le test de marché n'a confirmé aucun projet de ce type. De même, l'installation éventuelle de la société Ikea à Saint-Domingue n'est pas de nature à crédibiliser le projet d'une installation prochaine de cette enseigne aux Antilles, éventualité par ailleurs démentie en séance par la société concernée.
176. Ces barrières s'opposent à l'entrée de nouvelles enseignes mais également au repositionnement de l'offre des enseignes présentes sur ces marchés, ou sur des marchés connexes comme ceux des produits de décoration, dans l'hypothèse où ces enseignes voudraient accroître le degré de substituabilité entre leur offre et celle de la nouvelle entité, par exemple à la suite d'une hausse des prix de cette dernière. Les projets d'extension des surfaces de vente pour l'accroissement des capacités d'exposition et de stockage se heurteraient en effet aux barrières liées à la réglementation sur l'équipement commercial ou aux contraintes pesant sur le foncier exposées au paragraphe 169 ci-dessus. Par ailleurs, l'extension, par les enseignes déjà implantées localement, des gammes de produits qu'elles offrent pose le problème de leur accès à un approvisionnement à des conditions aussi favorables que celles obtenues par Cafom et Fincar.
5. CONCLUSION GENERALE SUR LES RISQUES D'ATTEINTE A LA CONCURRENCE
177. La partie notifiante fait valoir que les risques pour le consommateur sont limités puisque, d'une part, l'élasticité-prix de la demande locale serait trop forte pour permettre à la nouvelle entité de relever ses prix, et, d'autre part, parce les deux enseignes ne pourraient que maintenir une image de " discounter ".
178. Toutefois, aucune donnée sur l'élasticité-prix de la demande de meubles, ou plus généralement, de produits d'équipement de la maison, sur les marchés géographiques concernés n'est disponible. Si, comme les parties le mettent an avant, les études sur les revenus confirment que le niveau de revenu moyen aux Antilles-Guyane est plus faible qu'en métropole, du fait notamment d'un niveau de chômage plus élevé, aucune conséquence sur l'élasticité-prix de la demande pour ce type de produits en particulier ne peut en être tirée. De même, les conclusions d'une étude IPEA (" Moins de 35 ans, les achats de meuble de la jeune génération en 2003 ") selon lesquelles les consommateurs jeunes et à faible revenu, consacrent une part réduite de leur budget à l'achat de meubles et effectuent majoritairement leurs achats dans des magasins d'équipement du foyer (type But ou Conforama) ou du jeune habitat (Ikea), n'induisent pas une faible élasticité-prix de la demande pour les produits vendus par ces enseignes.
179. En tout état de cause, même si l'élasticité-prix était assez élevée pour les produits vendus par les enseignes But et Conforama sur les marchés concernés, cela n'aurait pas pour conséquence de rendre toute augmentation unilatérale de prix par les parties non profitable si elle ne concernait que certains des espaces de vente concernées par l'opération. En effet, une forte élasticité au prix des consommateurs implique seulement qu'en cas d'augmentation unilatérale des prix par certains points de vente, une proportion importante de leur clientèle se reporterait sur d'autres points de vente. Si ce report se fait dans une proportion importante en direction des autres magasins des parties du fait de leur très forte substituabilité et de l'éloignement des concurrents, l'augmentation unilatérale des prix peut demeurer globalement profitable. Or comme cela a été exposé ci-dessus, les magasins But et Conforama sont des substituts très proches, les autres concurrents, particulièrement en Guadeloupe et en Martinique, n'étant que des substituts imparfaits.
180. S'agissant de l'image de " discounter " des magasins But et Conforama, forgée pendant deux décennies, mise en avant par les parties, le Conseil constate que celles-ci ont également indiqué durant l'instruction qu'elles n'écartaient pas la possibilité, à terme, de faire évoluer le concept de l'une des deux enseignes et de le rénover sans doute par un rapprochement vers des concepts du type Ikea et Alinéa. Cette évolution pouvant éventuellement conduire à l'abandon de l'une des deux enseignes, Conforama ou But et à la création d'une nouvelle enseigne propre. Les parties n'écartent donc pas elles-mêmes, la possibilité de faire évoluer l'image de marque d'au moins une des enseignes concernées.
