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Décisions

CA Dijon, ch. corr., 1 juin 2006, n° 05-01157

DIJON

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Institut national des appellations d'origine, Confédération nationale du logement, UFC Que Choisir de Saône-et-Loire

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Baumet

Conseillers :

MM. Poisot, Jacquin

Avocats :

Mes Pegaz, Manière, Saggio, Kort-Cherif

TGI Macon, ch. corr., du 28 sept. 2005

28 septembre 2005

Faits et procédure :

X Edward a été poursuivi devant le Tribunal correctionnel de Macon en vertu d'une citation directe pour avoir :

- à Crèches-sur-Saône, courant 2003 et notamment le 30 avril 2003, en sa qualité de gérant de la SARL Y vendu du vin d'appellation d'origine contrôlée Brouilly et Cote De Brouilly commercialisé avec des étiquettes indiquant que ce vin était issu du "Domaine des Terres Bleues" alors que ce vin ne provenait pas d'une propriété répondant à cette appellation et en ne faisant pas figurer sur les étiquettes l'indication selon laquelle l'embouteillage n'avait pas été réalisé par la SARL Y (CF PV N° DD71 2004 00019 du 17/02/2004 de la DGCCRF de Saône-et-Loire)

Infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 Al.1 du Code de la consommation, et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation ; prévue et réprimée par les règlements communautaires 1493-1999 du 17/05/1999 ; 2392-89 du 24/07/1989 ; 3201-90 du 16/10/1990 ; 753-2002 du 01/08/2003 et le décret du 19/08/1921 (article 13) modifié par le décret du 07/01/1993 ;

- à Crèches-sur-Saône, courant 2003 et notamment le 30 avril 2003, en sa qualité de gérant de la SARL Y vendu du vin d'appellation d'origine contrôlée Maçon Villages commercialisé avec des étiquettes indiquant que ce vin était issu du "Domaine des Burdines" alors que ce vin ne provenait pas d'une propriété répondant à cette appellation et en ne faisant pas figurer sur les étiquettes l'indication selon laquelle l'embouteillage n'avait pas été réalisé par la SARL Y (CF PV N° DD71 2004 00019 du 17/02/2004 de la DGCCRF de Saône-et-Loire) ;

Infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 Al.1 du Code de la consommation, et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation ; prévue et réprimée par les règlements communautaires 1493-1999 du 17/05/1999 ; 2392-89 du 24/07/1989 ; 3201-90 du 16/10/1990 ; 753-2002 du 01/08/2003 et le décret du 19/08/1921 (article 13) modifié par le décret du 07/01/1993 ;

Le jugement dont il est fait appel a :

Statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire,

Sur l'action publique :

Constaté qu'il ne peut être fait état du règlement communautaire numéro 753-2002 du 1er août 2003 dans la prévention ;

Déclaré Monsieur X Edward coupable des faits qui lui sont reprochés ;

Condamné X Edward à la peine d'amende de 4 000 euro ;

Ordonné aux frais du condamné la publication du dispositif de la présente décision dans le journal suivant : Journal de Saône-et-Loire ;

Dit que le coût de cette publication ne devra pas dépasser la somme de 37 500 euro ;

Fixe le nombre de publication à une ;

Sur l'action civile ;

Déclaré la Confédération nationale du logement irrecevable en sa constitution de partie civile ;

Reçu l'UFC Que Choisir en sa constitution de partie civile ;

Déclaré X Edward responsable du préjudice subi par l'UFC Que Choisir ;

Condamné X Edward à payer, avec intérêts légaux a compter du présent jugement, à l'UFC Que Choisir la somme de 2 000 euro à titre de dommages-intérêts ;

Condamné X Edward à verser à l'UFC Que Choisir, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 300 euro ;

Reçu l'Institut national des appellations d'origine en sa constitution de partie civile ;

Déclaré X Edward responsable du préjudice subi par l'Institut national des appellations d'origine ;

Condamné X Edward à payer, avec intérêts légaux à compter du présent jugement, à l'Institut national des appellations d'origine la somme de 300 euro a titre de dommages-intérêts ;

Condamné X Edward à verser à l'Institut national des appellations d'origine, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 1 500 euro ;

Dit que la dite décision était assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 90 euro dont est redevable le condamné.

Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du Code de procédure pénale.

Ce jugement a été frappe d'appel par :

Monsieur X Edward, prévenu le 5 octobre 2005 (appel principal et général)

M. le Procureur de la République, le 5 octobre 2005 contre Monsieur X Edward (appel incident)

La Confédération national du logement, le 10 octobre 2005 contre Monsieur X Edward (appel incident des dispositions civiles)

Décision :

Attendu que le 17 février 2004, la DGCCRF du Rhône dressait procès-verbal à Edward X, gérant de la SARL Y, société de négoce de vins, implantée à Crèches-sur-Saône, (Saône-et-Loire) lequel commercialisait des Brouilly, des côtes de Brouilly et des Macon Villages en faisant figurer, sur l'étiquette des bouteilles, des marques de fantaisie "terres bleues" et "domaine des Burdins", enregistrées à l'INPI, alors qu'aucune exploitation n'est désignée, en fait ou réglementairement, sous ces dénonciations ;

Que l'étiquetage mentionnait, en outre, que la mise en bouteille était le fait de Y alors qu'en réalité, l'embouteilleur était la société Z, ce qui laissait croire à l'acquéreur que Y était un viticulteur, propriétaire d'un domaine, commercialisant lui-même sa production ;

Attendu qu'Edwards X a fait valoir qu'il n'avait pas voulu tromper la clientèle des grandes surfaces où seules ces appellations étaient commercialisées ;

