Livv
Décisions

Cass. crim., 14 novembre 2007, n° 05-85.740

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dulin (faisant fonction)

Rapporteur :

Mme Degorce

Avocat général :

M. Di Guardia

Avocats :

Me Ricard, SCP Celice, Blancpain, Soltner, SCP Delaporte, Briard, Trichet

TGI Nanterre, JLD, du 15 févr. 2005

15 février 2005

LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par la société A, la société B, la société C, la société D, la société E, contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nanterre, en date du 15 février 2005, qui, agissant sur commission rogatoire du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, a désigné des officiers de police judiciaire pour assister aux opérations de visites et de saisies en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi de la société C : - Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II - Sur les pourvois des sociétés D, E, A et B : - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour les sociétés D et E, pris de la violation des articles L. 450-4 et L. 450-6 du Code de commerce, des points 1, 2 et 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce et 81-1 du traité de Rome, 137-1, 591, 593 et 595 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que M. Benaiche, juge des libertés et de la détention au Tribunal de grande instance de Nanterre, a désigné Delphine X, Estelle Y, Elsa Z, Fabrice A et Emmanuel B, officiers de police judiciaire territorialement compétents, pour assister aux opérations de visite et de saisies qui devront se dérouler dans les locaux de la société D, <adresse> ;

"alors que l'ordonnance autorisant des visites domiciliaires en application de l'article L. 450-4 du Code de commerce, doit faire par elle-même la preuve de sa propre régularité ; que si cette autorisation est délivrée par le juge des libertés de la détention, il résulte des articles 48 et 49-VI de la loi n° 2000-516 du 16 juin 2000 que ce juge doit non seulement être un magistrat du siège ayant rang de président, de premier président, ou de vice-président, mais encore qu'il doit être désigné par le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ; qu'en l'absence de mention de l'ordonnance attaquée sur ce point, l'habilitation du magistrat désigné en qualité de juge des libertés de la détention doit être annexée en copie et certifiée conforme à l'ordonnance ; qu'il ne résulte d'aucune production annexée en copie à l'ordonnance, et d'aucune mention de ladite ordonnance attaquée que M. Benaiche était un magistrat du siège ayant rang de président, de premier président, ou de vice-président, et qu'il a été désigné par le Tribunal de grande instance de Nanterre en qualité de juge des libertés de la détention lorsqu'il a rendu l'ordonnance attaquée ; qu'en l'absence de mention ou de production essentielle de ladite habilitation, les dispositions des articles L. 450-4 du Code de commerce et 137-1 du Code de procédure pénale ont été méconnues" ;

Attendu qu'aucune disposition légale n'impose au juge des libertés et de la détention, qui tient de l'article L. 450-4 du Code de commerce sa compétence pour autoriser les visites et saisies de documents, de mentionner dans l'ordonnance l'origine de sa désignation ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation proposé pour les sociétés D et E, pris de la violation des articles L. 450-4 et L. 450-6 du Code de commerce, des points 1, 2 et 4 de l'article L. 420-1 du Code de commerce et 81-1 du traité de Rome, 591, 593 et 595 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a désigné Delphine X, Estelle Y, Elsa Z, Fabrice A et Emmanuel B, officiers de police judiciaire territorialement compétents, pour assister aux opérations de visite et de saisies qui devront se dérouler dans les locaux de la société D, <adresse> ;

"aux motifs que vu l'ordonnance en date du 8 février 2005 et l'ordonnance rectificative du 11 février 2005 de M. Grouman, juge des libertés et de la détention au Tribunal de grande instance de Paris ; que par lesdites ordonnances, Jean C, Directeur régional, chef de la Direction Nationale des Enquêtes de Concurrence, de Consommation et de Répression des Fraudes, a été autorisé à procéder ou à faire procéder à des visites et à la saisie de tous documents nécessaires pour apporter la preuve de pratiques anticoncurrentielles sur le marché de la gestion des droits dans le football professionnel et dans celui de la publicité dans les stades de foot ; que, parmi les entreprises suspectées de se livrer à de telles pratiques prohibées par les articles L. 420 1 et 2 et L. 420-2 du Code de commerce et 81-1 et 82 du traité de Rome se trouve D, <adresse>, qui a ses locaux dans le ressort territorial de notre tribunal ; que pour cette raison, par l'ordonnance susvisée, le juge des libertés et de la détention au Tribunal de grande instance de Paris nous a donné commission rogatoire pour désigner les officiers de police judiciaire territorialement compétents pour assister à ces opérations de visite et de saisies effectuées dans le ressort de notre juridiction et en contrôler la bonne exécution ; que Jean C, Directeur régional, chef de la Direction Nationale des Enquêtes de Concurrence, de Consommation et de Répression des Fraudes et que M. le Directeur départemental à Nanterre sont autorisés à désigner, parmi les enquêteurs placés sous leur autorité respective et habilités par les arrêtés des 22 janvier 1993 et 11 mars 1993 modifié, ceux qui seront chargés d'effectuer les opérations de visite et de saisie ;

