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Décisions

Cass. crim., 30 octobre 2007, n° 06-86.755

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Farge (faisant fonction)

Rapporteur :

M. Palisse

Avocat général :

M. Finielz

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Vier, Barthélémy, Matuchansky

Montpellier, ch. corr., du 1er août 2006

1 août 2006

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X Gilbert, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, en date du 1er août 2006, qui, pour publicité mensongère, tromperie, contrefaçon et usage de faux document administratif, l'a condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euro d'amende ainsi qu'à une mesure de publication et d'affichage, et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 121-1 du Code pénal, L. 121-1, L. 121-4, L. 121-5, L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation, 441-1 et suivants du Code pénal, L. 710-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilbert X coupable de publicité mensongère, de tromperie, d'usage de faux dans un document administratif et de contrefaçon, l'a condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 10 000 euro, a ordonné à titre de peine complémentaire la publication et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs que pour sa défense devant la cour, Gilbert X se contente de mettre en avant les agissements de son beau-frère et co-gérant des sociétés concernées, M. Y, en déclarant être pour sa part totalement étranger aux faits qui lui sont reprochés ; que Gilbert X qui ne conteste pas être co-gérant des sociétés B et C, occupait au sein de ces sociétés le poste de responsable technique et plus particulièrement de juriste ; qu'à ce titre et même en sa seule qualité de consommateur, il ne pouvait être ignorant de la quantité très importante de vins de Maury et de muscat de Rivesaltes qui avait été commercialisée auprès des grandes surfaces avec un étiquetage comportant des références de qualité inexactes ; que de même il ne pouvait être ignorant en sa qualité de juriste de la nécessité qu'il y avait pour les sociétés qu'il dirigeait de vérifier auprès de l'INPI les marques utilisées et le logo déposé ; qu'en réalité, ce n'est que lorsque les enquêtes étaient en cours et qui était dévoilé le stratagème utilisé que Gilbert X s'est empressé d'adresser à son co-gérant deux lettres de démission ; que des milliers de bouteilles comportant ces fausses distinctions et indications que ne pouvait pas ne pas voir Gilbert X sur les chaînes d'embouteillage et d'étiquetage, que ce dernier a manifestement vu les factures d'achat des vins concernés et se devait de faire le rapprochement qui s'imposait entre les qualités des vins achetés et les inscriptions sur les bouteilles offertes à la vente ; que son attention a manifestement été attirée par le médaillon " Mâcon médaille d'or " apposé sur les bouteilles de Maury et par les 20 000 collerettes portant sur la fausse mention " sélectionnée par le guide Hachette des vins 2000 " ; que le logo et la marque " le buveur " déposés par " la foire nationale des vins de France, foire de Mâcon " sont particulièrement connus des professionnels et ne pouvaient être apposés sur un macaron collé sur des bouteilles de vin sans que le "juriste" des sociétés B et C ne vérifie l'accord de la personne physique ou morale titulaire de cette marque ou de ce logo, que c'est donc en toute connaissance de cause que Gilbert X a accepté, voire a co-géré, la mise en place du procédé de fraude visé dans la prévention, lequel avait pour effet inéluctable de provoquer des reventes en plus grand nombre ; que s'il est vrai que le responsable d'une entreprise est dégagé de toute responsabilité lorsqu'une faute a été commise par une personne ayant reçu une délégation expresse de pouvoir dans le cadre de cette délégation, il en est autrement lorsque cette faute s'inscrit directement dans le pouvoir de direction et de contrôle que ce responsable détient à l'encontre de son délégataire ; que les fausses indications portées sur l'acquit à caution a servi à couvrir notamment auprès de la société Leader Price la tromperie sur l'étiquetage des vins de Maury ; que si l'auteur de ce faux n'a pas été identifié, l'usage de ce faux profitait aux deux sociétés et n'a pu être commis qu'avec l'accord des deux co-gérants de ces sociétés ;