181. Il résulte de l'ensemble des éléments développés ci-dessus que l'opération projetée est de nature à porter atteinte à la concurrence :
* En Guadeloupe, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement.
* En Guyane, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ainsi que sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques.
* En Martinique, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement.
VI. Le bilan économique de l'opération
182. Les parties mettent en avant les gains d'efficacité résultant de l'opération. Ces gains d'efficacité sont liés au regroupement des achats au sein d'une même centrale d'achat Cafom pour chacune des deux enseignes et à une amélioration de la gestion du stock et du service après-vente. Par ailleurs, des économies pourraient être réalisées sur divers postes de coûts : primes d'assurance et frais bancaires, communication et publicité, prestations externes. Elles précisent qu'une partie de ces économies leur permettra de développer un service de vente aux collectivités. Selon les parties, les économies ainsi générées leur permettront de proposer aux clients des produits moins chers et un service après-vente de meilleure qualité. En séance, les parties ont cependant indiqué qu'elles privilégieraient la rénovation des magasins et l'offre aux consommateurs des services additionnels.
183. L'affirmation des parties sur la transmission aux consommateurs des gains d'efficacité ainsi identifiés n'est pas étayée d'arguments en rapport avec les difficultés que pose cette transmission dans les circonstances de l'espèce. En effet, les prix de vente sont, en général, principalement déterminés par les coûts variables de production et une baisse de ceux-ci doit effectivement conduire, toutes choses égales par ailleurs, à une réduction du prix de vente aux consommateurs. L'intensité de la transmission dépend alors de l'élasticité de la demande au prix et de la pression concurrentielle. Or, les parties affirment, sans preuve, que la première est élevée et l'analyse effectuée dans le présent avis montre que la seconde serait faible si l'opération notifiée se faisait. Ensuite, parmi les économies de coût indiquées par les parties, les primes d'assurance, les publicités, dépliants et prospectus commerciaux et les frais bancaires sont des coûts fixes dont la baisse n'influe pas directement sur le prix de vente mais sur la profitabilité de l'entreprise.
184. Le Conseil s'interroge par ailleurs quant au caractère nécessaire de l'opération pour l'obtention des gains d'efficacité mentionnés par les parties, en particulier s'agissant du regroupement des achats. En effet, la création d'une centrale d'achat commune permettrait les mêmes économies de coût.
185. Enfin, les parties ont produit des éléments contradictoires en ce qui concerne les baisses de prix d'achat aux fournisseurs que permettrait l'opération. En effet, les parties ont affirmé que leur opération de concentration ne leur permettrait pas d'obtenir des prix d'approvisionnement plus faibles, la " grande taille " étant facteur de renchérissement des coûts d'approvisionnement du fait des contraintes plus importantes de " sécurisation des approvisionnements ", comparés à des entités plus petites.
186. Dans ses observations, le commissaire du Gouvernement relève que de nombreux magasins de biens d'équipement de la maison sont sortis des marchés concernés au cours de la dernière décennie. Il se demande si un tel phénomène manifeste que le niveau de concurrence est trop élevé dans les DOM, les enseignes But et Conforama s'étant livrées à une guerre des prix sans rapport avec les coûts qu'elles supportaient et finalement préjudiciable à la diversité de l'offre. Le commissaire du Gouvernement relève que " leur rapprochement pourrait alors être le signal d'un niveau de concurrence plus réaliste pour lequel l'entrée durable d'opérateurs serait de nouveau possible ".
187. Il ne ressort cependant pas de l'analyse du dossier que le niveau de prix actuel des produits vendus dans les magasins But et Conforama soit incompatible avec une perspective de rentabilité des entreprises concernées. Celles-ci d'ailleurs ne justifient pas l'opération par la nécessité d'augmenter leur prix de vente aux consommateurs. En tout état de cause, le Conseil rappelle que l'objectif poursuivi en contrôle des concentrations est in fine la protection du bienêtre des consommateurs. Celle-ci ne passe pas toujours par la défense de la structure de marché existante, quand bien même celle-ci serait plus concurrentielle, dans la mesure notamment où les consommateurs pourraient bénéficier de gains d'efficacité liés à l'opération. Il ressort toutefois de l'analyse menée ci-dessus que la transmission de gains d'efficacité aux consommateurs était peu probable.