Attendu que, devant la cour d'appel, l'Institut national des appellations d'origine, partie civile, sollicite, par voie de conclusions, le paiement d'une indemnité de 1 500 euro et, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, de la somme de 1 800 euro, ainsi que la publication de la décision ;

Attendu que l'UFC que Choisir de Saône-et-Loire, partie civile, sollicite, par voie de conclusions, la confirmation des dispositions civiles la concernant et au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, le versement complémentaire de la somme de 300 euro ;

Attendu que la Confédération nationale du logement, partie civile, sollicite, par voie de conclusions, la déclaration de recevabilité de sa constitution de partie civile, le versement d'une indemnité de 1 500 euro et, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, celui de la somme de 500 euro ;

Attendu que le Ministère public a requis la confirmation ;

Attendu que, par voie de conclusions, Edwards X a sollicité sa relaxe, à défaut une dispense de peine et la non-inscription de la condamnation à son casier judiciaire et, sur l'action civile, la confirmation de l'irrecevabilité de la constitution de la Confédération nationale du logement, l'irrecevabilité de la constitution de l'INAO et la réduction de l'indemnisation de l'UFC que Choisir ;

Sur l'action publique :

Attendu, ainsi que le tribunal l'a relevé, que la mention, sur l'étiquette d'un vin embouteillé, du nom d'un domaine d'appellation fictive et de la mise en bouteille "pour Y" induit en erreur le consommateur, au moment de son choix, lui laissant croire à l'existence d'un domaine et à un embouteillage, sur place, pour le négociant ;

Que l'infraction est ainsi caractérisée ;

Attendu que le montant de l'amende doit être fixé en fonction des revenus du prévenu lequel, désormais, est retraité, ce qui a entraîné une réduction de ses revenus ;

Attendu que le préjudice causé aux autres producteurs et aux négociants dont les produits en concurrence avec ceux commercialisés par Edwards X n'ont pas été choisis par la clientèle ne peut pas être réparé ;

Que les conditions fixées par la loi pour une dispense de peine ne sont pas réunies ;

Sur l'action civile ;

Attendu que le prévenu conteste la recevabilité de la constitution de l'INAO, au motif que la mission dressée à l'INAO, définie par l'article L. 641-6 du Code rural, est limitée à la défense des appellations contrôlées alors que la prévention ne porte pas sur les appellations ;

Mais attendu que l'article L. 641-6 du Code rural confère à l'INAO la charge de défendre les "appellations d'origine" et lui donne pouvoir d'ester en justice, à cette fin ;

Attendu que l'article 13 du décret du 19 août 1921 prohibe, notamment, l'utilisation du mot "domaine", en ce qui concerne les vins, sauf s'il s'agit de produit bénéficiant de l'appellation d'origine, ce qui est le cas en l'espèce, et provenant d'une exploitation agricole existant réellement, exactement qualifiée, ce qui n'est pas le cas, en raison de la dénomination fictive ;

Attendu que l'appellation d'origine contrôlée repose, en France, sur la notion de territoire ;

Que toute adjonction d'une mention d'un territoire, sous l'expression d'un domaine fictif, porte ainsi atteinte à l'ordonnancement voulu par le législateur et par les professions du vin, et préjudicie aux intérêts collectifs dont l'INAO a la charge de la défense ;

Qu'une indemnité de 1 000 euro suffit à la réparation du préjudice collectif ;

Attendu que le prévenu conteste, encore, la constitution de la Confédération nationale du logement ;

Attendu que l'article 2 de la Fédération définit ainsi son "but" :

- la défense des intérêts matériels et moraux des familles,

- la défense des personnes en situation d'exclusion, qu'elles soient locataires, accédants à la propriété, propriétaires occupant ou consommateurs,

Que le terme "consommateurs" décrit, ainsi, l'une des situations possibles de ceux dont la Fédération entend défendre les intérêts, c'est-à-dire les familles et les personnes en situation d'exclusion ;

Que le terme "consommateur", ensuite repris, doit être compris dans la même acception et dans les mêmes limites ;

Que l'appellation de la Fédération vise d'ailleurs uniquement le logement ;

Que, pour ces raisons, la déclaration d'irrecevabilité est confirmée,

Attendu que le tribunal a fait une exacte appréciation de l'indemnité allouée à l'UFC que Choisir ;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, Sur l'action publique : Confirme les déclarations de culpabilité, Reformant sur la peine, Condamne Edwards X à la peine d'amende de 2 000 euro, Dit qu'en application de l'article 707-2 du Code de procédure pénale, le paiement par le condamné auprès du Trésor Public de Dijon, dans le mois du présent arrêt, de l'amende délictuelle, entraînera une diminution de 20 % du montant de ladite amende, sans que cette diminution puisse excéder 1 500 euro, Dit que l'avertissement prévu à l'article 707-3 du Code de procédure pénale a été donné au condamné dans la mesure de sa présence effective lors du prononcé de l'arrêt, Dit n'y avoir lieu à publication, Exclut expressément la mention de la présente condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire d'Edwards X, Sur l'action civile : Confirme la déclaration d'irrecevabilité de la constitution de partie civile de la Confédération nationale du logement, Fédération de Saône-et-Loire, Confirme les dispositions du jugement relatives à l'UFC que Choisir, Y ajoutant Condamne Edwards X à payer à l'UFC Que Choisir la somme complémentaire de 300 euro, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, Confirme la déclaration de recevabilité de la constitution de l'INAO, Reformant pour le surplus, Condamne Edwards X à payer à l'INAO une indemnité de 1 000 euro et, au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 800 euro, pour ses débours de première instance et d'appel, La présente décision étant assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euro dont est redevable le condamné. Le tout en application des articles susvisés, 417, 424 du Code de procédure pénale et 1018 A du Code général des impôts.