"1°) alors que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; qu'en se fondant sur les seules circonstances selon lesquelles Gilbert X était co-gérant des sociétés, ou encore juriste, ou encore " consommateur " tandis qu'elle ne constatait aucun acte matériel positif de commission des infractions reprochées, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé les éléments constitutifs des délits à l'encontre du prévenu, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

"2°) alors que le chef d'entreprise peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il apporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de Gilbert X qui faisait valoir que Christian Z, qui occupait la fonction d'attaché de direction dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée avait reçu une délégation expresse pour la tenue des comptes régie et physique des sociétés B et C, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"3°) alors, qu'enfin, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'élément moral des infractions retenues, a, derechef, privé sa décision de base légale" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, 4 du protocole n° 7 annexé à cette convention, L. 213-1, 216-2 du Code de la consommation, 132-1, 132-2, 441-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilbert X coupable de tromperie sur la marchandises, et d'usage de faux et l'a condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 10 000 euro, et ordonné à titre de peine complémentaire la publication par extrait du jugement dans le Midi Libre et son affichage aux portes des sièges des sociétés B et C pour une durée de 7 jours ;

"aux motifs que les fausses indications " Médailles Mâcon" portées sur l'acquit à caution ont servi à couvrir notamment auprès de la société Learder Price la tromperie sur l'étiquetage des vins de Maury, que si l'auteur de ce faux n'a pas été identifié, l'usage de ce faux profitait aux deux sociétés B et C et n'a pu être commis qu'avec l'accord des deux cogérants de ces sociétés ;

"alors qu'un même fait, autrement qualifié ne peut donner lieu à une double déclaration de culpabilité ; qu'en déclarant Gilbert X coupable d'avoir fait usage de faux en utilisant lors de la vente de vins à la société Leader Price un acquit à caution, document fiscal, qui portait la fausse indication " médaille Mâcon " , et en le déclarant coupable de tromperie sur les qualités substantielles des marchandises en ayant vendu à la société Leader Price du vin de Maury en lui faisant croire grâce à l'acquit à caution falsifié que ce vin avait obtenu la médaille d'or au concours des vins de Mâcon en 1999, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, propres à chacune des infractions distinctes poursuivies, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ; d'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Mais, sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 198, 207 II et 211 de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, 112-1 du Code pénal, 749 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilbert X coupable de publicité mensongère, tromperie sur les qualités substantielles de marchandises, reproduction d'une marque sans l'autorisation de son propriétaire, usage de faux, l'a condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 10 000 euro, et en conséquence, a prononcé la contrainte par corps en application des dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale ;

"alors qu'il résulte tant de l'abrogation de l'article 473 du Code de procédure pénale par l'article 198 de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 que des nouvelles dispositions de l'article 749 du Code de procédure pénale issues de ce même article de loi, entrées en vigueur le 1er janvier 2005, qu'à compter de cette date, la contrainte par corps ne peut être prononcée que par le juge de l'application des peines à l'exclusion des jugements de condamnation ; que dés lors la contrainte par corps prononcée par l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier le 1er août 2006 doit être censurée" ; - Vu les articles 749 et 754 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de ces textes, entrés en vigueur le 1er janvier 2005, que la contrainte judiciaire ne peut être ordonnée, en cas d'inexécution volontaire d'une condamnation à une peine d'amende, que par le juge de l'application des peines ;

Attendu qu'après avoir condamné Gilbert X à une amende de 10 000 euro, l'arrêt dit que la contrainte judiciaire s'exercera suivant les modalités fixées par les articles 749, 750 et 751 du Code de procédure pénale, modifiés par la loi du 9 mars 2004 ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ; d'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs : Casse et Annule, par voie de retranchement, en ses seules dispositions relatives à la contrainte judiciaire, l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Montpellier, en date du 1er août 2006, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Dit n'y avoir lieu à renvoi.

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