188. Enfin, le Conseil note que les parties n'ont pas apporté d'élément concernant le progrès social qui pourrait résulter de l'opération. En séance, les parties ont mentionné les problèmes d'emploi et plus généralement, la fragilité de l'économie locale face aux conflits du travail, sans toutefois, expliquer la façon dont l'opération pourrait contribuer à résoudre ces problèmes, ni apporter d'argument à la possibilité d'envisager l'opération sous l'angle de la sauvegarde d'une entreprise défaillante.
VII. Les engagements susceptibles d'être proposés
189. Lors de la première phase d'examen de l'opération, la partie notifiante avait proposé certains engagements aux services du ministre de l'Economie. Ces engagements consistaient notamment dans la cession du magasin But de Collery à Cayenne (2 465 m²), du magasin Conforama de Kourou (870 m²) et du magasin YxorBut de Cayenne (476 m²).
190. Bien que ces engagements n'aient pas été formellement maintenus devant le Conseil, il convient de souligner que ceux-ci ne concernent que la Guyane et n'auraient qu'un impact limité en terme de parts de marché, de l'ordre de [0-10] points seulement en valeur, sur le marché de l'ameublement total et de [0-10] points sur le marché du meuble hors décoration. Les réductions de parts de marché seraient plus sensibles sur les marchés de l'électrodomestique mais l'écart entre la nouvelle entité et ses concurrents immédiats resterait considérable. De plus, le magasin But de Collery a déjà fait l'objet d'un engagement de fermeture, non exécuté à ce jour, auprès de la CDEC de Guyane et n'a pas été pris en compte dans les parts de marché calculées cidessus.
191. Dans leurs observations écrites, les parties ont également évoqué la possibilité de s'engager à créer une structure juridique ad hoc composée d'une société commune (la société Cafom) et de deux structures sociétaires différentes, l'une abritant l'enseigne But et l'autre l'enseigne Conforama. Les deux structures sociétaires seraient dotées de moyens humains propres et auraient pour fonction la définition et la mise en œuvre de la politique commerciale propre à chaque enseigne. Selon les parties, cette structure organisationnelle permettrait de garantir l'absence de hausse de prix et le maintien d'une concurrence effective entre les deux enseignes. Un tel engagement semble toutefois, d'une part, difficilement contrôlable et, d'autre part, ne permet en rien de garantir l'absence de coordination des politiques commerciales des deux enseignes.
192. De fait, seuls des engagements structurels pourraient permettre de remédier aux atteintes à la concurrence identifiés. De tels engagements devraient porter sur la cession, à un ou des repreneurs crédibles et indépendant, de magasins viables de surface suffisante pour contrebattre la puissance de la nouvelle entité, de façon que soit maintenue la pression concurrentielle existant avant l'opération sur chacun des deux marchés de produits - produits d'ameublement et produits électrodomestiques - et chacun des marchés géographiques en cause.
Sur la base des constatations qui précèdent, le Conseil de la concurrence est d'avis :
Que la concentration résultant de l'acquisition de la société Fincar par la société Cafom est de nature à porter atteinte à la concurrence :
* en Guadeloupe, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ;
* en Guyane, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ainsi que sur chacun des trois marchés de la distribution de produits électrodomestiques ;
* en Martinique, sur le marché de la distribution de produits d'ameublement ; et n'est pas de nature à apporter au progrès économique une contribution suffisante.
L'opération pourrait avoir des effets d'autant plus graves qu'elle concerne des territoires isolés dont les populations ont par ailleurs un niveau de revenus nettement inférieur à la moyenne nationale.
Notes
1 Voir par exemple les décisions C 2003-285, 7/4/2004, " Leroy Merlin/Domaxel ", C2002-168, 10/2/2003, " Leroy Merlin/OBl ", et C2002-51, 29/8/2002, " Mr. Bricolage/Tabur ".
2 Les chiffres placés entre crochés sont volontairement imprécis pour préserver la confidentialité des données transmises au Conseil.
3 Les densités commerciales constatées doivent toutefois être rapprochées de la réalité économique du territoire : niveaux de revenu, habitudes de consommation...