"alors que la cassation à intervenir sur l'ordonnance du 8 février 2005 du Tribunal de grande instance de Paris qui a autorisé l'Administration à procéder à des visites et saisies de documents sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce dans les locaux de la société D <adresse>, entraînera par voie de conséquence cassation de l'ordonnance attaquée qui a, sur commission rogatoire de l'ordonnance du Tribunal de grande instance de Paris, désigné Delphine X, Estelle Y, Elsa Z, Fabrice A et Emmanuel B, officiers de police judiciaire territorialement compétents, pour assister aux opérations de visite et de saisies qui devront se dérouler dans les locaux précités" ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour la société A, pris de la violation des articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 450-4 du Code de commerce, 10 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et de sauvegarde des libertés individuelles, 56-2, 591, 593 et 609 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Nanterre a désigné les officiers de police judiciaire territorialement compétents pour assister aux opérations de visites et de saisies de documents dans les locaux de la société A, en vertu d'une ordonnance du 8 février 2005, et d'une ordonnance rectificative du 11 février 2005, rendues par le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Paris ;

"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 56-2 du Code de procédure pénale, les perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat qui veille à ce que les investigations conduites ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession de journaliste et ne constituent pas un obstacle ou n'entraînent pas un retard injustifié à la diffusion de l'information ; qu'en se bornant à désigner ceux des officiers de police judiciaire territorialement compétents appelés à assister aux opérations de visite et de saisie de documents dans les locaux de la société A, entreprise de communication audiovisuelle, le juge des libertés et de la détention, agissant sur commission rogatoire, a violé les articles visés au moyen ;

"alors, d'autre part, que la cassation remet la cause et les parties au même état où elles étaient avant la décision annulée ; qu'elle postule l'annulation de tout ce qui a été la suite et/ou l'exécution des dispositions censurées ; que la cassation à intervenir sur le pourvoi introduit par la société A à l'encontre des ordonnances des 8 et 11 février 2005 entraînera, par voie de conséquence, celle de l'ordonnance du 15 février 2005 rendue par le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Nanterre" ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour la société B, pris de la violation des articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 450-4 du Code de commerce, 10 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et de sauvegarde des libertés individuelles, 56-2, 591, 593 et 609 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Nanterre a désigné les officiers de police judiciaire territorialement compétents pour assister aux opérations de visite et de saisie de documents dans les locaux de la société B, en vertu d'une ordonnance du 8 février 2005, et d'une ordonnance rectificative du 11 février 2005, rendues par le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Paris ;

"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 56-2 du Code de procédure pénale, les perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat qui veille à ce que les investigations conduites ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession de journaliste et ne constituent pas un obstacle ou n'entraînent pas un retard injustifié à la diffusion de l'information ; qu'en se bornant à désigner ceux des officiers de police judiciaire territorialement compétents appelés à assister aux opérations de visite et de saisie de documents dans les locaux de la société B, entreprise de communication audiovisuelle, le juge des libertés et de la détention, agissant sur commission rogatoire, a violé les articles visés au moyen ;

"alors, d'autre part, que la cassation remet la cause et les parties au même état où elles étaient avant la décision annulée ; qu'elle postule l'annulation de tout ce qui a été la suite et/ou l'exécution des dispositions censurées ; que la cassation à intervenir sur le pourvoi introduit par la société B à l'encontre des ordonnances des 8 et 11 février 2005 entraînera, par voie de conséquence, celle de l'ordonnance du 15 février 2005 rendue par le juge des libertés et de la détention près le Tribunal de grande instance de Nanterre" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu, d'une part, qu'après la clôture des opérations de visites et de saisies de documents en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles, seul est compétent, pour statuer sur la régularité du déroulement de ces opérations, le juge les ayant autorisées ;

Attendu, d'autre part, que le rejet, par arrêt de la Cour de cassation, en date de ce jour, du pourvoi formé contre l'ordonnance distincte mentionnée au moyen prive ce dernier de tout fondement ; d'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette les pourvois.